LE BOUDDHISME

DE L'ECOLE FUJI

 

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04/01/2010 10:04

 

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Nikken Shônin

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Le Traité sur la Sérénité du pays
par l'établissement de la rectitude

 

Commenté par sa Sainteté Nikken Shônin

 

"Risshô ankoku" calligraphié par Nikken Shônin

 

 

Sommaire

 Le Traité

Commentaires

Préambule

§       Premier Dialogue 

      Origine des difficultés rencontrées par la nation

§       Deuxième Dialogue

      Preuve de l’apparition des désastres et des calamités

§       Troisième dialogue

      Causes de l’offense au bon Dharma

§       Quatrième dialogue

      Révélation justifiée de la cause des malheurs

§       Cinquième dialogue

      Exposition des exemples japonais et chinois

§       Sixième dialogue

      Non présentation de ces réflexions en haut lieu

§       Septième dialogue

      Cesser les dons et interrompre la vie

§       Huitième Dialogue

      Controverse sur la peine de mort

§       Neuvième dialogue

      Fin du doute et naissance de la foi

 

 

Le traité sur la sérénité du pays
par l'établissement de la rectitude


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U

n visiteur est venu. Se lamentant, il dit : « Depuis ces dernières années jusqu’à ces derniers jours, bouleversements dans le ciel, morts prématurées sur la terre, famines et épidémies foisonnent sous le ciel et pullulent sur la terre. Vaches et chevaux tombent morts aux croisées des chemins et leurs squelettes remplissent les routes. Les familles ayant invité la mort, sont déjà décimées pour plus de la moitié. On peut même oser dire que pas une n’échappe à la tristesse d’avoir perdu un proche.

Pour ces raisons, certains se consacrent entièrement à la phrase "le sabre affûté est" en récitant le nom du souverain de l'enseignement de la terre de l'Ouest. D'autres lisent le Sutra de l'Ainsi-venant de la direction de l'Est, lui confiant leur vœu de guérison de toutes les maladies. D'autres ont foi dans la parole "la maladie se dissipera, il ne vieillira ni ne mourra" et vénèrent cette phrase sublime, vérité de la fleur du Dharma. D'autres encore, ayant foi en la stance : "Les sept désastres disparaîtront et les sept bénédictions apparaîtront" accomplissent le rite des cent exposés en cent lieux.

Certains, fondés sur les enseignements des Formules incantatoires secrètes, versent de l'eau dans cinq jarres. D'autres, accomplissant l'entrée en concentration par la méditation assise, contemplent la vacuité comme la lune claire. Ou bien, certains écrivent les noms des sept divinités et les collent sur mille portiques. Certains dessinent la forme des cinq grands puissants et l'accrochent à dix mille portes. Ou, par vénération des dieux du ciel et des divinités terrestres, ils organisent en leur faveur des rites aux quatre coins en déterminant quatre limites. Prenant en pitié le peuple et la paysannerie, le souverain s'adonne à la gestion bienveillante du pays. Pourtant, ils ne font tous que se briser le foie et l'estomac, alors que la famine et la maladie sont de plus en plus pressantes. Les mendiants montrent un spectacle insupportable et les cadavres heurtent la vue. Les corps tombés sans vie ressemblent à des tours de guet et les cadavres, allongés côte à côte, à des ponts. Pourtant, visiblement, les deux astres de lumière sont sur leur disque superbe et les cinq planètes poursuivent leur course. Les trois Trésors sont présents et le centième règne n'est pas encore arrivé à son terme. Pourquoi, dès lors, le monde a-t-il déjà amorcé son déclin et les lois sont-elles tombées en désuétude? Par quelle malchance cela est-il arrivé ? De quelles erreurs cela relève-t-il » ?

L'hôte dit : « Seul, je m'inquiétais de ces choses et ma poitrine était serrée par l'indignation et la tristesse. A présent qu'un visiteur est arrivé, ensemble pleurons et parlons inlassablement. Ceux qui ont quitté la demeure et sont entrés sur la voie, aspirent à l'Eveil en s'appuyant sur le Dharma. Or, à présent, les techniques divines restent sans effets et il n'y a pas de signe de la puissance du Bouddha. Observant la réalité du monde actuel avec minutie, leur ignorance les fait douter des vies futures. Alors, tournés vers la voûte céleste, ils avalent leur rancœur, prostrés vers le sol, ils affermissent leur peur. Ouvrant modestement les phrases du sutra, les observant intensément à travers un tube étroit, (je vois qu’en) ce monde, tous tournent le dos à ce qui est juste, les hommes rejoignent chacun le mal. Pour cette raison, les divinités bienfaisantes ont abandonné le pays et l'ont quitté, les saints se sont retirés pour ne plus revenir. A leur place, sont venus démons et esprits maléfiques. Alors les désastres se produisent, les calamités surviennent. Je ne peux rester à me taire, je ne peux réfréner mon effroi ».

Le visiteur dit : « Ces calamités dans le ciel et ces désastres dans le pays, je ne suis pas le seul à m'en lamenter ; le peuple entier s'en désole. Entré dans cette chambre aux senteurs d'orchidée, j'entends pour la première fois vos paroles odorantes. Dans quel sutra lit-on que les dieux et les saints sont partis et se sont retirés, que pour cela les calamités et les désastres apparaissent ? Faites-moi entendre ces preuves » !

L'hôte dit : « Ces phrases sont nombreuses à profusion et ces preuves sont largement diffusées.

Dans le Sutra de la Radiance d'or, il est dit : “Bien que ce sutra existe en ce lieu, il n'a jamais été propagé. Concevant un sentiment de rejet et d'éloignement, il ne souhaite pas l'entendre, ni faire l'offrande, ni le respecter, ni en faire l'éloge. Même lorsqu'il voit les quatre catégories d'êtres, ceux qui gardent ce sutra, il ne les respecte pas, eux non plus, ni ne leur fait l'offrande. Finalement, nous, nos féaux et les infinités de divinités célestes, n'obtenons pas d'entendre ce profond Dharma sublime. Il nous a privés de goûter la saveur du nectar et le courant du bon Dharma s'est tari. Notre majesté et notre puissance ont disparu. Alors, les mauvaises directions augmentent, les hommes et les cieux disparaissent. Ils tombent dans la rivière des vies et des morts, ils se détournent du chemin menant à l'Extinction.

Vénéré du monde ! Nous, les quatre rois, tous nos féaux, ainsi que les yakşa, voyant de telles choses allons abandonner ce pays, n'ayant plus le cœur à le protéger. Nous ne serons pas les seuls à rejeter ce roi. Immanquablement, l'infinité des divinités bienfaisantes des multiples cieux, défendeurs du territoire également, l'abandonneront et partiront. Quand elles l'auront abandonné et se seront éloignées, ce pays verra se produire diverses calamités et malheurs. Le rang du roi sera perdu, l'intégralité des hommes perdra son bon cœur. Il n'y aura que privation de liberté, meurtres, et luttes dues à la colère. On se disputera et se flattera mutuellement et l'injustice atteindra les innocents. Les épidémies se répandront. Des comètes paraîtront encore et encore, deux soleils apparaîtront l'un à côté de l'autre, des éclipses se produiront à des fréquences anormales, des arcs-en-ciel noirs et blancs, annonciateurs de mauvaise augure seront visibles, les étoiles fileront. La terre tremblera, des voix se feront entendre de l'intérieur des puits. Des pluies violentes et de mauvais vents, indépendants des saisons se produiront. Il y aura de constantes famines, les grains et les fruits n'arriveront pas à maturité. Dans de nombreuses autres contrées, des bandits en colère envahiront le pays. Alors, le peuple recevra toutes  sortes de souffrances et d'afflictions. Nulle place, il ne sera en sécurité”.

Dans le Sutra du Grand rassemblement, il est dit : “Lorsque le Dharma de l'Eveillé sera obscurci et disparaîtra, la barbe, les cheveux et les ongles s'allongeront. Les lois seront perdues. A ce moment, d'immenses voix se feront entendre dans le ciel, la terre tremblera et tout se déplacera comme sur un cercle d'eau. Les remparts des villes se briseront et s'écrouleront. Toutes les maisons et leurs toits seront détruits. Les racines, les branches, les feuilles, les fleurs et les fruits des arbres des bois perdront leurs propriétés médicinales. Hormis uniquement les cieux de l'existence pure, l'ensemble des régions du monde des désirs sera privé des sept saveurs et des trois pouvoirs essentiels, sans qu'il n'en reste rien. A ce moment, tous les bons discours, guidant vers l'émancipation, disparaîtront. Les fleurs et les fruits poussant sur terre seront moins nombreux et ils perdront leur parfum. Les puits, les sources et les bassins s'assècheront. Les terres deviendront saumâtres et sèches. Elles s'ouvriront en se fendant, se déformant pour devenir collines et crevasses. Les montagnes brûleront et le dragon du ciel ne fera plus tomber la pluie. Les semis se flétriront et mourront. Tout ce qui naît mourra, et l'herbe cessera de pousser. Il pleuvra de la terre jusqu'à ce que tout soit plongé dans l'obscurité, le soleil et la lune ne produiront plus leur lumière. Les quatre directions seront affectées par la sécheresse et souvent, de sinistres présages se manifesteront. Les dix mauvaises actions, en particulier la cupidité, la colère et la sottise décupleront, les êtres cesseront de considérer leurs parents, à l'instar des cervidés. Le nombre des êtres, leur longévité, leur force physique, leur influence et leur joie diminueront. Les plaisirs humains et célestes s'éloigneront, tous tomberont dans les mauvaises voies. De tels mauvais roi et mauvais moines aux mauvaises actions, détruiront mon bon Dharma. Ils interdiront la voie des cieux et des hommes. Les divinités bienfaisantes des multiples cieux qui, normalement, prennent en pitié et commisération les êtres, abandonneront toutes le pays pour se diriger vers d'autre contrées”.

Dans le Sutra du Roi bienveillant, il est dit : “Dans le processus de perturbation du pays, les esprits malfaisants se perturbent en premier. Du fait de la perturbation des esprits malfaisants, le peuple entier se perturbe. Des brigands envahissent et menacent le pays, les gens du peuple se meurent. Les ministres comme les seigneurs, les princes héritiers comme les princes de sang, ainsi que les officiers gouvernementaux se querellent sur ce qu’il faut réaliser ou pas. Des phénomènes anormaux se produisent dans le ciel et sur la terre. Les vingt-huit constellations, la voie des étoiles, le soleil et la lune apparaissent en des moments et des positions inappropriées”.

Il dit encore : “A présent, voyant clairement les trois phases à l’aide de mes cinq racines, l’intégralité des rois a obtenu de devenir souverains d’un empire parce que tous, dans une vie passée, ont servi cinq cents Eveillés. Pour cette raison, tous les saints et sages, viennent naître dans ces pays, où ils produisent de grands bienfaits. Lorsque le souverain a épuisé sa bonne fortune, tous les saints l’abandonnent et le quittent. Au moment où tous les saints quittent le pays, sept désastres se produisent immanquablement”.

Dans le Sutra du Maître des remèdes, il est dit : “Lorsque des calamités et des désastres se produisent en relation avec les Kşatriya ou les Abhişeka Raja, ces désastres sont : le désastre des maladies contagieuses parmi le peuple, le désastre de l’invasion par une nation étrangère et le désastre de la révolte au sein d’un même clan, le désastre de la mutation des étoiles et des constellations et le désastre des éclipses solaires et lunaires, le désastre des vents et des pluies hors saison et le désastre des sécheresses prolongées”.

Le Sutra du Roi bienveillant expose : “Grand roi ! Les régions où j’enseigne sont constituées de dix milliards de monts Sumeru, dotés de dix milliards de soleils et de lunes. Chaque mont Sumeru possède quatre continents. Dans celui du sud, le Janbudvipa, il y a seize grands pays, cinq cents pays moyens et dix mille petits pays. Au sein de tous ces pays, sept désastres sont à craindre. Parce que les souverains de tous ces pays les considèrent comme des désastres. Lorsque le soleil et la lune quitteront leur course et que les saisons s’intervertiront, lorsqu’un soleil rouge ou noir apparaîtra, que deux, trois, quatre ou cinq soleil apparaîtront, que le soleil s’éclipsant il n’y aura plus de lumière ou que le soleil présentera un, deux, trois, quatre ou cinq disques, ce sera le premier désastre. Lorsque les vingt-huit constellations perdront leur course, lorsque l’étoile de métal, les comètes, l’étoile à la roue, l’étoile de l’ogre, l’étoile du feu, l’étoile de l’eau, l’étoile du vent, l’épée d’Orion, la louche du sud, la louche du nord, la garnison des cinq grandes étoiles, et toutes les étoiles régissant les souverains, les étoiles des trois ministres et les étoiles des cent fonctionnaires, lorsque toutes ces étoiles se montreront de manière non naturelle, ce sera le deuxième désastre. Lorsque de grands brasiers calcineront le pays et que le peuple sera brûlé vif, que ce soit par le feu des esprits malfaisants, le feu des dragons, le feu du ciel, le feu des dieux des montagnes, le feu des hommes, le feu des arbres, ou le feu des brigands, lorsque ces phénomènes inhabituels se produiront, ce sera le troisième désastre. Lorsque des flots impétueux emporteront et noieront le peuple, que, inversant l’ordre naturel, il pleuvra en hiver et neigera en été, que tonnerre et foudre éclateront dans la saison d’hiver et que la glace, le gel et la grêle s’abattront au cours du sixième mois, qu’il pleuvra une pluie rouge, une pluie noire, une pluie bleue, qu’il pleuvra des montagnes de terre et des montagnes de pierres, qu’il pleuvra du sable, des cailloux et des pierres,  que les rivières et les fleuves couleront à contre courant, que les montagnes flotteront et feront couler des rochers, lorsque de tels phénomènes se produiront, ce sera le quatrième désastre. Lorsque des vents terribles balaieront et tueront le peuple, détruisant en un instant le pays, les montagnes, les fleuves et les forêts, que des grands vents hors saison, vents noirs, vents rouges, vents bleus, vents célestes, vents terrestres, vents de feu, vents d’eau souffleront, lorsque de tels phénomènes se produiront, ce sera le cinquième désastre. Lorsqu’une chaleur exacerbée s’abattra sur le ciel, la terre et le pays, au point que l’air semblera en feu et que les herbes dessècheront, que les cinq céréales ne mûriront pas, que la terre sera rougie et brûlée et que le peuple aura péri, lorsque de tels phénomènes se produiront, ce sera le sixième désastre. Lorsque des brigands viendront des quatre directions et envahiront le pays, que des brigands intérieurs et extérieurs apparaîtront, que des bandits du feu, des bandits de l’eau, des bandits du vent et des bandits démoniaques dévasteront le peuple, que la sédition armée se produira, lorsque ces prodiges auront lieu, ce sera le septième désastre”.

Dans le Sutra du Grand rassemblement, il est dit : “Si un souverain, bien qu’il ait pratiqué le don, les préceptes et la sagesse pendant une infinité de vies, voyant mon Dharma sur le point de s’éteindre, l’abandonne et ne fait rien pour le protéger, l’infinité de racines de bien qu’il aura accumulées seront toutes perdues. Trois événements malheureux se produiront alors dans le pays. Premièrement l’augmentation du prix des céréales, deuxièmement la guerre, troisièmement les épidémies. Lorsque toutes les divinités bienfaisantes l’auront abandonné et seront parties, le peuple ne se soumettra plus à ses édits et le pays sera sans cesse envahi par les pays voisins. De violents incendies incontrôlables se déclareront, nombreux seront les mauvais vents et les mauvaises pluies, les inondations augmenteront. La population sera emportée, à la merci des flots. Alors, les parents proches et éloignés (du souverain) s’allieront pour fomenter une insurrection. Ce souverain, avant peu, sera atteint d’une grave maladie et, après que sa vie aura atteint son terme, renaîtra dans le grand enfer. Son épouse, les princes, les ministres d’état, les seigneurs de villes, les chefs militaires, les protecteurs des régions et les fonctionnaires du gouvernement connaîtront le même sort que le souverain”.

Ces phrases de sutra sont parfaitement claires. Qui, parmi dix mille personnes pourrait émettre le moindre doute ? Or, une bande de non-voyants, des hommes égarés dans l’illusion croient aveuglément en des prêches hérétiques, incapables de discerner l’enseignement juste. Pour cette raison, sous le ciel, en ce monde, les Bouddha, en leurs sutras, voient naître le désir de partir, n’ayant plus le souci de protection. Alors, les divinités bienfaisantes et les saints abandonnent le pays et quittent leur lieu de résidence. A leur place, les esprits maléfiques et les voies extérieures provoquent des catastrophes, apportent les désastres.

Empourpré, le visiteur dit : “L’empereur Ming des Han postérieurs, voyant en rêve un homme en or, obtint les enseignements des chevaux blancs. Le Prince Shôtoku punit l’opposition de Moriya et s’adonna à la construction de temples et de pagodes. Depuis ce temps, du plus élevé aux plus humbles, tous vénèrent les statues de Bouddha et respectent les sutras. Ainsi, au mont Hiei, dans la capitale du sud, aux temples Onjôji et Tôdaiji, dans tout le pays entouré des quatre océans, dans les cinq régions et sur les sept routes, les sutras de l’Eveillé sont nombreux comme les étoiles et les temples s’étalent comme des nuages. Les héritiers de Shûshi contemplèrent la lune sur la tête de l’aigle et ceux du courant de Kakuroku transmirent le vent du Kukkutapada. Qui oserait dire, alors, que les enseignements de l’Eveillé sont négligés ou que les traces des trois Trésors sont abandonnées ? Si vous en avez la preuve, faites-la moi entendre minutieusement”.

L’hôte, prenant des exemples dit : « Certes, les toits des temples se touchent et les auvents des pavillons aux sutra se tiennent côte à côte. Les moines sont comme les bambous et les roseaux, leurs adeptes ressemblent au riz et au chanvre. Depuis les années de jadis, ils ont été vénérés et leur respect est renouvelé chaque jour. Or, les maîtres du Dharma sont devenus flagorneurs et déviants. Ils jettent la perturbation sur l’éthique humaine et le souverain et ses ministres, dénués de compréhension, sont incapables de discerner l’hérésie du juste.

Dans le Sutra du Roi bienveillant, il est dit : “Parmi les moines, nombreux seront ceux à la recherche de la renommée et du profit. Devant le Souverain, les princes et les princes héritiers, ils prêcheront des causes et conditions destructrices du Dharma de l’Eveillé, des causes et conditions destructrices de la nation. Le Souverain, incapable de discernement, écoutera et croira leurs paroles. Il promulguera alors des lois déraisonnables, non fondées sur les préceptes du bouddhisme. Telles seront les causes et conditions de la destruction du bouddhisme, de la destruction de la nation”.

Dans le Sutra de l’Extinction, il est dit : “Bodhisattva, ne ressentez pas d’effroi vis-à-vis des éléphants vicieux ! Concevez de la peur envers les mauvaises connaissances. Tué par un éléphant vicieux, on ne se dirige pas vers les trois mauvaises directions. A être tué à cause des mauvais amis, on va immanquablement sur les trois mauvaises voies”.

Dans le Sutra du Lotus, il est dit : “Dans l’âge mauvais, les moines auront une sagesse pervertie, leur pensée sera tordue. Ils penseront avoir obtenu ce qu’ils n’ont pas encore obtenu et seront remplis d’orgueil. Il y aura aussi des ermites forestiers, vêtus de haillons, dans des lieux déserts, qui s’estimeront pratiquer la bonne voie et mépriseront les hommes. Dans leur avidité d’offrandes lucratives, ils exposeront le Dharma aux habits blancs, afin d’être respectés du monde, comme des arhats dotés des six pouvoirs. (…)

Constamment au sein de la multitude, ils veulent nous détruire et, pour cela, se tournent vers les rois et les ministres, les brahmanes et les bourgeois, ainsi que la foule des autres moines et nous calomnient et nous flétrissent, prétendant : “ces gens aux vues erronées prêchent des discours des voies extérieures.

En cet éon souillé, en cet âge mauvais, nombreux seront les sujets de frayeur. De mauvais esprits pénétreront leur corps. Eux, ils nous insulteront et nous aviliront. Les mauvais moines de l’âge souillé ne sauront point que le Bouddha, par le biais des moyens salvifiques, prêche le Dharma en fonction des prédispositions. Ils médiront, fronceront les sourcils, et l’on verra à maintes reprises des expulsions”.

Dans le Sutra de l’Extinction, il est dit : “Après mon extinction, dans une myriade de centaines d’années, alors que les saints des quatre voies seront eux aussi entrés en extinction, après la disparition du Dharma correct, des moines seront dans la Semblance du Dharma. Ils sembleront respecter les commandements mais liront peu les sutras. Ils seront avides de boissons et de nourritures cherchant à entretenir leur corps. Bien que parés du surplis, ils seront comme le chasseur mirant sa proie sans faire un mouvement. Ils seront comme le chat épiant la souris. Ils réciteront sans cesse cette parole : « J’ai obtenu l’état d’arhat ». A l’extérieur, ils manifesteront la sagesse et la bonté, mais intérieurement, ils seront avides et jaloux. Ils seront comme ces brahmans pratiquant le dharma du silence. En réalité, ils manifesteront une image de moine sans être des moines. Consumés par leurs idées personnelles, ils bafoueront le bon Dharma”.

L’observation du monde faite à la lumière de ces phrases montre leur parfaite exactitude. En effet, sans admonester ces mauvais moines, comment peut-on faire œuvre de bien » ?

Le visiteur, de surcroît indigné dit : « Le monarque éclairé, agissant en accord avec le ciel et la terre, étend son influence. Le saint, capable de distinguer le bien du mal, règne sur le monde. Les moines et leurs disciples en ce monde sont dignes de la confiance de l’empire dans son ensemble. Un monarque éclairé ne saurait confier sa foi à un mauvais moine. S’ils n’étaient pas des saints, les sages ne les vénéreraient pas. A présent, en raison du respect que leur témoignent les sages et les saints, on peut comprendre le poids des dragons et des éléphants. Pourquoi, dès lors, vomissez-vous des propos irréfléchis et médisez-vous avec tant de véhémence ? Qui qualifiez-vous donc de mauvais moine ? Je veux entendre vos explications détaillées ».

L’hôte dit : « Sous le règne de l’empereur Gotoba, il y eut un homme appelé Hônen, auteur des « Passages sur la sélection » par lequel il détruisit les saints enseignements prêchés par l’Eveillé tout au long de sa vie et perturba largement les êtres dans les dix directions. Dans ce « Recueil des passages sélectionnés », il écrivit : “Daochuo, maître en concentration établit deux doctrines : la voie sainte et la terre pure, préconisant le rejet de la voie sainte et la prise immédiate de refuge dans la terre pure. Pour commencer, il détermine deux formes d’enseignement de la voie sainte. Ensuite, la réflexion fondée sur cet argument révèle que le Grand véhicule ésotérique et le Grand véhicule véritable font tous deux partie de la voie sainte. Dès lors, le cœur des huit écoles : Formules incantatoires, Cœur du Bouddha, Tendai, Ornementation fleurie, Trois traités, Nature des dharma, Traité des terres et des Collections, est compris dans cette notion”. Les annotations du « Traité sur la renaissance » du maître du Dharma Tanluan indiquent : « Je constate avec respect que le « Vibhāşā des dix stations » du Bodhisattva Nāgārjuna stipule : “Deux voies existent quant à la recherche du degré de non régression par les bodhisattva. La première est la voie des pratiques ardues. La seconde est la voie des pratiques aisées”. La voie des pratiques ardues correspond à la doctrine de la voie sainte. La voie des pratiques aisées correspond à la doctrine de la terre pure. Les étudiants de l’école de la terre pure doivent absolument savoir ce point avant tout. Même s’ils ont auparavant étudié la doctrine de la voie sainte et ont l’intention d’entrer dans la doctrine de la terre pure, ils doivent rejeter la voie sainte et prendre refuge dans la terre pure”.

Il dit encore : “le Précepteur Shandao distingua la pratique correcte des pratiques grossières, exhortant à rejeter les pratiques grossières et à prendre refuge dans la pratique correcte. Premièrement, la pratique grossière de la lecture et de la récitation : la lecture et la récitation de tous les sutras du Grand et du Petit véhicule, exotériques et ésotériques, hormis le Sutra de la Contemplation et les autres sutras traitant de la renaissance sur la Terre pure, sont appelées pratiques grossières. Troisièmement, la pratique grossière de la vénération : la vénération et le respect de tous les Bouddha, bodhisattva et divinités terrestres et célestes, hormis Amida, représentent les pratiques grossières de la vénération. Je dis : en lisant ces phrases, il convient de rejeter, par tous les moyens, le grossier et se consacrer à la pratique exclusive. Qui pourrait abandonner la pratique exclusive permettant la renaissance à cent personnes sur cent et s’attacher opiniâtrement aux pratiques grossières ne le permettant pas à une sur mille ? Pratiquants, réfléchissez y bien” !

Il dit encore : “Du Sutra de Grande sagesse, en six cents fascicules, au Sutra de la Présence permanente des dharma, l’inventaire des corbeilles de Zhenyuan recense six cent trente-sept sutra ésotériques et exotériques du Grand véhicule, répartis en deux mille huit cent quatre-vingt-trois fascicules. Tous ces sutras du Grand véhicule sont englobés dans une seule stance.” Il dit encore “Il faut le savoir ! Avant de se conformer aux autres, (l’Eveillé) ouvrit pour un temps les portes de la concentration et de la dispersion. Toutefois, après s’être conformé à lui-même, il referma par contre les portes de la concentration et de la dispersion. Après les avoir ouvertes, il les referma pour toujours, se consacrant uniquement à la seule porte de l’invocation du Bouddha”.

Il dit encore : “Une phrase du Sutra de la contemplation des vies infinies indique que le pratiquant de l’invocation du Bouddha doit posséder trois formes de cœur. Les commentaires dudit sutra disent : Question : Si certains diffèrent en compréhension et en pratique, sont hérétiques et grossiers, comment éviter leurs vues extérieures, hérétiques et différentes ? Comparables à des bandes de brigands attirant en arrière le voyageur, ayant déjà parcouru une ou deux étapes, sont ces gens aux compréhensions et pratiques différentes, et aux vues mauvaises. Moi j’affirme que dans cette phrase, toutes les compréhensions et pratiques différentes, toutes les études et les vues divergentes désignent les doctrines de la voie sainte”. Enfin, la dernière phrase de conclusion dit : “Si vous désirez vous éloigner rapidement des vies et des morts, vous devez choisir parmi ces deux enseignements supérieurs et ignorer la porte de la voie sainte et franchir celle de la terre pure. Si vous désirez franchir la porte de la terre pure, vous devez choisir entre la pratique correcte et la pratique grossière et abandonner la pratique grossière et prendre refuge dans la pratique correcte.”

L’examen de ces passages montre que Hônen, citant les commentaires erronés de Tanluan, Daochuo et Shandao, établit ce qu’il appela voie sainte et terre pure, pratique difficile et pratique aisée, qualifiant de voie sainte, pratique difficile, pratique grossière, le Lotus, les Formules incantatoires et, en général, les six cent trente-sept sutra du Grand véhicule répartis en deux mille huit cent quatre-vingt-trois rouleaux de l’ensemble des enseignements de Shakyamuni, l’intégralité des Eveillés, des bodhisattva, ainsi que des cieux. Exhortant à les abandonner, à les fermer, à les ignorer et à les jeter, il perturba par ces quatre mots la multitude. De surcroît, il qualifia de bandes de brigands les saints moines des trois pays et les disciples du Bouddha dans les dix directions, incitant ainsi à les insulter. De près, il s’oppose à la promesse faite dans les trois sutras de la terre pure : “Mais exclus sont ceux qui ont commis les cinq crimes d’opposition et ont offensé le bon Dharma”. De loin, il ne comprend pas le commandement du deuxième rouleau du Sutra du Lotus, cœur de tous les enseignements donnés par l’Eveillé au cours des cinq périodes : “Si un homme n’ayant pas foi en ce sutra l’insulte, cet homme tombera en enfer après que sa vie se soit achevée”. L’ère est l’ère finale. Les hommes ne sont plus des saints. Tous passent par des chemins de traverse obscurs et oublient la voie directe. Qu’il est triste qu’ils ne piquent pas leurs pupilles voilées ! Qu’il est pénible qu’ils croient inlassablement en des religions erronées ! Pour cette raison, du souverain au peuple, tous pensent qu’il n’existe pas d’autres sutras que les trois sutras de la terre pure, qu’il n’existe pas d’autre Bouddha que la triade d’Amida.

Jadis, Dengyô, Gishin, Jikaku ou Chishô voyagèrent dix mille lieues, au-delà de l’océan, pour ramener les saints enseignements. Ou encore, ils parcoururent les monts et les rivières de notre pays pour acquérir les statues de Bouddha qu’ils vénéraient. Ils construisirent ensuite des mondes fleuris au sommet des hautes montagnes pour les y enchâsser ou des palais de lotus au fond des vallées profondes pour les y vénérer. Ainsi, la lumière de Shakya et de Bhaişajya Guru, côte à côte, éclairait de sa majesté le manifeste et l’avenir. Akāśagarbha et Kşitigarbha, de plus en plus influents, apportaient des bienfaits aux vivants et aux morts. Aussi, le souverain faisait don de comtés et de provinces afin que ces lueurs continuent d’éclairer. De leur côté, les seigneurs apportaient leurs rizières et leurs jardins en offrande.

Or, à cause des Passages sélectionnés de Hônen, le souverain de l’enseignement est désormais oublié et, seul, le Bouddha de la terre de l’ouest est respecté. La transmission a été rejetée et l’Ainsi-venant de l’est négligé. L’importance est donnée uniquement aux trois sutras en quatre volumes et les sutras merveilleux des cinq périodes de l’enseignement du Bouddha abandonnés. Pour cette raison, le peuple n’a plus la volonté de pratiquer l’offrande hormis à un sanctuaire dédié à Amida. Il oublie aussitôt de faire des dons aux moines non pratiquants de l’Invocation du Bouddha. Pour cette raison, les temples dédiés au Bouddha tombent en ruine. Un mince filet de fumée s’échappe de leurs tuiles semblables à des pins. Les logements des moines sont vides et dilapidés, la rosée profondément incrustée sur l’herbe de leur jardin. Pourtant, tous ont perdu l’esprit de protection et de don, ont rejeté l’idée de reconstruire ces temples. Pour ces raisons, les saints moines demeurant dans ces temples sont partis pour ne plus revenir, les divinités protectrices s’en sont allées également à tout jamais. Tout cela est uniquement le fait des Passages sélectionnés de Hônen. Quelle tristesse qu’en seulement quelques décennies, cent, mille, dix mille personnes aient pu être abusées par le lien démoniaque et se soient perdues dans les nombreux enseignements de l’Eveillé. Ces personnes préfèrent l’hérésie et ont oublié la rectitude. Les divinités bienfaisantes ne sont-elles pas en droit de se mettre en colère ? Les hommes ont jeté le parfait, préférant le partiel. Comment échapper à la venue des esprits maléfiques ? Plutôt que d’offrir dix mille prières, il serait préférable d’interdire ce seul mal.

De plus en plus empourpré, le visiteur dit : « Depuis que Shakamon, notre maître fondamental prêcha les trois sutras de la Terre pure, le maître du Dharma Tanluan abandonna les quatre traités, prenant uniquement refuge dans la Terre pure. Le maître en méditation Daochuo ignora les nombreuses pratiques de l’extinction pour propager uniquement la pratique des quatre directions. Le Précepteur Shandao balaya les pratiques grossières et établit une pratique unique. Le Préfet monacal Eshin synthétisant l’essentiel de tous les sutras fit de la pratique unique de l’Invocation du Bouddha son école. Leur respect envers Amida s’exprima de telles manières. D’innombrables personnes purent accéder à la renaissance.

Hônen Shônin, en particulier, se rendit dans son jeune âge, au mont Tendai. A dix-sept ans, il avait parcouru les soixante volumes et approfondi les huit écoles dont il avait compris en détail les significations. En outre, il lut à sept reprises le corpus des sutras et des traités et épuisa lors de son étude tous les commentaires et biographies sans en omettre un seul. Sa sagesse était brillante comme le soleil et la lune, ses vertus surpassaient celles des maîtres précédents. Malgré tout, il doutait quant à la voie à prendre vers la délivrance et ne parvenait pas à comprendre la signification de l’extinction. Pour ces raisons, il lisait tout, apprenait de chaque document, réfléchissait profondément, considérait les choses avec recul. Finalement, il jeta au loin les sutras et se consacra uniquement à l’invocation du Bouddha. Il fit alors un rêve mystique dans lequel il propageait parmi les intimes et les étrangers des quatre bords. Dès lors, il fut appelé le corps transformé de Sthāmaprāpta, ou vénéré comme la renaissance de Shandao. Les nobles comme les roturiers des dix directions s’inclinaient devant lui, il attirait les pas de tous les hommes et femmes de l’empire. Depuis, les printemps et les automnes se sont succédés, les étoiles et le givre se sont accumulés. A présent, vous négligez les louables enseignements du vénéré Shakya et, délibérément, critiquez les écrits sur Amida. Pourquoi donc, imputez-vous à cet âge saint, les récentes catastrophes, offensez-vous avec tant de violence les maîtres précédents et, de plus, médisez-vous du saint ? Vous soufflez sur le pelage pour chercher les défauts, vous coupez la peau pour en faire couler le sang. Depuis le  passé jusqu’à présent, je n’ai jamais entendu de telles mauvaises paroles. Vous devriez avoir peur et être plus discret. Ce crime karmique est lourd. Comment échapper à la punition ? Je suis même effrayé d’être assis en votre compagnie. Je souhaite à présent reprendre ma canne et rentrer chez moi ».

L’hôte, souriant, l’interrompt et dit : « on s’habitue au salé grâce aux feuilles de la Renouée ; dans les latrines, on oublie la puanteur. Vous avez entendu mes bonnes paroles et les avez prises pour de mauvaises. Vous qualifiez de saint un offenseur et doutez du bon maître, l’estimant mauvais moine. Votre confusion est véritablement profonde, votre faute n’est nullement légère. Si vous souhaitez entendre la genèse des choses, je vais l’exposer maintenant avec minutie.

Au sein du prêche du vénéré Shakya, on distingue cinq périodes d’enseignements, dont la chronologie ainsi que la distinction entre le provisoire et le véritable, ont déjà été établies. Or, Tanluan, Daochuo et Shandao suivirent le provisoire, oubliant le véritable. Ils s’appuyèrent sur les enseignements préalables, rejetant les enseignements ultérieurs. Ils n’avaient pas encore sondé la profondeur des enseignements de l’Eveillé.

Hônen, en particulier, pourtant dans leur courant, en ignorait l’origine. Pour quelle raison ? Apposant les quatre mots : rejeter, fermer, sceller et abandonner sur les deux mille huit cent quatre-vingt-trois rouleaux des six cent trente-sept sutra du Grand véhicule, ainsi que sur tous les Bouddha et bodhisattva et les divinités du monde et des cieux, il corrompit le cœur de tous les êtres. Il développa uniquement des paroles déviantes personnelles, sans examiner les explications contenues au sein des sutras du Bouddha. Il a alors atteint le comble du mensonge, et commis le crime de médisance. Aucune parole ne saurait le décrire, aucune critique n’est suffisante pour le blâmer. Les hommes croient tous en ce mensonge et respectent les passages sélectionnés. Pour cette raison, adorant les trois sutras de la Terre pure, ils abandonnent les autres sutras ; vénérant le seul Bouddha de l’extrême félicité, ils oublient tous les autres Bouddha. Hônen est véritablement l’ennemi juré de tous les Bouddha et de tous les sutras. Adversaire des saints moines et des hommes ordinaires, son enseignement hérétique s’est propagé jusqu’aux confins du pays et s’est répandu partout dans les dix directions.

Vous avez été vivement choqué de ma critique d’une époque révolue faisant référence aux catastrophes de ces récentes années. Mais, par évocation d’exemples du passé, je vais dissiper votre illusion. L’Arrêt et examen, citant les Chroniques historiques, indique : “A la fin de la dynastie des Zhou, des hommes échevelés et nus, ne se conformant pas aux rituels…”. Citant la Tradition de Zuo pour commenter cette phrase, le deuxième fascicule de l’Auxiliaire à la transmission précise : “Lorsque le roi Ping transféra sa capitale à l’est, il vit, près de la rivière Yi, des hommes, les cheveux défaits, procédant à des sacrifices. Un sage dit alors (la dynastie) ne durera pas cent ans. Parce que les rites sont déjà morts”. On peut comprendre à partir de là que les signes se manifestent d’abord et qu’ensuite, seulement, se produisent les catastrophes. “Yuanjie, homme doté d’immenses qualités, négligeait toutefois ses cheveux et laissait sa ceinture non attachée. Par la suite, les fils de la noblesse l’imitèrent et ceux qui étaient vulgaires et d’un aspect disgracieux, passaient pour naturels, alors que ceux qui gardaient une attitude réservée étaient appelés paysans. C’était le signe de la fin du clan Sima”.

Par ailleurs, le grand maître Jikaku, dans son Journal des pèlerinages en Chine, écrivait : “En la première année de l’ère Huichang, l’empereur Wuzong, de la dynastie des Tang, ordonna au maître du Dharma Gengseung, du temple Zhangjingsi, de transmettre l’enseignement du Bouddha Amida dans tous les temples. Ce qu’il fit sans relâche, passant trois jours dans chaque temple. En la deuxième année de la même ère, l’armée Ouighour franchit la frontière des Tang. En la troisième année de la même ère, l’ambassadeur de la région située au nord du fleuve (jaune), fomenta subitement une révolte. Ensuite, le pays de Dafan refusa de se soumettre aux ordres et, de nouveau, les Ouighours se livrèrent à une invasion. Les conflits militaires et les révoltes étaient semblables à ceux de l’époque de Xiang et de la dynastie des Qin. Les villes et les villages furent détruits par divers incendies et autres catastrophes. Pire encore, Wuzong ordonna l’éradication du bouddhisme et la destruction de nombreux temples et pagodes. Il ne parvint cependant pas à calmer les révoltes et, finalement, mourut peu après dans l’agonie”. (idée principale)

Forts de ces éléments, nous devons considérer le fait que Hônen vivait à l’époque de l’empereur Gotoba, aux environs des années de l’ère Kennin. Nous savons ce qui s’est passé pour cet empereur : le grand pays des Tang a laissé des exemples qui se manifestent dans notre pays. Ne doutez pas ! Ne soyez pas suspicieux ! Ce que vous devez faire est rejeter le mal et prendre refuge dans le bien, condamner la source et couper les racines.

Le visiteur, quelque peu radouci dit : « Bien que n’ayant pas sondé profondément le sujet, j’en comprends la teneur. Pourtant, de la ville fleurie au campement des saules, les portes de Shakya sont dotées de gonds et de loquets, des poutres faîtières étayent les maisons bouddhistes. Or, nul n’a proféré jusqu’ici de telles accusations, rien n’est parvenu à l’empereur. Et, vous, homme d’humble extraction, vomissez sans vergogne ces paroles indésirables. Leur signification n’est pas complète, votre théorie est dénuée de raison ».

L’hôte dit : « Je suis peu de choses. Pourtant j’ai l’honneur d’étudier le Grand véhicule. Une calliphoridae accrochée à la queue d’un pur sang parcourt dix mille lieues. Le lierre vert, suspendu au sommet du pin, s’étend sur mille aunes. Né en tant que disciple, fils de l’Eveillé, je sers le roi des sutras. Comment, constatant le déclin du Dharma, ne pas être empli de tristesse en mon cœur ? De plus, le Sutra de l’Extinction dit : “Si un bon moine, voyant des hommes détruire le Dharma, les laisse faire sans les réprimander, ni les expulser, ni les dénoncer et les condamner, il faut le savoir, cet homme est un ennemi infiltré au sein du Dharma de l’Eveillé. Si, par contre, il les réprimande, les expulse et les dénonce et les condamne, il est alors mon disciple, un véritable auditeur”. Moi, bien que n’étant pas un bon moine, afin d’éviter le reproche d’“ennemi au sein du Dharma”, j’ai simplement cité grossièrement l’axe principal.

De plus, au cours de l’ère Gennin, deux temples, le Enryakuji et le Kôfukuji adressèrent à plusieurs reprises des pétitions à l’empereur. Des décrets et des messages impériaux furent alors émis, ordonnant la confiscation des plaquettes en bois ayant servi à l’impression du Recueil des passages sélectionnés de Hônen et leur archivage dans le grand auditorium. Elles furent ensuite détruites par le feu à titre de gratitude envers la bienfaisance des Eveillés des trois phases. Quant à la tombe de Hônen, les intouchables des temples Kanjin-in reçurent l’ordre de la détruire. Ses disciples, Ryûkan, Shôkô, Jôkaku, Sasshô et d’autres furent condamnés à l’exil lointain, sans jamais être amnistiés de leur disgrâce. Soutenez-vous encore qu’aucune accusation n’ait été proférée » ?

Apaisé, le visiteur dit : « il est difficile pour un seul homme de débattre de qui rabaisse les sutras et critique les moines. Toutefois, il est vrai qu’il a apposé les quatre mots : rejeter, fermer, sceller et abandonner sur les deux mille huit cent quatre-vingt-trois rouleaux des six cent trente-huit sutra du Grand véhicule, ainsi que sur tous les Bouddha et bodhisattva et les divinités du monde et des cieux. Ces paroles sont, à l’évidence, les siennes. Ces phrases sont on ne peut plus claires. Mais vous insistez sur ce défaut dans le jade et le critiquez sévèrement. Furent-elles des paroles motivées par l’illusion, ou étaient-ce des propos fondés sur l’éveil ? Je ne peux discerner le sage du sot. Il m’est difficile de déterminer le bien du mal. Pourtant, vous affirmez avec véhémence que les calamités et catastrophes sont dues à la Sélection de passages et élaborez des théories pour corroborer vos dires. Il est certain que la paix sous le ciel et la quiétude dans le pays représentent le vœu du souverain et des ministres, le souhait du peuple. Le pays prospère grâce au Dharma et le Dharma est sublimé par les hommes. Si le pays est détruit et les hommes anéantis, qui vénérera l’Eveillé, qui aura foi dans le Dharma ? Aussi, faut-il en premier lieu prier pour la nation et établir le bon Dharma du Bouddha. S’il existe une méthode pour éradiquer les calamités et arrêter les catastrophes, je souhaite l’entendre.

L’hôte dit : Je ne suis qu’un sot obstiné et n’ai nullement l’intention de me faire passer pour un sage. Je peux simplement citer des phrases des sutras. Concernant les moyens de traiter (les catastrophes), il existe en fait de nombreux passages au sein des livres intérieurs et des livres extérieurs. Il serait difficile de les citer en détail. Toutefois, ayant emprunté la voie du Bouddha, j’ai réfléchi à maintes reprises à ce sujet. Il me semble donc qu’interdire les hommes de l’offense au Dharma et respecter le moine arpentant la voie juste permet d’établir la sérénité de la nation et la paix sous le ciel.

En effet, le Sutra de l’Extinction enseigne : “L’Eveillé dit : « Hormis une catégorie d’hommes, vous pouvez faire l’offrande à tous les autres et vous serez alors dignes d’éloges ». Cunda demanda : « Qui désignez-vous par “une catégorie d’hommes” ? » « Ce sont ceux qui, au sein de ce sutra sont dits transgresser les préceptes ». Cunda dit alors : « Je ne comprends toujours pas. Je souhaite uniquement que vous daigniez me l’expliquer ». Alors, l’Eveillé, s’adressant à Cunda dit : « Ceux qui ne respectent pas les préceptes sont les icchantika. Le don fait à toute autre personne sera digne d’éloges, car vous recevrez de grandes rétributions ». Cunda demanda encore avec respect : « Que signifie icchantika ? » L’Eveillé répondit : « Cunda ! Suppose des moines ou des nones, ainsi que des upāsaka ou des upasīkā qui, proférant des paroles inconsidérées et mauvaises, insultent le Dharma, sans jamais regretter d’avoir commis une telle lourde faute, ni concevoir du repentir en leur cœur. De telles personnes sont dites suivre la voie des icchantika. Il y a aussi ceux qui commettent les quatre fautes graves ou perpètrent les cinq crimes de rébellion qui, tout en sachant commettre des actes graves, n’en conçoivent pas la moindre peur ni le moindre regret, ou, même s’ils en avaient, ne le manifesteraient pas. Ils n’ont aucun désir d’établir et de protéger à travers les âges le bon Dharma. Au contraire, ils en parlent avec dédain et mépris, par le biais de paroles pleines d’erreurs. Ces personnes aussi sont dites suivre la voie des icchantika. Ainsi, hormis les icchantika, tu peux faire le don à toutes les personnes et tu seras digne d’éloge »”.

Il dit encore : “Me remémorant mon passé, je me souviens avoir été le roi d’un grand pays au sein du Janbudvipa. Je m’appelais alors Ŗşidatta. J’aimais et respectais les sutras du Mahayana. Mon cœur était pur et bon, il ne possédait aucune trace de vulgarité, de mal, de jalousie ni de ladrerie. Hommes de bien, à cette époque, je chérissais le Mahayana. J’entendis un brahmane insulter cet enseignement. Après avoir entendu cela, je lui ôtai la vie sur le champ. Hommes de bien, grâce à cette causalité, je ne tombai jamais en enfer”. Le sutra énonce encore : “L’Ainsi-venant, par le passé, était un roi. Alors qu’il pratiquait la voie des bodhisattva, il ôta la vie au brahmane de ce lieu”. Il dit encore : “Il existe trois sortes de meurtres : bénin, intermédiaire et grave. Le meurtre bénin se rapporte aux fourmis et à tous les animaux, sauf s’ils sont la manifestation de bodhisattva. La causalité des meurtres bénins est la chute en enfer, parmi les animaux ou les esprits affamés, où l’on endure des souffrances bénignes. Pour quelle raison ? Ces animaux possèdent en petite quantité les racines de bien. Pour cette raison, celui qui les tue reçoit précisément la rétribution de son crime. Le meurtre intermédiaire est nommé ainsi lorsqu’il se rapporte aux hommes ordinaires jusqu’à ceux qui ne reviennent pas. Cette cause karmique provoque la chute en enfer, chez les animaux et les esprits affamés où l’on endure les souffrances intermédiaires. Le meurtre grave est celui des parents, des arhats, des Bouddha pour soi et des bodhisattva définitivement assurés. Il provoque la chute dans le grand enfer Avici. Hommes de bien, si quelqu’un tue un icchantika, il n’entre pas dans l’une de ces trois catégories de meurtres. Hommes de bien, les brahmanes sont tous des icchantika”.

Dans le Sutra du Roi bienveillant, il est dit : “L’Eveillé, s’adressant au roi Prasenajit, lui dit : « Pour cette raison, j’effectue la transmission aux divers souverains, je ne la fais pas envers les moines ni les nones. Pour quelle raison ? Parce qu’ils ne possèdent pas l’influence ni le pouvoir de ces monarques »”.

Dans le Sutra de l’Extinction, il est dit : “Je fais la transmission du bon Dharma sans supérieur aux rois, aux ministres d’état, aux Premiers ministres, ainsi qu’aux quatre catégories d’êtres. S’il est des individus détruisant le bon Dharma, les ministres d’état et les quatre catégories d’êtres doivent les punir et les corriger”. Il dit encore : “L’Eveillé dit : « Kāśyapa, c’est parce que je possède la causalité d’avoir protégé le bon Dharma, que j’ai réalisé le corps adamantin. Hommes de bien, ceux qui désirent protéger le bon Dharma sans recevoir les cinq préceptes ni pratiquer la dignité, doivent porter le couteau et le sabre, l’arc et les flèches, les pointes et les lances »”. Il dit encore : “S’il en est qui souhaitent recevoir et observer les cinq préceptes, ils ne peuvent pas obtenir d’être appelés (pratiquants du) Grand véhicule. Même s’ils ne reçoivent pas les cinq préceptes mais protègent le bon Dharma, ils peuvent être appelés (pratiquants du) Grand véhicule. Ceux qui protègent le bon Dharma doivent porter le couteau, le sabre, des armes et des bâtons. Même s’ils portent des sabres et des bâtons, je les appellerai hommes observant les préceptes” ».

Il dit encore : “Hommes de bien, par le passé, ici, à Kuśinagara, un Eveillé apparut au monde. Il s’appelait l’Ainsi-venant Joie Croissante. Après son extinction, le bon Dharma demeura un nombre incalculable de centaines de millions d’années. Alors qu’il restait quarante ans avant que le bon Dharma ne parvienne à son terme, il y avait un moine, respectueux des préceptes, dont le nom était Vertus d’éveil. A cette époque, il y avait de nombreux moines ayant abjuré les préceptes. Lorsqu’ils entendirent le prêche (de Vertus d’éveil), ils conçurent alors de la haine. Armés de sabres et de bâtons, ils attaquèrent ce maître du Dharma. Le roi d’alors s’appelait Doté de vertus. Ayant appris ce qui se passait, il se rendit immédiatement là où se trouvait le prêtre, afin de protéger le Dharma. Il se battit de toutes ses forces contre les moines haineux. En cette occasion, le prédicateur fut sauvé du danger. Pendant ce temps, le roi subit des blessures à coups de sabres, de bâtons, de flèches et de lances. Pas un endroit de son corps, aussi petit qu’une graine de moutarde soit-il, ne restait intact. Alors, Vertus d’éveil se rendit auprès du roi et le loua. « C’est bien, c’est bien ! Roi, vous êtes véritablement un protecteur du bon Dharma. Dans la vie prochaine, votre corps deviendra le réceptacle infini du Dharma ». Après avoir entendu cet enseignement, le roi ressentit une grande joie. Sa vie parvenue à son terme, il naquit dans le pays du Bouddha Akşobhya, qui plus est, en tant que principal disciple de cet Eveillé. Les généraux de ce roi, son peuple, ses alliés, qui s’étaient battus à ses côtés, tous ressentirent alors de la joie et ne régressèrent jamais dans leur aspiration à l’éveil. Après leur mort, tous naquirent dans le pays du Bouddha Akşobhya. Plus tard, le moine Vertus d’éveil mourut à son tour et put renaître dans le pays du Bouddha Akşobhya. En outre, il devint son deuxième disciple parmi les auditeurs. Lorsque le bon Dharma est sur le point de péricliter, il convient de le recevoir, de le garder et de le protéger de cette manière. Kāśyapa, le roi à ce moment, c’était moi. Le moine prêchant le Dharma était l’Eveillé Kāśyapa. Kāśyapa, ceux qui protègent le bon Dharma reçoivent ainsi d’innombrables rétributions. Grâce à cette causalité, j’ai obtenu aujourd’hui divers aspects dont je peux librement me parer et réaliser le corps de Dharma indestructible”.

L’Eveillé s’adressa ainsi au bodhisattva Kāśyapa : « C’est pourquoi, les pratiquants laïcs souhaitant protéger le Dharma, doivent porter des sabres et des bâtons afin d’en assurer la sécurité. Hommes de bien, après mon extinction, le pays tombera dans la négligence et le désordre d’un monde souillé et perverti. Alors, les hommes se pilleront mutuellement et le peuple sera en proie à la famine. A ce moment, afin d’échapper à la famine, nombre d’entre eux éveilleront leur cœur à l’éveil et quitteront la demeure. On les appellera les “crânes rasés”. Les crânes rasés, voyant des hommes protéger et garder le bon Dharma, les chasseront ou les blesseront, parfois même les tueront. Pour cette raison, j’autorise (les moines) observant les préceptes à recourir au soutien des bâtons et sabres (des laïcs), aux vêtements blancs et à accepter leur compagnie. Même s’ils sont  armés de sabres et de bâtons, je dis néanmoins qu’ils respectent les préceptes. Même s’ils sont armés de sabres et de bâtons, ils ne doivent cependant pas ôter la vie”.

Dans le Sutra du Lotus, il est dit : “Lorsque des hommes dénués de foi médisent de ce sutra, ils coupent instantanément les graines de boddhéité dans l’ensemble des mondes. A la fin de leur vie, ils entreront dans l’enfer Avici”.

Ces passages de sutra sont parfaitement clairs. Que pourrais-je y ajouter ? Si l’on se réfère au Sutra du Lotus, offenser les sutras du Grand véhicule est plus grave encore que d’avoir commis les cinq rébellions à l’infini. C’est la raison pour laquelle cette faute entraîne la chute dans l’enfer Avici duquel on ne peut s’extraire pendant une éternité. Si l’on se réfère au Sutra de l’Extinction, même si l’offrande aux auteurs des cinq rébellions est autorisée, l’offrande aux offenseurs du Dharma est interdite. Celui qui tue une fourmi tombe inéluctablement dans les trois mauvaises voies. Celui qui interdit l’offense au Dharma accède au degré de non régression. Ainsi, Vertus d’éveil devint le Bouddha Kāśyapa et Doté de vertus devint Shakyamuni.

Les enseignements des sutras du Lotus et du Nirvana représentent l’essence des cinq périodes de prêche de l’Eveillé. Leurs prescriptions sont très sévères. Qui ne s’y conformerait pas ? Les offenseurs du Dharma ont toutefois oublié la voie correcte. En outre, l’aveuglement dû à leur stupidité s’est accru en raison de leur attachement à la Sélection de Hônen. Se souvenant de son apparence, certains sculptent ou peignent son image. Ou encore, portant foi à ses thèses fallacieuses, d’autres gravent son verbiage tordu et méchant sur des blocs en bois afin de le propager à l’intérieur du pays et à l’extérieur des villes. On vénère son école et fait des offrandes à ses disciples. On en est arrivé au point de voir couper les doigts des mains de Shakyamuni et de les remplacer par les mudra d’Amida, de voir les temples dédiés à l’Ainsi-venant de l’est devenir la demeure du roi des oies, souverain de l’enseignement de la Terre de l’ouest. Le Sutra conforme au Dharma, retranscrit plus de quatre cents fois, a été abandonné au profit des trois sutras de la Terre pure. On a interrompu les cours commémorant le grand maître du Tendai pour ceux dédiés à Shandao. Il serait difficile d’être exhaustif dans les exemples de ce genre. N’est-ce pas, là, la destruction du Bouddha ? N’est-ce pas, là, la destruction du Dharma ? N’est-ce pas là, la destruction des moines ? Ces hérésies sont uniquement dues à la Sélection. Quelle tristesse de se détourner des propos prescripteurs véridiques et lucides de l’Ainsi-venant. Quelle pitié d’obéir aux paroles vulgaires de moines stupides jetant la perturbation. Si vous souhaitez que la tranquillité et le calme s’installent rapidement sur cette terre, il faut alors interdire l’offense au Dharma dans tout le pays.

Le visiteur dit : Si l’on souhaite interdire les offenseurs du Dharma, si l’on veut éradiquer ceux qui transgressent les interdits de l’Eveillé, faut-il, comme le préconise le Sutra, les mettre à mort ? S’il en est ainsi, nous serons à notre tour des assassins. Ne devrons-nous pas alors, en subir nous-mêmes les conséquences ?

En effet, dans le Sutra du Grand rassemblement, il est dit : « Si un homme se rase la tête et revêt le surplis, les hommes et les cieux devront lui faire des offrandes, qu’il respecte les préceptes ou même, qu’il les transgresse. En effet,  par cet acte, c’est à moi qu’ils font l’offrande. Car cet homme est mon fils. Si, par contre, ils le frappent, ils frappent alors mon fils. S’ils le tancent et l’humilient, c’est moi qu’ils injurient et humilient ». Sans réfléchir davantage, nous devons savoir, sans discourir sur le fait qu’il soit bon ou mauvais, sans distinguer du bien ou du mal, lorsqu’un homme est devenu moine, il est apte à recevoir des offrandes. Comment pourrions-nous dès lors le frapper sans blesser son père ? Les brahmanes aux bâtons de bambous qui tuèrent le vénérable Maudgalyāyana sombrèrent pendant une éternité au fond de l’enfer aux souffrances sans intermittence. Devadatta, qui tua la nonne Utpalavarna, fut longtemps prisonnier des flammes de l’enfer Avici. Ces preuves des temps anciens sont claires, les descendants doivent les craindre. En réprimandant ainsi les offenseurs du Dharma, vous enfreignez l’interdit. Il est difficile de vous croire. Comment vous justifiez-vous ?

L’hôte dit : « Il est clair que vous avez lu ces sutras. Pourtant, vous parlez encore de la sorte. Sont-ils hors de portée de votre esprit, ou ne parvenez-vous pas à en comprendre le raisonnement ? Mon intention n’est nullement de blâmer les enfants de l’Eveillé. J’ai uniquement la haine de l’offense au Dharma. Selon les enseignements bouddhistes antérieurs à Shakyamuni, ce crime était puni de mort. Toutefois, les sutras enseignés après l’apparition du bienveillant demandent d’interrompre les dons. Ainsi, si l’ensemble des quatre sortes d’êtres des quatre océans et des infinités de pays cessent de faire des dons à ce mal et prennent tous refuge dans le bien, quels désastres pourraient se produire ? Quelles calamités pourraient se manifester ?

A ce moment, le visiteur recula sur son siège et, ajustant son col, dit : « Les enseignements de l’Eveillé sont variés et leur signification difficile à percer. J’avais de nombreux doutes et ne savais faire la distinction entre le vrai et le faux. Or, les Passages sélectionnés du sage Hônen existent. Ce livre préconise d’abandonner, de fermer, d’ignorer et de jeter l’ensemble des Bouddha, des sutras, des bodhisattva et des divinités. Ses phrases sont très claires. Mais à cause de lui, les saints ont quitté le pays et les divinités bénéfiques abandonné leur demeure. Alors, la famine règne sous le ciel et les épidémies se répandent dans le monde. Vous avez largement cité les sutras et distingué clairement le vrai du faux. Aussi, mon attachement aveugle s’est corrigé, mes oreilles et mes yeux ont été éclairés.

Après tout, la paix sur la Terre et la quiétude sous le ciel sont ce que l’on aime, du Souverain à la multitude du peuple, ce que l’on désire. Si, au plus vite, on interrompt les dons aux icchantika et fait l’offrande aux moines et aux nonnes, si l’on parvient à endiguer les vagues blanches troublant l’océan de l’Eveil et couper les verts bosquets recouvrant la montagne du Dharma, le monde deviendra le monde de Xinong, le pays deviendra le pays de Tangyu. Alors, nous pourrons prendre en considération le superficiel et le profond de l’eau du Dharma et vénérer le faîte et les poutres de la maison du Bouddha ».

L’hôte, avec joie, dit : «La colombe se transforme en faucon et le moineau en palourde. Que cela est réjouissant ! A voisiner l’ami de cette demeure parfumée, votre nature est devenue celle d’un champ de lin. Si vous désirez réellement vous préoccuper de ces difficultés et croire entièrement ces paroles, le vent sera doux, les vagues seront calmes et les récoltes abondantes en peu de temps.

Mais le cœur des hommes change avec le temps. La nature des choses s’altère selon leur environnement, comme la lune sur l’eau au gré des vagues s’agite, ou les soldats de l’avant-garde sous le sabre s’inclinent. Bien qu’à présent vous affirmez croire, il est certain que, par la suite, vous oublierez pour longtemps.

Si, en premier lieu, vous désirez apporter la sérénité au pays et prier pour le présent et l’avenir, il faut, en toute hâte, examiner la situation et prendre rapidement des mesures.

Pour quelle raison ? Parmi les sept désastres énumérés dans le sutra du Maître des remèdes, cinq d’entre eux se sont déjà produits et deux restent à venir ; ce sont le désastre de l’invasion par un autre pays et le désastre de la révolte au sein de son propre monde. Parmi les trois catastrophes du sutra du Grand rassemblement, deux sont rapidement survenues et une n’est pas encore apparue. Il s’agit de la catastrophe due à la guerre. Bien que les désastres et calamités décrits dans le sutra de la Radiance d’or se soient l’un après l’autre produits, point encore ne s’est accomplie la catastrophe de l’invasion du pays par des barbares étrangers, point encore n’est advenu ce désastre. Parmi les sept désastres cités dans le sutra du Roi bienveillant, six abondent et un ne s’est pas encore produit. Il s’agit de l’invasion du pays par des brigands venus des quatre directions.

Non seulement cela, “lorsque le pays se trouble, ce sont d’abord les esprits démoniaques qui montrent des signes de désordre. Or, parce que les esprits démoniaques sont troublés, les hommes le sont aussi”. En examinant la nature des choses à la lumière de ce passage, cent démons ont été très tôt perturbés et de nombreux hommes ont alors péri. Les désastres passés sont évidents. Comment pourrait-on douter des désastres à venir ? Si les catastrophes restantes se produisent à cause des méfaits de mauvais enseignements, que faudra-t-il faire à ce moment là ? Les empereurs et les rois, fondés sur la nation, règnent sous les cieux. Leurs vassaux possèdent les rizières et les jardins et subviennent aux besoins du monde. Mais, si des brigands venus d’autres horizons envahissent ce pays, si des révoltes intérieures se produisent et que les terres sont pillées, comment ne pas être pris de terreur et d’agitation ? Si l’on perd son pays et que sa maison est détruite, dans quel monde pourra-t-on s’enfuir ? Si vous pensez à votre propre sécurité, ne devez-vous pas d’abord prier pour la tranquillité et l’ordre dans les quatre directions du pays ?

En particulier, tant qu’ils font partie du monde des hommes, tous craignent la vie future. C’est pourquoi croient-ils en des enseignements hérétiques, ou respectent les offenseurs du Dharma. Je suis désolé qu’ils ne puissent distinguer le bien du mal et, en même temps, je suis triste qu’ils aient pris refuge dans l’enseignement du Bouddha. Pourquoi, avec une force de la foi identique, respectent-ils aveuglément des paroles hérétiques ?

S’ils ne reviennent pas de leurs attachements et continuent à avoir un esprit pernicieux, ils se retireront rapidement du monde conditionné pour immanquablement tomber dans les geôles sans intermittence. Pourquoi cela ? Dans le sutra du Grand rassemblement, il est dit : “Si un roi, même ayant, pendant d’innombrables mondes, pratiqué l’offrande, les préceptes et la sagesse, voit mon Dharma sur le point d’être détruit, l’abandonne et ne fait rien pour le protéger, toutes les innombrables racines de bien qu’il a accumulées seront effacées et perdues. Puis, sans tarder, ce roi contractera une grave maladie et, après la fin de sa vie, renaîtra dans le grand enfer. Comme pour lui, il en sera de même pour son épouse, les princes, les ministres, les préfets, le maître principal, les chefs de villages, les généraux et les magistrats”.

Dans le sutra du Roi bienveillant, il est dit : “Si un homme détruit l’enseignement du Bouddha, il ne rencontrera de piété filiale chez ses enfants, ni d’harmonie parmi ses six collatéraux et les dieux ne le protégeront pas. Jour après jour, les maladies et les démons viendront le tourmenter. Les désastres tomberont sur lui et le malheur le poursuivra là où il va. Une fois mort, il entrera en enfer, chez les esprits affamés ou les animaux. S’il en sort et devient un homme, sa rétribution sera alors d’être l’esclave de l’armée. Comme l’écho, comme l’ombre, comme l’homme qui écrit la nuit et dont les mots demeurent, même après l’extinction de la lumière, ainsi est la rétribution des trois mondes”.

Dans le deuxième rouleau du sutra du Lotus, il est dit : “Si un homme ne croit pas en ce sutra et l’offense, il tombera dans l’enfer Avici après la fin de sa vie”. Dans le chapitre Sans mépris qui apparaît dans le septième rouleau du même sutra, il est dit : “Mille éons dans l’enfer Avici, de grandes souffrances il recevra”. Dans le sutra du Nirvana, il est dit : “Celui qui s’éloigne des amis de bien, n’écoute pas le Dharma correct et demeure dans l’enseignement erroné, par le biais de ces causes, s’abîmera dans l’enfer Avici et endurera un corps mesurant verticalement et horizontalement quatre vingt quatre mille yojana”. Fin de citation

Lorsqu’on ouvre la grande quantité des sutras, on voit que tous accordent de l’importance à la gravité de l’offense au Dharma. Qu’il est triste que tous franchissent la porte du bon Dharma pour le quitter et pénétrer dans les profondeurs des geôles des dharma hérétiques. Qu’il est stupide que les uns et les autres se prennent dans les rets des enseignements délétères et errent éternellement dans les filets des doctrines erronées. Ils se perdent dans le brouillard des illusions en ce monde et s’abîment dans les profondeurs des flammes intenses après la mort. Comme cela est lamentable, comme cela est affligeant.

Au plus vite, rectifiez l’attachement à votre petite croyance et prenez immédiatement refuge dans le bien unique du véhicule véridique. Ainsi, les trois mondes se révéleront être tous le monde du Bouddha. Comment le monde du Bouddha pourrait-il péricliter ? Les dix directions se révéleront être toutes la terre précieuse. Comment la terre précieuse pourrait-elle être détruite ? Si le pays ne décline pas et que le territoire ne subit pas de ruine, votre corps sera en sécurité et votre esprit serein. Vous devez croire, vous devez respecter ces mots, ces paroles.

Le visiteur dit : «S’agissant de cette vie et de la vie suivante, qui ne serait prudent ? Qui ne serait effrayé ? Ayant ouvert ces phrases des sutras et reçu consciencieusement la parole du Bouddha, je réalise combien lourde est l’erreur d’offense, combien profond est le crime de destruction du Dharma. J’ai cru en un Bouddha unique en rejetant tous les autres Bouddha ; j’ai vénéré les trois sutra en excluant tous les autres. Cette attitude n’était pas due à la corruption de ma pensée ; j’ai suivi les paroles des éminents maîtres précédents. Il en est de même des hommes dans les dix directions. Ceci représente de vains efforts dans cette vie et la chute dans l’enfer Avici dans la vie future. Les phrases sont claires et le principe formel ; ils ne laissent aucune place au doute. Il est temps de respecter vos bienveillantes instructions et d’ouvrir ma sottise de visiteur désemparé. Nous devons sans tarder faire prendre effet à l’antidote et établir la paix. Apaisons d’abord notre vie présente et, en outre, assurons la vie après notre trépas. Je ne croirai pas seulement moi-même, mais je corrigerai les erreurs d’autrui».

 


 

Cours de sa Sainteté Nikken Shônin

67e Souverain du Dharma

 

 

Mai 2003

Dans le Kyakuden du Taisekiji

 

 

 

 

Préambule


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B

onjour, Mesdames, Mesdemoiselles et Messieurs.

Dans la perspective du sept cent cinquantième anniversaire de la présentation de la bonne doctrine du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude, en 2009, nous, moines et pratiquants de la Nichiren Shôshû, nous efforçons, dans l’unité, de progresser dans la pratique et l’étude afin de protéger le bon Dharma et de travailler à sa pérennité. C’est dans ces conditions qu’ont débuté les cours d’été de cette année. Depuis hier, les divers professeurs chargés de cours vous ont proposé divers thèmes importants tels que shakubuku.

Dans six ans, ce sera l’année du sept cent cinquantième anniversaire de la présentation de la bonne doctrine du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Je souhaite, en cette première année, lire ce traité et, avec vous, réfléchir sur la profonde sagesse d’Eveillé de Nichiren Daishônin.

J’ai réfléchi au contenu de ce cours. Le volume d’enseignements contenus du début à la fin du Traité sur la Sérénité du pays se situe exactement au milieu, par comparaison avec les très longs Gosho que sont le Traité qui ouvre les yeux, le Traité sur la rétribution de la bienfaisance ou le Traité sur la sélection du temps d’une part, et des écrits et lettres plus brefs, d’autre part.

Après avoir mûrement réfléchi au contenu des cours donnés au long des dix sessions des cours d’été, j’ai pensé diviser en cinq parties l’ensemble du Traité sur la sérénité du pays. Je développerai ainsi le début au cours des première et deuxième sessions, la suite étant abordée au cours des troisième et quatrième sessions. Je vais par conséquent traiter la première partie, comme je l’ai fait lors de la première session.

 

 Arrière plan et signification du traité

Pour commencer, je vais évoquer le contexte dans lequel le Traité sur la sérénité du pays fut écrit. A cette époque, des catastrophes, telles qu’inondations, famines, épidémies, grands tremblements de terre, se produisaient de manière répétitive. Nichiren Daishônin jugea que ce phénomène se produisait parce que le pays entier s’adonnait l’hérésie, tournant ainsi le dos à la rectitude. De plus, le souverain et ses ministres ne prenant pas conscience de ce processus, Nichiren Daishônin, en tant que disciple du Bouddha, présenta le Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude, dans lequel il dénonça auprès de Tokiyori, entré dans la voie au temple Saimyôji, l’offense au Dharma et réprimanda l’hétérodoxe et le néfaste.

Ceci, toutefois, ne représente que le contexte expliqué du point de vue littéral. En ce qui concerne la signification profonde, il convient de lire ce texte comme l’écrit de réprimande et de shakubuku envers la nation et le peuple dans son ensemble, par Nichiren Daishônin, à l’aide du grand Dharma de l’ensemencement de la doctrine originelle du Sutra du Lotus. Manifestation du Bouddha fondamental, corps de rétribution qui, de lui-même, reçoit et emploie depuis le passé infini, son but était de réaliser la vaste propagation pour l’éternité de la Fin du Dharma. Sous le règne du quatre-vingt-dixième empereur, Kameyama, le 16 du septième mois de la première année de Bun’nô (1260), il présenta ce traité. Le Shogun (généralissime) du moment était le Prince Munetaka, sixième des neuf générations de Kamakura. Le Régent était Hôjô Nagatoki, mais en fait, le véritable pouvoir politique était aux mains de l’ancien Régent, Tokiyori, entré dans la voie au temple Saimyôji.

Quatre ans auparavant, en la première année de Kôgen (1250), Tokiyori avait reçu la tonsure et était entré dans la voie. Malgré cela, il prenait encore part aux affaires de l’Etat et, de fait, était le véritable détenteur des rennes du pouvoir politique. C’est la raison pour laquelle Nichiren Daishônin soumit le Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude à Tokiyori, par l’intermédiaire du nyûdô (entré dans la voie) Yadoya Mitsunori.

Les idées principales de ce traité sont les suivantes :

La première signification du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude est d’être un livre prophétique, dans la mesure où il révèle les grandes catastrophes à venir, outre celles qui s’étaient déjà manifestées jusqu’alors, comme le caractère inéluctable de celles-ci. Au nombre de deux, ces grands désastres étaient la guerre civile et l’invasion par une nation étrangère, tous deux prédits dans les sutras.

La deuxième signification du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude est de stigmatiser et de sévèrement réprimander les erreurs de l’offense au Dharma, en tant que cause des désastres. Il s’agit en fait, d’une réprimande à l’encontre des offenses au Dharma, commises du point de vue bouddhique.

La troisième notion est de corriger le crime de l’offense au Dharma, pour le salut présent et futur des êtres.

En février 1272 (neuvième année de Bun’ei), une guerre civile, première des prophéties, éclata. Ensuite, par deux fois, en octobre 1274 (onzième année de Bun’ei) et en mai 1281 (quatrième année de Kôan), les Mongols attaquèrent le Japon, accomplissant par là même et sans la moindre équivoque la seconde prophétie : l’invasion du pays par une nation étrangère.

A travers ces événements, on comprend que le Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude est à la fois le livre prophétique du Bouddha originel de l’ensemencement et le grand guide indiquant la voie vers la véritable paix au Japon et dans le monde entier, résultante de la protection et de la conservation du bon Dharma découlant sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude.


 

 Explication du titre du traité

Je vais à présent parler du titre même du traité : Risshô ankoku. “Risshô” signifie “établir ce qui est juste” et “ankoku” signifie “rasséréner le pays”. De nombreux passages de sutra évoquent l’interdépendance entre ces deux éléments. Par exemple, le chapitre des « Moyens » du Sutra du Lotus indique :

“Rejetez honnêtement les moyens. Je vais uniquement prêcher la voie sans supérieur”.

Le vénéré Shakya définit clairement tous les sutras exposés pendant plus de quarante ans, antérieurs au Sutra du Lotus, relevant du Hinayana ou du Mahayana, comme étant des moyens salvifiques. C’est sur cette base, qu’il demande de rejeter honnêtement les moyens, parce qu’à partir de ce moment, il va uniquement prêcher la voie sans supérieur. S’attacher indéfiniment aux moyens, sans voir la vérité représente les voies erronées. “Rejetez honnêtement les moyens” représente la réfutation de cette hérésie. “Je vais uniquement prêcher la voie sans supérieur”, c’est l’établissement du Dharma correct, c’est-à-dire la révélation de l’orthodoxie. Autrement dit, “la réfutation de l’hérésie et la révélation de l’orthodoxie” (j. haja kenshô) se rapporte à “l’établissement de la rectitude” (j. risshô).

Le contenu de cette “rectitude”, par ailleurs, est extrêmement profond, extrêmement vaste. On peut l’aborder sous l’angle des cinq niveaux de comparaisons (j. go jû no sôtai – 五重の相対). Les cinq niveaux de comparaisons sont : premièrement la comparaison entre la voie intérieure et les voies extérieures. La deuxième est la comparaison entre le Mahayana et le Hinayana. Le troisième niveau est la comparaison entre le provisoire et le véritable et le quatrième est la comparaison entre la doctrine originelle et la doctrine éphémère. Enfin, le cinquième niveau et la comparaison entre l’ensemencement et la récolte. Cette suite de comparaisons permet d’établir une claire hiérarchisation parmi les enseignements, du superficiel au profond. Là apparaissent la véritable signification de la “rectitude” et de la vertu permettant aux êtres d’ouvrir leur vie.

§         Comparaison entre les voies extérieures et la voie intérieure

Dans la première comparaison, la voie intérieure, autrement dit le bouddhisme, expose de manière claire et correcte la causalité et les interrelations de toutes choses au sein du monde des dharma, au cours des trois phases : passé, présent et futur.

Par contre, les voies extérieures, autrement dit toutes les philosophies et religions autres que le bouddhisme, ne sont véritablement pas claires à ce sujet. Ni l’Islam, ni le Christianisme, ni aucune des nombreuses religions de ce monde n’explique la cause ayant produit leur Dieu respectif. Elles disent simplement que Dieu existe à l’origine. Or, cette conception va à l’encontre du principe selon lequel pour l’intégralité des choses, une cause provoque un effet. Dans le bouddhisme, même le Bouddha est devenu Bouddha en fonction d’une cause, la pratique, faisant apparaître l’effet de boddhéité. Il y a immanquablement une cause par laquelle l’Eveillé est devenu Eveillé. C’est en fonction de cette logique que l’intégralité des êtres, fondés sur la pratique et l’éveil du véritable Bouddha peuvent eux-mêmes obtenir le véritable bonheur.

Ce principe de la causalité satisfait, par ailleurs, au principe selon lequel une bonne condition et une bonne cause produisent un bon effet et une bonne rétribution et, à l’inverse, une mauvaise condition et une mauvaise cause produisent un mauvais effet et une mauvaise rétribution.

Une bonne cause produit immanquablement un bon effet. Une mauvaise cause, elle, produit inéluctablement un mauvais effet. Parce que le monde actuel est incapable d’aller au fond de ce principe, des pensées erronées naissent telle que “l’essentiel étant d’obtenir de bons effets immédiats, peu importe de commettre de mauvaises actions pour parvenir à ses fins”. Force est de dire que cette manière de penser a provoqué les nombreux malheurs et troubles du monde actuel.

Ainsi, lorsqu’on procède à la comparaison entre la voie intérieure et les voies extérieures, au sein de cette comparaison entre le bouddhisme, la voie intérieure et toutes les autres religions autres que le bouddhisme, c’est-à-dire les enseignements des voies extérieures, on voit que le bouddhisme est l’enseignement véritablement correct, dans la mesure où il explique le principe de la causalité. Si l’on ne comprend pas cette logique, on ne peut pas comprendre la véritable signification des passages du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude que je vais lire à partir de maintenant. C’est en effet à partir du moment où l’on a compris la véritable signification et la logique de l’enseignement du Bouddha, que l’on peut établir “la rectitude”.

§         Comparaison entre le grand et le petit véhicule

Nous avons ensuite la “comparaison entre le grand et le petit”. Le “petit” désigne le Petit véhicule. Au sein du bouddhisme, il existe une distinction entre le Grand et le Petit véhicule. Comparé aux voies extérieures, le bouddhisme représente l’enseignement correct. Toutefois, lorsqu’on effectue la comparaison entre le contenu du Grand véhicule et celui du Petit véhicule, on s’aperçoit que la vision du Petit véhicule est extrêmement étroite. Le contenu de cet enseignement consiste simplement et uniquement à tenter de s’extraire de l’illusion des six voies et d’aller dans ce lieu de quiétude où l’on a réduit son corps en cendres et annihilé la sagesse. Dès lors, cet enseignement ne montre ni l’aspect des existences dans le monde des dharma, ni la voie de l’ascèse menant à la vision globale de ce monde des dharma et du monde lui-même.

Ainsi, le Petit véhicule se limite à une tentative d’extraction individuelle des six voies et se contente d’ouvrir l’éveil pour soi uniquement. On est incapable de voir les aspects de la souffrance des autres. Or, en fait, en ce monde, il n’y a pas que notre seule existence. Dans notre relation avec les autres, il existe à la fois toutes les choses, bonnes et mauvaises, justes et erronées, heureuses et malheureuses. Aussi, lorsqu’en raison d’actes de bien, nous devenons heureux, il faut en même temps guider les autres. Finalement, le Petit véhicule n’enseigne que le principe de la “vacuité”. Par contre, le Grand véhicule enseigne la vision de la vérité fondée sur “la vacuité”, “la conditionnalité” et “la médianité”. Le Grand véhicule montre clairement ces éléments et prêche l’enseignement du point de vue de la vision d’ensemble.

Aussi, lorsqu’on effectue la comparaison entre le Petit et le Grand véhicule, on comprend que non seulement le Grand véhicule représente la vérité par rapport au Petit véhicule, mais que le Petit véhicule s’oppose au Grand véhicule. C’est pourquoi, “établir la rectitude” demande d’abord de rejeter le Petit véhicule et d’établir ensuite le Grand véhicule. Tel est le sens de la comparaison entre le Grand et le Petit véhicule.

§         Comparaison entre le provisoire et le véritable

Il existe ensuite la “comparaison entre le provisoire et le véritable”. Le provisoire désigne les moyens salvifiques, alors que le véritable désigne l’enseignement véritable. On peut effectuer une distinction au sein des cinq mille, voire sept mille sutras, en les séparant en expédients salvifiques et vérité. Les moyens furent enseignés pendant plus de quarante ans, dans le Sutra de l’Ornementation fleurie, les sutras Agama, les sutras aux doctrine diverses et les sutras de la Sagesse. Or, dans le Sutra du Lotus, le vénéré Shakya affirma clairement : “rejetez honnêtement les moyens. Je vais uniquement enseigner la voie sans supérieur”, montrant ainsi que le Sutra du Lotus est bien l’enseignement apte à véritablement guider et à rendre heureux l’ensemble des êtres.

Dès lors, les écoles de l’Invocation du Bouddha (Nenbutsu), des Formules incantatoires (Shingon), des Commandements (Ritsu), de la Méditation (Zen), toutes fondées sur ces enseignements provisoires du Grand véhicule ignorent le bon Dharma. Elles sont donc hétérodoxes, dans la mesure où elles s’opposent ainsi aux significations et aux valeurs de ce bon Dharma. Là, réside la signification d’“établissement de la Rectitude” au sein de la comparaison entre le provisoire et le véritable, dans la mesure où elle permet de réfuter cette hétérodoxie et de montrer la rectitude.

§         Comparaison entre l’originel et l’éphémère

Il y a ensuite la “comparaison entre l’originel et l’éphémère”. Du point de vue doctrinal, la rectitude étant fondée sur le grand Dharma de la doctrine originelle, les pensées attachées aux sutra antérieurs et à la doctrine éphémère, sont toutes des dharma erronés. L’école du Tendai se fonde sur la doctrine éphémère du Sutra du Lotus. Bien sûr, elle a développé un enseignement bouddhique correct, fondé sur le Sutra du Lotus. Toutefois, la signification principale de cet enseignement n’est développée que jusqu’à la comparaison entre le provisoire et le véritable. Il n’établit par conséquent pas la distinction formelle entre la doctrine originelle et la doctrine éphémère. C’est par ailleurs naturel, du fait qu’il s’agit des dogmes de Zhiyi et de Saichô qui reçurent la transmission de la doctrine éphémère. Or, le temps a passé et s’attacher à la doctrine éphémère, destinée à guider les êtres de la période de la Semblance du Dharma, est à présent une hérésie. Dans la période de la Fin du Dharma, établir la distinction entre l’enseignement de la doctrine originelle du Sutra du Lotus et ceux des sutras antérieurs et la doctrine éphémère, correspond à “la rectitude” au sein de l’action d’“établir la rectitude”.

§         Comparaison entre l’ensemencement et la récolte

Enfin, nous avons la “comparaison entre l’ensemencement et la récolte”. Seul l’enseignement de la doctrine originelle du Sutra du Lotus de l’ensemencement représente l’essence de la doctrine originelle. Les autres écoles Nichiren, errant dans la confusion entre l’ensemencement et la récolte, parlent aussi d’“établir la rectitude”. Or, il ne s’agit pas là du véritable “Risshô”.

En effet, seuls le Honzon de l’ensemencement et les trois grands Dharma ésotériques en découlant, représentent “la rectitude” au sein de l’action d’“établir la rectitude”. Ils sont le grand Dharma révélé du point de vue de l’enseignement et de la propagation du bouddhisme de l’ensemencement destiné à l’éternité de la Fin du Dharma. L’“établissement de la rectitude”, après avoir fait la comparaison entre l’ensemencement et la récolte, est le grand Mandala du Dharma sublime des trois grands Dharma ésotériques, c’est-à-dire le Honzon du Kaidan de la doctrine originelle. Cette signification imprègne profondément le Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude de Nichiren Daishônin. Toutefois, en fonction de sa méthodologie de l’enseignement, adoptée au long de sa vie, ce n’est que progressivement, à partir des années Bun’ei[1], Kenji[2] et Kôan[3], que Nichiren Daishônin matérialisa concrètement le Honzon.

L’“établissement de la rectitude” (Risshô) est donc les trois grands Dharma ésotériques. Quant à la “rectitude” (Shô), elle même, premièrement, c’est la “sublimité” (Myô). La “sublimité” est la “rectitude”, la “rectitude” est telle quelle la “sublimité”. Dès lors, sans la “sublimité”, il ne peut y avoir de véritable “rectitude”. Aussi, si l’on considère “Myô” du point de vue de l’éveil du Bouddha originel, la “sublimité” est alors les cinq idéogrammes de Myôhôrengekyô.

Nichiren Daishônin évoque la substance de Myôhôrengekyô dans le Traité sur le Honzon. Il indique en effet l’essentiel de la transmission fondamentale du Sutra du Lotus destiné à sauver l’éternité de la Fin du Dharma :

“L’Eveillé n’effectua pas la transmission des cinq idéogrammes de Nam Myôhôrengekyô, cœur de la doctrine originelle à Manjusri, non plus qu’à Roi des remèdes. A plus forte raison, ne le fit-il à ceux qui leur étaient inférieurs. Il invita seulement les bodhisattva jaillis de la terre de mille mondes et leur fit la transmission, après avoir prêché huit chapitres. L’aspect de ce Honzon montre le maître fondamental faisant demeurer le stupa précieux au-dessus du monde de l’endurance. Le Bouddha Shakyamuni et le Bouddha Nombreux-trésors, assis de chaque côté de Myôhôrengekyô, à l’intérieur du stupa…”.

Prêtons plus particulièrement attention à l’expression “l’aspect de ce Honzon”.

En fait, Myôhôrengekyô est le Honzon de la doctrine originelle transmis en tant que substance fondamentale du Sutra du Lotus aux bodhisattva jaillis de terre. Dès lors, “établir la rectitude” correspond à établir les trois grands Dharma ésotériques. C’est en premier lieu établir “le Honzon de la doctrine originelle”. Etablir de manière orthodoxe le Honzon de la doctrine originelle correspond à la “rectitude” de l’expression “établir la rectitude”.

Par ailleurs, le but d’avoir révélé ce Honzon réside dans le fait de faire pratiquer l’ascèse correcte à tous les êtres. Aussi, nouer le lien avec le Honzon, objet correct, a pour effet de rendre la foi correcte. La foi devenue correcte, alors la “pratique” devient correcte. S’adonner à une “pratique” erronée est redoutable. Sans s’en rendre compte, on tombe dans le malheur et, dans le futur, en enfer.

Autrement dit, établir la “pratique correcte”, c’est avoir foi dans le Honzon de la doctrine originelle et réciter Nam Myôhôrengekyô. C’est ce qui correspond à “établir la rectitude” au niveau de la “pratique”. Tel est le “Daimoku de la doctrine originelle”.

Par ailleurs l’idéogramme “shô” (rectitude) se dessine en écrivant “s’arrête à un”[4]. Ce “un” n’est pas trois, ni cinq, ni sept, ni neuf. Il s’agit en fait de la substance de l’unicité de la Personne et du Dharma, véritable aspect du passé infini, transcendant les trois véhicules[5], les cinq véhicules[6], les sept expédients[7] et les neuf mondes de dharma[8]. Il existe une importante parole d’or à ce sujet dans une Réponse à Messire Nanjô :

“Le Dharma ésotérique de la plus grande importance fut transmis sur le mont sacré des aigles”.

Le lieu où réside Nichiren Daishônin, apparu dans la période de la Fin du Dharma et détenteur de ce Gohonzon, le lieu où se trouve le Honzon de la doctrine originelle, qu’il révéla en teintant l’encre de son moi profond, est le lieu où s’arrête la substance du Dharma sublime.

“S’arrête” signifie demeurer, exister en ce lieu. Aussi, s’arrêter et demeurer, désignant le lieu où demeure le Honzon, cette expression se rapporte au “Kaidan de la doctrine originelle”.

Vous avez fait récemment, Mesdames et Messieurs, une noble offrande, qui a permis de réaliser ce magnifique Hôandô. Le Dai Gohonzon du Kaidan de la doctrine originelle étant enchâssé dans le Hôandô, ce bâtiment est dès lors devenu le Kaidan de la doctrine originelle. Si l’on regarde les orientations fondamentales de Nichiren Daishônin au sujet du Kaidan, écrites dans le Traité sur le Dharma propagé au long de ma vie ou le Traité sur les trois grands Dharma ésotériques :

“Lorsque le souverain du pays établira ce Dharma, il faudra alors construire le Kaidan du temple de la doctrine originelle au mont Fuji”.

On comprend alors que le Kaidan qu’évoque Nichiren Daishônin est le Kaidan de l’époque de la réalisation de la vaste propagation. C’est donc le Kaidan exprimant la loi phénoménale des préceptes, établie par les œuvres et vertus des êtres du Japon et du monde entier, qui reçoivent et gardent le Dharma sublime. Là encore, il y a une correspondance avec l’“établissement de la rectitude”. C’est pourquoi, “établir la rectitude”, c’est le Honzon, le Daimoku et le Kaidan, autrement dit les trois grands Dharma ésotériques, propagés dans l’éternité de la Fin du Dharma.

Structure du Traité

Je vais à présent aborder la structure du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Un visiteur arrive et se lamente auprès de son hôte, au sujet des catastrophes et des souffrances se manifestant dans le monde. L’hôte répond à ces propos. L’échange de questions et de réponses entre le visiteur et l’hôte se poursuit à travers neuf échanges. Au sein des dernières paroles de l’hôte, prononcées au cours du neuvième échange, le visiteur s’ouvre enfin à l’enseignement correct et abandonne les illusions et mensonges qu’il berçait jusqu’alors. La dixième prise de parole est celle du Visiteur qui a compris et exprime de lui-même sa détermination et son vœu vis-à-vis du bon Dharma. Le Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude est donc constitué de neuf questions et réponses et d’une dixième prise de parole par le visiteur exprimant sa compréhension et son vœu.

Aujourd’hui, je traiterai dans les grandes lignes des deux premiers échanges entre le visiteur et l’hôte, autrement dit, des deux premières questions du visiteur et des deux réponses de son hôte. Commençons à présent la lecture du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. L’idée principale du premier dialogue est en premier lieu de “montrer l’origine des difficultés rencontrées par la nation”.

 

  

 

 

Premier Dialogue
Origine des difficultés rencontrées par la nation


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Un visiteur est venu. Se lamentant, il dit : « Depuis ces dernières années jusqu’à ces derniers jours, bouleversements dans le ciel, morts prématurées sur la terre, famines et épidémies foisonnent sous le ciel et pullulent sur la terre ».

Les “dernières années” font allusions aux quatre années précédant la présentation du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude (1260), c’est-à-dire à partir de la première année de Kôgen (1256). Cette année-là, des vents violents, des inondations et des épidémies ravagèrent le pays.

L’année suivante, première année de l’ère Shôka (1257), un terrible séisme se produisit, souvent évoqué par Nichiren Daishônin :

“Un grand tremblement de terre se produisit à l’heure du chien[9] du troisième jour du huitième mois de la première année de Shôka, année du serpent, signe de feu cadet”.

Il semble que ce tremblement de terre fut effroyable. On pense même qu’il fut plus violent que le séisme qui ravagea les régions de Hanshin et d’Awaji il y a quelques années.

L’année suivante, deuxième année de l’ère Shôka (1258), connut des vents violents et des pluies diluviennes qui dévastèrent les ressources agricoles dans toutes les régions du Japon.

Au printemps de l’année suivante, première année de l’ère Shôgen (1259), une grande famine éclata. Auparavant, une suite de catastrophes avait empêché les céréales de parvenir à maturation. Privé de nourriture, le peuple souffrait, plongé dans cette profonde disette. Des chroniques font également état d’une épidémie découlant de cette situation.

L’année suivante, première année de Bun’nô (1260), est l’année de la présentation du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. C’est le laps de temps de cinq ans, séparant la première année de Kôgen de la première année de Bun’nô, que Nichiren Daishônin définit comme étant “ces dernières années jusqu’à ces derniers jours”.

Le douzième jour du sixième mois de cette première année de l’ère Bun’nô, le gouvernement militaire intima un ordre à tous les temples bouddhistes et shinto du Japon. Cet ordre était de “prier pour la rémission de l’épidémie”. On trouve également cet ordre dans les chroniques de l’époque. On comprend ainsi que même en cette première année de l’ère Bun’nô, une épidémie faisait rage, faisant suite à toutes les catastrophes précédentes.

Il est clair, à la lecture des chroniques de l’époque, que pendant cinq ans, de terribles catastrophes se produisirent successivement. C’est cette période que recouvre l’expression “depuis ces dernières années jusqu’à ces derniers jours”.

Nous lisons ensuite : “bouleversements dans le ciel, morts prématurées sur la terre, famines et épidémies”. Les “bouleversements dans le ciel” désignent des modifications dans le rythme des saisons, accompagnées de vents violents, de grandes sécheresses, la foudre, le froid et la chaleur. Quant aux “morts prématurées sur la terre”, cette expression désigne les catastrophes survenant sur terre, tels les tremblements de terre. Les famines (j. kikin – 飢饉), quant à elles, étaient dues au manque de nourriture. Les deux idéogrammes formant le mot “kikin” signifient tous deux “famine”. Toutefois, le mot “ki” () désigne plus particulièrement la non maturation des récoltes et le mot “kin” (), quant à lui, désigne la pénurie de légumes. Autrement dit, ces deux idéogrammes signifient qu’il n’y avait plus rien à manger. Les deux idéogrammes dont est formé le mot “épidémie”, “ekirei” (疫癘), désignent tous deux la notion de propagation d’une maladie. Il existe encore de nos jours des épidémies. Le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère), par exemple, se propage à l’échelle mondiale. Au Japon, cette maladie est pratiquement inexistante. On ne peut cependant savoir quelle maladie va à présent se propager, ni quel lieu elle va frapper. Au reste, des maladies ne pouvant être guéries par les capacités actuelles de la médecine, apparaissent parfois sous différentes formes, en tant que rétribution des mauvais actes des êtres.

Et toutes ces catastrophes “foisonnent sous le ciel et pullulent sur la terre”. Les expressions “sous le ciel” et “sur la terre” constituent une antithèse. On trouvera cette figure de rhétorique partout, du début à la fin du Traité sur la sérénité du pays.

Rien que sur ce point de stylistique, les érudits versés dans l’étude des classiques chinois[10] ne sont pas avares de louanges, disant que “le Traité sur la sérénité du pays de Nichiren, est quand même quelque chose de remarquable”. Bien entendu, ils ne comprennent pas la teneur de cet écrit, évoquée tout à l’heure, concernant les trois grands Dharma ésotériques. Cependant, même sans comprendre sa profondeur, les érudits non pratiquants, louent le Traité sur la sérénité du pays. C’est dire si le style de ce traité est merveilleux.

Vaches et chevaux tombent morts aux croisées des chemins et leurs squelettes remplissent les routes.

C’est avec le même style de rhétorique que Nichiren Daishônin décrit l’aspect malheureux des vaches et des chevaux.

Les familles ayant invité la mort, sont déjà décimées pour plus de la moitié. On peut même oser dire que pas une n’échappe à la tristesse d’avoir perdu un proche.

Tel était l’aspect du malheur frappant la nation entière.

Pour ces raisons, certains se consacrent entièrement à la phrase "le sabre affûté est" en récitant le nom du souverain de l'enseignement de la terre de l'Ouest.

A partir de ce passage, Nichiren Daishônin évoque les prières faites par les autres écoles et religions de l'époque pour repousser les catastrophes.

De nombreuses implorations et prières effectuées à cette époque sont ici citées. C'est le visiteur qui s'exprime, mais comme c'est Nichiren Daishônin qui écrit aussi ces paroles, on peut donc comprendre qu'effectivement de telles choses se passaient.

La phrase "le sabre affûté est" est extraite de la Louange du bateau de la sagesse du moine Shandao (善導 - j. Zendô), troisième Patriarche de l'Invocation du Bouddha en Chine. La citation complète est :

"Le sabre affûté détruisant l'obscurité, les effets et les causes des actes, est le nom de Mida".

Cette phrase signifie qu'en récitant Namu Amidabutsu, on peut s'affranchir des catastrophes, des mauvaises passions et de tous les crimes.

Ensuite, "le nom du souverain de l'enseignement de la terre de l'Ouest" désigne comme vous le savez le Bouddha Amitabah, souverain de l'enseignement du bouddhisme, situé dans les mille milliards de terres de la félicité ultime en direction de l'Ouest. Autrement dit, cette phrase signifie : "il y a des gens qui récitent Namu Amidabutsu".

D'autres lisent le Sutra de l'Ainsi-venant de la direction de l'Est, lui confiant leur vœu de guérison de toutes les maladies.

Le Bouddha, appelé Ainsi-venant Maître des remèdes, qui a obtenu la voie dans le monde du pur béryl, situé en direction de l'Est, avait émis douze grands vœux, alors qu'il pratiquait l'ascèse des bodhisattva afin de guérir les maladies de tous les êtres. Il est écrit, dans le Sutra du Maître des remèdes, que la foi dans le Bouddha Ainsi-venant Maître des remèdes et la récitation de ses paroles permet de guérir des maladies. Il y avait donc alors des personnes qui récitaient cette phrase du sutra.

D'autres ont foi dans la parole "la maladie se dissipera, il ne vieillira ni ne mourra" et vénèrent cette phrase sublime, vérité de la fleur du Dharma.

La phrase "la maladie se dissipera, il ne vieillira ni ne mourra" est extraite du vingt-troisième chapitre « Conduite originelle du bodhisattva Roi des remèdes » du Sutra du Lotus. Le passage entier est :

"Si quelqu'un est malade et qu'il obtient d'entendre ce sutra, sa maladie se dissipera, il ne vieillira ni ne mourra".

Le Sutra du Lotus étant le vrai sutra au sein de tout l'enseignement de l'Eveillé, Nichiren Daishônin écrit ici "vérité de la fleur du Dharma".

Toutefois, il prouve ici par l'exemple que même en récitant cette phrase extraite de ce vrai et profond Sutra du Lotus, aucune efficacité n'en résulte. Ce passage laisse donc pressentir la signification ultérieure selon laquelle même en récitant simplement et uniquement le Sutra du Lotus, si on ne coupe pas les malheurs à la racine, cette pratique reste inefficace.

D'autres encore, ayant foi en la stance : "Les sept désastres disparaîtront et les sept bénédictions apparaîtront" accomplissent le rite des cent exposés en cent lieux.

Cette stance est extraite du Sutra de la Sagesse du roi bienveillant[11], un des sutras du volumineux recueil des sutras de la sagesse. Comme vous le savez, l'Eveillé développa son enseignement au cours de cinq périodes : Ornementation fleurie (kegon), Agama (agon), doctrines diverses (hôdô), sagesse (hannya) et Lotus - Extinction (hokke-nehan). Au sein des nombreux sutras de la période de la sagesse, existe le Sutra du Roi bienveillant dans lequel, le chapitre " recevoir et garder " expose :

"Si l'on expose la perfection de la sagesse, les sept désastres disparaîtront, sept bénédictions apparaîtront. Alors, toutes les familles seront quiètes et l'empereur se réjouira”.

Si l'on a foi en cette parole et que l'on expose les sutras de la Sagesse, sept désastres se transforment tels quels en sept félicités.

Quant aux "cent exposés en cent lieux", il existe une allégorie à ce sujet. Il y avait ainsi jadis un mauvais roi nommé Ding (j. chô). Un jour, il tenta de chasser la divinité Taishaku, dans le dessein de devenir le souverain des trente-trois dieux[12]. Afin de se protéger de cette difficulté, Taishaku invita cent maîtres du Dharma. Il prépara cent lieux dans lesquels les maîtres du Dharma donnèrent cent sermons sur les sutras de la Sagesse. Grâce aux œuvres et vertus de cette entreprise, le roi Ding se retira, permettant à Taishaku de conserver sa position.

Depuis le passé, à partir de cette légende, le rite des "cent exposés en cent lieux" a été célébré comme cérémonie destinée à chasser les catastrophes. Au Japon, ce rite fut célébré pour la première fois sous le règne de l'empereur Saimei[13] Par la suite, il fut inscrit dans la liste des rites annuels de la Cour Impériale. Il est alors évident que le rite des "cent exposés en cent lieux" y fut donc considéré comme important. Cette situation est évoquée ici par Nichiren Daishônin.

Certains, fondés sur les enseignements des Formules incantatoires secrètes, versent de l'eau dans cinq jarres.

Il s'agit là d'un enseignement professé par l'école des Formules incantatoires (j. shingon). Cette école est une religion généralement versée dans l'imploration. Aussi, utilise-t-elle à titre d'objets rituels, des objets tel le "Vajra"[14] expression sous diverses formes de l'éveil du Bouddha.

Il existe en particulier "les trois (pratiques) mystiques physique, verbale et mentale", pratiques qui consistent à méditer sur le mandala du Bouddha Mahavairocana, à réciter les formules magiques du Shingon et, avec son corps, à former les mudra du Bouddha Mahavairocana. Il existe de si nombreuses formes de mudra qu'il est impossible de toutes les retenir. De toute façon, du point de vue de l'ascèse du bouddhisme, ce n'est pas particulièrement nécessaire. Le mudra du Sutra du Lotus est le mudra de la jonction des paumes. Les paumes placées devant la poitrine avec les dix doigts joints représentent, telles quelles la profonde signification de la présence mutuelle des dix mondes, cent mondes, mille ainsi, Une pensée trois mille. Il n'est donc pas nécessaire de former d'autres mudra. Nichiren Daishônin résume ces pratiques par "les enseignements des Formules incantatoires secrètes".

Quant à "l'eau des cinq jarres", il s'agit d'un rituel officié par les moines du Shingon, destiné à manifester l'efficacité de leurs prières. Ceux-ci construisent une estrade sur laquelle ils placent cinq jarres : une à chaque direction et une au milieu. Ils introduisent ensuite cinq joyaux, cinq céréales, cinq herbes médicinales et cinq sortes d'encens dans celles-ci, puis y versent de l'eau pure.

D'autres, accomplissant l'entrée en concentration par la méditation assise, contemplent la vacuité comme la lune claire.

Cette phrase désigne la pratique du Zen.

Aujourd'hui, au Japon, lorsqu'on parle du Zen, il ne s'agit pas d'une association religieuse unique, mais de trois écoles différentes : l'école Rinzai[15], l'école Sôtô[16] et l'école Ôbaku[17].

Dans ces écoles, on pratique la méditation assise (j. zazen). Cette pratique est un moyen pour parvenir au but, l'entrée en concentration, c'est-à-dire à l'unification spirituelle. C'est faire cesser les troubles de son esprit et dépasser les notions de pensées. C'est ainsi que ces écoles prétendent parvenir à la boddhéité. Cependant, il s'agit là d'une grande erreur.

Sans le Sutra du Lotus, essence des enseignements, l'être humain aura beau unifier son esprit, ce n'est pas pour autant que ses fautes, emplies de toutes les mauvaises passions, auront disparu. Il n'y a d'ailleurs là aucune logique menant à la voie du bonheur de l'état de vie du Bouddha. Pour cette raison, Nichiren Daishônin qualifie le Zen de "Démon du ciel" du fait qu’il implique l’attachement à des maîtres Zen ayant oublié la méditation correcte de l'Ainsi-venant.

En fait, en ayant foi dans le Dharma sublime, enseignement correct de l'Eveillé et en effectuant la pratique correcte, naturellement, notre esprit devient la vie du Dharma sublime, la vie de l'Eveillé. Telle est la ligne directrice du Dharma du Bouddha. Cependant, à l'époque, on se trompait sur les critères du bouddhisme et c'est pourquoi on se livrait à de telles pratiques.

Ou bien, certains écrivent les noms des sept divinités et les collent sur mille portiques.

Amoghavajra[18], moine indien des enseignements ésotériques, arriva en Chine et il traduisit le Sutra des incantations aux dieux pour faire partir la chaleur. Les sept divinités sont citées dans ce sutra.

Il dit que réciter ces incantations en offrande aux sept dieux, puis écrire leur nom et apposer ceux-ci sur le portique, empêche les mauvais démons et les êtres démoniaques de s'approcher. Ces dieux possèdent de plus la fonction de protéger les êtres humains.

Ces sept divinités sont : Mudanan, Akani, Nikani, Akana, Harani, Abira et Hadairi. Certains écrivaient leurs noms et les collaient sur mille portiques.

Certains dessinent la forme des cinq grands puissants et l'accrochent à dix mille portes.

"Dix mille portes" sont l'antithèse des "mille portiques" de la proposition précédente.

Le thème des cinq grands puissants est prêché dans le chapitre " Recevoir et garder " du Sutra de la Sagesse du roi bienveillant. Lorsque les souverains protègent les trois trésors, l'Eveillé délègue alors cinq grands puissants bodhisattva pour protéger leur pays respectif.

Il s'agit des bodhisattva Rugissement du diamant (j. Kongô ku bosatsu), Rugissement du Roi des dragons (j. Ryûô ku bosatsu), Rugissement des dix pouvoirs sans peur (j. Mui jûriki ku bosatsu), Rugissement du tonnerre (j. Raiden ku bosatsu) et Rugissement de la force incommensurable (j. muryôriki ku bosatsu).

Du fait que ces bodhisattva sont envoyés pour accorder leur protection, certains peignaient alors la forme de ces cinq grands puissants, les placardant sur la porte des maisons.

Ou, par vénération des dieux du ciel et des divinités terrestres, ils organisent en leur faveur des rites aux quatre coins en déterminant quatre limites.

Ces dieux et divinités sont les forces résidant dans le ciel et sur la terre. "Les rites aux quatre coins et aux quatre limites" sont des prières de la religion Shinto, destinées à chasser les épidémies. On effectue alors la liaison des mondes. Ce rituel consiste à construire des estrades aux quatre angles de la ville, autour du palais impérial, à Kyoto, par exemple, et l'on fait des prières aux dieux. Une ligne est tracée entre ces quatre coins. Les zones délimitées par les lignes entre les quatre coins constituent quatre limites. On prie pour qu'aucune épidémie ne passe la ligne de délimitation. C'est ainsi qu'ils organisaient des rites.

Prenant en pitié le peuple et la paysannerie, le souverain s'adonne à la gestion bienveillante du pays.

Au cours de l'histoire, il y eut des périodes où une véritable gestion bienveillante  fut menée. Mais ici, ce n'est pas le cas. Il s'agit d'une gestion bienveillante plus commune : voyant la souffrance du peuple et des paysans, le souverain ou ses ministres réfléchissaient de toutes leurs forces au bonheur de la nation et faisaient des efforts pour tenter de trouver des solutions politiques[19].

Pourtant, ils ne font tous que se briser le foie et l'estomac, alors que la famine et la maladie sont de plus en plus pressantes. Les mendiants montrent un spectacle insupportable et les cadavres heurtent la vue.

"Le foie et l'estomac" sont des organes importants. (Au Japon) l'expression "se briser le foie et l'estomac" signifie faire les choses "véritablement avec sérieux". Se briser un organe vital désigne des efforts extraordinaires, agir avec diligence. Alors que tous ces gens faisaient de grands efforts, la famine et la maladie se faisaient de plus en plus tragiques, augmentant le nombre des mendiants et des cadavres.

Les corps tombés sans vie ressemblent à des tours de guet et les cadavres, allongés côte à côte, à des ponts.

Les tours de guet étaient des promontoires construits au sommet d'endroits légèrement élevés, desquels on observait les quatre directions, ce qui permettait de voir beaucoup de choses. Les cadavres étaient si nombreux, qu'on les empilait, les faisant ressembler à ces promontoires. Cette comparaison fait comprendre l'importance du nombre de morts. Les "cadavres, allongés côte à côte, ressemblant à des ponts" expriment également le grand nombre de morts.

Pourtant, visiblement, les deux astres de lumière sont sur leur disque superbe et les cinq planètes poursuivent leur course.

L'idéogramme traduit par astres signifie généralement "séparé". Mais il désigne aussi quelque chose de rond et d'extrêmement lumineux. Il s'agit donc ici du soleil et de la lune. "Sont sur leur disque superbe" signifie qu'ils éclairent parfaitement la terre, chacun à leur manière.

Ensuite, l'idéogramme utilisé pour le mot planète, signifie "fil horizontal". Les vêtements que vous portez sont confectionnés à l'aide de fils horizontaux et de fils verticaux. On ne peut obtenir un tissu uniquement avec des fils horizontaux ou des fils verticaux. C'est lorsque l'on a entrelacé des fils verticaux et des fils horizontaux que, véritablement, est obtenu un tissu. Incidemment, par rapport au fil horizontal qui signifie également "planète", le fil vertical, lui, signifie également "sutra".

Les "cinq fils horizontaux" ou "planètes" sont les cinq satellites solaires se déplaçant latéralement sur leur orbite : Mars, Mercure, Jupiter, Venus et Saturne. Malgré tout, ces planètes poursuivaient imperturbablement leur course.

Les trois Trésors sont présents et le centième règne n'est pas encore arrivé à son terme. Pourquoi, dès lors, le monde a-t-il déjà amorcé son déclin et les lois sont-elles tombées en désuétude?

Les "trois Trésors" sont le "Trésor du Bouddha", le "Trésor du Dharma" et le "Trésor du Moine", objets de vénération en bouddhisme.

Ensuite, "le centième règne n'est pas encore arrivé à son terme" se rapporte à la légende selon laquelle, au cours du règne du cinquante et unième empereur, Heizei (806 à 809), il y aurait eu un oracle du grand bodhisattva Hachiman[20]. Dans cet oracle, Hachiman promit de protéger cent rois. Son vœu était que jusqu'au centième règne, la puissance du souverain ne décline pas et, pour cela, il s'engageait à le protéger.

Au moment de la présentation du Traité sur la Sérénité du pays par l'établissement de la rectitude, l'empereur était, comme je l'ai dit précédemment, Kameyama, quatre-vingt dixième empereur du Japon. Autrement dit, on n'était pas encore parvenu au centième. Aussi, on pourrait dire qu'il était normal que la protection de la divinité s'opère. Or, le sens de l'oracle était que le grand bodhisattva Hachiman  s'était engagé à protéger non seulement cent règnes, mais tous les souverains du Japon pour l'éternité.

Avec une aussi belle légende et malgré la protection des temples Shinto, comment se faisait-il que le monde se soit tant dégradé ?

Quant aux "lois", il ne s'agit pas uniquement des lois du bouddhisme. Il est plus juste de considérer cette proposition comme désignant le fait que toutes les choses en ce monde montraient l'aspect de la confusion.

Par quelle malchance cela est-il arrivé ? De quelles erreurs cela relève-t-il ?

Quelle mauvaise fortune est-elle la cause de tout ce qui est arrivé ? Quelles erreurs ont-elles été commises ? Telle est la première question du visiteur.

A partir de là, commence la première réponse de l'hôte.

L'hôte dit : Seul, je m'inquiétais de ces choses et ma poitrine était serrée par l'indignation et la tristesse. A présent qu'un visiteur est arrivé, ensemble pleurons et parlons inlassablement.

L'hôte répond. En fait, moi aussi je m'afflige de ces choses et, voyant la situation, je suis en colère au fond de moi et j'en souffre. Les caractères utilisés dépeignent une tristesse et une colère indescriptible par les mots.

Maintenant que vous êtes là, nous allons nous lamenter ensemble et en parler en prenant notre temps.

Ceux qui ont quitté la demeure et sont entrés sur la voie, aspirent à l'Eveil en s'appuyant sur le Dharma. Or, à présent, les techniques divines restent sans effets et il n'y a pas de signe de la puissance du Bouddha. Observant la réalité du monde actuel avec minutie, leur ignorance les fait douter des vies futures. Alors, tournés vers la voûte céleste, ils avalent leur rancœur, prostrés vers le sol, ils affermissent leur peur.

On devient moine pour étudier le Dharma du Bouddha, ouvrir l'éveil et obtenir la personnalité la plus noble, apte à se guider soi-même et à guider autrui. Or, étant donné l'état du monde, où l'on réalise que les dieux sont devenus impuissants et que l'influence du Bouddha lui-même a disparu, on  se demande, pris de doute, alors que l'on est soi-même entré sur la voie du Bouddha, ce que l’on va devenir, ce qui se passer dans les vies futures, autrement dit après la mort ?

Il y a peut-être des gens parmi vous susceptibles de penser, qu'après la mort, il n'y a rien. Toutefois, du point de vue de la logique du bouddhisme, la vie se poursuit après la mort, en fonction du karma de la "forme", autrement dit la vie physique et de celui du "cœur", autrement dit la vie spirituelle. Dès lors, le bien ou le mal de la Une pensée au moment suprême, détermine véritablement le futur de cette vie. En effet, la somme totale du bien et du mal faits au cours de notre vie, constitue notre Une pensée au moment de l'instant suprême. Et c'est par cette Une pensée à l'instant suprême que notre avenir s'ouvre. Aussi, les personnes évoquées par le texte conçoivent du doute sur leur vie future, en raison des souffrances qu'elles endurent au cours de la vie présente.

"Tournés vers la voûte céleste, ils avalent leur rancœur" : ils regardaient le ciel et gardaient pour eux le ressentiment conçu vis-à-vis de ces malchances.

"Prostrés vers le sol, ils affermissent leur peur" : le sol ici désigne les quatre directions, nord, sud, est, ouest et la terre en général. Ils baissaient la tête vers le sol et tentaient de réfléchir profondément.

La phrase suivante constitue la conclusion de la réponse de l'hôte à la première question du visiteur. Celle-ci est importante, dans la mesure où elle constitue l'argument constant du Traité sur la sérénité du pays.

Ouvrant modestement les phrases du sutra, les observant intensément à travers un tube étroit…

Un proverbe dit : "regarder le ciel à travers le creux d'un roseau". A regarder le ciel à travers un tube étroit, on ne voit pas grand chose. Il s'agit là, en fait, des paroles de modestie de l'hôte. Ma compréhension est extrêmement étroite. Toutefois, en la dirigeant vers diverses phrases de sutra que je lis, je vois que :

En ce monde, tous tournent le dos à ce qui est juste, les hommes rejoignent chacun le mal.

Nichiren Daishônin donne ici la première cause des grandes catastrophes. La loi de causalité représente le principe premier de toutes les lois bouddhiques, comme des lois séculières. Toutes les existences en ce monde relèvent de la loi de causalité selon laquelle une bonne cause provoque un bon effet et une mauvaise cause entraîne un mauvais effet. C'est par le bouddhisme que la véritable voie de la causalité fut ouverte. Aussi, "qu'en ce monde, tous tournent le dos à ce qui est juste, les hommes rejoignent chacun le mal" éclairé par le miroir du bouddhisme, constitue la cause des catastrophes et des malheurs.

Pour cette raison, les divinités bienfaisantes ont abandonné le pays et l'ont quitté, les saints se sont retirés pour ne plus revenir.

Alors que la phrase suivante expose la cause, celle-ci dévoile l'effet. En réponse à la cause de se détourner du juste pour prendre refuge dans le mal, l'effet est que les divinités bienfaisantes ont rejeté le pays et sont parties. Les Saints, quant à eux, ont quitté le lieu où ils vivaient et ne reviendront plus. Autrement dit, les merveilleux dieux et saints qui protégeaient la nation ont tous disparu.

A leur place, sont venus démons et esprits maléfiques.

Là encore, on trouve la loi de causalité. La cause, c'est-à-dire le départ des dieux et des saints a provoqué l'effet de l'arrivée des démons et des esprits maléfiques.

Alors les désastres se produisent, les calamités surviennent.

A la cause, l'arrivée des démons et des esprits maléfiques, répond l'effet de l'apparition des désastres et des calamités, œuvres des démons et des esprits maléfiques.

Dans cette courte phrase, nous trouvons ainsi trois suites de causes et d'effets. Enfin :

Je ne peux rester à me taire, je ne peux réfréner mon effroi.

Il faut réfléchir profondément, sérieusement à ces choses graves.

 

 

 

 

Deuxième Dialogue
Preuve de l’apparition des désastres et des calamités

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Vis-à-vis de ces paroles de l'hôte, le visiteur pose sa deuxième question. A partir de là, commence la partie dans laquelle la preuve par les sutras est apportée quant à l'apparition de désastres et de calamités en raison de l'opposition à la rectitude.

Le visiteur dit : Ces calamités dans le ciel et ces désastres dans le pays, je ne suis pas le seul à m'en lamenter ; le peuple entier s'en désole. Entré dans cette chambre aux senteurs d'orchidée, j'entends pour la première fois vos paroles odorantes. Dans quel sutra lit-on que les dieux et les saints sont partis et se sont retirés, que pour cela les calamités et les désastres apparaissent ? Faites-moi entendre ces preuves !

Entendant la réponse de l'hôte : "En ce monde, tous tournent le dos à ce qui est juste, les hommes rejoignent chacun le mal. Pour cette raison, les divinités bienfaisantes ont abandonné le pays et l'ont quitté, les saints se sont retirés pour ne plus revenir", le visiteur s'étonne. Alors, formulant en préambule qu'il n'est pas le seul à se lamenter des calamités célestes et des désastres accablant le pays entier, le peuple entier en est contrit, il pose ensuite sa deuxième question.

"Entré dans cette chambre aux senteurs d'orchidée" : La "chambre aux senteurs d'orchidée" est une expression extraite des Analectes de Confucius, dans lesquels on lit :

"Rencontrer un homme bon est comme pénétrer dans une pièce emplie d'orchidées".

Il s'agit d'une pièce pure exhalant le parfum de l'orchidée. Cette métaphore élogieuse signifie : "vous, chez qui je suis entré, êtes un homme remarquable".

Je suis venu chez vous et, pour la première fois, j'entends vos paroles odorantes. Cependant, dans quel sutra peut-on lire que les divinités et les saints ayant quitté, abandonné le pays, les calamités et les désastres apparaissent les uns après les autres. Je voudrais entendre la preuve de ce que vous avancez. Telle est ma question.

Alors, l'hôte indique la preuve des sutras. C'est sa réponse au deuxième dialogue.

L'hôte dit : Ces phrases sont nombreuses à profusion et ces preuves sont largement diffusées.

Les mots "phrases" et "preuves" constituent, là encore, le style d'antithèse. Les phrases répondant à votre question sont extrêmement nombreuses et les preuves existent largement.

Les "phrases" et les "preuves", autrement dit l'attestation scripturaire sont, comme vous le savez, l'un des critères déterminant des jugements de valeurs au sein du bouddhisme. L'attestation scripturaire fait en effet partie des "trois preuves" : la logique, l'attestation scripturaire et la preuve manifeste. L'attestation scripturaire est un élément important permettant de démontrer la rectitude des principes du bouddhisme. Concernant la question du visiteur, l'hôte répond que l'attestation scripturaire existe à profusion.

Nichiren Daishônin cite ensuite les phrases de quatre sutra : Sutra de la Radiance d'or, Sutra du Grand rassemblement, Sutra du Roi bienveillant et Sutra du Maître des remèdes. Il donne sept citations, le Sutra du Roi bienveillant et le Sutra du Grand rassemblement étant plusieurs fois cités.

La première citation est celle du chapitre "Protection de la nation par les quatre rois célestes" du Sutra de la Radiance d'or. Au moment où le vénéré Shakya parle de la protection du pays, les quatre rois célestes[21], entendant le prêche de l'Eveillé, lui exposent le fruit de leur réflexion. C'est cette partie que Nichiren Daishônin cite. Bien qu'en apparence, il s'agisse des paroles des quatre rois célestes, leur réflexion étant fondée sur l'intention des propres paroles de l'Eveillé sur la protection du pays, on peut dès lors considérer que leurs paroles sont telles quelles celles de Shakyamuni.

Dans le Sutra de la Radiance d'or, il est dit : "Bien que ce sutra existe en ce lieu, il n'a jamais été propagé. Concevant un sentiment de rejet et d'éloignement, il ne souhaite pas l'entendre, ni faire l'offrande, ni le respecter, ni en faire l'éloge. Même lorsqu'il voit les quatre catégories d'êtres, ceux qui gardent ce sutra, il ne les respecte pas, eux non plus, ni ne leur fait l'offrande.

Dans ce passage, le mot souverain n'apparaît pas. Toutefois, il signifie que le souverain (il) dédaigne "ce sutra", autrement dit le précieux enseignement de l'Eveillé. Le fait qu'il le méprise est lié aux graves calamités et désastres.

Le souverain du pays rejette et se détourne de l'enseignement de l'Eveillé. Il n'a donc pas le souci de l'écouter, ni de lui faire l'offrande, ni de le respecter, ni de le louer.

"Même lorsqu'il voit les quatre catégories d'êtres, ceux qui gardent ce sutra, il ne les respecte pas, eux non plus, ni ne leur fait l'offrande" : les quatre catégories d'êtres sont les moines, les nones, les pieux laïcs et les pieuses laïques, qui gardent l'enseignement de l'Eveillé. Même en les voyant, il ne vient pas à l'esprit du souverain le sentiment de les louer.

Dans ces conditions :

Finalement, nous, nos féaux et les infinités de divinités célestes, n'obtenons pas d'entendre ce profond Dharma sublime. Il nous a privés de goûter la saveur du nectar et le courant du bon Dharma s'est tari.

"Nous" désigne les quatre grands roi célestes Dai Jikokuten'nô, Dai Bishamonten'nô, Dai Komokuten'nô et Dai Zôchôten'nô, que Nichiren Daishônin inscrivit sur le Gohonzon. Leur féaux et les infinités de divinités célestes désignent toutes les divinités bienfaisantes.

Finalement, toutes ces Shoten Zenjin ne peuvent plus entendre le Dharma sublime de l'enseignement de l'Eveillé. Elles ne peuvent plus non plus goûter la saveur du nectar, c'est-à-dire le goût merveilleux et sans égal du Dharma. Aussi, le courant des œuvres et vertus du bon Dharma s'est éteint. Le résultat est :

Notre majesté et notre puissance ont disparu.

La vie du souverain du pays que les quatre rois célestes sont censés protéger s'affaiblissant, la puissance des divinités diminue.

Alors, les mauvaises directions augmentent, les hommes et les cieux disparaissent.

Les mauvaises directions sont l'enfer, les esprits affamés, les animaux. Le nombre d'êtres plongés dans ces états de vie malheureux est en augmentation. En ce qui concerne "les hommes", Nichiren Daishônin écrit par ailleurs :

"Ce qui est paisible est l'homme".

Les êtres humains vivent dans la quiétude. Aussi, comparés aux quatre mauvaises directions : enfer, esprits affamés, animaux et asura, faisant elles-mêmes partie des six voies, les hommes sont supérieurs, du point de vue de la causalité. Quant aux "cieux", situés au-dessus des hommes, ils désignent un état de vie de joie et de félicité, dû à la concentration pure.

Or, l'affaiblissement des divinités protectrices entraîne la disparition de ces œuvres et vertus.

Ils tombent dans la rivière des vies et des morts, ils se détournent du chemin menant à l'Extinction.

Ils vivent en pure perte et meurent inutilement, sans véritable but. Ils sont tombés dans l'illusion et l'avilissement, d'où on ne peut les sauver. Ils se détournent avec futilité de la voie menant au bonheur de l'éveil correct.

Vénéré du monde ! Nous, les quatre rois, tous nos féaux, ainsi que les yaksa[22], voyant de telles choses allons abandonner ce pays, n'ayant plus le cœur à le protéger. Nous ne serons pas les seuls à rejeter ce roi. Immanquablement, l'infinité des divinités bienfaisantes des multiples cieux, défendeurs du territoire également, l'abandonneront et partiront. Quand elles l'auront abandonné et se seront éloignées.

Nous, les quatre rois célestes, ainsi que le nombre infini des divinités bienfaisantes, allons abandonner et quitter ce pays dont le souverain ne croit pas en l'enseignement de l'Eveillé. Nous n'avons plus le cœur à le soutenir ni à le protéger. Que va-t-il alors se passer ? Ce sont les diverses catastrophes annoncées successivement.

Ce pays verra se produire diverses calamités et malheurs, le rang du roi sera perdu.

Le rang de souverain, rang au niveau national, sera détruit. Ensuite :

L'intégralité des hommes perdra son bon cœur.

Les hommes, n'ayant plus un bon cœur, ne songeront qu'à faire le mal.

Il n'y aura que privation de liberté, meurtres, et luttes dues à la colère.

Les gens seront attrapés et attachés dans des prisons, il y aura des assassinats et des déchaînements de violence.

On se disputera et se flattera mutuellement.

Les disputes, c'est détester le bien fait par les autres et les blesser en les critiquant. Flatter, c'est courtiser les hommes de pouvoir En raison de tels actes immoraux, de nombreux innocents seront punis. En effet,

L'injustice atteindra les innocents.

Ce phénomène est très visible, même dans le monde actuel. Même dans un pays de droit tel que le Japon, ce genre de chose se produit ponctuellement.

Par ailleurs, ce phénomène s'est produit récemment en Irak. Vous lisez tous les journaux et devez donc le savoir, lorsqu'un gouvernement se trompe, de telles choses arrivent.

Les épidémies se répandront.

Il s'agit là de catastrophes humaines. Ensuite,

Des comètes paraîtront encore et encore, deux soleils apparaîtront l'un à côté de l'autre, des éclipses se produiront à des fréquences anormales, des arcs-en-ciel noirs et blancs, annonciateurs de mauvaise augure seront visibles, les étoiles fileront.

Tous ces phénomènes concernent les bouleversements dans le ciel. Ensuite,

La terre tremblera, des voix se feront entendre de l'intérieur des puits.

Il s'agit là des morts prématurées sur la terre.

Des pluies violentes et de mauvais vents, indépendants des saisons se produiront.

Là encore, ces phénomènes concernent les bouleversements dans le ciel. Alors,

Il y aura de constantes famines, les grains et les fruits n'arriveront pas à maturité.

Ces phénomènes se rapportent aux morts prématurées sur la terre.

Dans de nombreuses autres contrées, des bandits en colère envahiront le pays. Alors, le peuple recevra toutes  sortes de souffrances et d'afflictions. Nulle place, il ne sera en sécurité". Fin de citation.

Des bandits venus de l'extérieur du pays attaqueront et envahiront celui-ci.

Comme je l'ai dit en préambule, le Traité sur la sérénité du pays par l'établissement de la rectitude traite des deux désastres que sont la guerre civile et l'invasion du pays par une nation étrangère. Nichiren Daishônin réitérera clairement cette prophétie dans la réponse à la neuvième question.

Il évoque là la difficulté du peuple dont la vie quotidienne est emplie de souffrance, ne trouvant pas de lieu où se réjouir.

Ensuite, Nichiren Daishônin donne la deuxième attestation scripturaire en citant le Sutra du Grand rassemblement.

Dans le Sutra du Grand rassemblement, il est dit : "Lorsque le Dharma de l'Eveillé sera obscurci et disparaîtra, la barbe, les cheveux et les ongles s'allongeront. Les lois seront perdues.

Ce passage est extrait d'une stance du chapitre "Fond de la corbeille des dharma", dixième chapitre du Sutra du Grand rassemblement.

"Lorsque le Dharma de l'Eveillé sera obscurci et disparaîtra" : lorsque l'esprit de l'enseignement du Bouddha sera devenu obsolète, alors, les moines laisseront pousser leur barbe, leurs cheveux et leurs ongles.

Les moines, censés protéger le Dharma du Bouddha, à l'origine doivent raser leur barbe, se couper les cheveux et les ongles. Or, dans cette période, tous se laisseront aller.

De nos jours, parmi les moines des autres écoles, certains se laissent pousser les cheveux. Il s'agit là, en fait, d'une allure qui n'est pas celle des moines habituels.

Ce phénomène signifie que les enseignements, le Dharma correct du Bouddha, tous seront oubliés.

A ce moment, d'immenses voix se feront entendre dans le ciel, la terre tremblera et tout se déplacera comme sur un cercle d'eau.

A partir de "à ce moment", le sutra décrit les catastrophes inhérentes à l'obscurcissement et à la perte du Dharma de l'Eveillé.

Les remparts des villes se briseront et s'écrouleront. Toutes les maisons et leurs toits seront détruits. Les racines, les branches, les feuilles, les fleurs et les fruits des arbres des bois perdront leurs propriétés médicinales.

Ce passage décrit diverses catastrophes dans le ciel et sur la terre. Lorsqu'on regarde les choses sous l'angle de leur aspect global à travers les trois phases, on voit qu'en ce monde de nombreuses villes autrefois magnifiques, de puissants pays, habités par de nombreuses populations, ont aujourd'hui entièrement disparu. En fonction des causalités d'une époque ou d'une autre, la population ou la nation elle-même se sont progressivement anéanties.

Aussi, je pense qu'il convient de lire cette phrase dans cet esprit, en considérant qu'il s'agit des paroles du Bouddha possédant une vision éclairée des trois phases.

Selon ce processus, ce sont d'abord les catastrophes qui se produisent, entraînant la destruction du pays.

Hormis uniquement les cieux de l'existence pure, l'ensemble des régions du monde des désirs sera privée des sept saveurs et des trois pouvoirs essentiels, sans qu'il n'en reste rien. A ce moment, tous les bons discours, guidant vers l'émancipation, disparaîtront.

 

Il existe différents cieux au sein des trois mondes : monde des désirs, monde des formes et monde de la non-forme. Les "cieux de l'existence pure" se situent au sommet des dix-huit cieux du monde des formes. Il s'agit de cieux d'un état de vie remarquable. Leurs noms sont : le ciel sans embarras, le ciel sans souffrance, le ciel de l'apparition du bien, le ciel de la vision du bien et le ciel ultime de la forme.

Les cieux de l'existence pure se situent au dessus de nuages, en un lieu élevé. Etant éloigné de la terre, les catastrophes s’y produisant ne l'atteignent pas. Par contre, les cieux situés plus bas, sont de diverses façons atteints par les calamités. En particulier, le monde des désirs, dans lequel est situé notre monde, connaît de terribles catastrophes. Là, les sept saveurs : sucré, pimenté, acide, amer, saumâtre, astringent et léger disparaissent, de même que les trois pouvoirs essentiels : pouvoir essentiel de la terre, pouvoir essentiel des êtres et pouvoir essentiel du bon Dharma.

Enfin "tous les bons discours guidant vers l'émancipation", ces bons et justes discours disparaîtront.

A présent également, les bons discours au sens premier du terme, sont peu nombreux. Si l'on va dans une grande librairie, on se demande comment il peut y avoir autant de livres, à les voir tous alignés. Il y a beaucoup de bonnes choses d'écrites. Cependant, en définitive, du point de vue du bouddhisme, elles sont toutes d'une dimension inférieure.

Pratiquement aucun livre n'expose quelque chose d'une teneur allant dans le sens de la profondeur du bien et du mal tel que le traite le bouddhisme. Certains évoquent le bien et le mal. Toutefois évoquant ce problème avec une dimension peu profonde, je ressens qu'ils ne vont finalement pas jusqu'au bout.

En ce sens, les bons discours disparaissent effectivement.

Les fleurs et les fruits poussant sur terre seront moins nombreux et ils perdront leur parfum. Les puits, les sources et les bassins s'assècheront. Les terres deviendront saumâtres et sèches. Elles s'ouvriront en se fendant, se déformant pour devenir collines et  crevasses.

Il s'agit là encore d'un des aspects des calamités. Il existe de nombreux exemples, comme je le disais à l'instant, de royaumes jadis florissants où les peuples menaient une vie quotidienne agréable, devenus à présent des déserts.

Si l'on réfléchit au processus amenant à ces états de fait, on voit qu'au début, "les puits, les sources et les bassins s'assèchent, les terres deviennent saumâtres et sèches. Elles s'ouvrent en se fendant, se déformant pour devenir collines et crevasses". Autrement dit, le sol se dessèche complètement et se déforme, provoquant l'apparition de collines et de vallées.

Les montagnes brûleront et le dragon du ciel ne fera plus tomber la pluie.

Il s'agit là des éruptions volcaniques. On parle souvent au Japon de l'éruption du mont Fuji ou du grand tremblement de terre devant se produire dans la région de l'est. Or, rien ne se passe. C'est grâce aux œuvres et vertus du Dai Gohonzon du Kaidan. C'est du moins ce dont je suis convaincu. Il y a des séismes ailleurs. Mais ici, on ne craint rien. Certains disent que c'est pour l'année prochaine, ou dans deux ans. En tout cas, du moins pour l'instant, rien ne survient.

On peut considérer ici que l'existence du Dharma du Bouddha crée de grandes œuvres et vertus.

Les semis se flétriront et mourront. Tout ce qui naît mourra, et l'herbe cessera de pousser. Il pleuvra de la terre jusqu'à ce que tout soit plongé dans l'obscurité, le soleil et la lune ne produiront plus leur lumière. Les quatre directions seront affectées par la sécheresse et, souvent, de sinistres présages se manifesteront. Les dix mauvaises actions, en particulier la cupidité, la colère et la sottise décupleront, les êtres cesseront de considérer leurs parents, à l'instar des cervidés.

Jusqu'à "l'apparition de sinistres présages", le sutra expose toutes les calamités et désastres naturels, célestes et terrestres.

Ensuite, à partir des "dix mauvaises actions", il montre l'aspect de l'accroissement des mauvaises voies chez les êtres et la sensation de mauvais enseignements. Il est indiqué ici l'accroissement des dix mauvaises actions et de la cupidité, de la colère et de la sottise chez l'homme.

Les dix mauvaises actions sont les trois actes physiques : le meurtre, le vol et la fornication, les quatre actes oraux : le mensonge, la flatterie, la médisance et la duplicité et les trois actes mentaux : la cupidité, la colère et la sottise.

Trop de cupidité n'est pas bon à de nombreux titres. Il y a dans le monde beaucoup de personnes avides de nourriture. Vous n'êtes sans doute pas concernés par ce problème, mais lorsqu'on est trop avide de nourriture, ce phénomène dégrade le corps et on grossit démesurément. Trop grossir est préjudiciable pour la santé. Il existe une forme de cupidité pour chacune des six racines : la vue, l'ouïe, l'odorat, le goût, le toucher et la conscience. Toutes entraînent immanquablement de mauvaises rétributions.

Il y a ensuite la colère. La colère provoque le meurtre, au niveau individuel, et la guerre au niveau des nations.

Enfin, la sottise, c'est se plaindre en raison de l'ignorance de la logique de la causalité. "Pourquoi ça s'est passé comme ça ?" C'est de la sottise. On pense parfois "Pourquoi ai-je de tels problèmes ?" Mais si l'on y réfléchit bien, on s'aperçoit, sur la base de la profonde causalité, qu'en fait, j'ai créé la cause.

Si l'on comprenait les causes et les conditions, la sottise disparaîtrait. C'est pourquoi, en bouddhisme, on montre la causalité à ceux qui se plaignent.  En chaque chose, il y a une cause et un effet. Si on leur enseigne que toutes les choses apparaissent en fonction de causes et de conditions, ils cesseront de souffrir sans savoir pourquoi.

Si les dix mauvaises actions : le meurtre, le vol, la fornication, le mensonge, la flatterie, la médisance, la duplicité, la cupidité, la colère et la sottise sont commises, il existe, pour chacune deux manières de recevoir la rétribution après la mort, une fois que l'on renaît.

D'abord, le meurtre, c'est tuer ce qui vit. Le crime de tuer un homme est particulièrement lourd. Si quelqu'un a perpétré ce crime dans la vie passée, il aura la rétribution d'avoir une vie brève dans cette existence. Il peut également avoir beaucoup de maladies dans cette vie. Dès lors, ceux qui sont souvent malades, ont dû tuer quelqu'un dans la vie passée. Il est souhaitable alors qu'ils le comprennent et aient le désir de voir cette faute effacée. Là, il faut voir la causalité. On peut effacer même ce genre de faute grâce aux œuvres et vertus de la récitation du Dharma sublime.

Quant au vol, les deux rétributions de cette mauvaise action dans cette vie sont la pauvreté et perdre fréquemment ses biens ou être toujours dupé par les autres.

La rétribution dans cette vie de la fornication est d'avoir un mari (ou une femme) infidèle. La deuxième rétribution est l'infidélité de sa famille.

Ensuite, les deux rétributions du mensonge sont la médisance des autres à l'égard du menteur dans la vie précédente et la duperie.

Les deux rétributions de la médisance sont de toujours entendre de mauvaises voix à son égard, ou être sans cesse pris à partie.

Les deux rétributions de la duplicité sont l'abandon de la part de sa famille, ainsi que l'abandon de ses amis.

Ensuite, les deux rétributions de la flatterie sont l'absence de confiance de la part des autres et l'absence de clarté des paroles. Il y a des gens qui parlent et dont on ne comprend rien de leurs propos. Mais ce problème peut se résoudre par l'effacement des fautes grâce à la récitation du Daimoku.

Ensuite, les deux rétributions de la cupidité sont une vie d'avidité qui ne connaît jamais la satisfaction, ainsi que la profondeur des désirs.

Les deux rétributions de la colère sont d'être questionné sur les défauts et d'être assassiné.

Les deux rétributions de la sottise sont avoir une vie dans laquelle on garde des vues erronées et de naître dans une famille stupide à l'intelligence limitée.

Que ces dix mauvaises actions s'accroissent est extrêmement malheureux pour les hommes, comme pour la société entière.

Alors, le bon karma des êtres diminue et ils "cesseront de considérer leurs parents, à l'instar des cervidés". Lorsque les cervidés sentent du danger, ils se sauvent tout seuls, laissant sur place leurs parents. De la même manière, les êtres humains ne pensent plus du tout alors à leurs parents. Le monde devient immoral au point où les hommes ne pensent qu'à eux-mêmes et oublient la bienfaisance des parents.

Le nombre des êtres, leur longévité, leur force physique, leur influence et leur joie diminueront.

L'influence et la joie, rétributions en tant qu'être humain, la force physique des hommes, leur force spirituelle, leur durée de vie, diminueront.

Les plaisirs humains et célestes s'éloigneront, tous tomberont dans les mauvaises voies.

La quiétude, rétribution des hommes et des cieux, s'éloignera et ils tomberont dans les souffrances de  l'enfer, des esprits affamés et des animaux.

Jusque là, le sutra évoquait le mauvais karma des hommes.

De tels mauvais roi et mauvais moines aux mauvaises actions, détruiront mon bon Dharma. Ils interdiront la voie des cieux et des hommes. Les divinités bienfaisantes des multiples cieux qui, normalement, prennent en pitié et commisération les êtres, abandonneront toutes le pays pour se diriger vers d'autre contrées". Fin de citation.

En raison de la disparition du Dharma du Bouddha, les divinités bienfaitrices abandonnent le pays. Le résultat de ce départ est la voie de la causalité indiquée ici sous la forme de la destruction de la nation.

Dans le Sutra du Roi bienveillant, il est dit :

Il s’agit là de la citation du chapitre « Protection de la nation » du Sutra du Roi bienveillant.

“Dans le processus de perturbation du pays, les esprits malfaisants se perturbent en premier. Du fait de la perturbation des esprits malfaisants, le peuple entier se perturbe.

Lorsque la perturbation envahit un pays, la première cause de ce phénomène est la perturbation des esprits malfaisants. La cause de cette dernière a déjà été énoncée par Nichiren Daishônin.

En effet, lorsque le trouble s’empare d’un pays, c’est que les divinités protectrices y demeurant l’ont quitté. Les esprits démoniaques prennent alors leur place. La raison d’être de ces esprits maléfiques est de provoquer la perturbation dans le monde. Aussi, lorsqu’ils jettent la perturbation, ils se livrent à d’obscures activités ayant pour effet l’abandon de la notion de morale. Les hommes montrent alors un cœur équivoque attiré par le meurtre et la violence.

En fait, les hommes perdent le sentiment de responsabilité. Ils ne recherchent que ce qui est bon pour eux, ou encore n’ont plus d’énergie et n’éprouvent plus le désir de faire quoi que ce soit. Ils peuvent aussi bien escroquer les autres. Ainsi, ils se dotent d’un cœur douteux, d’un cœur perverti, les poussant à commettre le mal. Tous ces phénomènes sont l’œuvre des esprits maléfiques.

Des brigands envahissent et menacent le pays, les gens du peuple se meurent. Les ministres comme les seigneurs, les princes héritiers comme les princes de sang, ainsi que les officiers gouvernementaux se querellent sur ce qu’il faut réaliser ou pas.

Quand on parvient à de telles rétributions pour les êtres, alors, des bandits surgissent et le malheur augmente. Des disputes sur le bien et le mal éclatent du haut en bas de la hiérarchie de la société, entraînant alors le monde dans la perturbation.

Des phénomènes anormaux se produisent dans le ciel et sur la terre. Les vingt-huit constellations, la voie des étoiles, le soleil et la lune apparaissent en des moments et des positions inappropriées”. Fin de citation.

Outre les perturbations au sein de la société humaine, des phénomènes naturels anormaux se produisent.

“Les vingt-huit constellations” sont des éléments de l’astronomie de l’Inde antique. Elles désignent les étoiles réparties en quatre directions. En fait, sept étoiles étaient réparties sur chaque direction, nord, sud, est, ouest, ce qui donne vingt-huit constellations.

Le nom (chinois) des sept étoiles de l’est est jiao, kang, di, fang, xin, wei et ji. Il faut savoir qu’il ne s’agit pas du nom de sept étoiles, mais de groupes d’étoiles. Il s’agit de la position de groupes d’étoiles dans le ciel.

Les étoiles de l’ouest sont : kui, lou, wei, mao, bi, zi et shen. La quatrième, mao, se dit aussi « subaru » (les Pléiades) en japonais, mot que l’on entend beaucoup ces derniers temps[23].

Les sept étoiles du sud sont : jing, gui, liu, xing, zhang, yi et zhen et les sept du nord sont : dou, niu, nu, xu, wei, shi et bi.

Cette phrase du Gosho signifie, qu’en raison de la corruption du Dharma bouddhique, l’harmonie du monde des dharma est déstabilisée et la course de toutes ces étoiles est perturbée.

 Il dit encore :

Là aussi, il s’agit d’une citation du Sutra du Roi bienveillant.

“A présent, voyant clairement les trois phases à l’aide de mes cinq racines, l’intégralité des rois ont obtenu de devenir souverains d’un empire parce que tous, dans une vie passée, ont servi cinq cents Eveillés. Pour cette raison, tous les saints et sages viennent naître dans ces pays, où ils produisent de grands bienfaits.

Il est montré ici que devenir le souverain d’un pays est le fruit de l’accumulation de très grandes vertus par le passé. Ce fruit, considéré plus particulièrement selon la vision bouddhique, est le résultat de l’accumulation de mérites sur la voie du Bouddha. C’est pour ces raisons, qu’ils sont devenus empereur. Grâce à ces vertus de l’empereur, de nombreux saints et divinités bienfaitrices viennent se rassembler dans le pays, protègent le souverain, de sorte que le pays prospère.

Lorsque le souverain a épuisé sa bonne fortune, tous les saints l’abandonnent et le quittent.

Toutefois, si le souverain, au lieu d’accumuler des œuvres et vertus perpètre de mauvaises actions, une fois épuisée tout sa bonne fortune, tous les saints abandonnent le pays et s’en vont.

Au moment où tous les saints quittent le pays, sept désastres se produisent immanquablement”. Fin de citation.

La relation causale et la rétribution sont ici exposées. Immanquablement, sept désastres se produisent.

Prenant acte de cette prophétie des « sept désastres », Nichiren Daishônin va à présent citer le Sutra du Maître des remèdes, puis revenir au Sutra du Roi bienveillant. Toutes ces phrases de sutra exposent l’aspect concret des sept désastres.

La phrase suivante :

Dans le Sutra du Maître des remèdes, il est dit : ...

Enumère de manière très succincte les sept désastres. C’est je pense dans ce sens que Nichiren Daishônin cite cet extrait en premier.

Dans ce passage, le personnage qui parle est le bodhisattva Salut et libération. Celui-ci a reçu l’enseignement de l’Eveillé, l’a écouté et, à présent, se met à l’exposer. Aussi, en ce sens, il convient d’interpréter les paroles de ce bodhisattva comme étant celles du Bouddha lui-même.

“Lorsque des calamités et des désastres se produisent en relation avec les Kşatriya ou les Abhişeka Raja,

Les Kşatriya représentent la deuxième des quatre castes de l’Inde[24] , celle de la noblesse, incluant les rois et les guerriers.

Les Abhiseka Raja représentent les souverains eux-mêmes. L’abhişeka est une tradition séculaire indienne par laquelle, lorsqu’un souverain accédait au trône, de l’eau des quatre océans lui était versée sur le sommet du crâne.

Les catastrophes relatives à ces rois sont :

Ces désastres sont : le désastre des maladies contagieuses parmi le peuple,

Le premier désastre est celui des épidémies, des pandémies et de leur diffusion.

Le désastre de l’invasion par une nation étrangère et le désastre de la révolte au sein d’un même clan,

Deux désordres provoqués par les armes sont cités ici. Ces deux catastrophes sont en fait les principales au sein de toutes les citations proposées par Nichiren Daishônin. En effet, “puisque le Japon s’oppose à la rectitude et que tant de désastres sont déjà apparus, alors, immanquablement, le « désastre de l’invasion par une nation étrangère et le « désastre de la guerre civile », se produiront”. De fait, elles se produirent réellement au cours de la neuvième année de l’ère Bun’ei (1271).

Nichiren Daishônin évoquera de nouveau ces catastrophes à la fin du texte.

Le désastre de la mutation des étoiles et des constellations et le désastre des éclipses solaires et lunaires.

Il s’agit là des bouleversements naturels célestes.

Le désastre des vents et des pluies hors saison et le désastre des sécheresses prolongées”. Fin de citation.

Il s’agit là aussi des catastrophes naturelles, mais affectant cette fois la terre. Le sutra décrit ainsi les sept désastres.

Le Sutra du Roi bienveillant expose :

Nichiren Daishônin reprend le chapitre « Recevoir et garder » du Sutra du Roi bienveillant. Dans la citation précédente de ce sutra, « sept désastres » étaient prédits. A présent, le sutra énonce concrètement ces catastrophes.

“Grand roi ! Les régions où j’enseigne sont constituées de dix milliards de monts Sumeru, dotés de dix milliards de soleils et de lunes. Chaque mont Sumeru possède quatre continents. Dans celui du sud, le Janbudvipa, il y a seize grands pays, cinq cents pays moyens et dix mille petits pays. Au sein de tous ces pays, sept désastres sont à craindre. Parce que les souverains de tous ces pays les considèrent comme des désastres.

A partir de là, le sutra énonce un à un les désastres en question. A partir de “dix milliards de monts Sumeru”, le sutra expose la vision immense du monde enseignée dans le bouddhisme.  Lorsqu’on étudie avec soin le Dharma du Bouddha, on peut s’étonner à quel point, l’Eveillé, même sans télescope, est capable de voir le véritable aspect des phénomènes, même à plusieurs millions d’années lumières. L’existence de tous ces mondes est aussi perceptible à travers la doctrine des cinq cents grains de poussières d’éons du chapitre « Durée de la vie » du Sutra du Lotus.

“Chaque mont Sumeru possède quatre continents“ signifie que tous ces mondes existent avec des caractères communs.

Concrètement parlant, le monde dans lequel nous vivons est le“continent du sud, le Janbudvipa”.

“Seize grands pays” : A l’époque de Shakyamuni, de nombreux pays composaient l’Inde. Il y avait les pays de Kosala[25], Sravasti[26], Magadha[27], Varanasi[28], Kapilavastu[29], Kusinagara[30]  et bien d’autres encore. Ici, il est dit qu’il y avait seize grands pays. Ces derniers se décomposaient eux-mêmes en “cinq cents pays moyens et dix mille petits pays”. Sept désastres étaient particulièrement à craindre dans ce monde.

Le premier de ces désastres est :

Lorsque le soleil et la lune quittent leur course et que les saisons s’intervertissent, lorsqu’un soleil rouge ou noir apparaît, que deux, trois, quatre ou cinq soleil apparaissent, que le soleil s’éclipsant il n’y a plus de lumière ou que le soleil présente un, deux, trois, quatre ou cinq disques, c’est le premier désastre.

Telle est la description du premier désastre, catastrophes naturelles dues à la modification de la course du soleil et de la lune.

Lorsque les vingt-huit constellations perdent leur course, lorsque l’étoile de métal, les comètes, l’étoile à la roue, l’étoile de l’ogre, l’étoile du feu, l’étoile de l’eau, l’étoile du vent, l’épée d’Orion, la louche du sud, la louche du nord, la garnison des cinq grandes étoiles, et toutes les étoiles qui régissent les souverains, les étoiles des trois ministres et les étoiles des cent fonctionnaires, lorsque toutes ces étoiles se montrent de manière non naturelle, c’est le deuxième désastre.

Le sutra dépeint ici le désastre de la modification des étoiles et des constellations. L’étoile de métal, c’est Vénus la fameuse grande étoile blanche, l’étoile du matin. Quant aux comètes, de très gros spécimens apparurent à l’époque de Nichiren Daishônin. Aujourd’hui, il semble qu’il y en a encore, mais à de très lointaines distances. On peut les voir exclusivement à l’aide de télescopes et non plus à l’œil nu. Là également, on peut voir les différents aspects du ciel du point de vue des relations causales et des rétributions. L’étoile à la roue, c’est Saturne. L’étoile de l’ogre, elle, fait partie des sept constellations du sud. Ensuite, l’étoile du feu et l’étoile de l’eau sont respectivement Mars et Mercure. L’étoile du vent est l’une des étoiles du Sagittaire. On dit qu’elle aime le vent. L’épée d’Orion demandant des explications un peu complexes, je ne l’aborderai pas. La louche du sud, la louche du nord, font partie de la grande Ourse. Leur nom tient au fait que leur forme suggère cet instrument. La garnison des cinq grandes étoiles est composée de Jupiter, Mars, Saturne, Vénus et Mercure. Au sujet de “toutes les étoiles qui régissent les souverains”, dans un ouvrage intitulé Essai d’astronomie, on lit :

“Les quinze étoiles de l’enceinte de la ville pourpre sont situées au nord de la grande Ourse ; sept à l’ouest, huit à l’est”.

Le point central de ces étoiles est l’étoile Polaire. Par son immobilité, elle fut appelée l’étoile des empereurs.

“Les étoiles des trois ministres” : les trois ministres désignent des fonctions de ministres du palais dans la Chine de la dynastie des Zhou[31]. Les trois ministres étaient le Grand précepteur[32], le Grand Conseiller et le Grand Chambellan. “Les cent étoiles des fonctionnaires” désignent les nombreuses étoiles guidant les officiers ministériels.

“Lorsque toutes ces étoiles se montrent de manière non naturelle, c’est le deuxième désastre”. Le ciel, autrement dit le monde des dharma, se situe au sein de l’élément « espace », parmi les cinq éléments : terre, eau, feu, vent et espace. Il manifeste divers phénomènes dans le cadre de son élément. L’espace possède une relation étroite avec les quatre autres éléments. On peut même dire que la terre, l’eau, le feu et le vent, apparaissent en fonction de l’espace.

Les diverses transformations de l’élément « espace » font à présent l’objet de sérieuses études dans les domaines de l’astronomie, de la physique nucléaire et autres sciences. Il existe encore toutefois beaucoup de phénomènes étranges, insondables par la sagesse des hommes. L’Eveillé, grâce à sa sagesse, vit les phénomènes décrits ici, en tant que transformations faisant partie de ces phénomènes se manifestant au sein de l’espace et du temps infinis.

Lorsque de grands brasiers calcineront le pays et que le peuple sera brûlé vif, que ce soit par le feu des esprits malfaisants, le feu des dragons, le feu du ciel, le feu des dieux des montagnes, le feu des hommes, le feu des arbres, ou le feu des brigands, lorsque ces phénomènes inhabituels se produiront, ce sera le troisième désastre.

Diverses manifestations du feu dans son aspect négatif sont ici exprimées, pour enseigner le fait que de grands incendies ravageront le pays et feront de nombreuses victimes. Le désastre suivant est celui de l’eau.

Lorsque des flots impétueux emporteront et noieront le peuple, que, inversant l’ordre naturel, il pleuvra en hiver et neigera en été, que tonnerre et foudre éclateront dans la saison d’hiver et que la glace, le gel et la grêle s’abattront au cours du sixième mois, qu’il pleuvra une pluie rouge, une pluie noire, une pluie bleue, qu’il pleuvra des montagnes de terre et des montagnes de pierres, qu’il pleuvra du sable, des cailloux et des pierres,  que les rivières et les fleuves couleront à contre courant, que les montagnes flotteront et feront couler des rochers, lorsque de tels phénomènes se produiront, ce sera le quatrième désastre.

Il s’agit là des pluies violentes qui, se manifestant de temps en temps sous diverse aspects, provoquent de grands dégâts. Je pense que vous en avez tous l’expérience.

“Les rivières et les fleuves couleront à contre courant” : jadis, il arrivait effectivement que, lors de raz de marée, l’eau de la mer remonte par les rivières. Il survenait même que, lorsque l’eau se retirait, des barques se retrouvaient posées au sommet des montagnes. Par ailleurs, le fleuve Amazone remonte son cours une fois par an. Il s’agit là d’un phénomène naturel, mais qui montre que l’eau peut provoquer diverses catastrophes, expliquées ici par l’Eveillé en fonction de son immense vision des choses.

Lorsque des vents terribles balaieront et tueront le peuple, détruisant en un instant le pays, les montagnes, les fleuves et les forêts, que des grands vents hors saison, vents noirs, vents rouges, vents bleus, vents célestes, vents terrestres, vents de feu, vents d’eau souffleront, lorsque de tels phénomènes se produiront, ce sera le cinquième désastre.

Il s’agit là des catastrophes dues au vent. Typhons, tornades, vents de feu, lors d’incendies, toutes les formes de vents sont ici exprimées.

Lorsqu’une chaleur exacerbée s’abattra sur le ciel, la terre et le pays, au point que l’air semblera en feu et que les herbes dessècheront, que les cinq céréales ne mûriront pas, que la terre sera rougie et brûlée et que le peuple aura péri, lorsque de tels phénomènes se produiront, ce sera le sixième désastre.

Il s’agit ici des catastrophes terrestres. C’est l’aspect de la terre en proie à une chaleur extraordinaire où les incendies font rage à profusion. Aujourd’hui même, on peut voir largement sur notre terre, en raison de diverses causes, des régions entières connaissant des transformations effrayantes. On voit aussi qu’en raison de la sécheresse, les céréales ne parviennent pas à maturation.

En définitive, si l’on considère ces phénomènes sous l’angle des mutations des cinq éléments : terre, eau, feu, vent et espace, on comprend que les modifications des étoiles et des constellations, ainsi que les éclipses solaires et lunaires, se rapportent aux désastres dans “l’espace”. Ensuite, les désastres dus au feu, à l’eau, au vent et à la terre sont tous les désastres inhérents aux cinq éléments.

L’univers, le monde sont constitués de terre, d’eau, de feu, de vent et d’espace. Dès que l’harmonie au sein de ces cinq éléments est détruite, de telles catastrophes se produisent de manière répétitive. Or, de plus, même vous-mêmes, Mesdames et Messieurs, êtes constitués de terre, d’eau, de feu, de vent et d’espace. En effet, l’élément “feu” représente la température de votre corps. Sans cette chaleur, on meurt. Ensuite, le va et vient du souffle produit lorsque vous respirez n’est autre que l’élément “vent”. Le sang correspond à l’élément “eau”, la chair et les os à l’élément “terre”. La multitude des phénomènes se produit et nous existons nous-mêmes grâce à l’union harmonieuse des causes et des conditions des cinq éléments.

Il faut ainsi savoir que notre existence est en relation intime avec la terre, l’eau, le feu, le vent et l’espace du monde des dharma dans son ensemble. Pour cette raison, en fonction de la loi de non-dualité entre l’homme et son environnement, les rétributions du bien et du mal apparaissent très explicitement au niveau des causes et des relations des êtres et des causes et relations au niveau du territoire.

Lorsque des brigands viennent des quatre directions et envahissent le pays, que des brigands intérieurs et extérieurs apparaissent, que des bandits du feu, des bandits de l’eau, des bandits du vent et des bandits démoniaques dévastent le peuple, que la sédition armée se produit, lorsque ces prodiges ont lieu, c’est le septième désastre”. Fin de citation

Il s’agit là du dernier désastre, celui provoqué par la venue de brigands. Les “brigands viennent des quatre directions et envahissent le pays” se rapporte aux deux désastres soulignés par Nichiren Daishônin à la fin du Traité sur la sérénité du pays sous la forme du “désastre des luttes intestines” et le “désastre des invasions par une nation étrangère”.

Dans le Sutra du Grand rassemblement, il est dit : “Si un souverain, bien qu’il ait pratiqué le don, les préceptes et la sagesse pendant une infinité de vies, voyant mon Dharma sur le point de s’éteindre, l’abandonne et ne fait rien pour le protéger, l’infinité de racines de bien qu’il aura accumulées seront toutes perdues. Trois événements malheureux se produiront alors dans le pays”.

Ce passage est extrait du chapitre « Protection du Dharma par les cieux » du Sutra du Grand rassemblement.  Je pense que vous connaissez tous le nom du roi Bimbisara, souverain du pays de Maghada. Il avait pour fils le roi Ajatasatru. Ce dernier, manipulé par Devadatta, emprisonna son père et l’assassina. Or, Bimbisara était un personnage qui, durant sa vie passée, avait pris avec ferveur refuge dans le Dharma du Bouddha. Cette phrase du Sutra du Grand rassemblement est d’ailleurs un sermon donné à Bimbisara.

C’est pourquoi il y est question de l’attitude spirituelle que doit avoir le Souverain d’un pays.

Même s’il a eu une foi très profonde dans le Dharma du Bouddha, s’il ne fait rien pour protéger ce Dharma alors qu’il le voit péricliter, toute l’infinité des racines de bien qu’il aura accumulées seront irrémédiablement perdues et trois sortes de malheurs frapperont le pays.

Premièrement l’augmentation du prix des céréales, deuxièmement la guerre, troisièmement les épidémies.

“L’augmentation du prix des céréales” désigne les spéculations sur le prix des denrées alimentaires ou la valeur des choses de première nécessité, situation plongeant le peuple dans de grandes souffrances. Même dans notre société japonaise d’aujourd’hui, bien que la forme soit différente, le désordre économique plonge le peuple dans l’anxiété et la souffrance.

“La guerre” désigne toutes les formes de luttes. Il en est encore question plus loin.

“Les épidémies” désignent toutes les maladies propagées, mystérieuses, toutes dues au mauvais karma des êtres.

Lorsque toutes les divinités bienfaisantes l’auront abandonné et seront parties, le peuple ne se soumettra plus à ses édits.

Si les divinités bienfaisantes s’éloignent du pays, le peuple ne se conformera plus alors aux ordres du souverain.

Le pays sera sans cesse envahi par les pays voisins.

Les difficultés intérieures attirant les ennemis extérieurs, des nations étrangères viennent envahir et désoler le pays.

De violents incendies incontrôlables se déclareront, nombreux seront les mauvais vents et les mauvaises pluies, les inondations augmenteront.

Les inondations se produiront à tous moments, le vent et la pluie deviendront d’une violence extrême. Ces phénomènes sont similaires aux catastrophes déjà évoquées.

La population sera emportée, à la merci des flots. Alors, les parents proches et éloignés (du souverain) s’allieront pour fomenter une insurrection.

En plus de la catastrophe des populations emportées par les vents et les flots, les parents du souverain fomenteront une insurrection. Ainsi, les catastrophes atteindront tout le territoire. Il s’agit là du désastre des luttes intestines.

Ce souverain, avant peu, sera atteint d’une grave maladie et, après que sa vie aura atteint son terme, renaîtra dans le grand enfer.

Parvenues à ce stade, les phrases du sutra prennent la signification du principe de “gen tô nise” (les deux phases du présent et du futur). “Gen”, le présent, se rapporte à l’existence présente. “Tô” désigne le futur après la mort.

Vous-mêmes, Mesdames et Messieurs, devrez mourir un jour. Alors, à ce moment-là, irez-vous en enfer ? Irez-vous chez les esprits affamés ? Renaîtrez-vous en tant qu’animal ? Deviendrez-vous au contraire des êtres célestes, ou demeurerez-vous en permanence dans l’état de vie du Bouddha ? Finalement, dans l’expression “gen tô”, c’est le problème de “tô”, le futur, qui est important. Ici, l’avertissement donné au souverain est que “avant peu, il sera atteint d’une grave maladie et, après que sa vie aura atteint son terme, il renaîtra dans le grand enfer”. Autrement dit, il aura comme rétribution de son mauvais karma de tomber en enfer.

En même temps,

Son épouse, les princes, les ministres d’Etat, les seigneurs de villes, les chefs militaires, les protecteurs des régions et les fonctionnaires du gouvernement connaîtront le même sort que le souverain”. Fin de citation.

Les vassaux, les sous-ordres lui obéissant, tomberont tous, eux aussi, en enfer. En effet, lorsque des personnes possèdent une causalité commune et sont appelées à partager le même sort, elles sont entraînées par le plus fort et subissent toutes le même effet.

Ainsi s’achèvent les citations de ces quatre sutra, réparties en sept extraits. La conclusion de Nichiren Daishônin est la suivante :

Ces phrases de sutra sont parfaitement claires. Qui, parmi dix mille personnes pourrait émettre le moindre doute ?

Si l’on réfléchit sur la base de la preuve littérale, on ne peut plus claire, il apparaît alors indubitable que toutes les catastrophes proviennent de la non protection du Dharma ou de l’opposition au Dharma du Bouddha.

Or, une bande de non-voyants, des hommes égarés dans l’illusion croient aveuglément en des prêches hérétiques, incapables de discerner l’enseignement juste.

Les “non-voyants” désignent ici les hommes ignorants la logique des choses. “Egarés dans l’illusion” signifie qu’ils sont plongés dans l’égarement des mauvaises passions. Ces hommes ont foi sans la moindre réflexion en des thèses superficielles et hérétiques. Par conséquent, ils sont complètement ignorants du bon enseignement.

A ce niveau, Nichiren Daishônin ne précise pas encore quels sont les prêches hérétiques. Il y a cependant une raison pour laquelle il parle de “prêches hérétiques”. Ce point deviendra de plus en plus clair au fur et à mesure que le dialogue se poursuivra.

Il précise ici que, bien que croire en des thèses hérétiques soit une erreur, tous choisissent “l’hérésie” et rejettent le “juste”.

Pour cette raison, sous le ciel, en ce monde, les Bouddha, en leurs sutra, voient naître le désir de partir, n’ayant plus le souci de protection.

“Sous le ciel, en ce monde” désigne les nombreux hommes de ce monde. “Les Bouddha, en leurs sutra” se rapporte aux vénérables Bouddha et à leurs bons enseignements. En fait, du point de vue de la comparaison entre le provisoire et le véritable, même s’ils font partie des moyens salvifiques, il existe beaucoup d’enseignements remarquables. Le Sutra du Roi bienveillant, le Sutra du Grand rassemblement, le Sutra de la Radiance d’or et le Sutra du Roi des remèdes, cités ici par Nichiren Daishônin font partie de ces enseignements remarquables.

Les Bouddha ayant donné ces enseignements, voient naître en eux le désir de s’éloigner et non plus l’intention de protéger le pays.

A ce niveau, Nichiren Daishônin évoque les vastes enseignements du Grand véhicule en son ensemble en tant qu’enseignement correct, par rapport au Petit véhicule.

Alors, les divinités bienfaisantes et les saints abandonnent le pays et quittent leur lieu de résidence.

Voilà ce qui arrive en réponse à ce qui précède, une fois que les divinités bienfaitrices et les saints ont quitté le pays,

A leur place, les esprits maléfiques et les voies extérieures provoquent des catastrophes, apportent les désastres.

Des catastrophes dues aux mauvais esprits et aux voies extérieures se produisent.

Les “esprits maléfiques” pourraient aussi être appelés les vies du royaume des morts. Beaucoup de personnes ne croient que ce qu’elles voient. Toutefois, parmi toutes les existences, il existe toutes sortes de mondes invisibles à nos yeux. Il convient donc de croire en l’existence d’autres dix mondes.

Il arrive par exemple, que des personnes dotées de pouvoirs surnaturels, marchant sur les traces de l’Inari[33]  de la montagne ressentent parfois l’âme d’un renard ayant vécu longtemps à cet endroit.

Sans aller jusqu’à citer divers exemples concrets, je dirai que le monde des morts existe. Des esprits malfaisants, des démons y existent. Nichiren Daishônin dit ici que ces esprits négatifs, ces voies extérieures viennent et provoquent des catastrophes.

C’est ici que s’achèvent mes commentaires sur la partie lue aujourd’hui. Après les paroles de l’hôte, le visiteur voit son doute s’accroître et c’est là que commence sa question suivante.

A la fin de la partie lue aujourd’hui, nous lisons : “Ils croient aveuglément en des prêches hérétiques, incapables de discerner l’enseignement juste”. Quel est donc cet “enseignement juste” ? Du point de vue des trois sortes de transmissions secrètes, fondées sur la comparaison entre le provisoire et le véritable, la comparaison entre l’originel et l’éphémère et la comparaison entre l’ensemencement et la récolte, il s’agit des trois Grands Dharma ésotériques propagés par Nichiren Daishônin avec l’attitude de ne ménager ni son corps ni sa vie. En cette période actuelle de la Fin du Dharma, rien en dehors des trois Grands Dharma ésotérique ne permet de faire apparaître correctement, chez tous les êtres, la nature du Bouddha dans le véritable sens du terme, aussi bien du point de vue physique que du point de vue spirituel.

On trouve à présent chez les libraires de très nombreux livres écrits sur les diverses manières de penser le bien et le mal, dans les domaines religieux, philosophiques ou moraux. En fait, ils n’expriment qu’une parcelle de l’immense enseignement de Nichiren Daishônin, qui contient l’ensemble du monde des dharma.

En définitive, j’ai la conviction que ce n’est qu’à partir du moment où l’on reçoit et garde sérieusement les trois Grands Dharma ésotériques de la doctrine originelle exprimés par le Bouddha originel Nichiren Daishônin au péril de sa vie, qu’alors, la voie fondamentale vers la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude apparaît, tant au niveau de la nation, de la société, que de l’individu, grâce aux œuvres et vertus de son enseignement juste.

En outre, la dernière phrase de ce Traité sur la Sérénité du pays est :

“Je ne croirai pas seulement moi-même, mais je corrigerai les erreurs d’autrui”.

Il ne faut pas se contenter de pratiquer la religion correcte. Il faut également corriger les erreurs d’autrui et, ensemble sauver les autres. Telle est la conclusion finale apportée par le visiteur dans le Traité sur la Sérénité du pays.

A présent, la Nichiren Shôshû est tournée vers le sept cent cinquantième anniversaire de la présentation du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Nous, moines et laïques, devons réciter sérieusement le Daimoku et, en même temps, progresser dans la pratique personnelle et l’enseignement aux autres. Là se trouve la voie vers le salut de soi et d’autrui.

 

 

 

Troisième dialogue
Causes de l’offense au bon Dharma

 

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Le contenu des troisième et quatrième échanges de questions et de réponses étant constitué en majeure partie de citations de sutra, il est relativement complexe, en particulier, les citations du quatrième débat, résumées à l’essentiel de leur signification. Cette partie du Gosho est très difficilement compréhensible, en effet, si on se contente de le lire de manière superficielle.

Au début du troisième dialogue, le visiteur parle sous l’emprise de la colère. En effet, il questionne l’hôte, lui demandant de qui parle-t-il lorsqu’il dénonce ceux qui détruisent l’enseignement du Bouddha, alors que le bouddhisme est véritablement florissant dans tout le pays. A cette question, l’hôte répond qu’il s’agit des mauvais moines provoquant l’errance des hommes dans l’illusion. Il cite des passages de sutra étayant l’apparition de ces mauvais moines. Ces sutra sont le Sutra du Roi bienveillant, le Sutra de l’Extinction (Nirvana) et le Sutra du Lotus. L’idée principale de ce troisième débat est que les mauvais moines apparaissent tels que les sutra l’ont prédit et qu’il faut admonester leurs paroles hérétiques.

Empourpré, le visiteur dit :

On dit souvent de personnes qu’elles changent de couleur de visage. Là, le visiteur parle d’un air froissé.

“L’empereur Ming des Han postérieurs, voyant en rêve un homme en or, obtint les enseignements des chevaux blancs.

Le deuxième empereur des Han postérieurs s’appelait Xiao Ming (58-76). Une nuit, au cours de son règne, il vit en rêve un homme dont le corps entier avait la couleur de l’or flotter dans son jardin. Il interrogea l’historien Chuan Yi et le professeur Wang Zun, tous deux ministres du palais, sur la signification de ce rêve. Ils dirent que “l’homme en or” était en fait un saint, vivant loin, à l’ouest, et dont les enseignements étaient propagés dans cette région.

Désireux de connaître les enseignements de ce saint, l’empereur délégua des ambassadeurs en Inde. Au cours de leur périple, les ambassadeurs rencontrèrent Kâsyapamâtanga [34] et Zhou Falan[35] qui transportaient des statues de Bouddha et des sutra pour les apporter en Chine. Ils les guidèrent alors vers ce pays. Les deux hommes avaient chargé les statues et les sutra sur des chevaux blancs. L’empereur Xiao Ming se réjouit énormément. Il protégea dès lors avec ferveur cet enseignement qui venait d’être transmis et, afin d’y enchâsser les statues de Bouddha et les sutra, il construisit un temple. En raison des conditions avec lesquelles les statues et le sutra avaient été transportés, il donna à ce temple le nom de “Baima si” (j. hakubaji) ou temple des chevaux blancs. Telles sont les conditions selon lesquelles le bouddhisme fut introduit en Chine.

Le Prince Shôtoku punit l’opposition de Moriya et s’adonna à la construction de temples et de pagodes.

Après l’évocation de l’introduction du bouddhisme en Chine, Nichiren Daishônin conte à présent son introduction au Japon. En la mille deux cent douzième année du régime impérial, au cours du règne de l’empereur Kinmei, le roi Seimei, du pays de Kudara (Corée), fit présent au Japon de statues de Bouddha et de plusieurs sutra. Des avis opposés virent alors le jour sur l’adoption ou non des enseignements du Bouddha.

Le prince Shôtoku et Sôga Umako étaient d’avis d’adopter le bouddhisme, de croire et de vénérer ses enseignements. Par contre, le clan des Mononobe, traditionnellement attaché quant à lui au Shinto japonais, s’y opposa. A la suite d’une terrible lutte, Moriya, le chef de la sédition fut abattu.

Après avoir réduit à néant les résistants à l’adoption du bouddhisme, le prince Shôtoku protégea cet enseignement avec ferveur. Il existe de formidables temples tels le Sitennôji à Osaka, ou le Genkôji et le Hôryûji à Nara. Tous furent construits par le prince Shôtoku pour permettre la transmission du bouddhisme. “S’adonna à la construction de temples et de pagodes” se rapporte à la fervente protection du bouddhisme et la construction de temples par le prince Shôtoku.

Depuis ce temps, du plus élevé aux plus humbles, tous vénèrent les statues de Bouddha et respectent les sutras.

Beaucoup de gens ont prié les statues de Bouddha, étudié les sutra et se sont mis alors à pratiquer.

Ainsi, au mont Hiei, dans la capitale du sud, aux temples Onjôji et Tôji,

Le visiteur cite ici les temples majeurs de l’époque. Le “mont Hiei” désigne le temple Enryakuji du mont Hiei. La “capitale du sud” fait référence aux sept temples de la capitale du sud : les temples Tôdaiji, Kôfukuji, Genkôji, Yakushiji, Hôryûji, Daianji et Saidaiji. Ils manifestent la présence du bouddhisme à Nara (la capitale du Sud). Le temple “Onjôji”, lui désigne le temple de Mii, fondé par Chishô, Patriarche du temple Enryakuji, fondateur du courant du temple au sein de l’école du Tendai. Quant au Tôji (temple de l’est), il s’agit du temple sis à Kyoto. Lorsqu’on se trouve à la gare de Kyoto et que l’on regarde en direction du sud ouest, on voit une grande pagode à cinq étages. Cette zone est le temple Tôji. Le moine Kôbô, de l’école Shingon, reçut ce temple de la cour impériale et en fit un temple du Shingon. Son nom réglementaire est “Temple pour la protection du pays par le souverain de l’enseignement” (Kyôô gokokuji), défini en fonction de sa destination d’origine.

Dans tout le pays entouré des quatre océans, dans les cinq régions et sur les sept routes, les sutra de l’Eveillé sont nombreux comme les étoiles.

“Les quatre océans, dans les cinq régions” : Il s’agit, là encore d’une antithèse. De même pour “les cinq régions et sur les sept voies”. Le pays entouré de quatre océans est le Japon ; donc le pays dans son ensemble.

Les “cinq régions” correspondaient aux zones situées dans un rayon de moins de cent lieues autour du château impérial. Il s’agit, autrement dit, des régions situées dans la zone culturelle proche de la capitale impériale. Ces cinq régions étaient Yamashiro, Yamato, Kawachi, Izumi et Settsu, situées autour de la ville impériale, Kyoto. Yamashiro est à présent Kyoto, Yamato c’est Nara, Kawachi est devenue la région orientale d’Osaka, Izumi correspond à Sakai ; quant à Settsu, elle correspond à la zone s’étendant de la partie nord d’Osaka à la partie est de Hyogo. C’est ce que l’on appelait alors les cinq régions.

Quant aux “sept routes”, elles constituaient les voies d’accès principales partant de Kyoto vers le reste du Japon. Les sept routes étaient : Tokaidô, Tôsandô, Hokurikudô, Sanyôdô, San’indô, Nankaidô, et Saikaidô. Les cinq régions et les sept routes désignent en fait tout le Japon. Les sutras étaient ainsi répartis  et répandus comme des étoiles dans tout le pays.

Les temples s’étalent comme les nuages.

On voit de ci, de là, partout, de magnifiques temples, il existe d’innombrables sanctuaires bouddhistes.

Les héritiers de Shûshi

Le “Shûshi” est le cormoran, sorte de long oiseau aquatique dont les pattes ressemblent à celles des grues. Il mesure environ cinq pieds et il possède de très jolis yeux.

Vous connaissez tous Shariputra (j. sharihotsu), dont le nom est cité dans le chapitre des « Moyens ». Il était une sorte de chef, au sein des dix disciples majeurs du vénéré Shakya. Sa mère avait de très jolis yeux. Elle s’appelait Shari. Shari est le nom sanskrit du cormoran (j. shushi). Putra (j. hotsu) signifie : fils. Autrement dit, le fils de Shari s’appelait Shariputra. Ainsi, les héritiers de Shûshi désignent Shariputra et les moines de sa lignée.

Contemplèrent la lune sur la tête de l’aigle

La “tête de l’aigle” désigne le sommet du mont sacré des aigles. Dans les stances jiga du chapitre « Durée de la vie » nous lisons : “Nous apparaissons ensemble sur le mont sacré des aigles. Alors, je m’adresse aux êtres” (kushutsu ryôjûsen, ga ji go shûjô). Le mont sacré des aigles est le lieu où le vénéré Shakya prêcha le Sutra du Lotus. Il prêcha de nombreux autres sutras en ce lieu, mais il reste l’endroit où fut enseigné le Sutra du Lotus, Grand véhicule ultime au sein des enseignements du Grand véhicule. Ce lieu possède une signification importante du point de vue du bouddhisme. La lune, quant à elle, symbolise le profond enseignement du Sutra du Lotus prêché sur le mont sacré des aigles. Les personnes comme Shariputra obtinrent l’éveil de Une pensée trois mille à travers le principe de la possibilité d’éveil pour les deux véhicules (Auditeurs et Bouddha pour soi). Cet éveil est paraphrasé par l’expression : “contempler la lune”. Par ailleurs, comme c’est grâce à la sagesse que l’on peut “contempler” le principe du Dharma, la contemplation se rapporte à la sagesse au sein des trois sciences : préceptes, concentration et sagesse.

Ceux du courant de Kakuroku transmirent le vent du Kukkutapada

Kakuroku : Il s’agit d’Haklenayasa, vingt troisième héritier du Dharma de Shakyamuni. Il avait cinq cents disciples, tous dotés de peu de vertus et mérites. Pour cela, ils devinrent tous des grues et, ainsi, obéirent au vénérable. C’est la raison pour laquelle on l’aurait appelé Kakuroku, ou “collier des grues”. Les gens de cette congrégation “transmirent le vent du Kukkutapada”.

Le Kukkutapada est le nom d’une montagne. Shariputra et Kasyapa étaient considérés comme les deux chefs des dix disciples majeurs de Shakyamuni. Le mont Kukkutapada est la montagne où Kasyapa entra en méditation. Kasyapa reçut la transmission de la concentration méditative directement du vénéré Shakya. En d’autres termes, il s’agit de l’obtention de la voie par la concentration au sein du vent de l’enseignement de Kasyapa.

Ainsi, ce passage indique les deux lois de la concentration et de la sagesse, principes centraux de l’enseignement du Bouddha. Il signifie donc qu’alors, le bouddhisme était au point culminant de sa popularité.

Le visiteur réfute ensuite l’hôte :

Qui oserait dire, alors, que les enseignements de l’Eveillé sont négligés ou que les traces des trois trésors sont abandonnées ?

Ici, “négligé” possède le sens de mépris, de dédain. Le visiteur argumente : “Qui, comme vous le prétendez, dédaigne les enseignements de l’Eveillé”  et que “les traces des trois trésors sont abandonnées”, c’est-à-dire que la protection extérieure par les bienfaiteurs a été interrompue ? 

Si vous en avez la preuve, faites- la moi entendre minutieusement”.

“Si vous prétendez de telles choses, alors, possédez-vous des preuves ? Si c’est le cas, je désire les écouter en détail”. Le visiteur pose d’abord une question contradictoire à l’hôte.

C’est alors à l’hôte de s’exprimer.

L’hôte, prenant des exemples dit :

L’hôte a, dans un premier temps, une réponse affirmative : “Vous avez raison”. Quelle que soit l’occasion, dans un débat, il est important de parler, dans un premier temps, au mode affirmatif : “Je comprends ce que vous dites”. Si, par contre, dès le début on dit à son interlocuteur : “ce que vous dites est faux”, ce dernier, fâché, ne voudra plus rien entendre. Cette attitude ne peut en aucun cas être appelée shakubuku. Dès lors, dans un premier temps, on écoute ce que dit l’autre et on répond au mode affirmatif. Si, à ce moment, on rajoute : “Toutefois, en fait, voilà la vérité”, je pense que c’est là un moyen pour que la discussion puisse se développer sans heurts.

Les moines sont comme les bambous et les roseaux, leurs adeptes ressemblent au riz et au chanvre.

Les moines sont aussi nombreux que les tiges de bambou ou que les roseaux. Leurs amis sont par ailleurs nombreux comme les pousses de riz ou le chanvre.

Depuis les années de jadis, ils ont été vénérés et leur respect est renouvelé chaque jour.

Cela fait en réalité très longtemps que le Dharma du Bouddha est vénéré au Japon et, encore à présent, on voit chaque jour des personnes respectant profondément cet enseignement.

Là encore, ce passage, comme dans l’ensemble du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude, présente une remarquable antithèse. “Vénérés” et “Respect” possèdent le même sens, mais Nichiren Daishônin utilise des expressions différentes. “Depuis les années de jadis” signifie que cela fait déjà longtemps. Ensuite, ce “respect est renouvelé chaque jour”. Tous les jours, le Dharma du Bouddha est respecté à nouveau. Là encore, “jadis” et “renouvelé” sont mis symétriquement. Tout du long, ce traité montre cet excellent style. Sa merveilleuse et remarquable syntaxe fait l’objet de l’admiration de tous.

Or, les maîtres du Dharma sont devenus flagorneurs et déviants. Ils jettent la perturbation sur l’éthique humaine

A partir de là, l’hôte, commençant par “or” va exposer son sentiment réel. “Vous dites cela et les faits semblent vous donner raison. Or, la vérité est que les maîtres du Dharma, gardiens et propagateurs du Dharma du Bouddha, sont flagorneurs et déviants”. “Flagorneurs et déviants” signifie que leur esprit est tordu. “Ils jettent la perturbation sur l’éthique humaine” : ils sont même incapables de préserver la voie des êtres humains et leurs pensées sont dépravées. L’ôte décrit en premier lieu l’état des moines.

Le souverain et ses ministres, dénués de compréhension, sont incapables de discerner l’hérésie du juste.

Même le souverain, chargé de protéger de l’extérieur le Dharma et ses ministres, chargés du précieux travail de gestion de l’état, n’ont la faculté de discerner le juste de l’hérétique vis-à-vis de l’attitude erronée des moines flagorneurs et déviants.

A partir de là, des phrases de sutra sont citées à titre d’attestation scripturaire. Dans les Sutra du Roi bienveillant, Sutra de l’Extinction et le Sutra du Lotus, le vénéré Shakya prédit clairement que, dans le futur, de mauvais moines apparaîtront et jetteront la perturbation au sein du Dharma du Bouddha. Nichiren Daishônin cite ici les phrases expliquant l’apparition de diverses erreurs dues à ces moines.

Première preuve par le sutra de l’offense au bon Dharma 

Sutra du Roi bienveillant chapitre  « Passation »

“Parmi les moines, nombreux seront ceux à la recherche de la renommée et du profit.

Ce passage prédit l’apparition de mauvais moines, causes de la destruction du Dharma et de la nation. “Ils recherchent renommée et profit”. Ils n’ont de cesse d’être flattés et de recevoir des offrandes de la part du plus grand nombre, de manière à vivre une vie opulente.

Devant le Souverain, les princes et les princes héritiers, ils prêcheront des causes et conditions destructrices du Dharma de l’Eveillé, des causes et conditions destructrices de la nation.

De plus, l’action de ces mauvais moines sera de donner des enseignements fallacieux au Souverain, aux princes et au prince héritier, qui constitueront les “causes et conditions destructrices du Dharma de l’Eveillé”. La destruction du bouddhisme s’opère par les prêches fallacieux constituant les causes et conditions de cette destruction. Quant à la destruction de la nation, elle s’opère du fait que les prêches fallacieux destructeurs du bouddhisme constituent, telles quelles, les doctrines erronées détruisant le pays. Ils profèrent de telles choses sans le moindre examen de conscience.

Le Souverain, incapable de discernement, écoutera et croira leurs paroles. Il promulguera alors des lois déraisonnables, non fondées sur les préceptes du bouddhisme, provoquant ainsi les causes et conditions de la destruction du bouddhisme, de la destruction de la nation”. Fin de citation.

Ne se fondant pas sur l’enseignement correct du Bouddha, ayant foi en des choses erronées, les hommes, chargés de la gestion du pays, produisent des lois centrées sur leur propre profit, sans tenir compte du bonheur du peuple. Promulguer de telles lois, sans tenir compte des préceptes du bouddhisme, c’est “provoquer les causes et conditions de la destruction du bouddhisme, de la destruction de la nation”.

En d’autres termes, les mauvais moines propagent des enseignements hérétiques et critiquent l’homme professant le bon Dharma. Ils conçoivent ensuite de la haine et de la jalousie envers lui. Alors, ils médisent de lui auprès du Souverain, ce qui constitue la cause de la destruction du bouddhisme et de la destruction de la nation. Le Souverain croyant ces médisances distord le bon Dharma et persécute le bon maître qui l’enseigne. Cet état de fait constitue la condition de la destruction du bouddhisme et de la destruction de la nation. En ce sens, c’est par les mauvais moines que l’aspect de l’offense au Dharma et la destruction de la nation se manifestent.

Deuxième preuve par le sutra de l’offense au bon Dharma

Sutra de l’Extinction chapitre du « Noble Roi vertueux »

Alors que le passage précédent relatait la destruction du bouddhisme et la destruction de la nation par les mauvais moines hérétiques en ce monde, ce passage-ci traite du futur après la mort. Il avertit que, dans le futur, ce sera par les mauvais Dharma que la chute en enfer se produira.

Dans le Sutra de l’Extinction, il est dit : “Bodhisattva, ne ressentez pas d’effroi vis-à-vis des éléphants vicieux !

Les “éléphants vicieux” sont des éléphants auxquels on a fait boire de l’alcool et qui, ivres et rendus fous, s’emballent. Personne ne peut plus les approcher, ils cassent tout, écrasent les hommes et provoquent de nombreux dégâts. Or, dans le sutra, il est dit que, plus que ces “éléphants vicieux”, ce sont les “mauvaises connaissances” que l’on doit redouter au plus haut point. Il n’est pas nécessaire par conséquent de craindre les éléphants vicieux.

Concevez de la peur envers les mauvaises connaissances. A être tué par un éléphant vicieux, on ne se dirige pas vers les trois mauvaises directions.

Par contre, il faut avoir le sentiment que les mauvaises connaissances sont véritablement effroyables. En effet, tué par un éléphant vicieux, on ne se dirige pas vers les trois mauvaises directions, autrement dit, être tué par un éléphant n’entraînant que des blessures physiques, l’effet de cette mort n’est pas la chute en enfer, ni dans le monde des esprits affamés, ni dans celui des animaux. Il existe des rétributions de la causalité d’être né sous la forme d’un être humain. Aussi, même si l’on est tué par un éléphant vicieux, finalement, on renaît en tant qu’être humain. On ne tombe ni en enfer, ni dans le monde des esprits affamés, ni dans le monde des animaux.

A être tué à cause des mauvais amis, on va immanquablement sur les trois mauvaises voies” Fin de citation.

Par contre, être tué à cause de “mauvais amis”, entraîne inéluctablement la chute dans les trois mauvaises directions : enfer, esprits affamés, animaux, surtout en enfer. En effet, les mauvaises connaissances détruisent notre esprit, bon esprit pour devenir Bouddha. Les éléphants vicieux ne vont pas jusqu’à détruire ce bon esprit. Ils détruisent uniquement le corps, sans détruire les vertus du cœur. Les mauvaises connaissances, elles, détruisent notre cœur et ses vertus. Dès lors, le bon esprit des hommes disparaît à cause des éléments erronés enseignés par les mauvaises connaissances, s’ils y croient. Il est remplacé par le mauvais esprit conduisant à l’enfer.

C’est exactement ce qui se passe pour les membres de la Soka Gakkai. A cause d’une mauvaise connaissance, leur mauvais esprit enfle de plus en plus. Si on leur dit “un mensonge répété cent fois devient la vérité”, ils le croient sincèrement, sans aucun esprit critique. A cause de cette manière de penser, de nombreuses personnes ont fini par penser que, pour leur intérêt personnel, on peut dire n’importe quel mensonge. Leur caractère s’est transformé de la sorte. Si l’on en arrive à penser que l’on peut mentir quand cela nous arrange, on peut alors dire effrontément n’importe quel mensonge. En plus, on finit par y croire soi-même. C’est un phénomène dont la société devrait le plus se lamenter.

En raison de telles choses, de nombreuses personnes ont le bon esprit détruit en leur cœur. Telles sont les mauvaises œuvres (karma) des mauvaises connaissances, tel Ikeda. Mesdames et Messieurs vous avez véritablement bien fait d’entrer dans la Nichiren Shôshû, école héritière du Dharma correct de Nichiren Daishônin. Fondamentalement, tout en dissimulant leur mauvais esprit, les mauvaises connaissances, avec des paroles et une mine flatteuse, dirigent les hommes et leur font commettre le mal. Elles sont à l’origine de la destruction de l’esprit de bien, faisant inéluctablement tomber dans les trois mauvaises voies dans le futur. Pour cette raison, il faut connaître leur caractère véritablement effroyable.

Troisième preuve par le sutra de l’offense au bon Dharma

Sutra du Lotus chapitre « Exhortation à garder »

C’est à présent une citation du chapitre « Exhortation à garder » du Sutra du Lotus.

Dans l’âge mauvais, les moines auront une sagesse pervertie, leur pensée sera tordue.

Ce passage du chapitre « Exhortation à garder » définit l’outrecuidant qui a franchi la porte de la voie, l’un des trois puissants ennemis. Les moines de l’ère mauvaise de la Fin du Dharma seront dotés d’une sagesse pernicieuse et hérétique et auront le cœur tordu. La raison en est, qu’en fait, ils n’écoutent ni n’étudient le Dharma du Bouddha.

Ils penseront avoir obtenu ce qu’ils n’ont pas encore obtenu et seront remplis d’orgueil.

Ils penseront avoir obtenu ce qu’ils n’ont pas encore obtenu, ils se croiront eux-mêmes remarquables, pensant avoir obtenu l’éveil. Forts de telles considérations, ils mépriseront tout le monde. L’effet de cette attitude sera qu’ils persécuteront ceux qui gardent le bon Dharma.

Il y aura aussi des ermites forestiers, vêtus de haillons, dans des lieux déserts

La phrase citée ici désigne l’outrecuidant qui feint la sainteté. “Vêtus de haillons” signifie qu’ils se vêtiront d’humbles tissus. Ils revêtiront une robe confectionnée à l’aide d’humbles tissus usagés dont on leur a fait offrande. Avec cet aspect modeste, ils se donneront l’air de saints. Quant aux “lieux déserts”, ce sont des lieux calmes. Ce sont des forêts ou des lieux paisibles.

Ils s’estimeront pratiquer la bonne voie et mépriseront les hommes.

Les hommes entrant dans la catégorie des Outrecuidants qui feignent la sainteté, détruisent largement et en profondeur le bon Dharma.

Dans leur avidité d’offrandes lucratives,

Cette avidité d’offrandes lucratives se formalise par l’attachement avide aux offrandes de la part des croyants et l’attachement aux honneurs mondains.

Ils exposeront le Dharma aux habits blancs,

Les “habits blancs” se rapportent aux laïques. Ils prêcheront à ces gens là.

Afin d’être respectés du monde, comme des arhats dotés des six pouvoirs.

Plus le moine est à l’origine de la destruction du Dharma, plus il prend l’aspect d’un saint. Les six pouvoirs sont : les yeux divins[36], les oreilles divines[37], la vision des vies antérieures[38], les pieds divins[39], la perception des pensées[40], le pouvoir d’annihiler les écoulements[41].

A ce propos, chacun de vous possède ces pouvoirs de manière latente. Toutefois pour qu’ils puissent s’exprimer, il faut pratiquer une alimentation particulière insuffisante, se retirer dans des grottes, pratiquer diverses méditations et sagesses et passer ainsi toute une vie. Ce qui est d’ailleurs sans doute insuffisant. Il faut dès lors renaître, trois fois, cinq fois. Alors, progressivement, ces pouvoirs divins apparaissent peut-être. Or, dans la période de la Fin du Dharma, beaucoup sont obtus de ce point de vue et manquent déjà des capacités de base. Alors, il n’y a rien à espérer. Fondamentalement, tous les êtres possèdent par nature ces pouvoirs, mais ces derniers semblent chez la plupart inexistants à la naissance. Ces cinq ou six pouvoirs divins ne peuvent se manifester dans des vies emplies de toutes sortes de désirs : appétit, libido, pouvoir et autres. Or, tel est en réalité l’aspect du monde actuel. Aussi, il n’est pas nécessaire que vous perdiez votre temps avec de telles choses. Il est beaucoup plus important de réciter le Daimoku, Nam Myôhôrengekyô, qui permet de réaliser la voie de la boddhéité.

Constamment au sein de la multitude, ils veulent nous détruire

Si ce genre de personnage se contentait de commettre seul des erreurs cela irait encore. Or, c’est justement ces personnes qui conçoivent de la jalousie envers ceux qui propagent le bon Dharma et les critiquent.

Et, pour cela, se tournent vers les rois et les ministres, les brahmanes et les bourgeois, ainsi que la foule des autres moines et nous calomnient et nous flétrissent, prétendant : “ces gens aux vues erronées prêchent des discours des voies extérieures”.

Ces mauvais moines s’adressent aux hommes au pouvoir, le souverain, les hauts ministres, aux dirigeants du monde et déversent en masse des calomnient sur le moine propagateur du bon Dharma, prétendant qu’il prêche des idées personnelles relevant des voies extérieures.

En cet éon souillé, en cet âge mauvais, nombreux seront les sujets de frayeur. De mauvais esprits pénétreront leur corps. Eux, ils nous insulteront et nous aviliront.

Ce passage prédit l’apparition de nombreux événements graves pour ceux qui, dans l’ère souillée et mauvaise, garderont le bon Dharma. Ensuite, “de mauvais esprits pénétreront leur corps” est une phrase très connue. Elle signifie que, si des gens se transforment en mauvais hommes et profèrent des médisances, c’est que de mauvais esprits ont pénétré leur vie. A partir de là, les critiques et des menaces se font jour naturellement.

Les mauvais moines de l’âge souillé ne sauront point que le Bouddha, par le biais des moyens salvifiques, prêche le Dharma en fonction des prédispositions. Ils médiront, fronceront les sourcils, et l’on verra à maintes reprises des expulsions”. Fin de citation

Jusqu’à ce passage, le texte décrit l’aspect de la jalousie, de la haine et des persécutions générées par l’outrecuidant qui feint la sainteté, l’un des trois puissants ennemis. Ces mauvais moines outrecuidants feignant la sainteté, même s’ils se parent d’actions apparemment méritoires, ignorent les moyens utilisés par l’Eveillé, au sein de son enseignement essentiel. En fait, ils ne savent pas que le Bouddha prêche le Dharma à l’aide de différents moyens répondant aux prédispositions.

“En fonction des prédispositions” signifie que l’Eveillé ne prêche pas le Dharma en fonction de son cœur véritable, mais en fonction de l’humble prédisposition  de ses auditeurs. Autrement dit, les mauvais moines ne savent pas qu’au sein même de l’enseignement du Bouddha, il existe une distinction entre la vérité et les moyens. S’ils ignorent que le Bouddha enseigne le Dharma en fonction des prédispositions, cela signifie qu’ils ignorent aussi le Dharma véritable de l’Eveillé. Ne pas savoir faire la distinction entre le Dharma enseigné en fonction des prédispositions et le Dharma véritable, croire que les moyens répondant  aux prédispositions représentent le Dharma véritable, entraîne l’apparition d’une terrible confusion. Aussi, ces mauvais moines conçoivent de la haine et de la jalousie, envers le moine prêchant la véracité du Sutra du Lotus et le critiquent.

Ils fronceront les sourcils” de mécontentement, et l’on verra à maintes reprises des expulsions”, prophétie selon laquelle le bon pratiquant du Sutra du Lotus sera souvent expulsé de son lieu de villégiature.

Quatrième preuve par le sutra de l’offense au bon Dharma

Sutra de l’Extinction chapitre « Nature de l’Ainsi-venant »

La citation suivante est extraite du chapitre « Nature de l’Ainsi-venant » du Sutra du Nirvana.

“Après mon extinction, dans une myriade de centaines d’années, alors que les saints des quatre voies seront eux aussi entrés en extinction

“Les saints des quatre voies” : quatre degrés existent au cours de la pratique de l’ascèse de la voie du Bouddha : le premier fruit[42], le deuxième fruit[43], le troisième fruit[44] et le quatrième fruit[45]. Les saints libérés des égarements des vues ou des égarements des pensées, grâce à ces pratiques, utilisent les vertus obtenues pour guider le monde. Cependant, après la mort de l’Eveillé, ces saints, eux aussi disparaissent. Alors, l’enseignement du Bouddha passe de la période de la Rectitude du Dharma, au cours de laquelle ce dernier fut correctement transmis à la période de la Semblance, où l’enseignement devient formaliste. C’est à ce moment que les mauvais moines apparaissent.

Après la disparition du Dharma correct, des moines seront dans la Semblance du Dharma. Ils sembleront respecter les commandements mais liront peu les sutras. (…) « J’ai obtenu l’état d’arhat ».

Le sutra prédit l’apparition de moines qui, sans éprouver le moindre sentiment de profond regret ou de réflexion quant à l’orthodoxie et l’hérésie, attendus de pratiquants du bouddhisme, s’attachent aux désirs avides. Ces mêmes personnes prétendent “j’ai obtenu l’état d’arhat”, autrement dit : je suis un saint, aussi je suis supérieur à tous, plus remarquable qu’eux. Dans la période de la Fin du Dharma, les hommes se vantant ainsi ne sont pas des gens dignes d’intérêt.

Dans la Nichiren Shôshû, l’étiquette demande à ce que l’on joigne les mains pour saluer le Souverain du Dharma. Personnellement, au fond de moi, je suis très embarrassé lorsque l’on me salue de la sorte. Je suis sincèrement confus lorsque des gens joignent les mains devant un homme tel que moi. A ces moments, je récite Daimoku intérieurement. Jusqu’à présent, je n’ai jamais proféré de paroles telles que : « je suis important » ou « j’ai obtenu tel ou tel état de vie ».

Par contre, les mauvais religieux disent effrontément : « je suis vraiment quelqu’un d’important ». Le sutra prédit ainsi l’apparition de mauvais moines.

A l’extérieur, ils manifesteront la sagesse et la bonté, mais intérieurement, ils seront avides et jaloux.

Extérieurement, ils auront l’apparence de bons moines, sages et avenants. Mais intérieurement, ils berceront fortement les laids sentiments d’avidité et de jalousie. Ils se tairont, pensant que le mutisme est la voie menant à l’éveil.

Ils seront comme ces brahmanes pratiquant le dharma du silence.

Une catégorie de voies extérieures en Inde pratique le mutisme incessant. Pensant obtenir l’éveil par cette ascèse, les personnes qui les suivent ne prononcent jamais un mot, ce qui constitue une pratique erronée. Progresser sur cette voie s’appelle le “dharma du silence”.

En tout état de cause, pourquoi ces mauvais moines sont-ils “comme ces brahmanes pratiquant le dharma du silence” ? Afin de guider les hommes, il faut parler et échanger avec eux. Il est nécessaire de faire accorder les sentiments. Par exemple, je suis en train de vous parler, mais il est nécessaire que nous soyons des moines et des laïques dont les esprits communiquent. Ensuite, il faut que, mutuellement, nous étudiions et pratiquions ce qui est juste, que mutuellement, nous nous édifiions et, simultanément, sans cesse, priions pour ce qui est juste. A l’inverse, se taire pour paraître sage à l’extérieur, donner le change en se faisant passer pour remarquable, est l’apanage des mauvais moines. C’est ce que le texte indique en les décrivant “comme ces brahmanes pratiquant le dharma du silence” .

En réalité, ils manifesteront une image de moine sans être des moines. Consumés par leurs idées personnelles, ils bafoueront le bon Dharma”. Fin de citation.

Ce ne sont pas des moines. Ils n’ont que l’aspect de moines. C’est pourquoi, ils développent des points de vue hérétiques et erronés, ils ne tiennent pas compte de la causalité ; c’est ce que l’on appelle les opinions personnelles. Ces dernières sont virulentes comme le feu et ces moines calomnient le bon Dharma.

Ce sont là les propres paroles de Nichiren Daishônin. Jusque là, il a cité diverses phrases de sutra. Si l’on observe le monde à travers ces phrases, force est de dire qu’il est rempli de ces mauvais moines. Il est donc nécessaire d’admonester ces mauvais moines. Admonester, c’est les amener à un enseignement apte à les faire corriger leur mauvaise attitude. Plus encore, le mot admonester renferme le sens de châtiment. En fait, il s’agit de shakubuku. Du point de vue du bon Dharma et de la doctrine correcte, l’enseignement de Nichiren Daishônin est l’admonestation des doctrines et des moines hérétiques : c’est shakubuku. C’est ce qui paraît clairement dans la phrase suivante : “sans admonester ces mauvais moines, comment peut-on faire œuvre de bien”  représente la conclusion de la réponse de cette partie.
 

 

 

Quatrième dialogue
Révélation justifiée de la cause des malheurs

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Dans le quatrième débat, le visiteur, entendant les paroles de l’hôte, voit sa colère décupler. Il pose alors une question sévère. “Qui donc qualifiez-vous de mauvais moine” ? Parvenu à ce point de la discussion, pour la première fois, l’hôte dévoile le nom de celui dont il a parlé jusqu’à présent, à mots couverts. Il s’agit en fait de Hônen. Il cite alors des passages de l’ouvrage de ce dernier, intitulé Passages sur la sélection, puis analyse leur contenu, démontrant ainsi qu’il s’agit de doctrines hérétiques destructrices du Bouddha et du Dharma, véritables causes des désastres et des catastrophes. Tel est le contenu de ce quatrième dialogue.

Agissant en accord avec le ciel et la terre, étend son influence.

Il s’agit de l’attitude du souverain régnant sur le monde, soucieux de ne pas mêler son profit, ses désirs ou ses sentiments personnels. Il y a ici un sens de conformité aux lois du ciel et de la terre pour prendre soin de l’ensemble du peuple de manière naturelle. Il agit en accord avec le ciel et la terre pour le bien du peuple. Cette expression est issue d’un livre chinois intitulé Le livre de la piété filiale[46] dans lequel il est écrit : “Se conformer à la lumière du ciel, se fonder sur l’éthique de la terre et, de là, faire régner l’ordre sur le monde”.

Le saint, capable de distinguer le bien du mal, règne sur le monde.

Le mot “saint” (shônin) apparaît à maintes reprises au long du Traité sur la sérénité du pays. Le saint dont il est question ici est le saint au niveau de la loi mondaine. Il s’agit par exemple de Hôjô Yasutoki, auteur du “Code de lois de Jôei” sur la base duquel il gouverna, ou encore de Hôjô Tokiyori, entré dans la voie au temple Saimyôji qui établit sa politique après s’être livré à des investigations dans tout le pays pour en connaître la situation réelle. Ces personnages, à leur époque, menèrent une politique équitable et sauvèrent de nombreux habitants. C’est en ce sens que le qualificatif “saint” leur est ici attribué. Ils étaient capables de connaître la vérité et de distinguer le bien du mal. Ce passage décrit les hommes politiques de l’époque.

Les moines et leurs disciples, en ce monde, sont dignes de la confiance de l’empire dans son ensemble. Un monarque éclairé ne saurait confier sa foi à un mauvais moine.

Les moines font l’objet de la prise de refuge des hommes sur cette terre. Dès lors, si de mauvais moines apparaissaient, il n’y a aucune raison que le souverain leur attribue sa confiance

S’ils n’étaient pas des saints, les sages ne les vénéreraient pas.

Contrairement au passage précédent, le mot “saint” désigne ici les moines de chaque école. S’ils étaient véritablement indignes d’être vénérés comme saints, il serait impossible que les sages de ce monde les vénèrent. Le mot “saint” apparaît deux fois dans ce court passage, avec chaque fois une acception différente.

A présent, en raison du respect que leur témoignent les sages et les saints, on peut comprendre le poids des dragons et des éléphants.

Ici, les mots “sages” et “saints” font référence aux sages et aux saints séculiers. Le fait que ces derniers leur font bénéficier de leur respect et de leur vénération, les vertus des moines actuels ne sont nullement légères, ressemblant ainsi à celles des dragons et des éléphants. Les dragons comme les éléphants désignent les moines de haut rang aux vertus remarquables. Parmi les animaux, les dragons et les éléphants sont tenus pour supérieurs. Dans le même sens, ils désignent ici des moines très érudits aux vertus extrêmement nobles. Leur position et  leur influence morale ne sont pas minimes.

Pourquoi, dès lors, vomissez-vous des propos irréfléchis et médisez-vous avec tant de véhémence ? Qui qualifiez-vous donc de mauvais moine ? Je veux entendre vos explications détaillées”.

En réaction aux propos de l’hôte, le visiteur lui reproche de proférer des “propos irréfléchis”. Il lui reproche en l’occurrence de “dire des mensonges”, il lui demande “pourquoi vous livrez-vous à de telles médisances” et, enfin, “qui désignez-vous par mauvais moine” ? Alors, enfin, commence la réponse de l’hôte au cours de ce quatrième débat.

A partir de là, des points doctrinaux précis sont en particulier développés.

L’hôte dit : “Sous le règne de l’empereur Gotoba, il y eut un homme appelé Hônen, auteur des « Passages sur la sélection ».

Le nom “Hônen” est cité ici. Hônen est le fondateur de l’école de la Terre pure au Japon. C’est le premier à avoir récité Namu Amidabutsu. Aujourd’hui, l’école de la Véritable terre pure de Shinran est plus connue que l’école de la Terre pure de Hônen. Par exemple, les temples Honganji de l’ouest ou Honganji de l’est, à Kyoto, sont des temples principaux de l’école de Shinran. En fait, Shinran était disciple de Hônen. Il vécut à peu près à la même époque que Nichiren Daishônin, étant néanmoins apparu peu de temps avant. Chose étrange, Nichiren Daishônin n’a jamais rien dit au sujet de Shinran. Le nom de ce dernier n’apparaît nulle part, dans aucun des plus de quatre cents écrits de Nichiren Daishônin. Par contre, Hônen fait l’objet de nettes réfutations dans de nombreux Gosho.

Hônen était originaire de la préfecture d’Okayama. Il existe aujourd’hui encore un village appelé Kume, à environ trente kilomètres au nord de l’actuelle ville d’Okayama, considéré comme le lieu de naissance de Hônen. Il existe à cet endroit un temple de l’école de la terre pure, appelé Tanjôji ou “Temple de la naissance”. A l’époque, cette préfecture était appelée Province de Mimasaka. Hônen devint disciple de Kangaku à l’âge de neuf ans. A quinze ans, il se rendit au mont Hiei, où il lut cinq fois les trois écrits majeurs du Tendai, ainsi que l’intégralité des sutras. C’était sans doute un formidable érudit. Or, à quarante-trois ans, il eut entre les mains les commentaires écrits par Shandao sur le Sutra de la Contemplation des vies infinies, traitant de la terre pure. A partir de ce moment, il voua une profonde admiration à l’invocation du Bouddha. Il quitta alors l’école du Tendai et fondit celle de l’Invocation du Bouddha. A soixante-six ans, il écrivit les Passages sur la sélection, ouvrage en deux fascicules, par lequel il parachevait les doctrines de la Terre pure.

Par lequel il détruisit les saints enseignements prêchés par l’Eveillé tout au long de sa vie et perturba largement les êtres dans les dix directions.

En fait, les Passages sur la sélection désavouent complètement l’intégralité des saints enseignements du Bouddha. Pour cela, il perturbe largement les êtres dans les dix directions.

Le mot “sélection” du titre de cet ouvrage est composé de deux idéogrammes (sen et chaku) signifiant tous deux “choisir”. Dès lors, qu’a donc choisi et sélectionné Hônen ? En fait, il a choisi uniquement les doctrines de la Terre pure et, par là même, rejeté les doctrines de la voie sainte. Il rejeta la totalité de l’immense enseignement de l’Eveillé, ne sélectionnant que les doctrines de la Terre pure. Tel est le sens du mot “sélection”.

Dans ce « Recueil des passages sélectionnés », il écrivit : “Daochuo, maître en concentration établit deux doctrines : la voie sainte et la terre pure, préconisant le rejet de la voie sainte et la prise immédiate de refuge dans la terre pure”.

Nichiren Daishônin cite d’abord un extrait des Passages sur la sélection. Il cite quelques extraits clé. En premier lieu, Hônen reprend les assertions de Daochuo (j. Dôshaku) établissant deux doctrines : la voie sainte et la terre pure et exhortant à rejeter la première pour prendre uniquement refuge dans la seconde.

Né en 562, Daochuo, le deuxième fondateur de l’école de la Terre pure en Chine, était contemporain de Zhiyi. A quatorze ans, il entra dans les ordres. A cette époque, en Chine, il existait une Ecole de l’Extinction, fondée sur le Sutra de l’Extinction (Nirvana). Ce sutra fut prêché par le vénéré Shakya au moment de son extinction. L’école fondée sur le Sutra du Nirvana est donc appelée Ecole de l’Extinction (Nehan shû). Elle ne fut pas transmise au Japon, mais existait à l’époque en Chine. En tant que moine de cette école, Daochuo étudia sans relâche le Sutra de l’Extinction. Il aurait donné à vingt-quatre reprises des cours sur ce sutra. Toutefois, à quarante-huit ans, il entra au temple Xuanzhong où il lut une épitaphe de Tanluan, premier fondateur de l’école de l’Invocation du Bouddha et ressentit quelque chose. Il se convertit alors aux enseignements de la Terre pure et écrivit le Recueil de passages concernant la renaissance sur la terre pure, enseignant qu’il fallait prendre refuge dans la terre pure.

Les raisons pour lesquelles Daochuo se convertit à la terre pure sont les suivantes. Beaucoup de temps s’est écoulé depuis la mort du vénéré Shakya. Le monde courant à sa perte, le nombre d’êtres pour lesquels les profonds enseignements de Shakyamuni sont désormais totalement inefficaces a augmenté. Une autre raison réside dans le fait que les doctrines de la voie sainte : les sutra Guirlande fleurie, Agama, Doctrines diverses, Sagesse et Lotus sont trop complexes pour les êtres de l’ère finale. Ceux-ci sont incapables de les comprendre. Or, seules les doctrines de la Terre pure sont en mesure de les sauver.

Certes, les doctrines de la voie sainte sont profondes, leurs enseignements, leurs pratiques et leurs principes sont complexes. Cependant, le Sutra du Lotus, enseignement ultime des enseignements du vénéré Shakya, révèle une voie aisée permettant à tous les hommes d’être sauvés. Cette voie fut enseignée et pratiquée dans la Fin du Dharma par Nichiren Daishônin, récipiendaire de la transmission du fondement du Sutra du Lotus, sous la forme de Nam Myôhôrengekyô, qui contient toutes les difficultés et les œuvres et vertus des doctrines de la voie sainte. Celui qui récite Nam Myôhôrengekyô, quel qu’il soit, sera immanquablement sauvé. En même temps, même dans les aspects du monde, de grands bienfaits sont perçus en réponse à la foi dans Nam Myôhôrengekyô. Il est dès lors inutile de l’éviter ou de l’abandonner parce qu’il est difficile. Je souhaite que vous compreniez bien ce point.

Or, il est souligné ici que les Passages sélectionnés citent Daochuo exhortant à rejeter la voie sainte et à prendre refuge dans les doctrines de la Terre pure.

Pour commencer, il détermine deux formes d’enseignements de la voie sainte. Ensuite, (Paroles de Daochuo)

Ces deux enseignements, dans le cadre de la voie sainte, sont le Mahayana (Grand véhicule) et le Hinayana (Petit véhicule). Puis, le mot “Ensuite” signifie que Nichiren Daishônin abrège le texte de Hônen. En fait, ce dernier, reprenant la signification du Recueil de Daochuo, écrit dans ses Passages sélectionnés : “Premièrement, il y a le Grand véhicule, deuxièmement le Petit véhicule. Au sein du Grand véhicule, il existe des disparités entre l’exotérique et l’ésotérique, le provisoire et le véritable. Toutefois, le sens du Recueil est que seuls le Grand véhicule exotérique et le Grand véhicule provisoire existent. C’est pourquoi, ils correspondent aux pratiques cycliques pendant des éons”.

Autrement dit, le Grand véhicule est composé des enseignements exotériques et des enseignements ésotériques, des enseignements provisoires et des enseignements véritables. Les enseignements ésotériques désignent le Shingon (Formules incantatoires). Les enseignements exotériques, quant à eux, se rapportent aux autres enseignements du Grand véhicule : Ornementation fleurie, Doctrines diverses, Sagesse et Lotus. Le Grand véhicule exotérique désigne le Mahayana dans son ensemble, hormis les enseignements ésotériques. Le Grand véhicule provisoire désigne les enseignements des moyens du Grand véhicule. Le sens premier du Recueil de Daochuo est que “seuls le Grand véhicule exotérique et le Grand véhicule provisoire existent”. Le Grand véhicule en général (par rapport aux enseignements ésotériques) et le Grand véhicule des moyens réclament tous des pratiques cycliques pendant des éons, autrement dit pendant une très importante durée de temps. Daochuo demande à rejeter ces enseignements.

Il n’évoque pas clairement le Sutra du Lotus. Le Grand véhicule exotérique et le Grand véhicule provisoire désignent les moyens et le Grand véhicule autre que les enseignements ésotériques, qui correspondent tous à des pratiques cycliques au cours de nombreux éons. En fait, à part le Sutra du Lotus, tous les enseignements du Grand véhicule, comme ceux du Petit véhicule, demandent effectivement des pratiques cycliques à travers de nombreux éons. En un mot, ils ne permettent pas de réaliser le but de devenir Bouddha dès ce corps. Devenir Bouddha réclame en effet des ascèses extrêmement longues.

La réflexion fondée sur cet argument révèle que le Gand véhicule ésotérique et le Grand véhicule véritable font tous deux partie de la voie sainte. (Paroles de Hônen)

Il s’agit là des paroles mystificatrices de Hônen. Alors que le sens du Recueil de passages concernant la renaissance sur la terre pure était simplement que les pratiques cycliques au cours de nombreux éons se rapportent au Grand véhicule exotérique et au Grand véhicule provisoire, autrement dit le Grand véhicule en général, qu’il convient, selon Daochuo de rejeter, Hônen, lui, rajoute sa propre opinion. Il exagère en effet l’idée de Daochuo, disant : “le Gand véhicule ésotérique et le Grand véhicule véritable font tous deux partie de la voie sainte”. Ces paroles insensées exhortent à rejeter le Grand véhicule ésotérique, représenté par le Shingon, et le Grand véhicule véritable, autrement dit, le Sutra du Lotus. En d’autres termes, le Recueil de passages concernant la renaissance sur la terre pure dit que les enseignements du Grand véhicule en général, réclamant des pratiques cycliques à travers de nombreux éons, ne sont d’aucune utilité pour les êtres. Hônen, lui, en rajoute, prétendant que le Sutra du Lotus comme le Shingon sont inutiles.

Dès lors, le cœur des huit écoles : Formules incantatoires, Cœur du Bouddha, Tendai, Ornementation fleurie, Trois traités, Nature des dharma, Traité des terres et des Collections est compris dans cette notion”. (Paroles de Hônen)

Il s’agit, là encore, des propos de Hônen. Les huit écoles : Formules incantatoires (Shingon), Cœur du Bouddha, autrement dit le Zen, Tendai, autrement dit le Sutra du Lotus, toujours existantes, ainsi que les écoles  de l’Ornementation fleurie (kegon), Trois traités (san ron), Nature des dharma (hossô), Traité des terres (jiron) et des Collections (shôron) faisant toutes parties de la voie sainte, doivent être rejetées. Les deux dernières, Jiron et Shôron, existèrent en Chine, mais ne furent jamais transmises au Japon. Par ailleurs, du point de vue des doctrines, elles furent absorbées par les écoles des Trois traités et de la Nature des Dharma.

En tout état de cause, “le cœur des huit écoles est compris dans cette notion” signifie que dans les Passages sélectionnés, Hônen, tout en citant les phrases du maître en méditation Daochuo, va encore plus loin, exhortant à rejeter l’ensemble des enseignements des voies saintes et à prendre exclusivement refuge dans la terre pure. Nichiren Daishônin cite ici cette mauvaise doctrine.

Les annotations du « Traité sur la renaissance » du maître du Dharma Tanluan indiquent : (Paroles de Hônen)

Il s’agit ici des Annotations du traité sur la renaissance, commentaires de Tanluan sur le Traité sur la renaissance de Vasubandhu.

« Je constate avec respect que le « Vibhasa des dix stations » du bodhisattva Nagarjuna stipule : (Paroles de Tanluan)

Nagarjuna, célèbre bodhisattva ayant prêché les enseignements du Grand véhicule, apparut en Inde. Au sein de son œuvre épistolaire, il existe le Vibhasa des dix stations. “Vibhasa” signifie “vastes explications”. Autrement dit, il s’agit de larges commentaires sur les enseignements du Grand véhicule. Quant aux dix stations, normalement, il devrait être indiqué “Vibhasa des dix terres”. Il existe cinquante et un degrés de bodhisattva dans le Grand véhicule : les dix fois, les dix stations, les dix pratiques, les dix transferts, les dix terres et l’éveil égal. Les dix terres se situent au plus haut niveau. Le Vibhasa des dix stations traite de la première et de la deuxième terre au sein des pratiques des bodhisattva des dix terres. En fait, ce traité aurait dû s’intituler “dix terres”, mais il est appelé “dix stations”, expression qualifiant des degrés inférieurs.

“Deux voies existent quant à la recherche du degré de non régression par les bodhisattva. (Paroles de Nagarjuna)

Le degré de non régression (abidatchi) possède la même signification que l’expression du chapitre « Durée de la vie » que vous lisez tous les jours lors de la pratique : “Terre de non régression” (a yui otchi ji). Le passage entier est : “Nous-mêmes, bien que demeurant sur la Terre de non régression, ne pourrions avoir accès à une telle chose” (ga tô jû, a yui otchi ji, o ze ji chû, yaku sho fudatsu). Ces paroles sont celles du bodhisattva Maitreya. Ce dernier affirme demeurer sur la terre de non régression (a yui otchi ji), autrement dit, le degré de non régression (abidatchi). Pour donner une explication simple, je dirai qu’il s’agit d’un état de vie de bodhisattva extrêmement profond, dans lequel, quoi qu’il arrive, on ne régresse jamais. C’est un état de vie profond, proche de celui de l’Eveillé. Même à ce niveau de non régression de abidatchi, il existe la non régression du degré, la non régression de la pratique et la non régression de la pensée. Il s’agit ici plus particulièrement de la non régression de la pensée. Pour obtenir un état de vie de bodhisattva d’une telle profondeur, il existe “deux voies”.

La première est la voie des pratiques ardues. La seconde est la voie des pratiques aisées”. (Paroles de Nagarjuna)

L’une des deux voies est celle des pratiques difficiles, l’autre est celle des pratiques faciles.

Les Annotations du traité sur la renaissance donnent des exemples. Ainsi, lorsqu’on marche sur la terre, pas à pas, on rencontre des routes dénivelées, comme des cols et des vallées, ce qui fatigue les jambes, et représente une austérité très pénible. Pour se rendre au même endroit, si l’on emprunte un bateau et que l’on traverse alors les mers, on peut y aller aisément. Telle est la voie des pratiques faciles.

La voie des pratiques ardues correspond à la doctrine de la voie sainte. La voie des pratiques aisées correspond à la doctrine de la terre pure. (Phrase de Hônen)

C’est là le commentaire de Hônen. La “voie des pratiques ardues” est “la doctrine de la voie sainte” et la “voie des pratiques faciles” est “la doctrine de la terre pure”. Les doctrines de la voie sainte étant difficiles, il faut les abandonner.

Les étudiants de l’école de la terre pure doivent absolument savoir ce point avant tout. Même s’ils ont auparavant étudié la doctrine de la voie sainte et ont l’intention d’entrer dans la doctrine de la terre pure, ils doivent rejeter la voie sainte et prendre refuge dans la terre pure”. (Paroles de Hônen).

Du point de vue des pratiques difficiles et des pratiques faciles évoquées par Tanluan, il faut faire un choix entre les doctrines de la voie sainte et les doctrines de la Terre pure. Il est nécessaire, autrement dit, de rejeter les doctrines de la voie sainte et d’adopter celles de la Terre pure.

C’est à présent à Chandao (j. Zendô) d’être cité. Chandao était un moine de l’école de la Terre pure en Chine, vivant à l’époque des Tang (7e siècle). Il était disciple de Daochuo, considéré comme le troisième fondateur de l’école de la Terre pure en Chine. Au début, il étudia les doctrines de l’école des Trois traités, ou encore, le Sutra de Vimalakirti et le Sutra du Lotus auprès de Ming Cheng, disciple du grand maître Jia Xiang[47]. Pourtant, par la suite, à la suite de Daochuo, il conçut une foi profonde pour les doctrines de la Terre pure. Il écrivit les Commentaires du Sutra de la Contemplation, interprétation du Sutra sur la Contemplation des vies infinies. Puis, les Louanges de la renaissance et la Louange de la pratyutpanna[48], œuvres relatives aux doctrines de la Terre pure.

Pourtant, à la fin, cet homme, désirant aller au plus vite sur la terre de la félicité suprême, située à dix mille milliards de terres dans la direction de l’ouest, demeure du Bouddha Amida, grimpa sur un arbre de son habitation monacale et plongea dans le vide. Il se fractura la hanche et décéda dans la souffrance. Ceci dit, en tout cas, cet homme inculqua énormément l’Invocation du Bouddha.

Il dit encore : le Précepteur Shandao distingua la pratique correcte des pratiques grossières, exhortant à rejeter les pratiques grossières et prendre refuge dans la pratique correcte. (Paroles de Hônen)

L’enseignement de Shandao est cité dans les Passages sélectionnés. Dans son Commentaire sur le Sutra de la Contemplation des vies infinies, Shandao définit cinq sortes de pratiques. Il fit cette analyse, fondé sur la signification du Sutra de la Contemplation des vies infinies. En outre, en ce qui concerne le contenu du Sutra de la Contemplation des vies infinies, je tiens à préciser que tout sutra représentant un moyen salvifique ne constitue en aucun cas la vérité. Je vais commenter ce sutra uniquement à titre informatif, pour faire comprendre de manière plus compréhensible le sens principal du Traité sur la Sérénité du pays, d’autant que les doctrines du Nenbutsu (invocation du Bouddha) sont évoquées tout au long de ce traité à partir du point suivant. Je tiens donc à prévenir, si par hasard il se trouvait des personnes dans ce cas, qu’il ne faudrait pas penser : “mais c’est bien ça !”.

La première des cinq pratiques est la pratique correcte de la lecture et de la récitation des trois sutras de la Terre pure, à l’exclusion de tout autre sutra. La deuxième est la pratique correcte de la contemplation, consistant à observer uniquement le Bouddha Amida[49] et la Terre pure. Il ne faut pas observer les autres bodhisattva ou Bouddha. La troisième pratique est la pratique correcte de la vénération, consistant à vénérer uniquement la triade d’Amida, enseignée dans le Sutra de la Contemplation des vies infinies, triade constituée du Bouddha Amida au centre, entouré de ses deux assesseurs les bodhisattva Avalokitésvara[50] et Mahasthamaprapta[51]. La quatrième pratique est la pratique correcte de la récitation du nom. Elle consiste à réciter le nom du seul Bouddha Amida. Cette pratique correcte de la récitation du nom fait donc abstraction du Bouddha Shakyamuni, de l’Ainsi-venant Maître des remèdes (Yakushi Nyorai) et de tous les autres Bouddha, consistant en la seule pratique de la récitation de Namu Amidabutsu. La cinquième pratique est la pratique correcte de la vénération et de l’offrande par laquelle est loué et fait l’offrande uniquement au Bouddha Amida.

En outre, Shandao subdivisa ces pratiques en pratique principale et pratiques auxiliaires. Les première, deuxième, troisième et cinquième pratiques constituent les pratiques auxiliaires, la quatrième pratique, celle de la récitation du nom, représente la pratique principale.

De surcroît, dans son Commentaire sur le Sutra de la Contemplation des vies infinies, Shandao écrivit : “Hormis ces deux formes de pratiques, principale et auxiliaires, tous les autres actes de bien sont appelés pratiques grossières”. Les pratiques grossières sont le contraire des pratiques correctes, elles signifient pratiques erronées.

Or, Hônen, lui, va encore plus loin. En effet, il prend la proposition des cinq pratiques correctes pour, a contrario, définir cinq pratiques grossières. Autrement dit, alors que Shandao regroupait en une catégorie les pratiques grossières, Hônen, lui, précise cinq pratiques grossières, vis-à-vis des cinq pratiques correctes.

Il définit ainsi la première des cinq pratiques grossières par la lecture et la récitation de tous les sutras à l’exception des trois sutras de la Terre pure. La deuxième pratique grossière est la contemplation de tout élément autre que le Bouddha Amida et la Terre pure. La troisième pratique grossière est la vénération de tout autre élément que la triade d’Amida. La quatrième pratique grossière est la pratique de la récitation de noms, la prise de refuge en d’autres Bouddha qu’Amida. La cinquième pratique grossière est la pratique de la vénération et de l’offrande à d’autres Dharma que le Bouddha Amida. Finalement, Hônen va plus loin que Shandao, en définissant de manière précise cinq formes de pratiques grossières, exhortant ainsi à ne pas avoir foi, à ne pas pratiquer autre chose que le Bouddha Amida.

Je reviens à présent au texte du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude.

Premièrement, la pratique grossière de la lecture et de la récitation : la lecture et la récitation de tous les sutra du Grand et du Petit véhicule, exotériques et ésotériques, hormis le Sutra de la Contemplation et les autres sutra traitant de la renaissance sur la Terre pure, sont appelées pratiques grossières. (Paroles de Hônen)

Il s’agit là de la première des cinq pratiques grossières évoquées à l’instant.

Troisièmement, la pratique grossière de la vénération : la vénération et le respect de tous les Bouddha, bodhisattva et divinités terrestres et célestes, hormis Amida, représentent les pratiques grossières de la vénération. (Paroles de Hônen)

En fait, Hônen développe ses cinq pratiques grossières, mais Nichiren Daishônin ne cite, en particulier dans le Traité sur la Sérénité du pays, que la première et la troisième. La raison de ce choix réside sans doute dans le fait que les offenses au Dharma, commises dans le cadre de la lecture et de la vénération, sont particulièrement graves. Je pense donc que c’est la raison pour laquelle Nichiren Daishônin ne cite ici que la première et la troisième des pratiques grossières.

Je dis : en lisant ces phrases, il convient de rejeter par tous les moyens le grossier et se consacrer à la pratique exclusive. (Paroles de Hônen)

Le mot “je” désigne Hônen qui, dans ces Passages sélectionnés, parle à la première personne, ce qui signifie que ce traité développe les opinions personnelles de Hônen. Quant à “ces phrases”, il s’agit du Commentaire sur le Sutra de la Contemplation des vies infinies de Shandao, au sein duquel nous trouvons l’expression dix sur dix, cent sur cent (accèdent à) la renaissance. (…) Pas une sur mille”. C’est de ce passage dont parle Hônen en disant “ces phrases”.

Qui pourrait abandonner la pratique exclusive permettant la renaissance à cent personnes sur cent et s’attacher opiniâtrement aux pratiques grossières ne le permettant pas à une sur mille ? Pratiquants, réfléchissez y bien ! (Paroles de Hônen)

La “renaissance de cent personnes sur cent” signifie que toutes, telles quelles, sans exception, renaissent sur la terre pure de la félicité extrême. Telles sont les œuvres et vertus des pratiques correctes. A l’opposé, “pas une sur mille” désigne les pratiques grossières de la voie sainte. “Pas une sur mille” est l’expression niant le plus activement la doctrine de la voie sainte.

Nichiren Daishônin  stigmatise ensuite, de nouveau, les Passages sélectionnés. Ces extraits étant extrêmement résumés, ils sont difficiles à comprendre.

La liste des corbeilles de Zhen Yuan (Paroles de Hônen)

Avant l’Inventaire des corbeilles de Zhen Yuan (j. teigen nyûzô roku), il existait une liste des enseignements bouddhistes appelée Inventaire des corbeilles de Kai Yuan (j. Kaigen nyûzô roku). En la première année de l’ère Zhen Yuan, sous le règne de l’empereur Xuan Zong de la dynastie des Tang, obéissant à un édit impérial, une comparaison éclairée des commentaires fut effectuée sur la base de l’Inventaire des corbeilles de Kai Yuan, déjà existant, ce qui donna le nouvel inventaire, celui de Zhen Yuan. Lorsqu’on parle des “cinq mille, sept mille rouleaux des sutra”, l’Inventaire des corbeilles de Zhen Yuan correspond aux sept mille rouleaux. Il existe quelques différences dans les chiffres, mais ce phénomène provient certainement d’une différence inhérente aux critères de comptage.

Du Sutra de Grande sagesse, en six cents fascicules, au Sutra de la Présence permanente des dharma (Phrase de Hônen)

L’Inventaire des corbeilles de Zhen Yuan recense six cents fascicules pour le Sutra de la Grande sagesse. Quant au Sutra de la Présence permanente des dharma, j’ai procédé à une vérification. Il existe bien, mais est tellement bref, que l’on peut s’étonner de le voir figurer au sein d’une liste de sutra.

Il recense six cent trente-sept sutras ésotériques et exotériques du Grand véhicule, répartis en deux mille huit cent quatre-vingt-trois fascicules. Tous ces sutra du Grand véhicule sont englobés dans une seule stance.” Il dit encore “Il faut le savoir ! Avant de se conformer aux autres, (l’Eveillé) ouvrit pour un temps les portes de la concentration et de la dispersion. Toutefois, après s’être conformé à lui-même, il referma par contre les portes de la concentration et de la dispersion. Après les avoir ouvertes, il les referma pour toujours, se consacrant uniquement à la seule porte de l’invocation du Bouddha.” (Paroles de Hônen)

Hônen dit que tous ces sutra du Grand véhicule sont englobés dans une seule stance.” Quelle peut donc être cette “seule stance” ? Il s’agit en fait de la porte de la pratique (j. gyômon) prêchée dans le Sutra de la contemplation des vies infinies, doctrine subdivisée en trois : la porte de la bonne (pratique) de la concentration (j. jôzen mon), celle de la bonne (pratique) de la dispersion (j. sanzen mon) et la porte unique de l’invocation du Bouddha (j. nenbutsu ichimon).

1.        Porte de la bonne dispersion

1.      Bonheur séculier : il s’agit de la voie engendrant le bonheur mondain.

1.        Piété filiale envers son père et sa mère : c’est accomplir son devoir de piété filiale envers ses parents

2.        Se dévouer aux maîtres et supérieurs : c’est servir son maître et ses aînés.

3.        Avoir un cœur compatissant et s’abstenir de tuer : ne pas ôter la vie à d’autres en raison d’un cœur empli de compassion.

4.        Pratiquer les dix biens : il existe dix bontés, par opposition aux dix mauvaises actions. Cette pratique consiste à œuvrer au sein du bien.

Telles sont les actions engendrant le bonheur dans le sens séculier.

2.        Bonheur du précepte : il s’agit là du bonheur accumulé par la pratique, accomplie sur la base des préceptes issus de l’enseignement du Bouddha.

1.        Recevoir et garder les trois refuges : les trois refuges, c’est prendre refuge dans les trois trésors : Bouddha, Dharma, Moine.

2.        Accomplir les multiples préceptes : c’est respecter et accomplir les divers préceptes et commandements. C’est quelque chose de très difficile, mais les enseignements bouddhiques du vénéré Shakya font largement état de préceptes et commandements.

3.        Ne pas violer la dignité : il s’agit là de la dignité de la bonne dispersion. Il s’agit en fait, à partir du moment de la réception des préceptes en tant que bouddhiste, de les mettre concrètement en application. Il s’agit donc de ne pas porter atteinte à la dignité au quotidien, que l’on  soit en mouvement, statique, assis ou couché.

3.        Bonheur de la pratique : il s’agit là du contenu concret de la pratique du Dharma du Bouddha.

1.        Ouverture du cœur à la boddhéité : il faut en premier lieu éveiller son cœur à la boddhéité.

2.        Croire profondément à la causalité : croire à la causalité est un élément d’une extrême importance. Le pratiquant, le croyant du Dharma ne doit jamais oublier ce point. Je souhaite que vous-mêmes le preniez pour vous et l’inscriviez en vous.

3.        Lire et réciter le Grand véhicule : il s’agit là d’une expression extraite des Passages sélectionnés, citée dans le Traité sur la sérénité du pays. Il s’agit en fait de la lecture des sutra du Mahayana.

4.        Encourager le pratiquant à progresser.

En fait, toutes les pratiques indiquées dans les sutras, y compris les doctrines de la voie sainte, entrent dans la lecture et la récitation du Grand véhicule, en tant que bonheur de la pratique. A ce sujet, Hônen dit“tous ces sutra du Grand véhicule sont englobés dans une seule stance”. La lecture et la récitation du Grand véhicule ne représente donc pour lui qu’une partie de la porte de la bonne dispersion à l’intérieur du Sutra de la contemplation des vies infinies.

2.        Porte de la bonne concentration

La porte de la bonne concentration désigne l’idéal tourné vers le Bouddha Amida de la terre pure de la félicité ultime. C’est concentrer son cœur et contempler Amida et la terre pure. Telle est la porte de la bonne concentration.

o        Contemplation du soleil, contemplation de l’eau : il s’agit de contemplations préliminaires.

o        Contemplation de la terre : il s’agit de penser à la terre de la félicité ultime.

o        Contemplation des arbres précieux, contemplation des tours précieuses et contemplation du siège de lotus (d’Amida) : ces trois contemplations représentent la rétribution du support. Il s’agit, autrement dit, de contempler le pays du Bouddha Amida.

o        Contemplation de l’image (d’Amida, d’Avalokitésvara et de Mahasthamaprapta) : il s’agit là de la contemplation de l’image et du corps réel, autrement dit, de la contemplation de la rétribution du principal. C’est, en d’autres termes, la rétribution du principal, au sein des deux rétributions (support = environnement et principal = personne). Dans ce cas, la rétribution du principal désigne le Bouddha. C’est donc la contemplation de la triade d’Amida, rétribution principale des œuvres et vertus.

o        Contemplation universelle : C’est contempler dans leur ensemble les deux rétributions du support et du principal.

o        Contemplation diverses : il s’agit de la contemplation d’Amida dans ses diverses manifestations.

Synthétisées, ces deux portes, concentration et dispersion, sont développées en fonction du cœur des autres. En fait, le  Sutra de la contemplation des vies infinies développe la totalité de ces pratiques, mais Hônen, lui, détermine qu’elles sont toutes prêchées en fonction du cœur des autres.

Ici, nous trouvons les expressions “en fonction du cœur des autres” (j. zui ta i) et “en fonction de son propre cœur” (j. zui ji i). Les autres, ce sont les êtres. C’est donc prêcher en fonction du cœur des êtres plongés dans l’illusion. Ces enseignements sont donc des moyens salvifiques. Ils ne représentent pas l’enseignement fondé sur le cœur véritable de l’Eveillé. Par contre, “en fonction de son propre cœur”, désigne l’enseignement correct délivré par l’Eveillé, en fonction de son propre cœur. Par conséquent, si l’on se fonde sur le jugement correct au sein des enseignements du Bouddha, seul le Sutra du Lotus représente l’enseignement donné en fonction du propre cœur du Bouddha, tous les autres étant donné en fonction du cœur des autres.

Toutefois, dans l’acception donnée par Hônen ici de l’expression “en fonction du cœur des autres”, l’ensemble des portes de la bonne dispersion et de la bonne concentration développées dans le Sutra de la contemplation des vies infinies ne représentent pas la vérité. Il exhorte donc à les refermer du point de vue de la pratique.

3.        L’unique porte de l’invocation du Bouddha

Or, pour Hônen, l’unique porte de l’invocation du Bouddha représente le cœur véritable du Bouddha Amida, dans son souci de sauver les êtres et représente donc l’enseignement donné en fonction de son propre cœur. Aussi, convient-il d’ouvrir cette porte. La porte unique de l’invocation du Bouddha signifie qu’il faut fermer les portes des pratiques de la bonne dispersion et de la bonne concentration et se consacrer uniquement la récitation du nom d’Amida en invoquant ce Bouddha dans son esprit, ce qui, d’après Hônen, représente l’unique porte menant à la renaissance sur la terre de la félicité ultime.

Sur quoi se fonde Hônen pour exhorter à ouvrir l’unique porte de l’Invocation du Bouddha ? En fait, à la fin du Sutra de la contemplation des vies infinies, on lit seulement : “L’Eveillé dit à Ananda : « Garde bien cette parole. Bien garder cette parole revient à garder le nom du Bouddha aux vies infinies »” (Phrase de Shakyamuni). “Garde cette parole” signifie garder le nom du Bouddha Amida et réciter sans cesse Namu Amidabutsu, que l’on soit en mouvement, statique, assis ou couché. Il s’agit de l’enseignement donné par le Bouddha Amida en fonction de son propre cœur et de la pratique à même de sauver les êtres.

Le pratiquant de l’invocation du Bouddha doit posséder trois formes de cœur. (Paroles de Hônen)

Après avoir enseigné la porte de la bonne dispersion et la porte de la bonne concentration, le Sutra de la contemplation des vies infinies enseigne l’aspect des neuf étapes de la renaissance et de leur esprit, puis enseigne la renaissance sur la terre pure. La première des neuf étapes de la boddhéité est le degré supérieur de l’éveil, pour lequel il faut se doter des trois formes de cœur nécessaires. Ces trois  formes de cœur sont premièrement le cœur parvenu à la sincérité (j. shijôshin). C’est désirer la renaissance sur la terre de la félicité ultime avec un cœur honnête. Le deuxième est le cœur profond (j. jinshin). C’est croire profondément que les vœux originels du Bouddha Amida sont aptes à nous sauver de toutes nos erreurs et de tous nos maux. Le troisième cœur est le cœur émettant le souhait d’accomplir le transfert. C’est transférer toutes ses racines de bien et se consacrer sincèrement au souhait de renaître sur la terre pure, terre de la félicité ultime.

Comparables à des bandes de brigands attirant en arrière le voyageur ayant déjà parcouru une ou deux étapes. (Paroles de Shandao)

Cette phrase est extraite du Commentaire sur le Sutra de la contemplation des vies infinies de Shandao. Dans ce commentaire, il interprète les trois cœurs. Après avoir expliqué l’éveil du cœur émettant le souhait d’accomplir le transfert, Shandao conte la parabole des “deux rivières et de la voie blanche” afin d’inciter à prendre foi dans la terre pure de l’ouest et éviter ainsi les difficultés des vues extérieures, erronées et divergentes (les enseignements des doctrines de la voie sainte).

La parabole des “deux rivières et de la voie blanche” est la suivante : un voyageur marchait sur une voie blanche toute droite, se dirigeant de la côte est vers la côte ouest. Soudain, au sud et au nord de ce chemin, il croise deux rivières. Celle du sud, autrement dit celle de gauche, était une rivière de feu. Celle du nord, autrement dit celle de droite, était une rivière d’eau. La voie blanche, empruntée par le voyageur, située juste entre les deux rivières, ne mesurait que quatre ou cinq sun (1 sun = environ 3,03 cm) de large et était par conséquent très dangereuse. Il n’existait pas d’autre route pour se rendre sur la côte ouest. De plus, derrière le voyageur, sur la côte est, des bêtes sauvages et des brigands le poursuivaient dans le dessin de lui nuire. Le voyageur hésita ; devait-il avancer sur la route blanche en tant que fil de vie, ou au contraire, retourner en arrière ? Derrière lui, venant de la côte est, une voix lui disait “avance sans douter !” et de la côte ouest, lui parvenait une autre voie lui disant “viens vite dans le pays de l’ouest, tu seras immanquablement sauvé !” Alors, le voyageur décida de progresser sur l’étroit chemin blanc.

Or, au moment où il avait progressé d’une ou deux étapes, autrement dit, alors qu’il progressait pas à pas, et c’est la citation du Traité sur la Sérénité du pays, des brigands, tentant de l’abuser lui criaient : “si tu continues sur cette route, tu mourras, reviens vite” ! Toutefois, le voyageur, imperturbable avança en direction de la côte ouest, parvint à traverser et atteignit la terre de la félicité. Tel est le résumé de la parabole des “deux rivières et de la voie blanche”.

Voici à présent la signification de cette parabole. Le voyageur symbolise le croyant de la porte de la terre pure. La côte est, quant à elle, représente le monde de l’endurance (j. shaba sekai), le monde de la souffrance et de la peine, autrement dit, notre monde. La côte ouest, elle, désigne la terre pure de la félicité extrême, monde véritablement agréable, le monde du Bouddha Amida. Quant aux deux rivières au sud et au nord, la rivière d’eau représente les désirs de possession et d’amour, alors que la rivière de feu symbolise la colère et la lutte. Enfin, la voie blanche toute droite représente la foi dans la renaissance sur la terre pure.

Ensuite, la voix provenant de l’est et encourageant le voyageur à avancer, est celle du vénéré Shakya prêchant les trois sutra de la terre pure. Ces sutras sont le Sutra Amida[52], le Sutra des vies infinies[53] et le Sutra de la contemplation des vies infinies[54]. Tous trois furent prêchés par le vénéré Shakya. Par exemple, l’enseignement que ce dernier donna à Vaidehi[55] est le Sutra de la contemplation des vies infinies. Ainsi, même le Sutra Amida, ce n’est pas le Bouddha Amida lui-même qui l’a enseigné. De même, l’existence de myriades de terres de la félicité en direction de l’ouest ont également été enseignées par le vénéré Shakya. Ce dernier représente la voix venant de la côte est encourageant à avancer. La voix venant de l’ouest invitant à progresser dans cette direction est celle du Bouddha Amida, la force salvatrice.

Sont ces gens aux compréhensions et pratiques différentes, et aux vues mauvaises (Paroles de Shandao)

Une fois que le croyant à progressé d’un ou deux pas, des voix s’élèvent : “Reviens, reviens ! Cette route est très dangereuse ! Si tu continues, tu mourras”. Ces voix sont celles des “gens aux compréhensions et pratiques différentes, et aux vues mauvaises”, autrement dit les gens des doctrines de la voie sainte. Dès lors, nous avons là un enseignement déréglé considérant tous les moines, les Bouddha et les bodhisattva autres que ceux des doctrines de la terre pure comme de mauvais hommes.

Moi j’affirme que dans cette phrase, toutes les compréhensions et pratiques différentes, toutes les études et les vues divergentes désignent les doctrines de la voie sainte”. (Paroles de Hônen)

Là encore, Hônen surenchérit à l’aide de paroles d’une incommensurable vilenie, offensant l’ensemble des enseignements de l’Eveillé.

Enfin, la dernière phrase de conclusion dit : “Si vous désirez vous éloigner rapidement des vies et des morts, vous devez choisir parmi ces deux enseignements supérieurs et ignorer la porte de la voie sainte et franchir celle de la terre pure. Si vous désirez franchir la porte de la terre pure, vous devez choisir entre la pratique correcte et la pratique grossière et abandonner la pratique grossière et prendre refuge dans la pratique correcte.” Fin de citation. (Paroles de Hônen)

C’est la phrase de conclusion de Hônen. Pour se départir des souffrances de la vie et de la mort, but de la voie du Bouddha,  il faut ne tenir aucun compte de la porte de la voie sainte et pénétrer dans celle de la terre pure. Parmi les deux pratiques –correcte et grossière- il faut abandonner les pratiques grossières et se  consacrer à la pratique correcte. Les citations des Passages sélectionnés de Hônen s’achèvent ici.

A partir de là, commence la critique, la réfutation de ce texte par Nichiren Daishônin lui-même.

L’examen de ces passages montre que Hônen, citant les commentaires erronés de Tanluan, Daochuo et Shandao, établit ce qu’il appela voie sainte et terre pure, pratique difficile et pratique aisée, qualifiant de voie sainte, pratique difficile, pratique grossière, le Lotus, les Formules incantatoires et, en général, les six cent trente-sept sutra du Grand véhicule répartis en deux mille huit cent quatre-vingt-trois rouleaux de l’ensemble des enseignements de Shakyamuni, l’intégralité des Eveillés, des bodhisattva, ainsi que des cieux. Exhortant à les abandonner, à les fermer, à les ignorer et à les jeter, il perturba par ces quatre mots la multitude. De surcroît, il qualifia de bandes de brigands les saints moines des trois pays et les disciples du Bouddha dans les dix directions, incitant ainsi à les insulter.

Nichiren Daishônin souligne ici l’attitude de Hônen qui, citant les commentaires erronés des trois précurseurs de l’école de l’Invocation du Bouddha en Chine, développe la mauvaise doctrine de jeter, fermer, ignorer, abandonner tous les enseignements du Grand véhicule, ainsi que tous les Bouddha et bodhisattva, médisant de surcroît tous les saints moines et disciples du Bouddha, les appelant bandes de brigands.

De près, il s’oppose à la promesse faite dans les trois sutra de la terre pure : “à l’exception des cinq crimes d’opposition et des offenseurs du Dharma”.

L’hôte (Nichiren Daishônin) précise que les explications maléfiques de Hônen s’opposent même en premier lieu aux phrases du Sutra des vies infinies, l’un des trois sutra de la terre pure, ses propres sutra de référence. En effet, ce sutra enseigne les quarante huit vœux émis par le Bouddha Amida à l’époque où il pratiquait les austérités de bodhisattva en tant que moine sous le nom de Corbeille du Dharma (j. Hôzô). Or, le dix-huitième vœu  était : “ Quand je serai sur le point d’obtenir l’éveil, si des êtres dans les dix directions se réjouissent dans la foi, aspirent à renaître dans mon pays et invoquent dix fois mon nom, s’ils ne renaissent pas, je n’obtiendrai pas l’éveil véritable. Mais exclus sont ceux qui ont commis les cinq crimes d’opposition et ont offensé le bon Dharma”. Autrement dit, le Bouddha Amida affirma lui-même vouloir sauver tous les êtres, mais ceux qui auront perpétré les cinq fautes d’opposition et commis l’offense au Dharma, ne pourront pas renaître sur la terre pure de la félicité extrême.

Ainsi, alors que le Bouddha Amida renie lui-même l’offense au bon Dharma, Hônen, lui, à l’opposé, offense totalement le bon Dharma. Même en récitant Namu Amidabutsu, si en même temps, on s’oppose au bon Dharma, il est impossible de se rendre sur la terre pure de la félicité ultime de l’ouest. Dès lors, les thèses pernicieuses de Hônen sont en parfaite contradiction avec les propos du Bouddha Amida, ce sont des doctrines hérétiques dénuées de sens.

De loin, il ne comprend pas le commandement du deuxième rouleau du Sutra du Lotus, cœur de tous les enseignements donnés par l’Eveillé au cours des cinq périodes : “Si un homme n’ayant foi en ce sutra l’insulte, cet homme tombera en enfer après que sa vie se soit achevée”.

Nichiren Daishônin cite ici une phrase du chapitre « Parabole », troisième chapitre du Sutra du Lotus apparaissant dans le deuxième rouleau. C’est une phrase connue. Elle établit clairement que l’offense au bon Dharma, autrement dit l’offense au Sutra du Lotus, voue irrémédiablement  à la chute en enfer.

L’ère est l’ère finale. Les hommes ne sont plus des saints. Tous passent par des chemins de traverse obscurs et oublient la voie directe.

Nous sommes à présent dans la période de l’ère finale. Il n’y a désormais plus d’hommes remarquables qualifiés de saints. Pour cela, les hommes pénètrent dans des voies obscures où ils oublient la grande voie, correcte et directe.

Qu’il est triste qu’ils ne piquent pas leurs pupilles voilées ! Qu’il est pénible qu’ils croient inutilement en des religions erronées !

Piquer le voile développé sur les yeux permet de voir de nouveau. Jadis, il existait un tel traitement, permettant, par piqûres du voile oculaire à l’aide d’une aiguille, de recouvrer la vue. “Ne pas piquer les pupilles voilées” signifie que, bien qu’ils soient aveugles, ils ne suivent aucun traitement. Ce qui est triste est qu’ils ne piquent pas leurs pupilles voilées, ce qui est pénible est qu’en raison de cet aveuglement, ils sont incapables de discerner le juste de l’erroné et continuent vainement à suivre des religions erronées.

Pour cette raison, du souverain au peuple, tous pensent qu’il n’existe pas d’autres sutras que les trois sutras de la terre pure, qu’il n’existe pas d’autre Bouddha que la triade d’Amida.

Au moyen de ses Passages sélectionnés, Hônen induit en erreur un grand nombre d’hommes. L’effet de son influence fut que, de bas en haut de l’échelle sociale, tous crurent de manière fallacieuse qu’il n’existait absolument aucun enseignement hormis les trois sutra de la terre pure et la triade d’Amida.

A partir de là, Nichiren Daishônin expose l’aspect de la corruption du Dharma du Bouddha.

Jadis, Dengyô, Gishin, Jikaku ou Chishô voyagèrent dix mille lieues, au-delà de l’océan, pour ramener les saints enseignements. Ou encore, ils parcoururent les monts et les rivières de notre pays pour acquérir les statues de Bouddha qu’ils vénéraient.

“Jadis, Dengyô, Gishin, Jikaku ou Chishô”, autrement dit, les grands aînés de Hônen, grands maîtres du Tendai, moines des doctrines des voies saintes, firent de grands efforts grâce auxquels les saints enseignements venus d’Inde et de Chine existent au Japon.

Ils construisirent ensuite des mondes fleuris au sommet des hautes montagnes pour les y enchâsser ou des palais de lotus au fond des vallées profondes pour les y vénérer.

“Ils construisirent ensuite des mondes fleuris au sommet des hautes montagnes” : ils construisirent des temples et des pagodes au sommet des montagnes de tout le pays. “Des palais de lotus au fond des vallées profondes pour les y vénérer” : ils construisirent aussi des temples au creux des vallées profondes où ils enchâssèrent et vénérèrent les statues des Bouddha. Les “mondes fleuris” et les “palais de lotus” représentent tous deux l’état de vie et le palais de la pure fleur du lotus. Ces expressions désignent le contenu des enseignements du Bouddha. Ainsi, de nombreux temples furent construits où des statues de Bouddha et les sutras furent enchâssés et vénérés.

Ainsi, la lumière de Shakya et de Bhaisajya Guru, côte à côte, éclairait de sa majesté le manifeste et l’avenir.

A cette époque, jusqu’à l’âge de trente-deux ans, Nichiren Daishônin s’était livré à toutes sortes d’études qui l’amenèrent en particulier à effectuer un long séjour au mont Hiei. Pour cette raison, il connaissait très bien le temple situé en ce lieu. Sur le mont Hiei, la pagode de l’ouest, le Hôdô in (temple de la bannière du Dharma) contient la statue du Bouddha Shakyamuni. La pagode de l’est, le Shikan in (temple de l’arrêt et examen), est le célèbre Kompon chû dô ou sanctuaire fondamental, où est enchâssé l’Ainsi-venant Bhaisajya Guru (j. Yakushi nyorai, f. Ainsi-venant Maître des remèdes). Ce point est évoqué ici par Nichiren Daishônin. La magnificence de la lumière de ces deux Bouddha éclairait le manifeste et l’avenir, autrement dit, le présent et le futur.

Akasagarbha et Ksitigarbha, de plus en plus influents, apportaient des bienfaits aux vivants et aux morts.

“Akasagarbha”[56] est le bodhisattva Kôkûzô (Corbeille céleste), enchâssé dans la vallée de l’esprit des préceptes du mont Hiei et “Ksitigarbha”[57] est le bodhisattva Jizô (Corbeille terrestre), enchâssé, lui, dans le vallon de la sagesse de la même montagne. Grâce à leurs vertus, ces bodhisattva faisaient bénéficier aux êtres des bienfaits de l’enseignement, tant dans la vie présente qu’après la mort.

Aussi, le souverain faisait don de comtés et de provinces afin que ces lueurs continuent d’éclairer. De leur côté, les seigneurs apportaient leurs rizières et leurs jardins en offrande.

Pour ces raisons, le souverain faisait don d’une partie de ses territoires afin que la lumière des temples continue de briller et les seigneurs, eux, faisaient don d’une partie des récoltes de leurs rizière et de leurs jardins au Bouddha et au Dharma. Jadis, ces pratiques se faisaient couramment.

Or, à cause des Passages sélectionnés de Hônen, le souverain de l’enseignement est désormais oublié et, seul, le Bouddha de la terre de l’ouest est respecté.

A cause de la publication du Recueil des passages sélectionnés de Hônen, la dette de gratitude vis-à-vis des vertus bienfaisantes du vénéré Shakya, souverain de l’enseignement de cette, terre fut oubliée et le Bouddha de la terre de l’ouest, autrement dit le Bouddha Amida, fut seul respecté. Or, le Bouddha Amida n’est pas un Bouddha apparu sur notre terre. C’était un Bouddha prêché de la bouche du vénéré Shakya. Autrement dit, il naquit de la bouche du vénéré Shakya et s’éteignit de la même bouche. Aussi, bien que son créateur, Shakyamuni, soit plus important, fut commise l’erreur d’oublier Shakyamuni pour vénérer le Bouddha Amida.

La transmission a été rejetée et l’Ainsi-venant de l’est négligé. L’importance est donnée uniquement aux trois sutra en quatre volumes et les sutra merveilleux des cinq périodes de l’enseignement du Bouddha abandonnés.

“La transmission a été rejetée” : la transmission de maître à disciple, selon l’esprit du Sutra du Lotus, fut instaurée par le grand maître Dengyô. Sur cette base, l’Ainsi-venant Bhaisajya Guru fut enchâssé dans le sanctuaire fondamental. Or, la prise de refuge dans ce Bouddha fut abandonnée et la lecture et l’offrande au sutra ne fut plus faite qu’aux “trois sutra en quatre volumes”, autrement dit les trois sutra de la terre pure. Les cinq à sept mille rouleaux des sutras dans leur ensemble, furent abandonnés. Telle est la contradiction mise en exergue ici.

Pour cette raison, le peuple n’a plus la volonté de pratiquer l’offrande hormis à un sanctuaire dédié à Amida. Il oublie aussitôt de faire des dons aux moines non pratiquants de l’Invocation du Bouddha.

A une époque où la foi dans l’Invocation du Bouddha était en grande vogue, l’offrande se faisait uniquement aux temples d’Amida. Cet état de fait provoqua l’abandon de l’offrande aux textes canoniques enseignés par l’Eveillé tout au long de sa vie et au vénéré Shakya lui-même. Par ailleurs, les dons aux moines s’effectuaient uniquement envers ceux de l’Invocation du Bouddha. L’offrande aux autres moines fut alors oubliée. Autrement dit, il y eut une interruption des offrandes envers le Bouddha et les moines.

Les gens d’aujourd’hui ne font plus la distinction entre le vénéré Shakya ou le Bouddha Amida. Pour eux, un temple est le lieu où est enchâssé le Buddha. Avec la progression de l’aspect de la Fin du Dharma, l’attrait envers les temples et les statues de Bouddha a été complètement oublié. Je pense qu’en raison de l’influence nuisible des enseignements erronés, le peuple a entièrement oublié la signification des enseignements du Bouddha dans leur ensemble.

Pour cette raison, les temples dédiés au Bouddha tombent en ruine.

Bien que les temples bouddhistes dédiés au Grand véhicule fussent nombreux, les réparations nécessaires n’étaient plus effectuées. Dès lors, ils tombaient en obsolescence et montraient l’aspect de ruines.

Un mince filet de fumée s’échappe de leurs tuiles semblables à des pins.

Du fait de l’absence d’entretien du toit, de la mousse s’était installée sur les tuiles, donnant de loin l’aspect de pins. Et le mince filet de fumée s’échappant de ce toit donnait à ces temples l’aspect de la décomposition et de la décrépitude.

Les logements des moines sont vides et dilapidés, la rosée profondément incrustée sur l’herbe de leur jardin.

Après l’exemple des temples, celui du logement des moines est évoqué ici. Comme les temples, ils tombaient en ruine et comme personne n’entretenait les jardins, l’herbe poussait en abondance et la rosée s’y incrustait profondément, rajoutant à l’aspect de désolation générale.

Pourtant, tous ont perdu l’esprit de protection et de don, ont rejeté l’idée de reconstruire ces temples.

En raison de la perte de l’esprit de protection et de regret en regard du Dharma correct, il ne venait plus à l’idée de reconstruire ou d’entretenir ces temples.

Pour ces raisons, les saints moines demeurant dans ces temples sont partis pour ne plus revenir, les divinités protectrices s’en sont allées également à tout jamais. Tout cela est uniquement le fait des Passages sélectionnés de Hônen.

Si l’enseignement de l’Eveillé est tombé en obsolescence au Japon, si les saints moines ne sont plus là et que les divinités protectrices ont abandonné le pays, que d’innombrables catastrophes se produisent, l’entière responsabilité incombe à l’enseignement nuisible du Recueil des passages sélectionnés de Hônen.

Quelle tristesse qu’en seulement quelques décennies, cent, mille, dix mille personnes aient pu être abusées par le lien démoniaque et se soient perdues dans les nombreux enseignements de l’Eveillé.

Peu de temps après l’apparition de Hônen, durant le règne de l’empereur Gotoba, se produisit la révolte de Jôkyû (1222), épisode inouï jusqu’alors, au cours de laquelle des seigneurs subalternes s’emparèrent du pouvoir au détriment de l’empereur. C’est juste au moment où la révolte commença que Umegikunyô, mère de Nichiren Daishônin, fut enceinte. On peut voir à travers ce phénomène de la simultanéité de l’apparition d’un grand mal et de la conception du grand bien fondamental, l’aspect inconcevable du monde des dharma. Ce grand mal, représenté par le lien démoniaque du Recueil des passages sélectionnés de Hônen, sévissait déjà depuis plusieurs dizaines d’années, faisant perdre à chacun la capacité de distinguer le juste de l’erroné et jetant l’incompréhension sur les enseignements du Bouddha.

Ces personnes préfèrent l’hérésie et ont oublié la rectitude. Les divinités bienfaisantes ne sont-elles pas en droit de se mettre en colère ?

Le mot “hérésie” (j. =) est l’orthographe correcte. Dans de nombreuses autres versions du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude, le mot “bô” est écrit, ce qui signifie “secondaire”. Dans ce contexte, le mot “rectitude” (j. shô =) prend dès lors le sens de “principal”. Autrement dit, la comparaison est faite entre le principal et le secondaire. Dans le cas des sutra, le “secondaire” est représenté par les sutra enseignant des expédients salvifiques que sont l’Ornementation fleurie, Agama, aux Doctrines diverses et de la Sagesse, autrement dit tout ce qui n’est pas le principal. La phrase prend dès lors le sens suivant : ils préfèrent le secondaire, c’est-à-dire les plus de quarante années d’enseignements antérieurs et oublient le principal, le Sutra du Lotus.

Or, dans le cas de Hônen, celui-ci choisit uniquement les trois sutra de la terre pure au sein des quarante années d’enseignements, rejetant tout le reste. Pour bien marquer l’offense au Dharma de Hônen, Nichiren Daishônin n’utilisa pas le caractère (secondaire) mais écrivit (hérésie).

Vis-à-vis de cette prédilection pour l’hérésie et le rejet de la rectitude, “les divinités bienfaisantes ne sont-elles pas en droit de se mettre en colère” ?, autrement dit, les divinités protectrices ne vont-elles pas se mettre en colère ? Elles le feront immanquablement.

Les hommes ont jeté le parfait, préférant le partiel. Comment échapper à la venue des esprits maléfiques ?

Le “parfait” est l’aspect véritable de la voie du milieu. C’est l’enseignement global, parfait, sans faille. Le partiel est incomplet. Si l’on compare le Petit véhicule au Grand, le premier est incomplet. Si l’on compare le Grand véhicule provisoire au Grand véhicule véritable, le premier est incomplet. Dès lors, si l’on rejette le Sutra du Lotus parfait et pur par préférence à une partialité extrême telles les assertions de Hônen, comment pourrait-il se faire que les esprits maléfiques, prenant avantage de ce mal, ne se manifestent pas ? Immanquablement, ils se manifesteront.

Enfin, nous arrivons à la dernière phrase.

Plutôt que d’offrir dix mille prières, il serait préférable d’interdire ce seul mal.

Cette phrase est très célèbre. Elle indique en effet le point principal de l’enseignement de Nichiren Daishônin centré sur la pratique de shakubuku. Dans l’acte de shakubuku, il est important de saisir ce point important, cette signification essentielle pour l’indiquer à la personne que l’on tente de guider.

De nombreuses personnes prennent beaucoup de médicaments pour améliorer leur état de santé. Mais, parmi elles, beaucoup n’améliorent rien en dépit de la quantité de médicaments absorbés. Quelqu’un doté d’une mauvaise santé doit d’abord connaître la cause première de ce mauvais état. Prenons le cas d’une personne buvant de grandes quantités d’alcool. Tant qu’il est jeune, il ne ressent aucun malaise. Mais parvenant à l’âge de quarante, cinquante ou soixante ans, progressivement son métabolisme s’affaiblit et sa condition physique se transforme. Cependant, il ne s’en rend pas compte. Si alors il continue à absorber de l’alcool en grande quantité comme au temps de sa jeunesse, sa condition physique périclite rapidement et diverses maladies se manifestent alors. Il est tombé malade en raison de la forte quantité d’alcool absorbée mais il ne comprend pas que sa condition ait changé, pensant que depuis son jeune âge il buvait et était en bonne santé et que cela ne varie pas. Même s’il absorbe de bons remèdes, s’il continue en même temps à boire, son état de santé ne s’améliorera pas, au contraire, sa maladie s’aggravera encore. L’important, plutôt que d’ingurgiter une grande quantité de médicaments, serait d’arrêter la cause néfaste de la maladie qu’est l’absorption d’alcool en grande quantité. S’il agissait ainsi, ses maux disparaîtraient de manière évidente.

De la même manière, au début de ce traité, le visiteur énumère toutes les formes de prières effectuées pour conjurer les catastrophes. Nichiren Daishônin montre par là l’inefficacité des dix mille prières. En fait, hormis l’interdiction du seul mal, il n’existe pas d’autre moyen de prendre des mesures contre le malheur, il est impossible de devenir Bouddha. Tel est le sens essentiel de l’expression : “il serait préférable d’interdire ce seul mal”. Nichiren Daishônin demande de bien saisir ce point.

Saisir ce point signifie prendre conscience de l’offense au Dharma et, ensuite, détruire cette offense au Dharma. Cette attitude génère véritablement des œuvres et vertus remarquables. En ce sens, la présentation de la bonne doctrine du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude signifie que vous-mêmes ayez conscience de l’offense au Dharma, en particulier des offenses au Dharma perpétrées par la Soka Gakkai et d’autres enseignements hérétiques et détruisiez ces offenses au Dharma par le shakubuku fondé sur le bon Dharma et la doctrine correcte. C’est dans cette pratique, dans sa détermination fondée sur la foi, que réside l’aspect de l’interdiction du grand mal et que se manifesteront les véritables œuvres et vertus dans le pays et dans votre foi personnelle et vos vies quotidiennes.

Je termine ce cours en vous disant pour terminer que “plutôt que d’offrir dix mille prières, il serait préférable d’interdire ce seul mal” restera éternellement la grande directive de Nichiren Daishônin pour guider les êtres vers la rectitude.

 

  

 

Cinquième dialogue
Exposition des exemples japonais et chinois

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Cette partie prédit l’imminence des deux désastres que sont l’invasion par une nation étrangère et les luttes intestines, en fonction de la condition de la nation. Le Traité sur la sérénité du pays, livre prophétique, fondé sur les multiples catastrophes sévissant déjà dans le pays, annonce le caractère inéluctable de l’apparition de ces deux catastrophes.

Bien entendu, à l’époque de la présentation du Traité sur la sérénité du pays aux autorités, ces deux désastres ne s’étaient pas encore produits. Neuf mois plus tard, une missive du grand empire mongol parvint au Japon. Plus tard encore, les preuves indubitables de l’agression d’une nation étrangère et des luttes intestines apparurent. Le passage étudié aujourd’hui est l’illustration, à travers des exemples pris en Chine et au Japon, que les catastrophes d’ordre national subies par le Japon sont dues aux hérésies de Hônen, autrement dit des enseignements erronés de l’invocation du Bouddha (nenbutsu).

De plus en plus empourpré, le visiteur dit :

La colère du visiteur se manifesta sur son visage.

Shakamon, notre maître fondamental

Il s’agit là bien entendu de Shakyamuni. La translittération phonétique de Shakyamuni se prononce également « Shakamon ».

Depuis qu’il prêcha les trois sutras de la Terre pure, 

Rien qu’en Chine, le nombre de sutra traduits s’élève à cinq ou sept mille. Parmi ces ouvrages, seulement trois d'entre eux, les « trois sutra de la Terre pure », répartis en quatre fascicules, relatent l’enseignement du Bouddha Amida préconisant l’invocation du Bouddha. Ces trois sutra sont : le Sutra des vies infinies en deux volumes, le Sutra de la Contemplation des vies infinies en un volume et le Sutra Amida, en un volume. Ces trois sutra sont extrêmement brefs.

Quant à la personne ayant prêché ces sutra, nombreux, en ce monde, l’ignorent. Beaucoup récitent Namu Amidabutsu, l’invocation du Bouddha mais, même parmi les pratiquants de cette religion, il paraît que certains pensent que le Bouddha Amida est né au Japon et a enseigné les trois sutras de la Terre pure. Il n’en est évidemment rien. Les trois sutra de la Terre pure furent prêchés par Shakyamuni.

Au sein de ces trois sutra, le Sutra de la contemplation des vies infinies fut prêché à l’intention de Vaidehi (j. Idaike- 章提希). Cette dernière était l’épouse du roi Bimbisāra (j. Binbashara - 頻婆舎). Leur fils, Ajātaśatru (j. Ajase -阿闍世) ayant été mystifié par Devadatta (j. Daibadatta -提婆達多), emprisonna son propre père, Bimbisāra, puis finit par le tuer. Pendant son emprisonnement, Vaidehi, cherchant à le nourrir, s’enduisait le corps de miel, lors de ses visites à la geôle. Apprenant le subterfuge, Ajātaśatru fit alors jeter sa mère à son tour en prison. Soucieux de réconforter cette femme plongée dans une telle détresse, le vénéré Shakya, utilisant ses pouvoirs transcendantaux, se glissa dans la cellule de Vaidehi et prêcha pour elle le Sutra de la Contemplation des vies infinies.

Ce sutra, en fait, fut prêché à une femme en proie à une condition particulièrement triste et pénible. L’intention du vénéré Shakya était de sauver Vaidehi de sa souffrance du moment, en tentant de faire naître en elle l'élan de "prise de refuge". Dans cette perspective, il enseigna, pour argumenter son propos, le Bouddha Amida demeurant sur la Terre pure de l’ouest et son territoire de félicité.

Ainsi, les trois sutra de la Terre pure furent enseignés par le vénéré Shakya et non pas par le Bouddha Amida apparu directement en ce monde. C’est donc le vénéré Shakya qui parla du Bouddha Amida et de sa Terre de la félicité ultime, située à mille milliards de terres dans la direction de l’ouest. Autrement dit, Amida est un Bouddha né de la langue du vénéré Shakya, qui prêcha la Terre de la félicité ultime et s’éteignit par la langue du vénéré Shakya.

Le maître du Dharma Tanluan abandonna les quatre traités, prenant uniquement refuge dans la Terre pure.

Les « quatre traités » sont : le Traité de la contemplation du milieu[58], puis un traité en douze articles intitulé le Traité des douze portes[59] et le Traité en cent versets[60]. Ces trois traités constituent les livres canoniques de référence de l’école des Trois traités[61]. Le quatrième traité est le Traité de la grande vertu de sagesse[62].

Le Traité de la contemplation du milieu, le Traité des douze portes et le Traité de la grande vertu de sagesse sont l’œuvre du célèbre bodhisattva Nāgārjuna, appelé maître de mille traités. Ils expriment la pensée maîtresse de l’enseignement de Nāgārjuna. Le Traité en cent versets, quant à lui, est l’œuvre d’Aryadeva[63], disciple de Nāgārjuna

Le premier objectif de ces traités est la réfutation des idées des voies extérieures[64]. En effet, de nombreuses voies extérieures, autrement dit des religions et pensées autres que le bouddhisme, existaient en Inde. Leurs enseignements développaient de nombreuses doctrines qui, en finalité, s’opposaient aux principes corrects bouddhiques de causes et relations, de causes et d’effets. Leurs visions sur les notions de vie et du monde étant erronées, ces traités les réfutaient alors.

Leur second objectif était de réfuter les enseignements du Hinayana. Nāgārjuna se fonde en particulier sur le plus volumineux des Sutra de la Sagesse, le Sutra de la grande vertu de sagesse. Il existe de nombreux autres Sutra de la Sagesse, tels le Sutra de la Sagesse du roi bienveillant, ou le Sutra de la Sagesse du diamant. Le Sutra de la Grande vertu de sagesse, lui, est un sutra de la sagesse enseignant la vacuité absolue. Les Sutra de la Sagesse furent enseignés après le Sutra de l’Ornementation fleurie, les Sutra Agama et les Sutra aux Doctrines diverses. Le sutra prêché après les Sutra de la Sagesse est le Sutra du Lotus. Dès lors, que ce soit en fonction de leur place au sein des sutra ou de leur contenu, ils possèdent des significations extrêmement profondes.

Les Sutra Agama du Hinayana enseignent aussi le principe de la naissance et de l’extinction. La naissance, c’est l’apparition. C’est notre vie, à nous qui existons. L’extinction est le sort de ce qui vit, à savoir la mort. Lorsqu’on meurt on disparaît. Aussi, l’existence de notre moi, dont l’essence est la mutation, est « vide ». Ce principe de la naissance et de l’extinction, en définitive, implique que, même en existant, tous les phénomènes se transforment. Dès lors, la seule voie pour se libérer de cette errance réside, dans sa finalité, à s’éveiller à la « vacuité ». Pour cela, il convient de « réduire son corps en cendres et d’annihiler sa conscience » (j. keshin metchi -灰身滅智), de manière à prendre refuge physiquement et spirituellement dans la vacuité et la tranquillité et demeurer dans la véritable sérénité. Tel est l’enseignement de « la vacuité selon le Hinayana ».

A l’opposé, « la vacuité selon le Mahayana » enseigne que « la naissance » comme « l’extinction », ce qui existe comme ce qui n’existe pas, est vide à l’origine. Toutes les formes sont englobées dans cette « vacuité ». C’est ce que l’on nomme « La vacuité suprême ». Autrement dit, ce qui prend une forme phénoménale, de même que la vacuité inabordable, tout se retrouve dans la « vacuité ». Là réside la véritable voie du milieu. Tel est l’enseignement de la « médianité » selon le Mahayana, en particulier au sein des enseignements de la Sagesse.

Il existe quatre notions antithétiques dans notre vie quotidienne : la naissance et l’extinction, le départ et la venue, l’uniformité et la diversité, l’interruption et la permanence. Toutes ces notions sont le fruit de l’illusion. Dans la véritable « vacuité suprême », il n’y a ni naissance ni extinction, ni départ ni venue, ni uniformité ni diversité, ni interruption ni permanence. Le principe de la voie du milieu absolue se situe là où tous les attachements illusoires sont dépassés. Cette voie du milieu ayant dépassé ces huit différences est appelée « voie du milieu des huit négations » (j. happu chûdô -八不中道). Nous sommes toujours attachés à l’une de ces extrémités. Ainsi, s’il s’agit de « la naissance », nous nous attachons uniquement à « la naissance ». Or, en fait, il faut également connaître « l’extinction ». Le Hinayana, lui, considère uniquement la nature des choses comme étant « la vacuité simple » (j. tankû -但空).

Le Mahayana, quant à lui, établit l’inhérence de la vacuité (j. sokuku -即空) aux multiples aspects se présentant sous la forme de différences. Aussi, le contenu des Sutra de la Sagesse est « la vacuité suprême ». La totalité du monde des dharma, que ce soit de notre vie ou de toute forme d’existence, ces dharma sont tous dans leur acception première, « vides » à l’origine. L’ascèse fondée sur l’appréhension de la « vacuité » mène à l’ouverture de l’éveil, à finalement devenir Bouddha. Le contenu de cette ascèse est l’apprentissage de la vérité de la conditionnalité au sein de la réalité, puis l’approfondissement de la vérité de la vacuité pendant une durée très longue d’une infinité incalculable d’éons. L’effet de ces pratiques est la pénétration dans un profond état de vie de bodhisattva. Pour autant, on ne devient pas Bouddha par ce moyen. Toutefois, finalement, on devient Bouddha en prenant refuge dans l’enseignement parfait du Sutra du Lotus. Face à ce long détour pour parvenir à la boddhéité, les gens du Nenbutsu nièrent la porte de la voie sainte en déclarant que « le principe est profond et sa compréhension infinitésimale[65] », ou encore selon le concept de « pas un sur mille[66] ».

Or, en fait, ces gens de la Terre pure en Chine ne connaissaient pas les œuvres et vertus du Sutra du Lotus. En effet, dans le Sutra du Lotus, qui succède aux Sutra de la Sagesse, les aspects de divers êtres sont concrètement montrés, ainsi que leurs œuvres et vertus. Même un très mauvais homme comme Devadatta, même tombé en enfer, devient lui aussi par la suite Bouddha. Même les deux véhicules (auditeurs et Bouddha pour soi) qui, dans les sutra antérieurs, ne pouvaient accéder à l’éveil, et même les femmes, peuvent devenir Bouddha. Le salut de tous est par conséquent concrètement prêché dans le Sutra du Lotus.

Nous avons dès lors deux « voies du milieu ». La « voie du milieu » du Sutra du Lotus et la « voie du milieu » des Sutra de la Sagesse, fondée sur la « vacuité suprême ». Quelle est donc la différence entre la voie du milieu du Sutra du Lotus et la voie du milieu des Sutra de la Sagesse ? En un mot, elle réside essentiellement dans Myôhôrengekyô, révélé par le Sutra du Lotus.

Au sujet de ce mot « Myô » (), Nichiren Daishônin écrivait dans le Traité sur le Titre de la fleur du Dharma (Hokke daimoku shô -法華題目抄) : “Myô possède le sens de doté”. Qu’est-ce qui est « doté » (j. gu -) ? La réponse réside dans cette célèbre phrase du chapitre des « Moyens » du Sutra du Lotus : “Les Eveillés vénérés du monde veulent ouvrir les êtres au savoir et à la vision des Eveillés et leur faire obtenir la pureté”. Si les êtres de l’enfer, des esprits affamés ou des animaux n’étaient pas dotés intérieurement de la vie du Bouddha, ils ne pourraient pas « l’ouvrir ». Extérieurement, on ne le voit absolument pas, cependant, dans le Sutra du Lotus, tous les êtres en sont dotés et, s’ils suivent le processus de l’ascèse de ce vénérable sutra, cette vue du Bouddha apparaît. On parle de présence mutuelle des dix mondes (j. jikkai gogu -十界互具), mais la signification de cette présence mutuelle des dix mondes est justement la voie du milieu du Sutra du Lotus. Or, les Sutra de la Sagesse n’aboutissent pas à cette « dotation » en tout. En conséquence, même si l’expression « Myôhô » figure bien dans ces sutra, la nature du « Myôhô » du Sutra du Lotus et du « Myôhô » des Sutra de la Sagesse est différente. Dès lors, même si le même mot « médianité » est employé dans l’un et l’autre des sutra, sa signification est aussi éloignée que le ciel de la terre.

Approfondissons un peu la question. Dans le chapitre quatrième du Sutra du Lotus « Foi et compréhension », nous trouvons l’allégorie du « riche et vertueux vieillard et de son fils indigent ». Vous l’avez sans doute déjà entendue.

Dans cette histoire, le fils d’un homme riche et vertueux s’enfuit dans son enfance du château paternel et mène pendant très longtemps une vie miséreuse. Cette condition rend son cœur extrêmement vulgaire. Un jour, le père retrouve son fils. Parvenant habilement à l’amadouer, il l’entraîne dans le château. Le fils, quant à lui, ayant complètement oublié être le fils de la maison, croyant simplement être un homme vulgaire, sans famille, se met terriblement en colère après son père. Alors le vieil homme commence d’abord à lui confier le ménage des toilettes. Puis, tout en améliorant progressivement, le contenu des tâches confiées, il le met en confiance. Pour finir, il lui confie la gestion de tous ses biens et richesses. A la fin, le vieillard lui révèle leur relation et lui lègue toute sa fortune.

Dans cette parabole, le fils, par le biais de la gestion des biens et richesses du vieil homme connaît, parfaitement la nature du travail et la valeur des biens gérés, mais croit encore n’être qu’un domestique. Si l’on transpose cette parabole à ce que l’on nomme l’ouverture et l’intégration du dharma dans les Sutra de la Sagesse, du point de vue du Dharma, toutes les choses sont égales, toutes sont « vides ». Allant plus avant, la prise de conscience d’être le fils du vieil homme riche et de lui succéder, symbolise l’obtention du bienfait de devenir Bouddha dès ce corps en tant que véritable voie du milieu. Or, ce n’est pas encore la « médianité » de ce qui est parfaitement « doté ». La « médianité des Sutra de la Sagesse est la « vacuité » transposée à la « médianité ». Elle ne reflète pas la valeur inestimable de l’inhérence de la « médianité » à la « vacuité » et à la « conditionnalité ».

Autrement dit, la « médianité » du Sutra du Lotus possède la signification de « doté ». Si l’on part de la grande vérité de « doter », « la vacuité » est dès lors la « conditionnalité ». A partir de là, la vie de chaque homme, en tant que manifestation de causes et de conditions, autrement dit l’aspect de la « conditionnalité », est telle quelle la « médianité ». Aussi, les trois vérités de la vacuité, de la conditionnalité et de la médianité inhérentes les unes aux autres sont appelées fusion parfaite des trois vérités, dans laquelle ces trois principes sont présents (dotés) mutuellement les uns dans les autres.

Ce principe est le grand principe de « doter », impliquant l’inhérence de la vacuité, l’inhérence de la conditionnalité et l’inhérence de la médianité. La transposition de ce principe, aux problèmes concrets de la vie dans les dix mondes, donne la présence mutuelle des dix mondes. Aussi, si tous les êtres vont plus avant que les Sutra de la Sagesse, prennent connaissance de ce grand principe du Sutra du Lotus et pratiquent avec foi, alors ils peuvent être radicalement sauvés. Malgré cela, Tanluan, fondateur du Nenbutsu en Chine, captivé par les longues pratiques des sutra antérieurs, déclara que « personne ne peut suivre les difficiles enseignements de la voie sainte, principes profonds que personne ne peut comprendre » et s’adonna alors aux enseignements de l’invocation du Bouddha.

Ce « Maître du Dharma Tanluan » fut le premier à diffuser en Chine les enseignements de la Terre pure de l’ouest et de Namu Amidabutsu. Il est en fait le fondateur de l’invocation du Bouddha (Nenbutsu - 念仏). Tanluan avait rencontré Bodhiruci, arrivant d’Inde à Loyang et reçut de lui le Sutra de la contemplation des vies infinies. Il se dit alors qu’il était désormais inutile d’étudier les quatre difficiles traités et entra alors dans l’étude du Bouddha Amida.

Le deuxième fondateur de l’école fut « le maître en méditation Daochuo », dont l'éveil spirituel naquit en lisant l’épitaphe inscrite sur la pierre tombale de Tanluan. Influencé par les enseignements de Daochuo, le troisième fondateur à pénétrer dans les enseignements de l’invocation du Bouddha fut « le précepteur Shandao ». Ces trois personnages étaient chinois.

Leur opinion était que l’ensemble des enseignements du vénéré Shakya se divisait en deux « portes » : la doctrine de la voie sainte et la doctrine de la Terre pure, la première enseignant des principes profonds mais incompréhensibles. Pour eux, hormis les trois sutra de la Terre pure, tous les autres sutra relèvent de la doctrine de la voie sainte et les principes enseignés sont extrêmement profonds mais, en même temps, leur compréhension est infinitésimale et donc, ils ne sont d’aucune aide pour guider les êtres.

Le contenu de cette « porte de la voie sainte » est extrêmement profond. Il possède à la fois la signification des préceptes, de la concentration et de la sagesse. Les préceptes ont pour sens de prévenir les fautes et d’arrêter le mal. Ils interrompent les divers maux et préconisent le bien. Il existe les préceptes du Hinayana et les préceptes du Mahayana. Ces derniers sont très vastes. Ils comportent toutes les morales. Ensuite, la concentration est importante, dans la mesure où elle permet de rassembler, de concentrer l’esprit sur des œuvres de bien. Enfin, la sagesse est la fonction permettant de choisir entre le bien et le mal, de s’éveiller aux principes. Le grand maître du Tendai consigna dans le Sens mystérieux de la fleur du Dharma la présence de vingt sagesses. En ce sens, si l’on développe le contenu des préceptes, de la concentration et de la sagesse, on obtient les six perfections (sk. Paramita) : générosité, observation des préceptes, patience, courage, concentration et sagesse. On obtient également les quatre-vingt-quatre mille doctrines des saints enseignements prêchés par le vénéré Shakya au long de sa vie. Telle est la porte de la voie sainte.

A l’opposé, en ce qui concerne « la porte de la Terre pure », au sein des trois sutra de la Terre pure prêchés par le vénéré Shakya, un moine dénommé Dharmakara fit le vœu, lorsqu’il devint Bouddha, de fabriquer et de décorer une Terre pure. Il fabriqua donc la Terre pure de la sérénité et de la nourriture et émit le vœu d’y guider pour les sauver toutes les personnes plongées dans la souffrance et l’affliction. Cette Terre pure, sereine et heureuse, dénuée de toutes souffrance, est le lieu du bonheur. Or, au sein du Sutra de la contemplation des vies infinies, dans lequel cet enseignement est donné, il existe la « concentration sur le bien[67] » et la « dispersion sur le bien[68] », au sein desquelles il existe toutes sortes de pratiques pour renaître sur la Terre pure.

Au Japon, Hônen, quant à lui, affirma que même ces pratiques étaient inutiles, qu’il suffisait de croire, pour être sauvé, au Bouddha Amida et de réciter Namu Amidabutsu. Il affirma que telle était la pratique de l’invocation du Bouddha dans la période de la Fin du Dharma. Pour lui, à l’opposé, les doctrines de la voie sainte sont certes profondes mais incompréhensibles. Les principes développés sont en effet extrêmement complexes et parfaitement incompréhensibles pour la sagesse des êtres stupides ordinaires, dont aucun ne peut devenir Bouddha.

Si les principes sont profonds, c’est que le contenu des préceptes, de la concentration et de la sagesse est lui-même extrêmement profond. Les enseignements du Bouddha sont donc eux-mêmes particulièrement profonds. Pour cette raison, personne ne peut être, selon lui, sauvé par les doctrines de la voie sainte. Par contre, la voie de la Terre pure, elle, est suffisamment simple. En effet, il suffit de réciter l’invocation du Bouddha pour être sauvé. Telles sont les assertions de la « porte de la Terre pure ».

Le maître en méditation Daochuo ignora les nombreuses pratiques de l’extinction pour propager uniquement la pratique des quatre directions.

L’extinction (sk. nirvana, j. nehan -涅槃) est un sutra enseigné après le Sutra du Lotus. Il est considéré comme le sermon prêché par le vénéré Shakya au moment de sa mort. Autrement dit, il s’agit du dernier sermon du vénéré Shakya. Les « nombreuses pratiques de l’extinction », expliquées succinctement, concernent la réexposition et le ré effacement effectués au sein du Sutra du Nirvana.

La réexposition (j. tsuisetsu -追説) : les enseignements des moyens, incluant les Sutra de l’Ornementation fleurie, Agama, aux Doctrines diverses, y compris les sutra du Hinayana et du Mahayana, jusqu’aux Sutra de la Sagesse, furent enseignés avant le Sutra du Lotus. Certains disciples ne participèrent pas à l’assemblée du Sutra du Lotus et ne purent donc pour cette raison obtenir l’éveil. La réexposition consista à enseigner de nouveau pour ces gens là la signification du Sutra du Lotus et aussi, encore une fois, les moyens. Aussi, le Sutra du Nirvana contient-il également des expédients salvifiques.

Or, le Sutra du Nirvana ayant été enseigné après le Sutra du Lotus, il ne contient pas seulement des enseignements de moyens. Il enseigna également la permanence de la nature du Bouddha, sur la base des significations du Sutra du Lotus. C’est ce que l’on nomme le ré effacement (j. tsuimin -追泯). Ce que le Bouddha a réexposé, il poursuivit en effaçant les différences. Ces différences sont les différences entre le Mahayana et le Hinayana, entre les moyens et la vérité. En effaçant toutes ces différences, le Bouddha enseigna la présence permanente de la nature du Bouddha, son véritable enseignement.

La première des ascèses des bodhisattva enseignée à travers la forme revêtue par la « réexposition » et le « ré effacement » est la « pratique sainte ». Cette pratique sainte consiste, comme nous l’avons vu tout à l’heure, en des ascèses extrêmement profondes et difficiles, telles les préceptes, la concentration et la sagesse. L’ascèse suivante est « la pratique céleste », puis nous rencontrons la « pratique de Brahmâ ». Existe également la « pratique de la maladie », destinée à sauver les êtres. Elle consiste en effet à les sauver quand ils souffrent de maladies. Précisons que ces maladies ne sont pas physiques mais principalement spirituelles. Il existe également la « pratique (vis-à-vis) des enfants », destinée à sauver les personnes très infantiles. Ainsi, comme nous le constatons, toutes ces pratiques ont des sens extrêmement vastes et sont extrêmement nombreuses.

Ainsi, « les nombreuses pratiques de l’extinction » représentent les pratiques inhérentes à un vaste enseignement. Daochuo, estimant impossible d’accomplir ces pratiques, propagea uniquement les pratiques de l’invocation du Bouddha de l’ouest. En fait, ces personnes oublièrent les significations du Sutra du Lotus, tendance principale de la porte de la voie sainte et, ne parvenant pas à cette compréhension, s’attachèrent à des enseignements liés aux moyens. Finalement, elles s’engagèrent seulement dans la simple invocation du Bouddha.

Le Précepteur Shandao balaya les pratiques grossières et établit une pratique unique.

Il en est de même pour Shandao. Lui, affirma que toutes les pratiques autres que celles de la porte de la Terre pure sont des pratiques grossières. Autrement dit, les enseignements prêchant d'autres sens que les phrases des sutra de la Terre pure et préconisant la récitation d’autre chose que le Nenbutsu sont des pratiques embrouillées, d'aucune utilité. Tel est le sens de l’expression « pratiques grossières ». Fort de cette assertion, il établit la pratique unique du Nenbutsu.

Le Préfet monacal Eshin synthétisant l’essentiel de tous les sutra fit de la pratique unique de l’Invocation du Bouddha son école.

Le Préfet monacal Eshin (慧心僧都 – 942-1017), dont le nom posthume est Genshin (源信), était disciple de Ryôgen (良源), dix-huitième Patriarche de l’école du Tendai au Japon. Eshin lui-même ne devint pas Patriarche du Tendai, mais fut à l’origine d’un des courants de cette école, le courant Eshin du Tendai, célèbre courant de la Porte de la voie sainte du Tendai, qui perdura longtemps. Pendant un temps, Eshin établit même la pratique unique du Nenbutsu dans son école. Tout en étudiant le Sutra du Lotus, il pensait que l’invocation du Bouddha était la pratique la plus appropriée pour les êtres aux prédispositions et racines inférieures de la Fin du Dharma. A quarante-trois ans, il écrivit le Recueil des essentiels sur la renaissance (sur la Terre pure), ouvrage prêchant le Nenbutsu.

Toutefois, à soixante et un ans, il changea de conception et écrivit la Détermination dans l’essentiel du véhicule unique. Ici, le véhicule unique est le Sutra du Lotus. Dans cet ouvrage, Eshin, prenant refuge dans le Sutra du Lotus, affirme que nous pouvons devenir Bouddha par le Sutra du Lotus. Il s'était pour un temps converti au Nenbutsu. Mais on peut affirmer clairement que, plus tard, après repentir, celui-ci revint au Sutra du Lotus. Ici, toutefois, Nichiren Daishônin évoque seulement la période « pratique unique de l’invocation du Bouddha » d’Eshin.

Leur respect envers Amida s’exprima de telles manières. 

Par ces témoignages, à travers les trois moines chinois et le Préfet monacal Eshin au Japon, le visiteur démontre à l’hôte, le respect apporté au Bouddha Amida.

D’innombrables personnes purent accéder à la renaissance. 

Et puis, grâce à cet enseignement, combien de personnes ont-elles pu renaître sur la Terre de la félicité extrême située à mille milliards de terres dans la direction de l’ouest ? Un nombre sans doute incalculable, avance le visiteur. Ce dernier parle ainsi, car il ne connaît pas la causalité, fondée sur la logique de l’enseignement du Bouddha.

Hônen Shônin, en particulier, se rendit dans son jeune âge, au mont Tendai. A dix-sept ans, il avait parcouru les soixante volumes et approfondi les huit écoles dont il avait compris en détail les significations.

A partir de là, le visiteur conte les différents témoignages sur Hônen. Les “soixante volumes” désignent les trois œuvres majeures de Zhiyi : Sens mystérieux de la Fleur du Dharma, Mots et phrases de la Fleur du Dharma et Grand arrêt et examen et les trois œuvres majeures de Miaolo : Plaquettes explicatives sur le Sens mystérieux de la Fleur du Dharma, Notes sur les Mots et phrases de la Fleur du Dharma et Auxiliaire à la transmission et à la propagation du Grand arrêt et examen. Après avoir étudié ces soixante volumes, il approfondit les enseignements des huit écoles, à savoir Ornementation fleurie (Kegon), Nature des dharma (Hossô), Trois traités (Sanron), Scolastique (Gusha), Réalisation de la vérité (Jojitsu), Commandements (Ritsu), Tendai et Formules incantatoires (Shingon), dont il comprit les principes fondamentaux. Autrement dit, il étudia l'ensemble du bouddhisme. En fait, il semblerait, d’après de nombreuses biographies, qu’Hônen possédait une extraordinaire érudition.

En outre, il lut à sept reprises le corpus des sutra.

Hônen ne lut pas qu’une seule fois les cinq ou sept mille rouleaux des sutra enseignés par le vénéré Shakya, il les lut en fait à sept reprises. Il est à penser que par cette phrase sont qualifiées les vastes connaissances de Hônen sur les enseignements.

… et des traités et épuisa lors de son étude tous les commentaires et biographies sans en omettre un seul.

En bouddhisme, il n’existe pas uniquement les sutra enseignés par le vénéré Shakya. Il existe également de nombreux traités et des commentaires sur ces sutra et, de plus, de nombreuses biographies des docteurs et des maîtres. Ainsi, d’Inde en Chine et de Chine au Japon, de nombreux bouddhistes apparurent dans ces trois pays. Il existe donc de très nombreux commentaires faits par ces hommes et de très nombreuses bibliographies à leur sujet. Hônen les lut tous “sans en omettre un seul”.

Sa sagesse était brillante comme le soleil et la lune, ses vertus surpassaient celles des maîtres précédents.

Dans l’école du Tendai, de nombreux savants vertueux exaltèrent les doctrines de l’école. Ici, le visiteur affirme que les vertus de Hônen surpassaient celles des anciens maîtres du Tendai.

Malgré tout, il doutait quant à la voie vers la délivrance et ne parvenait pas à comprendre la signification de l’extinction.

Pourtant, Hônen restait perplexe au sujet de la voie vers la délivrance, autrement dit sur la solution du problème des vies et morts. Ainsi, il ne put trouver la voie du salut au sein de la doctrine de la voie sainte.

Pour ces raisons, il lisait tout, apprenait de chaque document, réfléchissait profondément, considérait les choses avec recul. Finalement, il jeta au loin les sutra et se consacra uniquement à l’invocation du Bouddha.

Alors, il étudia largement les contenus des enseignements du Bouddha, y consacra profondément tout son cœur et, pour finir, après mûre réflexion, parvint à la conclusion que le Nenbutsu était bien la pratique la plus noble.

Il fit alors un rêve mystique dans lequel il propageait parmi les intimes et les étrangers des quatre bords.

Hônen pensait que les enseignements du Nenbutsu convenaient aux personnes vivant dans la Fin du Dharma, sans toutefois pouvoir se déterminer lui-même. C’est alors qu’il fit un rêve. Il vit le précepteur Shandao, maître chinois, lui apparaître et lui dire : “Les enseignements du Bouddha Amida dans lesquels vous croyez sont les plus excellents. Grâce à eux, de nombreuses personnes peuvent accéder au bonheur. Vous-même, pourrez renaître sur la Terre de la félicité ultime, située à mille milliards de terres dans la direction de l’ouest. Aussi, il faut propager ces enseignements”.

Les quatre bords désignent les gens de tous les pays. Autrement dit, Hônen propagea le Nenbutsu à travers tout le pays, parmi ses proches, comme parmi les étrangers, sans distinction.

Dès lors, il fut appelé le corps transformé de Sthāmaprāpta, ou vénéré comme la renaissance de Shandao.

Sthāmaprāpta (j. seishi - 勢至) est un bodhisattva faisant partie de la triade d’Amida dans le Sutra de la Contemplation des vies infinies. La triade est composée d’Amida au centre, entouré à droite et à gauche de Sthāmaprāpta et d’Avalokiteśvara (j. Kannon - 観音). Ce dernier symbolise la rigueur et la compassion alors que le premier représente la sagesse. Hônen avait énormément étudié. Il connaissait tout et possédait beaucoup de sagesse. Pour cette raison, on l’appela corps transformé de Sthāmaprāpta. Il fut en outre vénéré comme la renaissance de Shandao, promoteur du Nenbutsu en Chine.

Les nobles comme les roturiers des dix directions s’inclinaient devant lui, il attirait les pas de tous les hommes et femmes de l’empire.

Pour ces raisons, tous les hommes et femmes du pays, du plus élevé dans la hiérarchie sociale au plus humble, le visitaient, languissant de l'influence de ses vertus. Ainsi, par son biais, de nombreuses personnes entendirent les enseignements de l’invocation du Bouddha, récitèrent le Nenbutsu et en louèrent les vertus.

Depuis, les printemps et les automnes se sont succédés, les étoiles et le givre se sont accumulés.

Quarante-huit ans se sont écoulés entre la mort de Hônen, en la deuxième année de l’ère Kenryaku (1212) et la présentation du Traité sur la Sérénité du pays en la première année de Bun’nô (1260). Les printemps et les automnes, les étoiles et le givre sont des notions exprimant l’écoulement du temps. Autrement dit, depuis que les enseignements du Nenbutsu furent propagés, le temps s’est considérablement écoulé.

A présent, vous négligez les louables enseignements du vénéré Shakya et, délibérément, critiquez les écrits sur Amida.

Les trois sutra de la Terre pure, étant eux-mêmes des enseignements dispensés par le vénéré Shakya, le visiteur, ne comprenant pas qu’il s’agit là d’expédients salvifiques, considère que l’hôte fait peu de cas des enseignements du vénéré Shakya, quand il affirme que le Nenbutsu de Hônen est une mauvaise doctrine.

Pourquoi donc, imputez-vous à cet âge saint, les récentes catastrophes, offensez-vous avec tant de violence les maîtres précédents et, de plus, médisez-vous du saint ?

Les récentes catastrophes évoquent le tout début du Traité sur la Sérénité du pays : « Un visiteur est venu. Se lamentant, il dit: “Depuis ces dernières années jusqu’à ces derniers jours, bouleversements dans le ciel, morts prématurées sur la terre, famines et épidémies foisonnent sous le ciel et pullulent sur la terre” ». Autrement dit, les catastrophes apparues récemment dans tout le Japon sont véritablement terribles.

Toutes ces catastrophes, vous en faites porter la responsabilité à l’âge saint. Puisque Hônen était qualifié de « saint » (shônin -聖人), l’époque pendant laquelle il propagea largement le Nenbutsu, cinquante ou soixante ans auparavant, est appelée âge saint. Faire endosser la cause de ce qui se passe aujourd’hui sur le passé est une erreur. Pourquoi, sans raison, critiquez-vous les trois maîtres du Nenbutsu en Chine et, de plus, médisez de Hônen Shônin ?

Vous soufflez sur le pelage pour chercher les défauts

Cette expression désigne un imbécile agissant de manière à la fois inutile et préjudiciable. Même si des cicatrices ou de vilaines traces sont présentes sur une tête, les cheveux les recouvrent et les dissimulent. Si quelqu’un souffle exprès sur les cheveux pour les séparer, il fait alors apparaître ces blessures. Cette expression dénote donc une investigation inutile.

Vous coupez la peau pour en faire couler le sang.

Imaginons une croûte recouvrant une cicatrice. Si on la trouve disgracieuse et qu'on la coupe pour cette raison, alors, le sang coule et la douleur s'accroît. Dans le même sens que l’expression précédente, celle-ci désigne une action excessive vis-à-vis de quelque chose qu’on aurait très bien pu laisser en l’état, qui s’avère donc inutile et préjudiciable. Autrement dit, le visiteur reproche à l’hôte que toutes ses affirmations soient une quête finalement inutile et préjudiciable.

Depuis le passé jusqu’à présent, je n’ai jamais entendu de telles mauvaises paroles. Vous devriez avoir peur et être plus discret.

Ce passage constitue la synthèse de l'opinion du visiteur. Vos paroles sont pernicieuses. Je n’ai jamais rien entendu de tel.

Ce crime karmique est lourd. Comment échapper à la punition ? Je suis même effrayé d’être assis en votre compagnie. Je souhaite à présent reprendre ma canne et rentrer chez moi.

Le fait même d’entendre vos propos est une chose effroyable. Il est préférable de s’abstenir d’écouter et de répondre à de telles infamies. Vous qui proférez de telles erreurs et moi qui les écoute, ensemble sommes en train d’alourdir nos crimes karmiques.

Proférer de telles paroles inhumaines et les écouter constituent des actes relevant de la punition. Aussi, je ne peux davantage demeurer à converser avec un homme disant des choses aussi atroces. Le visiteur veut alors reprendre son bâton et retourner chez lui. Autrement dit, lorsqu’on pratique shakubuku, les offenseurs du Dharma se mettent de la sorte en colère.

A présent, l’hôte répond.

L’hôte, souriant, l’interrompt et dit

Avec un léger sourire, l’hôte dit alors au visiteur : « ne vous mettez pas dans une telle colère. Ecoutez plutôt mes propos ». Les deux phrases suivantes sont des exemples exprimant le phénomène selon lequel lorsqu’on se trouve dans la souillure, on finit par s’y habituer et ne plus percevoir ce qui est correct.

On s’habitue au salé grâce aux feuilles de la Renouée

Les feuilles de la Renouée sont salées. Toutefois, si on les lèche constamment, on finit progressivement par s’y habituer et à ne plus ressentir leur goût salé. Autrement dit, si on s’habitue à faire le mal, on finit par le trouver normal. Tel est le sens du mot « s’habituer » ici.

Dans les latrines, on oublie la puanteur.

Les latrines sont les toilettes. Aujourd’hui, l’eau dans les toilettes est un phénomène courant, de sorte que leur odeur n’est pas mauvaise. Or, jadis, ces types de toilettes d’aujourd’hui n’existaient pas et ce lieu sentait mauvais. Toutefois, si on y restait un certain temps, l’odorat finissait par s’engourdir, de sorte qu’on en oubliait la puanteur.

Ces deux exemples signifient que lorsqu’on s’habitue au mal, on finit par ne plus percevoir que c’est mal. Autrement dit, tous, s’étant habitués à l’enseignement erroné d’Hônen, ne s’aperçoivent plus qu’il s’agit d’une hérésie.

Vous avez entendu mes bonnes paroles et les avez prises pour de mauvaises. Vous qualifiez de saint un offenseur et doutez du bon maître, l’estimant mauvais moine.

L’« offenseur » désigne celui qui s’oppose à l’enseignement du Bouddha. Il s’agit là d’un très grand crime. Cet offenseur est Hônen. Pourtant, vous montrez cet offenseur Hônen et l’estimez saint. Par contre, vous doutez du maître correct tentant de transmettre la véritable logique du bouddhisme, et le qualifiez de mauvais moine.

Votre confusion est véritablement profonde, votre faute n’est nullement légère.

Nichiren Daishônin professe ici de manière très stricte : vous êtes dans la plus grande illusion et cette faute est lourde de conséquences.

Si vous souhaitez entendre la genèse des choses, je vais l’exposer maintenant avec minutie.

La « genèse des choses » désigne la genèse du bouddhisme. Ce que Hônen au Japon, Tanluan, Daochuo et Shandao en Chine enseignèrent, furent des hypothèses, des hérésies, amenant le courant du bouddhisme dans l’erreur. Il faut donc reconsidérer l’enseignement du Bouddha depuis son origine.

Au sein du prêche du vénéré Shakya, on distingue cinq périodes d’enseignements, dont la chronologie ainsi que la distinction entre le provisoire et le véritable, ont été établies.

Vous savez que les moines, lors de la cérémonie de Oéshiki, lisent les remontrances. Cette phrase apparaît également au sein de ces textes. Ensuite, quelle personne a dressé une chronologie et établi une hiérarchie au sein des écritures ? En fait, à l’origine de ce principe, nous trouvons le vénéré Shakya lui-même.

En effet, en écoutant honnêtement les enseignements du vénéré Shakya, on trouve immanquablement des différences d’antériorité et de postériorité de ces enseignements.On appelle « jugé antérieur » (senpan -先判) le contenu des enseignements considérés comme antérieurs et « jugé postérieur » (kôhan -後判) les enseignements considérés comme ayant été donnés ultérieurement aux précédents. Cette distinction « antérieur – postérieur » a été clairement définie par le vénéré Shakya lui-même. Il a en effet appelé « provisoires » les enseignements des expédients salvifiques et les a jugés antérieurs. Quant aux enseignements jugés postérieurs, il les a appelés « véritables ». Le vénéré Shakya a lui-même établi cette distinction.

Comme vous le savez, le Sutra du Lotus est précédé du Sutra des Sens infinis. Peu de temps avant de commencer à prêcher le Sutra du Lotus, le vénéré Shakya entra dans une profonde méditation, appelée Recueillement de demeure dans les sens infinis (s. ananta nirdeśa pratişţāna samādhi, j. muryôgi sho zanmai -無量義処三昧). A l’issue de cette méditation, le vénéré Shakya s’adressa à Shariputra et commença le prêche du Sutra du Lotus : “A ce moment, le vénéré du monde émergea de son recueillement, calme et lucide et s’adressa à Shariputra” (niji seson jû sanmai, anjô niki gô Sharihotsu).

Dans le Sutra des Sens infinis, apparaît cette phrase : “J’ai compris que la nature et les désirs des êtres étaient dissemblables. Leur nature et leurs désirs étant dissemblables, j’ai prêché le Dharma de diverses façons. Pour prêcher le Dharma de diverses façons, j’ai eu recours au pouvoir des moyens. Pendant plus de quarante ans, je n’ai pas encore révélé la vérité”. Pendant plus de quarante ans, le vénéré Shakya enseigna les sutra de l’Ornementation fleurie, Agama, aux Doctrines diverses et de la Sagesse. Toutefois, dans le Sutra des Sens infinis, faisant le bilan de tous ces enseignements, il avoua qu’il n’avait pas encore révélé la vérité.

C’est alors que dans le chapitre des « Moyens » du Sutra du Lotus, il dit : “Rejetez honnêtement les moyens. Je vais prêcher la voie sans supérieure”. A travers ces deux extraits du Sutra des Sens infinis et du Sutra du Lotus, le jugé antérieur et le jugé postérieur sont clairement définis, établissant ainsi la distinction évidente entre les enseignements provisoires et l’enseignement véritable. C’est le sens de l’expression : “la chronologie ainsi que la distinction entre le provisoire et le véritable ont été établies”.

Or, Tanluan, Daochuo et Shandao, suivirent le provisoire, oubliant le véritable. Ils s’appuyèrent sur les enseignements préalables, rejetant les enseignements ultérieurs.

Les maîtres chinois du Nenbutsu furent obnubilés par les enseignements des moyens tels les Sutra de la Sagesse ou le Sutra de l’Extinction –ce dernier n’est pas à proprement dit un enseignement des moyens, mais il contient toutefois une réexposition des moyens. Aussi, ils oublièrent que le véritable contenu du Grand véhicule était la présence mutuelle des dix mondes, cent mondes, mille domaines, subséquents au Dharma merveilleux, c’est à dire l’éveil dès ce corps, aspect même du Sutra du Lotus. C’est pourquoi, ils suivirent le provisoire, oubliant ainsi le véritable.

Par ailleurs, les Sutra d’Amida sont eux-mêmes des sutra faisant partie de la période des Doctrines diverses. Ce sont donc bien des sutra du Grand véhicule, mais du Grand véhicule provisoire et donc des sutra enseignés à titre de moyens. Dès lors, les considérer comme suprêmes, c’est véritablement s’attacher aux moyens antérieurs et rejeter le Sutra du Lotus, ultérieur.

Ils n’avaient pas encore sondé la profondeur des enseignements de l’Eveillé.

Comme pour les abysses insondables d’une rivière profonde, les trois maîtres chinois n’ont pas accédé au sens profond de l’enseignement de l’Eveillé. 

Hônen, en particulier, bien qu’il suivit leur courant, en ignorait l’origine.

Nichiren Daishônin se livre à présent à la réfutation des doctrines hérétiques d’Hônen. Ce dernier, suivit le courant des chinois Tanluan, Daochuo et en particulier de Shandao et établit l’école de la Terre pure, pratiquant l’invocation du Bouddha (nenbutsu) au Japon. Or, Nichiren Daishônin affirme ici que Hônen ne connaissait même pas la source de ces enseignements. En fait, le vénéré Shakya ne prêcha pas uniquement les trois sutra de la Terre pure. Il en prêcha de nombreux, cinq mille, voire sept mille. Pour finir, il établit une chronologie au sein de laquelle il distingua le provisoire du véritable, déterminant ainsi que les trois sutras de la Terre pure ne représentaient que des moyens salvifiques. Dès lors, que Hônen s’attache uniquement à ces sutras prouve qu’il ne connaissait pas l’origine des enseignements développés par le Bouddha tout au long de sa vie.

Pour quelle raison ? Apposant les quatre mots : rejeter, fermer, sceller et abandonner sur les deux mille huit cent treize rouleaux des six cent trente-sept sutra du Grand véhicule, ainsi que sur tous les Bouddha et bodhisattva et les divinités du monde et des cieux, il corrompit le cœur de tous les êtres.

La raison est que Hônen, incitant à rejeter, fermer, sceller et abandonner l’intégralité des vastes enseignements du Mahayana, ainsi que l’ensemble des Bouddha et bodhisattva évoqués dans ces sutras, perturba tous les êtres. Les principes des Passages sélectionnés de Hônen : rejeter, fermer, sceller et abandonner ont déjà fait l’objet de réfutations lors du quatrième débat. En fait, Hônen parle clairement de rejeter, fermer, sceller et abandonner. « Rejeter », c’est rejeter la porte de la voie sainte. Rejeter la porte de la voie sainte, revient en fait à rejeter le Sutra du Lotus. « Fermer » signifie fermer le Sutra du Lotus et ne pas le lire. Sceller et abandonner, c’est également le laisser de côté et le rejeter au loin.

En effet, le Sutra du Lotus faisant naturellement partie de la porte de la voie sainte, rejeter, fermer, sceller et abandonner, ceci revient à le faire aussi pour le Sutra du Lotus, enseignement véritable, but de la venue en ce monde du vénéré Shakya. Il s’agit là d’une grave trahison envers le Bouddha et ses enseignements. C’est l’attitude à l’opposé de celle de l’Eveillé qui, mu par un sentiment de grande rigueur et compassion, tente de guider correctement les êtres, Hônen, quant à lui, viola la foi des êtres et les induisit dans l’erreur.

Il développa uniquement des paroles déviantes personnelles, sans examiner les explications contenues au sein des sutra du Bouddha.

Hônen proféra des paroles fallacieuses, fondées sur des conceptions uniquement personnelles. Il ne vit absolument pas l’enseignement correct du Bouddha.

Il a alors atteint le comble du mensonge et commis le crime de médisance. Aucune parole ne saurait le décrire, aucune critique n’est suffisante pour le blâmer.

Les paroles de Hônen atteignirent le comble de la fausseté. Il commit un acte de médisance sans précédent. Ce crime est tellement grave, que rien ne pourrait le décrire, ni ne serait suffisant pour l’accabler.

Les hommes croient tous en ce mensonge et respectent les passages sélectionnés. Pour cette raison, adorant les trois sutras de la Terre pure, ils abandonnent les autres sutra ; vénérant le seul Bouddha de l’extrême félicité, ils oublient tous les autres Bouddha.

De nombreuses personnes crurent aux « mensonges », proférés par Hônen et respectèrent les Passages sélectionnés, compilation de ses mensonges. Les paroles incitant à vénérer uniquement les trois sutra de la Terre pure et à rejeter tous les autres, les paroles incitant à respecter le seul Bouddha de la félicité ultime, autrement dit Amida et à réciter Namu Amidabutsu, ces paroles amènent à perdre toutes les œuvres et vertus de tous les autres vénérables Bouddha.

Hônen est véritablement l’ennemi juré de tous les Bouddha et de tous les sutra. Il est l'adversaire des saints moines et des hommes ordinaires.

Par ses propres paroles, Hônen se positionne en ennemi des Bouddha. Il est l'adversaire de tous les moines et de tous les hommes.

Son enseignement hérétique s’est propagé jusqu’aux confins du pays et s’est répandu partout dans les dix directions.

L’enseignement hérétique de l’invocation du Bouddha Amida s’est répandu dans tout le pays, y compris dans ses moindres recoins, jusque dans ses régions désolées.

Vous avez été vivement choqué que je critique une époque révolue pour les catastrophes de ces récentes années.

Vous pensez que mes propos, imputant la cause des catastrophes récentes aux doctrines hérétiques de Hônen, liées au passé, sont irrationnels et constituent une erreur. Pourtant, c’est vous qui vous trompez.

Mais, par évocation d’exemples du passé, je vais dissiper votre illusion.

Afin de vous éveiller de votre illusion, je vais à présent vous donner des exemples concrets, vous prouvant l’apparition de signes et, par répercussion, de catastrophes.

L’Arrêt et examen, citant les Chroniques historiques, indique :

Nichiren Daishônin donne trois exemples concrets. Le premier est une histoire se déroulant à la fin de la dynastie des Zhou.

« A la fin de la dynastie des Zhou, des hommes échevelés et nus, ne se conformant pas aux rituels ».

Jadis, il y eut en Chine, chronologiquement, trois nations : les Xia, les Yin et les Zhou. Cette dernière est une nation relativement ancienne. A la fin de cette dynastie, des hommes, aux manières discourtoises, se montrèrent négligés, tant dans leur chevelure, longue et mal soignée, que dans leur manière de se vêtir, se montrant en public en sous-vêtements.

Citant la tradition de Zuo pour commenter cette phrase, le deuxième fascicule de l’Auxiliaire à la transmission précise :

Dans son Auxiliaire à la transmission, commentaires du Grand arrêt et examen de Zhiyi, Miaole cite la Tradition de Zuo. Cette dernière désigne en fait la Tradition de Zuo sur les annales Printemps et Automne. Il s’agit de commentaires effectués par un certain Zuoqiuming sur les Annales printemps et automne. Ces dernières, œuvres de Kongzi (Confucius), relatent l’histoire du pays de Lu, à l’époque des Zhou. Divers enseignements y exposent les causes justes, telles la gestion du pays et l’enseignement de la voie.

Lorsque le roi Ping transféra sa capitale à l’est, il vit, près de la rivière Yi, des hommes, les cheveux défaits, procédant à des sacrifices. Un sage dit alors (la dynastie) ne durera pas cent ans. Parce que les rites sont déjà morts ».

Parmi les anecdotes relatées dans les Annales Printemps et automne, réside celle concernant le roi Ping, treizième monarque de la dynastie des Zhou. Ping était le fils du roi You. Ce dernier s’était entiché de la tristement célèbre Baosi. Courtisane d’une très grande beauté, Baosi était toutefois dotée d’un esprit exécrable. Elle incita You, sous son charme, à commettre des atrocités. Finalement, ses actes eurent pour résultat l’invasion du pays par des peuplades étrangères et, finalement, l’assassinat de son roi.

Alors, son successeur, Ping, soucieux d’éviter les problèmes, transféra la capitale du pays, d’où l’expression « transféra sa capitale à l’est ». Au cours du voyage, on vit « des hommes, les cheveux défaits, procédant à des sacrifices » aux abords de la rivière Yi. Autrement dit, des hommes échevelés, pratiquement nus, se livraient à des actes religieux telles l’adoration de divinités ou les offrandes aux ancêtres. Il s’agit là, en fait, d’une véritable décadence spirituelle, d’une ignorance des règles les plus élémentaires de déférence. Face à ce phénomène, un sage nommé Xinyou prédit alors : « Etant donné l’état des choses, le pays des Zhou se maintiendra peut-être cent ans, sans doute moins ». Effectivement, environ cent années plus tard, la dynastie des Zhou fut détruite.

On peut comprendre à partir de là que les signes se manifestent d’abord et qu’ensuite, seulement, se produisent les catastrophes.

Un des symptômes de la ruine imminente de la dynastie des Zhou fut la décadence des mœurs du peuple. En fait, le respect de l’étiquette permet à une nation de se développer de manière remarquable et à son peuple de se comporter convenablement. Les bonnes manières constituent le fondement permettant l’accomplissement de l’intérêt national et du bien être du peuple. Constatant que les mœurs se dépravaient, Xinyou prédit la fin prochaine de la dynastie. Et ce fut rapidement effectif. C’est un exemple réel de la manifestation de signes avant coureurs de catastrophes se produisant par répercussion peu après.

 « Yuanjie, homme doté d’immenses qualités, négligeait toutefois ses cheveux et laissait sa ceinture non attachée.

Nichiren Daishônin cite à présent un second exemple. Je pense que, parmi vous, certaines personnes ont lu le roman historique chinois Histoire des trois royaumes (c. sanguozhi, j. sangokushi -三国志). C’est un conte historique très intéressant, centré en particulier sur les guerres et la paix, l’essor et le déclin de Sunquan de la dynastie Wu, Caocao de la dynastie Wei et Liubei de la dynastie Shu. A la fin, la destruction de la dynastie Shu s’opéra lorsque le pouvoir politique du pays des Wei fut pris par Simayan. Ce dernier fut à l’origine de la dynastie des Jin. A l’époque des Jin, existaient  les « sept sages de la forêt des bambous ».

« Yuanjie » était l’un des sept sages de la forêt des bambous. Ils vivaient tous sans souci dans la forêt des bambous en buvant de l’alcool. Ces hommes avaient pour base la pensée de Laozi et de Zhuangzi. Ils pensaient que la nation devait également se fonder sur cette philosophie. Ils considéraient cette pensée non pas comme conduisant au développement, mais au contraire, au nihilisme. Cette passivité entraînait une manière de penser destructrice pour la nation. Tout devait être confié aux bons soins de la nature. Plus besoin de politesse, ni de hiérarchie, inutile de faire des efforts ; lutter tout seul et se distinguer, contribuer au monde, était dès lors vain et superflu. Cette philosophie est plus qu’étrange. Cependant, cette tendance fut un temps pourtant mise à l’honneur.

Cette pensée était l’apanage de gens tels que les sept sages de la forêt des bambous. Yuanjie était donc l’un d’entre eux. Il était pétri de talents. Cependant, très négligé, ses cheveux étaient comme de l’armoise, jamais coiffés. A force de ne pas l’attacher, sa ceinture était devenue lâche, de sorte que son vêtement s’ouvrait devant, le montrant nu. Cette allure passait alors pour supérieure, parce qu’elle correspondait à la nature, conception en vigueur de ce temps.

Par la suite, les fils de la noblesse l’imitèrent.

Cette manière de penser fut en vogue au sein des classes intellectuelles et des classes supérieures, de sorte que les fils et les petits fils des ministres et hauts fonctionnaires des divers pays, jeunes au futur prometteur, se mirent à imiter cette attitude.

Ceux qui étaient vulgaires et d’un aspect disgracieux, passaient pour naturels.

Ils se conduisaient et parlaient de manière vulgaire et grossière. Ils n’avaient cure de l’étiquette et tenaient des propos brutaux. Avoir des paroles et une attitude induisant un état d’esprit honteux passait alors pour une façon de communiquer très proche de la nature.

Alors que ceux qui gardaient une attitude réservée étaient appelés paysans.

Par contre, ceux qui agissaient avec modération, humbles et sévères avec eux-mêmes, ceux qui en fait se révélaient polis, passaient pour des paysans.

C’était le signe de la fin du clan Sima ». Fin de citation

L’apparition d’une telle tendance dépravée amena la fin du clan de Sima, alors détenteur du pouvoir.

Le passage suivant apporte la preuve actuelle de la nuisance doctrinale du nenbutsu.

Par ailleurs, le grand maître Jikaku, dans son Journal des pèlerinages en Chine, écrivait :

Jikaku fut le troisième Patriarche du temple Enryakuji du Tendai. Il se rendit en Chine – appelé à l’époque pays des Tang- et y séjourna dix ans. Il se rendit dans tous les temples bouddhistes afin d’y étudier les doctrines du Mahayana et rapporta des Sutra et de nombreux livres au Japon.

Le grand maître Dengyô (Saichô) se rendit lui aussi en Chine, mais n’y séjourna qu’un an et quelques mois. Jikaku, lui, y résida dix années. Il revint au Japon au cours de la onzième année. Il nota ce qu’il vit et entendit au cours de son périple dans son Journal des pèlerinages en Chine. J’ai moi-même consulté cet ouvrage. Il se présente sous la forme d’un journal de voyage, très précis sur tous ce que Jikaku expérimenta en Chine.

« En la première année de l’ère Huichang, l’empereur Wuzong, de la dynastie des Tang,

La « première année de l’ère Huichang » correspond à la quatrième année du séjour de Jikaku en Chine. Cette année là, le dénommé Wuzong accéda au trône impérial du pays des Tang.

Ordonna au maître du Dharma Gengseung, du temple Zhangjingsi, de transmettre l’enseignement du Bouddha Amida dans tous les temples. Ce qu’il fit sans relâche, passant trois jours dans chaque temple.

Jikaku écrit : « ordonna au maître du Dharma Gengseung, du temple Zhangjingsi ». Or, on ne trouve dans aucune biographie de trace de ce Gengseung. Pourtant, il fut nommé pour « transmettre l’enseignement du Bouddha Amida dans tous les temples ». Je pense que l’empereur pris cette décision à titre de politique religieuse, de manière à mieux gérer le pays. Le journal de Jikaku indique que Gengseung se rendit dans chaque temple du pays, séjournant trois jours à chaque fois et transmit alors les doctrines du nenbutsu, tournant ainsi la roue du Dharma de cet enseignement.

En la deuxième année de la même ère, l’armée Ouighour franchit la frontière des Tang.

Or, « en la deuxième année de la même ère », c’est-à-dire l’année suivante, l’armée Ouighour franchit la frontière chinoise en plusieurs endroits. Les Ouighours étaient une tribu turque vivant en Mongolie extérieure, au nord du désert de Gobie. Ils feignaient de se soumettre à l’empire chinois mais, en même temps, réitéraient des actes d’opposition. L’invasion par le nord est l’un de ces actes de dissidence.

En la troisième année de la même ère, l’ambassadeur de la région située au nord du fleuve (jaune), fomenta subitement une révolte.

L’année suivante, encore, l’ambassadeur de la région située au nord du fleuve, se révolta. Le « nord du fleuve » désigne la région incluse entre l’actuelle province de Hebei (province au nord du fleuve) et la province de Hénan (province au sud du fleuve), c’est-à-dire la zone constituée des provinces de Shanxi et de Shandong. Les ambassadeurs étaient des généraux missionnés par l’empereur dans l’objectif d’empêcher simultanément les invasions barbares et à gouverner les régions. Leur tâche consistait donc en la gestion des régions situées hors du pays et en leur protection des envahisseurs. Après la mort de l’ambassadeur légitime de la région, son fils, poussés par certaines raisons personnelles, s’opposa à l’empereur et fomenta une rébellion.

Ensuite, le pays de Dafan refusa de se soumettre aux ordres.

Le « pays de Dafan » était le nom utilisé alors pour le Tibet. Tout en communiquant avec le pays des Tang, le Tibet attaqua à plusieurs reprises ses frontières.

Et, de nouveau, les Ouighours se livrèrent à une invasion.

Jikaku note que des invasions se produisirent encore depuis le nord.

Les conflits militaires et les révoltes étaient semblables à ceux de l’époque de Xiang et de la dynastie des Qin.

Shihuang Di de la dynastie des Qin (premier empereur de Chine NdT) fit la guerre à six pays dont il s’empara. Jusqu’à l’unification de tous ces pays en un seul, les combats furent d’une extrême violence. Immédiatement après la mort de Shihuang, la dynastie fut renversée par Xiangyu et Gaozu de la dynastie des Han. Ce fut ensuite au tour de Xiangyu et de Gaozu d’entrer en guerre l’un contre l’autre, lutte qui dura encore huit années. En fin de compte, en tout, les guerres ne cessèrent pas pendant vingt à trente ans.

Les villes et les villages furent détruits par divers incendies et autres catastrophes.

Les feux de la guerre et des catastrophes n’épargnèrent aucune ville ni aucun village dans tout le pays. Nichiren Daishônin cite ici Jikaku imputant la cause de ces désastres à l’empereur Wuzong. Celui-ci avait en effet ordonné de transmettre, en la première année de Huichang, les doctrines hérétiques du nenbutsu dans tous les temples du pays.

Pire encore, Wuzong ordonna l’éradication du bouddhisme et la destruction de nombreux temples et pagodes.

Le journal de Jikaku indique ensuite qu’au cours de la quatrième année de Huichang, l’empereur Wuzong ordonna cette fois l’abrogation du bouddhisme. Il avait cette intention depuis l’époque de son intronisation. Mais en cette quatrième année de l’ère Huichang, il se mit à vénérer un certain Zhaoguizhen du taoïsme. En la cinquième année de Huichang, sur les conseils de ce personnage et de ses proches, Wuzong ordonna  la destruction de tous les temples par décret impérial. On dit qu’il fit ainsi détruire quatre mille six cents temples et quarante mille bâtiments bouddhiques et qu’il fit revenir deux cent soixante mille cinq cents moines et nonnes à la vie séculière.

Il ne parvint cependant pas à calmer les révoltes et, finalement, mourut peu après dans l’agonie ». Fin de citation (idée principale)

La vénération d’un bouddhisme erroné, puis la persécution du bouddhisme par l’empereur Wuzong eurent pour effet sa maladie tragique. Il mourut dans la folie en constatant, impuissant, la perturbation du pays entier. Autrement dit, ce fut le type de preuve actuelle pouvant découler des doctrines hérétiques.

A présent, Nichiren Daishônin prend l’exemple de Hônen lui-même.

Forts de ces éléments, nous devons considérer le fait que Hônen vivait à l’époque de l’empereur Gotoba, aux environs des années de l’ère Kennin.

En la deuxième année de Kennin (1202), Hônen propageait déjà le nenbutsu depuis une vingtaine d’années. C’était sa période de grande activité à Kyoto.

Nous savons ce qui s’est passé pour cet empereur.

Vingt ans plus tard, se produisit la célèbre révolte de Jôkyû. L’empereur retiré, Gotoba, fut extrêmement irrité par le fait que les vassaux de rang inférieur du gouvernement militaire de Kamakura s’arrogeaient le pouvoir dans tout le pays. En effet, les domaines, jusqu’alors régis par la cour impériale et la noblesse, se soulevèrent contre eux, entraînant, entre autres, des problèmes économiques. En fin de compte, Gotoba ordonna l’arrestation et la condamnation à mort de Hôjô Yoshitoki, personnage central du gouvernement de Kamakura.

Or, Yoshitoki, jouant au chat et à la souris, attaqua Kyoto avec l’armée du Kanto. S’en suivit la célèbre bataille d’Ujigawa au cours de laquelle l’armée de l’empereur fut défaite. Yoshitoki entra alors dans Kyoto. Il condamna à l’exil  les trois empereurs retirés: Jôtoku, Tsuchimikado et Gotoba, respectivement à Sado, Tosa et Oki. Qu’un roturier osât attaquer l’empereur par les armes, le battît et l’exilât en toute impunité, ne s’était jamais vu. Ce fut la première fois au cours de l’histoire du Japon qu’un vassal se révolta et supplanta ses supérieurs hiérarchiques. Il va sans dire qu’il s’agissait là d’un phénomène extrêmement grave.

Cet événement se déroula vingt ans après qu’Hônen ait récité le nenbutsu et écrit le Recueil de passages sélectionné. Il montre ainsi que les doctrines hérétiques se produisent d’abord et, qu’ensuite, se manifestent les catastrophes.

Le grand pays des Tang a laissé des exemples qui se manifestent  dans notre pays.

En tant que preuve actuelle de la responsabilité du nenbutsu, cause des manifestations des catastrophes nationales, Nichiren Daishônin a cité des exemples chinois et japonais.

Ne doutez pas ! Ne soyez pas suspicieux ! Ce que vous devez faire est jeter le mal et prendre refuge dans le bien, condamner la source et couper les racines.

A titre de conclusion de son exposé, l’hôte conseille fortement au visiteur : du point de vue de la logique du bouddhisme, ne doutez pas de mes propos, et n’ayez pas de soupçons. Il faut, au contraire, rejeter le mal et se rallier au bien. Il faut  tarir la source et couper les racines du mal.

 


 

 

Sixième dialogue
Non présentation de ces réflexions en haut lieu

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Nous arrivons à présent au sixième débat. Dans le cinquième débat, l’hôte, par des preuves concrètes, a démontré que les catastrophes survenaient à cause des doctrines hérétiques du nenbutsu. Jusque là, le visiteur était très en colère. A présent, il s’est toutefois quelque peu calmé.

Le visiteur, quelque peu radouci dit : Bien que n’ayant pas sondé profondément le sujet, j’en comprends la teneur.

Je n’ai pas encore compris vos propos dans toute leur profondeur. Pourtant, en vous écoutant, je les ai saisis dans les grandes lignes. Toutefois, un doute subsiste encore. Il constitue le thème de la question suivante.

Pourtant, de la ville fleurie au campement des saules

La « ville fleurie » désigne le lieu de résidence de l’empereur. En Chine, à l’époque des Zhou, la capitale fut appelée Luoyang (洛陽 – ville du soleil). Au Japon, le mot ville (luo - , prononcé raku en Japonais) fut associé au mot fleur pour désigner la capitale où demeurait l’empereur : Karaku (華洛). Quant au campement des saules, il désignait dans les anciennes légendes, le lieu où se trouvait le Généralissime, autrement dit, le lieu où s’effectuait la politique du pays (en l’occurrence, Kamakura).

Les portes de Shakya sont dotées de gonds et de loquets, des piliers étayent les maisons bouddhistes.

Les portes de Shakya désignent les doctrines du vénéré Shakya. Il s’agit, autrement dit, du bouddhisme. Ensuite, l’expression « les maisons bouddhistes » possède également la même signification.

L’important dans une « porte » est ses battants. Autrefois, les battants s’ouvraient par un système de charnières. Le pilier de la porte et le battant étaient raccordés à l’aide de gonds. Il y avait en outre un loquet. L’expression « les portes de Shakya sont dotées de gonds et de loquets » signifie que, les gonds et le loquet représentant la partie essentielle d’une porte, ils symbolisent les moines éminents existant au sein des enseignements du vénéré Shakya.

Ensuite, sans une « poutre faîtière », une maison ne pourrait tenir debout. Ainsi, dans les maisons bouddhiques, il y avait des moines très érudits et dotés de grandes vertus.

Or, nul n’a proféré jusqu’ici de telles accusations, rien n’est parvenu à l’empereur.

Alors que des hommes prépondérants, possédant un pouvoir, existent au sein du bouddhisme, aucun n’a soumis de textes mettant en accusation Hônen pour ses erreurs, ni sur la place publique, ni auprès de l’empereur.

Et, vous, homme d’humble extraction, vomissez sans vergogne des paroles indésirables.

Le visiteur poursuit son objection : le caractère « indésirable » () est synonyme du setaria viridis, herbe ressemblant seulement aux plants de riz. C’est en effet, non pas du riz, mais une plante nuisible. Les « paroles indésirables » sont donc des propos vains, erronés, nuisibles. Autrement dit : « ce que vous dites n’est finalement rien d’autre que des propos nuisibles ». Le visiteur s’est un peu calmé comparativement au débat précédent. Il n’est cependant toujours pas convaincu par les propos de l’hôte.

Leur signification n’est pas complète.

Vos explications ne sont pas complètes. Il doit exister un complément, sans lequel je ne peux adhérer.

Votre théorie est dénuée de raison.

Le visiteur parle à présent du contenu des propos de l’hôte. Il ne peut adhérer aux principes évoqués.

Alors, l’hôte donne sa sixième réponse.

L’hôte dit : « Je suis peu de choses. Pourtant j’ai l’honneur d’étudier le Grand véhicule. Une calliphoridae accrochée à la queue d’un pur sang parcourt dix mille lieues. Le lierre vert, suspendu au sommet du pin, s’étend sur mille aunes.

Tout en restant humble, l’hôte cite des exemples pour démontrer que sa thèse est hautement prévalente. Il dit en substance : bien que de très modeste apparence, j’ai humblement étudié le Grand véhicule, contenant les profonds enseignements du Bouddha. Aussi, ce que je dis n’est en rien ma vision personnelle étriquée.

Même un petit insecte, tel la « calliphoridae », ou mouche bleue de la viande, lorsqu’il s’accroche à la queue d’un pur sang, animal donnant l’impression de pouvoir galoper dans les cieux, il peut ainsi parcourir dix mille lieues sans user ses forces. De même, le lierre vert, plante rampante, trop souple pour pouvoir se dresser, ne peut pas croître en hauteur. Cependant, si elle s’enroule autour d’un pin, arbre dur, il pousse alors vers le haut. Il peut ainsi atteindre le sommet d’un pin de mille aunes. Autrement dit, même quelqu’un de peu de capacités, s’il s’appuie sur un homme vénérable, excellent, peut lui aussi accéder à l’excellence et à la rectitude.

Né en tant que disciple, fils de l’Eveillé, je sers le roi des sutra.

Ici, dans la forme, Nichiren Daishônin, adopte la position d’enfant du Bouddha Shakyamuni. En tant que fils du Bouddha, il sert le « roi des sutra », autrement dit le Sutra du Lotus, enseignement suprême du Grand véhicule.

Comment, constatant le déclin du Dharma, ne pas être empli de tristesse en mon cœur ?

A constater le déclin de l’enseignement du Sutra du Lotus, objectif de la venue en ce monde du Bouddha, je ne peux ressentir que du regret. D’ailleurs, comment pourrait-on ne pas être triste face à cette situation ?

De plus, le Sutra de l’Extinction dit :

Nichiren Daishônin cite à présent des sutra, en particulier le Sutra de l’Extinction, afin de montrer qu’il ne faut pas agréer les doctrines et enseignements hérétiques, mais au contraire, les juger sévèrement et les dénoncer comme tels.

“Si un bon moine, voyant des hommes détruire le Dharma, les laisse faire sans les réprimander, ni les expulser, ni les dénoncer et les condamner, il faut le savoir, cet homme est un ennemi au sein du Dharma de l’Eveillé.

Le « bon moine » désigne le religieux pratiquant correctement les préceptes, sans les briser, après les avoir entendus de la bouche de l’Eveillé. Pourtant, si un tel bon moine, doté d’aussi hautes vertus, n’intervient pas lorsqu’il voit quelqu’un détruire le Dharma, cette attitude signifie qu’en réalité, il n’est pas vraiment un bon moine. Au contraire, il devient alors un ennemi au sein du bouddhisme, accumulant les erreurs graves.

Lorsqu’il voit un individu détruire le Dharma, le véritable bon moine doit, selon le sutra, le réprimander, l’expulser, le dénoncer et le condamner. Le réprimander, c’est l’attaquer par la discussion sur ses erreurs. Si après la réprimande, il ne se corrige pas, il faut alors l’expulser, autrement dit, le chasser de la communauté dans laquelle il pratique. Ensuite, il faut dénoncer ses crimes, de manière à prendre des mesures, c’est-à-dire le condamner en lui infligeant une punition concrète.

Si, par contre, il les réprimande, les expulse et les dénonce et les condamne, il est alors mon disciple, un véritable auditeur”.

S’il voit un homme détruire le Dharma et qu’il le réprimande, l’expulse, le dénonce et le condamne, il est alors le disciple de l’Eveillé, un véritable auditeur, un homme écoutant l’enseignement du Bouddha.

Dans la phrase suivante, Nichiren Daishônin s’exprime en fonction de la logique du bouddhisme

Moi, bien que n’étant pas un bon moine, afin d’éviter le reproche d’“ennemi au sein du Dharma”, j’ai simplement cité grossièrement l’axe principal.

Afin d’éviter le reproche d’être ce que le Bouddha appelle un « ennemi au sein du Dharma », l’hôte a donné la grande ligne du principe bouddhique. Cette « grande ligne » est en fait la grande voie fondamentale au sein des enseignements du Bouddha. Fort de cette signification juste, il a expliqué succinctement une partie de ce principe. Cette phrase est en fait un enseignement de Nichiren Daishônin, offert sur la base de sa propre conviction et de l’exhortation du Sutra du Nirvana.

De plus, au cours de l’ère Gennin, deux temples, le Enryakuji et le Kôfukuji adressèrent à plusieurs reprises des pétitions à l’empereur.

Plus haut dans le texte, le visiteur prétendait que les portes de Shakya étaient dotées de gonds et de loquets, que des poutres faîtières étayaient les maisons bouddhistes, que personne n’a jamais proposé de telles accusations, ni interpellé l’empereur. A partir de là, l’hôte montre la preuve actuelle de ses affirmations, en citant des faits s’étant déroulés au cours de l’ère Gennin (1224).

Des décrets et des messages impériaux furent alors émis.

Le Enryakuji, temple principal de l’école du Tendai et le Kôfukuji, l’un des sept célèbres temples principaux de Nara, aujourd’hui temple de l’école de la Nature des Dharma (Hossô), envoyèrent à maintes reprises des pétitions à l’empereur qui, à son tour, émit plusieurs décrets et messages.

Les décrets sont les ordres de l’empereur. Les messages, sont les ordres donnés au généralissime afin qu’il applique les décrets. Ces décrets et messages sont les exemples concrets de la dénonciation des hérésies du nenbutsu.

Ordonnant la confiscation des plaquettes en bois ayant servi à l’impression du Recueil des passages sélectionnés de Hônen et leur archivage dans le grand auditorium. Elles furent ensuite détruites par le feu à titre de gratitude envers la bienfaisance des Eveillés des trois phases.

L’application concrète de ces mouvements prit la forme de la confiscation des plaquettes en bois ayant servi à l’impression du Recueil des passages sélectionnés, à titre d’ouvrage impropre au regard du bouddhisme. Ces plaquettes furent archivées dans le grand auditorium (Dai kôdô), lieu de l’étude correcte de l’ensemble des enseignements du Bouddha. On suppose que le grand auditorium, dont il est question ici, est le Dai kôdô du temple Enryakuji. Là, afin de payer la dette de gratitude envers la bienfaisance du Bouddha, s’exerçant à travers les trois phases, ces plaquettes furent brûlées, ce mauvais ouvrage ne devant pas subsister..

Quant à la tombe de Hônen, les intouchables des temples Kanjin-in reçurent l’ordre de la détruire.

Des mesures furent également prises à l’encontre de la tombe de Hônen lui-même. Hônen était décédé à l’âge de quatre vingt ans. Sa tombe fut construite par ses disciples et adeptes dans le lieu appelé Otani, à Kyoto. Or, les restes de Hônen furent par la suite exhumés et jetés dans la rivière Kamogawa.

Jadis, un noble de haut rang, Fujiwara Mototsune (836-891), eut des visions à caractère religieux. Il fit alors construire un monastère à Yasaka, qu’il nomma  Kankeiji (temple de la célébration de la vision). Ayant reçu un message divin de la divinité Gozu (tête de bœuf), il  appela alors le temple Kankeiji Kanjin-in (temple de la sensation des dieux). Ce lieu est aujourd’hui le célèbre temple shinto Gion à Kyoto. En fait, à la suite de diverses péripéties de l’histoire, ce temple changea de nom à plusieurs reprises. A l’époque évoquée par Nichiren Daishônin, le Kanjin-in était géré par le temple Enryakuji du Tendai. Il s’occupait des Mikoshi (temples shinto portables) du temple Hie et des diverses besognes domestiques du temple Enryakuji.

Quant aux intouchables (inu jinnin), le mot jinnin seul, désigne les prêtres shinto officiels servant le dieu d’un temple shinto. Mais si l’on place le mot inu (chien) devant jinnin, il désigne alors les employés chargés des basses besognes du temple Kanjin-in. Avant les fêtes religieuses, par exemple, ils inspectaient les alentours pour enlever les cadavres de chiens et de chats, ils balayaient les rues devant être empruntées par la procession portant le Mikoshi.

Je ne pense pas qu’aujourd’hui le temple Gion reçoive des ordres du temple Enryakuji. Or, jadis, c’était le cas. Il ordonna aux intouchables du Kanjin-in de détruire la tombe de Hônen et de jeter ses restes.

Ses disciples, Ryûkan, Shôkô, Jôkaku, Sasshô et d’autres, furent condamnés à l’exil lointain, sans jamais être amnistiés de leur disgrâce. Soutenez-vous encore qu’aucune accusation n’ait été proférée » ?

Ryûkan, Shôkô, Jôkaku, Sasshô, étaient tous des disciples de Hônen. C’étaient des moines d’un rang très respectable. Ryûkan (1148-1227), en particulier, encouragea largement les doctrines du nenbutsu, en tant que maître de l’école de la Terre pure ou, encore, comme auteur de la Révélation des passages sélectionnés. Cependant, il fut quand même condamné à l’exil lointain.

Dans La chute dans l’enfer sans intermittence dans cette vie des pratiquants de l’invocation du Bouddha (Tôse nenbutsusha mugen jigoku no koto - 当世念仏者無間地獄事), Nichiren Daishônin, s’appuyant sur les transmissions de l’époque, écrit que tous ces hommes, au moment de leur mort, sombrèrent dans la folie à la suite de graves maladies. Que ce soit par la preuve actuelle prenant de telles formes, ou en fonction de l’erreur d’offense au Sutra du Lotus, Nichiren Daishônin montre ici que les enseignements du nenbutsu mènent les pratiquants et les fidèles de cette école au malheur.

Ici s’achèvent les cinquième et sixième débats entre le visiteur et l’hôte. Il convient de réfléchir à présent à la fin de ces passages. A l’époque, les enseignements spécieux du nenbutsu furent à l’origine d’émeutes dans tout le pays. Pour cette raison, les temples Enryakuji et Kôfukuji intervinrent auprès de l’empereur qui, par décret, ordonna des mesures à l’encontre de cette école. Ces mesures, clairement fondées sur les enseignements du Bouddha, furent la réprimande, l’expulsion, la dénonciation et la condamnation

Or, qu’en est-il de nos jours ? Comme Nichiren Daishônin l’a écrit plus tôt dans le texte : « Plutôt que d’offrir dix mille prières, il serait préférable d’interdire ce seul mal » (BEF n° 102 p. 17). Là réside l’essentiel au sein des pratiques du bouddhisme. On aura beau avoir recours à des enseignements imparfaits, ou s’écartant de la grande ligne, on aura beau les prier, les situations malheureuses ne trouveront jamais de solution. Il est dès lors essentiel de prier à l’aide de l’enseignement correct. De plus, puisque le Dharma correct se propage de manière appropriée grâce à l’enseignement correct, il est dès lors essentiel d’interdire le seul grand mal. Interdire ce seul grand mal c’est, en fonction du moment, faire shakubuku et réfuter les enseignements erronés. En effet, la pratique de shakubuku permet de révéler le pouvoir lumineux du bon Dharma, sur la base de l’éradication du seul grand mal.

Le dénommé Daisaku Ikeda disait souvent auparavant : « C’est moi qui ai tout réalisé ». Or, aujourd’hui, au Taisekiji, temple principal de la Nichiren Shôshû, il ne reste plus grand chose de ses réalisations. J’estime que celles-ci s’appuyaient sur des conceptions erronées, fondées sur des opinions personnelles et sur l’ego. Pourtant, il continue à dire : « Moi seul vous protège. Je représente le fondement ». Il s’agit là de conceptions personnelles et de vues du moi vraiment arrogantes. Ce sont des actions motivées par des ambitions et des aspirations uniquement d’ordre mondain, consistant du début à la fin en désirs effrénés et en rancœur. Ces conceptions empoisonnent les millions de membres de la Soka Gakkai. Elles constituent l’origine de la dégradation des sentiments au sein du peuple japonais et ce, à divers titres. En particulier, des conceptions telles que « à répéter cent fois un mensonge, il devient vérité » font que ce concentré de petit ego, mu par des sentiments d’égalité futile et d’orgueil, considère comme hostile tout ce qui ne se plie pas et cherche à le détruire par tous les subterfuges possibles. Toutes ces nuisances et offenses sont présentes dans la Soka Gakkai actuelle.

Exalter la bonne doctrine du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude comme nous le faisons aujourd’hui, permettra de faire apparaître les véritables œuvres et vertus du bon Dharma et de la bonne doctrine. C’est, autrement dit, faire shakubuku, tel que ce traité le montre, fondé sur la noble existence de la Nichiren Shôshû, à tous ceux qui suivent les enseignements et doctrines erronées en ce monde et les faire prendre refuge dans le bon Dharma. Je terminerai ce cours en priant pour votre progression.

 

 

 

Septième dialogue
Cesser les dons et interrompre la vie


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Nichiren Daishônin expose ici le moyen fondamental effectif susceptible d’éradiquer les catastrophes nationales. Dans cette perspective, il cite les preuves par les phrases du sutra.

Apaisé, le visiteur dit :

Tout au long des nombreux débats auxquels se sont livrés le visiteur et l’hôte, ce dernier a montré la preuve logique, l’attestation scripturaire et la preuve manifeste, ce qui a pour résultat de calmer l’énervement du visiteur.

Il est difficile pour un seul homme de débattre de qui rabaisse les sutra et critique les moines.

Le visiteur dit en substance : « je conçois tout ce que vous affirmez. Toutefois, moi seul, ne peux tirer de conclusion sur le bien fondé ou non de vos assertions concernant le fait que Hônen ait rabaissé tous les sutra y compris le Sutra du Lotus et ait offensé les saints moines de la voie sainte ». En fait, ce point n’est pas encore clair pour lui.

Toutefois, il est vrai qu’il a apposé les quatre mots : rejeter, fermer, sceller et abandonner sur les deux mille huit cent quatre-vingt-trois rouleaux des six cent trente-huit sutra du Grand véhicule, ainsi que sur tous les Bouddha et bodhisattva et les divinités du monde et des cieux. Ces paroles sont, à l’évidence, les siennes. Ces phrases sont on ne peut plus claires.

Il faut pourtant se rendre à l’évidence. Dans son Recueil de passages sélectionnés, Hônen accole les quatre mots « rejeter, fermer, sceller et abandonner » sur les « deux mille huit cent quatre-vingt-trois rouleaux des six cent trente-huit sutra du Grand véhicule », ainsi que sur « tous les Bouddha et bodhisattva et les divinités du monde et des cieux ». Il demande ainsi de mettre en application ces quatre formules pour tous les sutra, tous les Bouddha et tous les bodhisattva. Le Recueil de passages sélectionnés fait clairement état de ces propos et le visiteur ne le nie pas.

Mais vous insistez sur ce défaut dans le jade et le critiquez sévèrement. Furent-elles des paroles motivées par l’illusion, ou étaient-ce des propos fondés sur l’éveil ? Je ne peux discerner le sage du sot. Il m’est difficile de déterminer le bien du mal.

Pourtant, le visiteur croit encore que Hônen est un moine aussi éminent que remarquable. Il répond à l’hôte « Il s’agit là d’un petit défaut de moine chez une personnalité aussi précieuse. Il est certes semblable à un défaut dans le jade, sur lequel vous vous obstinez. Je n’arrive pas à comprendre si  vos propos sont fondés sur l’illusion ou l’éveil. Etes-vous donc un sage, ou un sot ? Etes-vous intelligent ou stupide ? Je ne parviens pas à le déterminer ».

Ici, « le bien et le mal » (j. zehi - 是非), expression courante au Japon (aujourd’hui zehi est une expression tout à fait banale signifiant : « à tout prix », « coûte que coûte », « absolument » etc. NdT) est construite par « ze » ( = ce qui est juste) et « hi » ( =  ce qui est faux). Autrement dit, je n’arrive pas à déterminer si ce que vous dites est vrai ou faux.

Or, ensuite, le visiteur aborde le véritable problème, le problème concret.

Pourtant, vous affirmez avec véhémence que les calamités et catastrophes sont dues à la Sélection de passages et élaborez des théories pour corroborer vos dires. Il est certain que la paix sous le ciel et la quiétude dans le pays représentent le vœu du souverain et des ministres, le souhait du peuple.

Autrement dit : « je ne parviens pas à saisir si vos dires sont justes ou erronés. Vous prononcez de nombreuses paroles, discutant d’abondance sur le fait que la suite de catastrophes survenues en ce pays jetant de nombreuses personnes dans l’affliction, seraient provoquées par le Recueil de passages sélectionnés ». Le visiteur poursuit cependant en allant dans le sens de l’hôte, disant : « Il faut toutefois parler de la paix sous le ciel et de la quiétude dans le pays, thèmes que vous abordez, sachant qu’ils sont le souhait de tous, le vœu des gens de ce pays.

 Aujourd’hui, il semble que la vie quotidienne des Japonais présente des aspects de contentement matériel. Aussi, ils ne connaissent pas la souffrance de manquer de vêtement, de couvert, de toit et autres éléments de première nécessité. Avec le temps, par exemple, les personnes contemporaines des malheurs de la guerre deviennent de moins en moins nombreuses. La vie quotidienne du peuple pendant la seconde guerre mondiale était en effet tragique. Beaucoup mouraient dans les flammes dues aux bombardements aériens des grandes villes comme Tokyo ou Osaka. La nourriture était pratiquement inexistante. Les maisons étaient brûlées. C’était l’aspect même du grand enfer des hurlements incessants[69] et de la tourmente des esprits affamés. Aujourd’hui augmente le nombre de personnes ignorant cette situation atroce. En tout état de cause, il faut comprendre que jadis, outre les diverses catastrophes naturelles, les épidémies étaient fréquentes et la vie quotidienne, avec toutes ses difficultés, était alors extrêmement pénible.

Lorsqu’on est plongé dans une telle souffrance, il est naturel d’aspirer au bonheur et à la sécurité. Lorsqu’à tout moment des avions déversent des bombes incendiaires, embrasant l’environnement et qu’on croit être proche de la mort constamment, on a véritablement l’unique désir d’échapper à cet enfer. Les jeunes présents ici aujourd’hui n’ont pas connu cette situation, mais quelques aînés doivent certainement s’en souvenir. La guerre du Pacifique s’est achevée en 1945. Depuis, cinquante-huit ans se sont écoulés. Aussi, presque aucun témoin ne survit encore.

Dans une situation, où toutes sortes de catastrophes et de calamités surviennent dans le pays, on ressent avec acuité que « la paix sous le ciel et la quiétude dans le pays représentent le vœu du souverain et des ministres, le souhait du peuple ».

Le pays prospère grâce au Dharma et le Dharma est sublimé par les hommes.

Si dans une nation, un enseignement fondé sur des conceptions erronées est établi, immanquablement, cette nation sera en proie à la confusion. Aussi, un pays prospère ou périclite en fonction du dharma établi.

Cette phrase est prononcée par le visiteur, mais elle exprime, par son bon sens, la raison. Ensuite, c’est par le biais des hommes le propageant et le pratiquant correctement que les œuvres et vertus de ce dharma se manifestent.

Si le pays est détruit et les hommes anéantis, qui vénérera l’Eveillé, qui aura foi dans le Dharma ?

Cette phrase exprime la situation la pire qui soit. Si un pays est anéanti avec ses habitants, peut-on encore réellement croire au Bouddha, peut-on encore avoir foi dans le Dharma ? Plus la malhonnêteté et la perversion s’aggravent, plus, naturellement, le pays plonge dans des situations semblables.

Aussi, faut-il en premier lieu prier pour la nation et établir le bon Dharma du Bouddha.

La situation dans laquelle est plongé l’Irak depuis un certain temps est dramatique et, par ailleurs, des feux couvent un peu partout, prêts à éclater, semant guerre et malheur. De ce point de vue également, il est important de désirer la paix sociale au sein de la nation. Et le visiteur précise que cette situation peut être réalisée en établissant le bon Dharma de l’Eveillé.

Ces propos sont tenus par le visiteur, qui établit la relation entre la nation et le Dharma du Bouddha. Il dit en substance qu’afin de gérer de manière appropriée le pays et d’établir la paix sociale et l’ordre, il est nécessaire d’instaurer fermement l’enseignement du Bouddha. C’est en effet important et relève de la logique.

S’il existe une méthode pour éradiquer les calamités et arrêter les catastrophes, je souhaite l’entendre.

Dans l’objectif de conclure, le visiteur demande s’il existe des artifices pour conjurer les calamités de l’époque et « éradiquer les calamités et arrêter les catastrophes ».

La réponse proposée alors par l’hôte donne le sens principal de l’ensemble de ce point.

L’hôte dit : Je ne suis qu’un sot obstiné et n’ai nullement l’intention de me faire passer pour un sage.  

Se positionnant lui-même dans le rôle de l’hôte, Nichiren Daishônin se qualifie humblement de sot et d’obstiné.

Je peux simplement citer des phrases des sutra.

Or, il donne ses instructions seulement après avoir lu l’intégralité des sutra et en avoir saisi parfaitement le sens. A trop s’accrocher aux branches, on oublie la présence du tronc. Si l’on transpose cette attitude au bouddhisme, celle-ci engendre des erreurs dans l’interprétation du Dharma. Nichiren Daishônin, lui, a lu l’ensemble des enseignements développés par le vénéré Shakya tout au long de sa vie. Il était dès lors apte à citer les passages appropriés et à exposer son opinion au sujet de ces phrases.

Concernant les moyens de traiter (les catastrophes)

Ces moyens représentent les techniques appropriées à la gestion judicieuse du pays et à l’établissement de « la paix sous le ciel et la quiétude dans le pays ». Aujourd’hui, on parlera de la politique en tant que fondement.

Il existe en fait de nombreux passages au sein des livres intérieurs et des livres extérieurs. Il serait difficile de les citer en détail.

« Intérieurs » désigne la voie intérieure, autrement dit le bouddhisme et « extérieurs » les voies extérieures, c’est-à-dire tous les enseignements en dehors du bouddhisme. Le confucianisme de Kongzi[70] et Mengzi[71], le brahmanisme de l’Inde, toutes les philosophies et religions du monde, toutes les morales et éthiques, tout ce que l’humanité connaît comme stratagèmes et moyens, « exposent de nombreux passages ». S’il existe aujourd’hui aussi beaucoup de textes, il en existait également de très nombreux à l’époque, rendant leur présentation détaillée difficile.

Toutefois, ayant emprunté la voie du Bouddha, j’ai réfléchi à maintes reprises à ce sujet.

L’hôte va à présent révéler la méthode du point de vue du bouddhisme.

Il me semble donc qu’interdire les hommes de l’offense au Dharma et respecter le moine arpentant la voie juste permet d’établir la sérénité de la nation et la paix sous le ciel.

Dénoncer les hommes de l’offense au Dharma, tels Hônen qui, dégradant les importants sutra du Mahayana, dont le Sutra du Lotus, demanda de les rejeter, de les fermer, de les sceller, de les abandonner et de mettre en évidence l’hérésie de leurs enseignements, puis de respecter le moine progressant sur la voie juste. Ces deux éléments représentent la voie la plus directe pour instaurer la paix sous le ciel et la quiétude dans le pays.

Au fondement de « la voie juste », il y a les trois grands Dharma ésotériques propagés par Nichiren Daishônin, tout au long de sa vie. Le moine propageant ces trois grands Dharma ésotériques désigne le moine engagé sur la voie juste, montrant le principe directeur au sein de l’éternité de la Fin du Dharma. Néanmoins, en se fiant seulement aux phrases du présent traité, le moine sur la voie juste désigne le moine propageant le Sutra du Lotus, enseignement véritable, au regard des sutra antérieurs prêchés par l’Eveillé tout au long de  sa vie.

En ce sens, Nichiren Daishônin cite à présent de longs passages de sutra que je vais succinctement commenter.

Il cite en premier lieu le Sutra de l’Extinction (Nirvana).

L’offrande est la pratique du don. Lorsque vous voyez un homme dans un état inspirant la pitié, vous avez envie de lui donner ne serait-ce qu’un peu à manger, ou un peu d’argent, parce que ce geste pourrait peut-être le sauver. Ce geste correspond à une partie de l’offrande bouddhique.

Une autre offrande est faite à l’homme prêchant un enseignement supérieur. En fonction de notre sentiment du moment, on fait alors offrande à cet homme. Celui qui fait l’offrande à la Personne et au Dharma, grâce à ce geste, génère de grandes œuvres et vertus. Par contre, celui qui reçoit cette offrande peut continuer à vivre et continuer encore davantage à prêcher correctement le Dharma.

Parmi les plus de quatre cents écrits de Nichiren Daishônin, en particulier dans ses lettres, on peut lire combien est appréciable l’offrande et, en même temps, il enseigne les œuvres et vertus inhérentes à l’offrande. C’est pourquoi, en bouddhisme,  et même du point de vue de la société, le don, l’offrande, sont des actes très importants.

Les chrétiens également organisent des bazars où ils déposent des objets qu’ils partagent avec les plus nécessiteux. Cette attitude répond à un point commun à toute l’humanité : vouloir s’entraider.

Au sein de la pratique du bouddhisme, il existe les six perfections, ascèses encore plus larges et plus profondes : le don, le respect des préceptes, la patience, la progression, la concentration et la sagesse. Or, la première de ces pratiques est le don. C’est dire si cette ascèse est importante.

En effet, le Sutra de l’Extinction enseigne : L’Eveillé dit :

Cette phrase est extraite du chapitre dix-sept « Questions de la grande assemblée » du Sutra de l’Extinction. Avant de mourir, le vénéré Shakya se rendit à Kuśinagara. Il parvint chez un pratiquant nommé Cunda. Ce dernier, offrit de tout cœur un repas à l’Eveillé, à ses disciples et à son nombreux cortège. Après avoir pris son repas, le vénéré Shakya se dirigea vers le bosquet des arbres śāla où il mourut.

Lorsque le vénéré Shakya se trouvait chez Cunda, ce dernier lui posa la question : « doit-on faire l’offrande à n’importe qui ? » Ou bien faut-il faire une distinction entre le bien et le mal ? Le passage cité par Nichiren Daishônin constitue la réponse à Cunda.

« Hormis une catégorie d’hommes, vous pouvez faire l’offrande à tous les autres et vous serez alors dignes d’éloges ».

Il existe une seule sorte d’hommes à qui vous ne devez pas faire l’offrande, que vous devez exclure. Pour tous les autres, vous pouvez pratiquer l’offrande. Participant ainsi à leur salut, vous accumulerez des œuvres et vertus et vous serez dès lors loués.

Cunda demanda : « Qui désignez-vous par “une catégorie d’hommes” » ?

Entendant cette réponse, Cunda demanda qui était cette catégorie d’hommes.

« Ce sont ceux qui, au sein de ce sutra sont dits transgresser les préceptes ».

Pour toute réponse, le vénéré Shakya désigne ceux qui ne respectent pas les préceptes. Autrement dit, il ne faut pas leur faire l’offrande.

Cunda dit alors : « Je ne comprends toujours pas. Je souhaite uniquement que vous daigniez me l’expliquer ».

Cette brève réponse ne satisfait pas Cunda. En effet, il existe tant de catégories de préceptes que « transgresser les préceptes » est une notion trop vaste pour être claire. Il y a des préceptes lourds et des préceptes simples. Si l’on parle de ne pas respecter les préceptes, il arrive à tout le monde de commettre des mauvaises actions minimes. Il arrive, par exemple, que parfois, sans arrière pensée, on utilise un langage abusif, qu’on commette des mensonges minimes, parvenus à un certain âge, les enfants tiennent tête à leurs parents. Ce sont là des choses très banales. Pourtant, si on les considère du point de vue de l’ensemble des commandements, ces derniers possédant un contenu si vaste, finalement, même ces petites mauvaises actions reviennent à transgresser les préceptes. Dès lors, si l’on considère que toute action négative, même futile, correspond à un non respect des préceptes, on ne peut plus faire d’offrande à qui que ce soit.  C’est la raison pour laquelle Cunda ne comprit pas concrètement les paroles de l’Eveillé. Il le pria alors de lui expliquer de manière compréhensible.

Alors, l’Eveillé, s’adressant à Cunda dit : « Ceux qui transgressent les préceptes sont les icchantika. Le don fait à toute autre personne sera digne d’éloges, car vous recevrez de grandes rétributions ».

 Le Bouddha donne alors une réponse claire et précise. Les transgresseurs des préceptes sont en particulier les « icchantika ». Il faut ne pas faire don uniquement aux icchantika. Le don envers toute autre personne provoque, par tous, les éloges de nos vertus et permet d’obtenir de grandes et favorables rétributions.

Cunda demanda encore avec respect : « Que signifie icchantika » ?

Cunda poursuivit ses questions en demandant à l’Eveillé qui sont les icchantika et pour quelle raison, ne faut il pas leur faire de don.

L’Eveillé répondit : « Cunda ! Suppose des moines ou des nones, ainsi que des upāsaka ou des upasīkā qui, proférant des paroles inconsidérées et mauvaises, insultent le Dharma, sans jamais regretter d’avoir commis une telle lourde faute, ni concevoir du repentir en leur cœur. De telles personnes sont dites suivre la voie des icchantika.

 Le Bouddha répond : si, parmi les disciples de l’Eveillé, moines et nonnes, et parmi les dévots laïques hommes (upāsaka) et les fidèles laïques femmes (upasīkā), certains profèrent des critiques et offensent le Dharma sans en concevoir de regrets, ces hommes et ces femmes, alors, se tournent vers la voie lourde de fautes des icchantika. Les « paroles inconsidérées et mauvaises » sont, en fait, les propos nuisibles des doctrines erronées, s’opposant à l’enseignement du Bouddha et, de ce fait, offensent le bon Dharma.

Quant au bon Dharma, il existe en bouddhisme plusieurs niveaux. Même le Hinayana est un enseignement extrêmement supérieur à ceux des voies extérieures au bouddhisme et contient des vérités. Par contre, comparé au Mahayana, le Hinayana est inférieur. Dans cette comparaison, le Mahayana apparaît comme le bon Dharma. Si l’on compare alors, au sein du Mahayana les enseignements provisoires et l’enseignement véritable, l’enseignement véritable, autrement dit le Sutra du Lotus, est supérieur aux enseignements provisoires, représentant des expédients salvifiques. Il représente donc le véritable bon Dharma.

L’offense faite à ce bon Dharma constitue une faute très lourde. Le sutra  indique ici qu’il s’agit là du véritable mal. Telle est la définition du mal concernant les icchantika. Le sutra poursuit avec les « quatre fautes graves » et les « cinq crimes de rébellion ». Ces éléments sont une explication réitérée plus détaillée de la définition large des icchantika. L’important est toutefois de savoir que la faute la plus grave des icchantika est l’offense au bon Dharma.

Il y a aussi ceux qui commettent les quatre fautes graves ou perpètrent les cinq crimes de rébellion.

Les « quatre fautes graves » sont le meurtre, le vol et la fornication, trois des dix mauvaises actions et le mensonge, l’une des quatre mauvaises actions verbales.

Les « cinq crimes de rébellion » sont encore plus graves. Le premier est : tuer son propre père et le deuxième est tuer sa propre mère. Ce sont des crimes particulièrement odieux. Depuis quelque temps, on voit des individus tuer sans vergogne leur père ou leur mère. C’est l’aspect de perturbation jetée par les esprits maléfiques au Japon. Le troisième crime de rébellion est tuer un arhat. Un arhat est un saint. C’est donc tuer un homme de hautes vertus ayant complètement interrompu les mauvaises passions.

Le troisième crime de rébellion est : faire couler le sang du corps du Bouddha. Devadatta, tentant d’assassiner le vénéré Shakya, fit tomber un gros rocher sur son passage, afin de l’écraser. On dit qu’un éclat du rocher blessa les doigts de pied de Shakyamuni, faisant ainsi couler le sang du corps du Bouddha. Plus près de nous, le onze novembre de la première année de Bun’ei (1264), à Komatsubara, Tôjô Saemon Kagenobu, accompagné de plusieurs centaines de guerriers armés de lances, de sabres, d’arcs et de flèches, attaqua Nichiren Daishônin dans le dessein de l’assassiner. Lors de cet attentat, Kyônin bô, disciple de Nichiren Daishônin, fut tué après un combat acharné livré pour protéger son maître. Kudô Yoshitaka, un bienfaiteur, accouru pour protéger Nichiren Daishônin, fut lui aussi tué. Malgré cette violente persécution, Nichiren Daishônin lui-même, par prodige, échappa à la mort. Tôjô Kagenobu et ses hommes, visant Nichiren Daishônin l’encerclèrent pour lui nuire. Un disciple et un bienfaiteur, tentant de le protéger, perdirent la vie, mais, Nichiren Daishônin lui-même, blessé au front et à la main gauche, ne fut cependant pas tué. La raison en est que Nichiren Daishônin est le Bouddha originel de l’ensemencement. Parmi les cinq crimes de rébellion existent le parricide, le matricide et le meurtre d’un saint. Il n’y a pas le meurtre du Bouddha. En effet, même un mauvais démon, même un mauvais esprit motivé pour tuer l’Eveillé n’y parviendrait pas, car personne ne peut tuer un Bouddha. A la place, finalement, il y a le crime de faire couler le sang du corps du Bouddha.

Enfin, le dernier des cinq crimes de rébellion est la destruction de l’harmonie au sein même de la congrégation des moines. Ce crime consiste à tenter, par des médisances et des critiques, de fissurer, de détruire l’harmonie de la congrégation des disciples de l’Eveillé, gardant avec ce dernier le bon Dharma, essayant de le propager dans l’unité spirituelle des corps différents animés d’un cœur identique. Les actes commis par la Soka Gakkai aujourd’hui correspondent véritablement à ce crime. Ce genre d’actions représente le très grave crime de rébellion de la destruction de l’harmonie de la congrégation des moines.

Qui, tout en sachant commettre des actes graves, n’en conçoivent pas la moindre peur ni le moindre regret, ou même, s’ils en avaient ne le manifesteraient pas.

Les mauvais esprits ayant pénétré leur corps, ces personnes commettent toutes ces types de crimes sans être effrayées de leurs conséquences, sans en concevoir le moindre remord. En particulier, l’absence du « moindre regret » signifie qu’elles ne considèrent pas leur action comme le mal. « Ce n’est pas grave, de tels actes sont normaux, je sais ce que je fais, en parfaite connaissance de cause » disent-elles. Là encore, cette absence du moindre regret est applicable à la Soka Gakkai.

« S’ils en avaient ne le manifesteraient pas » signifie qu’ils n’avouent pas leurs crimes ni à eux-mêmes, ni à autrui.

Ils n’ont aucun désir d’établir et de protéger à travers les âges le bon Dharma.

 Ainsi, commettant de mauvais actes, sans peur ni regrets, sans aveux, ils perdent naturellement le désir de « protéger à travers les âges le bon Dharma ».

Au contraire, ils en parlent avec dédain et mépris, par le biais de paroles pleines d’erreurs.

Alors, commettant le grand acte immoral de dédaigner, de mépriser le bon Dharma, ils profèrent des paroles pleines d’erreurs. Finalement, les offenseurs du bon Dharma sont les icchantika.

Ces personnes aussi sont dites suivre la voie des icchantika. Ainsi, hormis les icchantika, tu peux faire le don à toutes les personnes et tu seras digne d’éloge. »

C’est la conclusion quant à la pratique du don. En fait, il ne s’agit pas de refuser de faire l’offrande à ceux qui commettent quelques mauvaises actions, mais uniquement aux mauvais hommes que sont les icchantika. En effet, leur faire une offrande accroîtrait leur pouvoir de nuisance. Faire une offrande participant à commettre de mauvais actes, a pour effet d’accumuler soi-même du mauvais karma. Même si l’on pense faire acte de bien en pratiquant le don, en fait, dans ce cas, on accumule au contraire du mauvais karma.

De nombreux membres de la Soka Gakkai sont convaincus qu’il s’agit d’une organisation oeuvrant pour Kôsen Rufu. Aussi, participent-ils à « zaimu[72] » en donnant de l’argent. Or, la Soka Gakkai étant une organisation nuisible, contraire aux principes du bouddhisme, leur don est en fait un acte plus mauvais qu’ils ne le pensent. Je souhaite que vous graviez bien ce principe en vous.

Nichiren Daishônin cite à présent le chapitre « Pratique sainte » du Sutra de l’Extinction. Dans ce passage, il est question d’ôter la vie aux offenseurs du Dharma. Toutefois, ici, la notion de tuer est liée à la protection du bon Dharma.

Il dit encore : « Me remémorant mon passé, je me souviens avoir été le roi d’un grand pays au sein du Janbudvipa. Je m’appelais alors Ŗşidatta.

 Jadis, existait un roi nommé Ŗşidatta (j. sen-yo -仙予). Le vénéré Shakya affirme qu’il s’agit d’une de ses vies antérieures. A l’époque où le roi Ŗşidatta naquit en ce pays, le Bouddha n’était pas encore apparu. Il n’y avait d’ailleurs pas non plus de bodhisattva, ni de saints tels que les auditeurs et les Bouddha pour soi. Alors, le roi étudia diverses voies religieuses et morales pendant douze années auprès d’un brahmane.

J’aimais et respectais les sutra du Mahayana. Mon cœur était pur et bon, il ne possédait aucune trace de vulgarité, de mal, de jalousie ni de ladrerie.

Or, par une causalité extraordinaire, Ŗşidatta avait auparavant entendu les sutra du Mahayana. Il manifestait donc une immense aspiration envers les enseignements du Grand véhicule et leur portait une grande déférence. Pour cette raison, d’un cœur pur, il s’appliquait à faire le bien, n’éprouvait jamais de mauvais sentiments, de jalousie, ni d’attachement matériel.

Hommes de bien, à cette époque, je chérissais le Mahayana. 

Ainsi, après douze années d’études, Ŗşidatta dit au brahmane « je suis convaincu que les enseignements du Mahayana sont justes. Nous devons dès lors éveiller la véritable aspiration à l’éveil et étudier la voie correcte par le Grand véhicule ».

J’entendis qu’un brahmane insultait cet enseignement. Après avoir entendu cela, je lui ôtai la vie sur le champ.

Or, à ce moment, son maître, le brahmane répondit : « Les enseignements du Mahayana sont aussi vides que le ciel insaisissable. Il est vain de penser à de telles choses ». Après avoir entendu ces paroles, le roi Ŗşidatta tua sur le champ le brahmane.

Hommes de bien, grâce à cette causalité, je ne tombai jamais en enfer ». 

Le vénéré Shakya poursuit : « Hommes de bien, la causalité de ce meurtre étant bonne, les œuvres et vertus engendrées me permirent de ne jamais tomber en enfer ».

Le sutra énonce encore :

Ici, Nichiren Daishônin cite le chapitre « Pratique brahmanique » du Sutra de l’Extinction, pour donner la signification de tuer des offenseurs du Dharma.

« L’Ainsi-venant, par le passé, était un roi. Alors qu’il pratiquait la voie des bodhisattva, il ôta la vie aux brahmanes de ce lieu ».

Dans la première partie du chapitre « Pratique brahmanique », le vénéré Shakya explique la grande rigueur et compassion nécessaire aux bodhisattva pour parvenir à l’éveil. Là aussi, existent des niveaux au sein des bodhisattva : du bodhisattva débutant au bodhisattva d’un niveau élevé, doté déjà d’un état de vie profond. Toutefois, lorsqu’on parvient au niveau d’un bodhisattva à l’état de vie supérieur, on encourage sans cesse autrui dans l’optique de le guider. Tout au long de ce chapitre « Pratique brahmanique », le Bouddha évoque ce genre de bodhisattva.

Il enseigne, en particulier, l’importance de guider quiconque avec le désir de le sauver fondamentalement, même s’il s’agit d’un ennemi. Le bodhisattva Kāśyapa, ayant entendu le prêche de l’Eveillé depuis le début, fut alors pris d’un doute. Il l’exprima sous ces termes au vénéré Shakya : « Vous dites qu’il faut guider avec rigueur et compassion tous les êtres. Or, Eveillé, n’avez-vous pas, vous-même tué, supprimé la vie à un brahmane ? » La phrase citée par Nichiren Daishônin est en fait la question posée par Kāśyapa.

Au sein du chapitre « Pratique brahmanique », il est enseigné un état de vie de bodhisattva nommé « terre[73] de l’enfant unique ». Il s’agit d’un état de vie, semblable à celui de parents chérissant leur enfant unique et prêts à donner leur vie pour lui, s’il fallait en arriver là pour le sauver. C’est donc l’état de vie des bodhisattva désireux de sauver tous les êtres. Kāśyapa s’étonne : « vous prêchez un tel état de vie et pourtant, vous-même, jadis, avouez avoir tué un brahmane. N’y a-t-il pas là une contradiction dans vos propos ? »

En réponse, le vénéré Shakya prêche diverses raisons afin de convaincre Kāśyapa. Tous ces passages existent dans le sutra, mais Nichiren Daishônin ne les cite pas dans le Traité sur la sérénité du pays. En résumé, Shakyamuni dit : « Je n’ai pas tué ce brahmane sous l’emprise du mauvais sentiment de haine ». « Si je l’avais laissé faire, il serait inéluctablement tombé en enfer. Le fait de le tuer immédiatement lui permettra de recommencer sa vie. J’ai constaté que la causalité d’avoir été tué en relation avec le Grand véhicule, devait entraîner que, dans le futur, il soit sauvé grâce aux enseignements justes du Grand véhicule. C’est donc par rigueur et compassion, que je l’ai alors tué. »

De fait, le sentiment à la base de cet acte de tuer, était, contre toute apparence, la compassion de vouloir sauver tous les êtres, sentiment apparaissant dans l’état de vie du bodhisattva demeurant sur la terre de l’enfant unique, de la même manière que des parents veulent à tout prix sauver leur enfant. Oter la vie était donc un moyen fondé véritablement sur la compassion, moyen pour protéger le Dharma vis-à-vis d’un offenseur du Grand véhicule.

Il dit encore : « Il existe trois sortes de meurtres : bénin, intermédiaire et grave.

Là encore, il s’agit d’une citation du chapitre « Pratique brahmanique » du Sutra de l’Extinction. Nichiren Daishônin cite les paroles du Bouddha concernant ce qui est à la fois désapprouvé et possible dans l’acte de tuer.

« Bénin, intermédiaire et grave » : Il existe trois degrés de gravité dans l’acte de tuer. En premier lieu, le meurtre bénin est le plus léger au sein du crime de tuer.

Le meurtre bénin se rapporte aux fourmis et à tous les animaux.

Tuer des animaux représente donc un meurtre bénin.

Sauf, s’ils sont la manifestation de bodhisattva.

Afin de guider les êtres vers le salut, les bodhisattva peuvent émettre le vœu de naître sous la forme d’animaux. Les causes et conditions les amenant à être tués permettent alors de sauver les êtres. Il s’agit d’un vœu émis en fonction du profond enseignement bouddhique de la cause, condition, effet, rétribution. Aussi, tuer ces « animaux – bodhisattva » ne représente pas un crime.

La causalité des meurtres bénins est la chute en enfer, parmi les animaux ou les esprits affamés, où l’on endure des souffrances bénignes.

Par contre, tuer toute autre sorte d’animaux, provoque la causalité bénigne de tomber en enfer, parmi les animaux ou les esprits affamés et d’y endurer « des souffrances bénignes ». Le Bouddha enseigne qu’il s’agit de souffrances relativement légères, comparées aux souffrances intermédiaires et lourdes.

Pour quelle raison ? Ces animaux possèdent en petite quantité les racines de bien. Pour cette raison, celui qui les tue reçoit précisément la rétribution de son crime.

Même les animaux conservent une quantité infinitésimale de racines de bien du passé au sein de la vie reçue à présent. Dès lors, les tuer représente un crime. Telle est la sagesse et la vue du Bouddha contemplant l’ensemble du monde des dharma. En fonction de ce principe, tuer ne serait-ce qu’une fourmi, provoque la chute en enfer. En fait, si l’on étudie convenablement les enseignements du Bouddha, il ne faut pas tuer sans raison, même une fourmi. En effet, même une fourmi possède une petite quantité de racines de bien. La tuer sans raison valable, simplement par méchanceté, par cruauté, entraîne par conséquent une rétribution équivalente. Ce principe ne se limite pas aux fourmis, il s’applique également à tous les animaux. Tuer un animal est donc un crime du point de vue du bouddhisme.

Le meurtre intermédiaire est nommé ainsi lorsqu’il se rapporte aux hommes ordinaires jusqu’à ceux qui ne reviennent pas.

Le « meurtre intermédiaire » se rapporte aux êtres humains. Cette catégorie s’étend de l’homme ordinaire, autrement dit les simples mortels, à ceux qui ne reviennent pas.

« Ceux qui ne reviennent pas » font partie de la troisième des quatre catégories de saints. De bas en haut, il y a « ceux qui sont entrés dans le courant[74] » (premier fruit), « ceux qui reviennent encore une fois »[75] (deuxième fruit), « ceux qui ne reviennent pas »[76] (troisième fruit) et les « arhats[77] ». Ceux qui ne reviennent pas se situent juste en dessous des arhats, c’est dire si leur état de vie est élevé. On les nomme également « ceux qui ne reviennent pas ». C’est le nom des saints ayant annihilé les mauvaises passions du monde des désirs. Conservant encore les illusions de la pensée au sein des mondes de la forme et de la non forme, ils ne sont pas encore aptes à s’extraire des trois mondes, sans toutefois renaître de nouveau dans le monde des désirs. En ce sens, n’étant pas encore des saints à part entière, leur meurtre fait partie des meurtres intermédiaires, comme celui des hommes ordinaires.

Cette cause karmique provoque la chute en enfer, chez les animaux et les esprits affamés où l’on endure les souffrances intermédiaires.

Le meurtre, des hommes ordinaires à ceux qui ont obtenu le fruit de non retour, fait tomber en enfer, chez les esprits affamés et chez les animaux, mondes dans lequel sont endurées les souffrances « moyennes ».

Le meurtre grave est celui des parents, des arhats, des Bouddha pour soi et des bodhisattva définitivement assurés.

Le « meurtre grave » englobe les cinq crimes de rébellion : le parricide, le matricide et le meurtre d’un arhat. Ces éléments font partie des cinq crimes de rébellion. Meurtres auxquels viennent s’ajouter le meurtre d’un Bouddha pour soi et  celui d’un boddhisattva assurément fixé. Arhat et Bouddha pour soi possèdent sensiblement la même signification. L’arhat se situe au point culminant des auditeurs, alors que le Bouddha pour soi est le saint s’éveillant par l’observation des causes et des conditions. Les Bouddha pour soi sont cités dans les chapitres des « Moyens » et « Durée de la vie » que vous lisez chaque jour, sous l’expression « byakushi butsu » : « Byakushi butsu sho funô chi » (les Bouddha pour soi ne peuvent en avoir connaissance) ou encore, « Byakushi butsu i murô chi » (les Bouddha pour soi, de leur sagesse sans écoulement…).

L’expression « byakushi », de « byakushi butsu » signifie « seul », « pour soi ». Le mot « butsu » signifie naturellement « Eveillé ». Autrement dit, ils s’éveillent tout seuls. Ainsi, par l’observation du principe des douze liens causaux, ils éradiquent leurs mauvaises passions et s’éveillent au principe de la vacuité. Ils se retirent dans les montagnes et les forêts  où ils affûtent  leur esprit tout en contemplant les douze liens causaux : l’obscurité, les actes, la conscience, le nom et les formes, les six entrées, le contact, la perception, l’attachement, les désirs, l’existence, la vie, la vieillesse et la mort. Les Bouddha pour soi s’éveillent ainsi.

Il y a ensuite les « bodhisattva définitivement assurés » (j. hitsujô no bosatsu - 畢定の菩薩). Cette expression signifie qu’ils ont définitivement parachevé toutes les ascèses nécessaires au sein du profond enseignement du Bouddha. Ce sont des bodhisattva possédant un extraordinaire état de vie, assurés de ne jamais régresser.

Il provoque la chute dans le grand enfer Avici.

Le meurtre de son père, de sa mère, d’un arhat, d’un Bouddha pour soi ou d’un bodhisattva définitivement assuré provoque la chute dans l’enfer Avici, l’enfer aux souffrances les plus terribles.

Hommes de bien, si quelqu’un tue un icchantika, il n’entre pas dans l’une de ces trois catégories de meurtres.

Les trois catégories de meurtre précitées sont désapprouvées. La présente phrase met en regard ce qui est désapprouvé de ce qui, relativement, est défini comme possible. Ainsi, contrairement au trois catégories de meurtres, tuer un icchantika ne représente pas un crime.

Hommes de bien, les brahmanes sont tous des icchantika ».

Lorsqu’il était le roi Ŗşidatta, Shakyamuni tua un brahmane. Ce dernier était un mauvais homme icchantika. Aussi, le tuer ne fut pas un crime. En même temps, comme je l’ai dit  tout à l’heure, l’état de vie du Bouddha au moment où il tua le brahmane n’était pas la haine, mais la rigueur et la compassion. Fort de ces deux signification, Shakyamuni dit que le meurtre est une mauvaise action, mais il ne constitue pas un crime s’il s’agit d’un icchantika. De plus, le sens principal de ce meurtre, son objectif fondamental était de protéger le bon Dharma.

Je tiens à rajouter que, selon la signification du débat suivant, le huitième de ce Traité sur la sérénité du pays, Nichiren Daishônin indique d’autres méthodes pour éradiquer les hérésies, moins excessives que de tuer des icchantika.

Ensuite, Nichiren Daishônin cite le Sutra du Roi bienveillant.

Dans le Sutra du Roi bienveillant, il est dit :

Le Sutra du Roi bienveillant fut prêché pour le roi Prasenajit[78]. Il enseigne la manière de gouverner correctement et de protéger la nation.

« L’Eveillé, s’adressant au roi Prasenajit, lui dit :

A cette époque, il existait en Inde un pays nommé Śrāvasti (j. Shaé -舎衛). Prasenajit était son roi. Il naquit le même jour que le vénéré Shakya. On l’appelait également roi des armées victorieuses, car il n’avait connu que la victoire, jamais la défaite. C’était un roi très puissant et remarquable.

“Pour cette raison, j’effectue la transmission aux divers souverains, je ne la fais pas envers les moines ni les nones. Pour quelle raison ? Parce qu’ils ne possèdent pas l’influence ni le pouvoir de ces monarques” Fin de citation.

Prasenajit possédait une foi profonde dans le Dharma. En raison de la causalité d’avoir reçu l’enseignement du vénéré Shakya, ce dernier prêcha pour lui le Sutra du Roi bienveillant. Un monarque doté d’un tel pouvoir d’influence, recevant et protégeant correctement le Dharma est en mesure de l’utiliser pour gouverner le pays et, ainsi, apporter le bonheur à ses nombreux sujets. En ce sens, le vénéré Shakya transmit ce sutra au roi. Par contre, il ne le transmit pas aux moines ni aux nones, ni aux hommes du commun, ne possédant pas ce pouvoir.

Finalement, le sens principal de la transmission à Prasenajit était de donner la signification particulière du souverain dans la perspective de protéger et de propager le bon Dharma.

Dans le Sutra de l’Extinction, il est dit.

La phrase suivante est extraite du chapitre « Longévité » du Sutra de l’Extinction (Nirvana).

« Je fais la transmission du bon Dharma sans supérieur aux rois, aux ministres d’Etat, aux Premiers ministres, ainsi qu’aux quatre catégories d’êtres.

Je fais la transmission au souverain, mais pas uniquement au souverain, également aux ministres d’Etat, au Premier ministre et aux quatre catégories d’êtres. Ces dernières sont les moines, les nones, les pieux laïques et les pieuses laïques.

S’il est des individus détruisant le bon Dharma, les ministres d’Etat et les quatre catégories d’êtres doivent les punir et les corriger ».

Je fais la transmission au roi et à de nombreuses autres personnes. Si, au sens populaire, certains détruisent ou s’opposent au bon Dharma, il faut alors les corriger sincèrement de ce mauvais esprit.

Il dit encore :

La phrase suivante, extraite du chapitre « Corps adamantin » du Sutra de l’Extinction précise dans un sens encore plus fort la punition et la correction.

« L’Eveillé dit : “Kasyapa.

Ce sermon est donné à l’attention du bodhisattva Kasyapa. Ce dernier avait posé une question sur la causalité du corps de Dharma adamantin et indestructible obtenu par l’Ainsi-venant. Cette phrase constitue la réponse.

C’est parce que je possède la causalité d’avoir protégé le bon Dharma, que j’ai réalisé le corps adamantin.

Le Bouddha répond que c’est parce qu’il a protégé le bon Dharma, que cette causalité lui a permis d’obtenir le corps adamantin. Ce dernier signifie qu’il a le corps fort et dur, que rien ne peut détruire. Adamantin vient du mot diamant, matière dure et incassable.

Hommes de bien, ceux qui désirent protéger le bon Dharma sans recevoir les cinq préceptes ni pratiquer la dignité, doivent porter le couteau et le sabre, l’arc et les flèches, les pointes et les lances”.

Ensuite, le Bouddha précise que, en tant que méthode pour propager le Dharma, il faut porter les armes et non pas observer les préceptes, ni  pratiquer la dignité. Pourtant, ces cinq préceptes constituent la base morale de l’être humain, dans tous les domaines de sa vie quotidienne. Ce sont : ne pas tuer, ne pas voler, ne pas forniquer, ne pas mentir et ne pas absorber d’alcool. Les quatre premiers, en particulier, comme ils concernent le meurtre, le vol, le mensonge et la luxure, représentent des interdits d’actes fondamentalement négatifs. Dès lors, le sens donné par le Bouddha dans cette phrase est qu’il est en fait plus important de protéger le bon Dharma que de s’attacher à ce genre de chose.

Quant à « la dignité », on parle de trois mille dignités. Les moines officiels de la congrégation du vénéré Shakya devaient recevoir de nombreux préceptes. Leur nombre était de deux cent cinquante. Ils devaient, en outre, observer ces deux cent cinquante préceptes qu'ils marchassent, qu’ils fussent immobiles, assis ou couchés, autrement dit au cours des quatre postures de la vie quotidienne, ce qui donne mille dignités. De plus, devant les observer au cours des trois phases : passé présent et futur, ils devaient, autrement dit, observer les préceptes en toute circonstance, ce qui donne trois mille dignités.

Toutefois, lorsqu’il s’agit du Grand véhicule, en particulier pour ce qui est de protéger le Dharma, il n’est dès lors plus nécessaire d’observer les préceptes. A la place, il faut porter des armes : des sabres, des arcs, des flèches, des lances. Autrement dit, si des individus détruisent le bon Dharma par des enseignements et des doctrines erronées, il faut alors, pour le protéger, porter des armes. Il ne s’agit cependant pas d’une incitation au meurtre. Il s’agit seulement de porter des armes pour protéger le Dharma, au cas où des individus tenteraient de persécuter le pratiquant du bon Dharma.

Cette tradition s’est transmise tout au long de l’histoire du bouddhisme au Japon. Au temple principal, par exemple, à l’occasion de la cérémonie de Ontaié, lors de la procession se déroulant entre le Kyakuden et le Mieidô, un des « sôdai » (administrateur laïc du temple), vêtu d’un costume de samurai, porte un sabre. Il représente l’aspect de la protection du Dharma par le sabre, transmis depuis les temps anciens. L’origine de cette tradition résiderait dans cette phrase.

Il dit encore :

La phrase suivante est également extraite du chapitre du « Corps adamantin ».

“S’il en est qui souhaitent recevoir et observer les cinq préceptes, ils ne peuvent pas obtenir d’être appelés (pratiquants du) Grand véhicule.

Les « cinq préceptes » sont communs au Hinayana et au Mahayana. Ils proviennent cependant du Hinayana. Aussi, recevoir  uniquement ces cinq préceptes, prends dès lors la signification du Petit véhicule et ne représente donc pas le véritable respect des préceptes au sens du Grand véhicule.

Même s’ils ne reçoivent pas les cinq préceptes mais protègent le bon Dharma, ils peuvent être appelés (pratiquants du) Grand véhicule.

Autrement dit, protéger le bon Dharma représente le véritable précepte du Grand véhicule.

Ceux qui protègent le bon Dharma doivent porter le couteau, le sabre, des armes et des bâtons.

Ceux qui protègent le bon Dharma doivent, le cas échéant, s’armer de sabres, de lances, de bâtons, armes aptes à défaire les ennemis, de manière à protéger le Dharma.

Même s’ils portent des sabres et des bâtons, je les appellerai hommes observant les préceptes” ».

Plutôt que d’observer les cinq préceptes, morale et modèle d’ordre personnel, celui qui, afin de protéger le Dharma, s’arme d’un sabre ou d’un bâton est considéré respecter véritablement les préceptes.

Le passage suivant est également extrait du chapitre « Corps adamantin ». Commence ici un exemple concret d’un saint ayant, par le passé, protégé le Dharma. Il s’agit des mérites du roi Utoku (doté de vertus) et du moine Kakutoku (vertus d’éveil).

Il dit encore : « Hommes de bien, par le passé, ici, à Kuśinagara, un Eveillé apparut au monde. Il s’appelait l’Ainsi-venant Joie Croissante. Après son extinction, le bon Dharma demeura un nombre incalculable de centaines de millions d’années. Alors qu’il restait quarante ans avant que le bon Dharma ne parvienne à son terme, il y avait un moine, respectueux des préceptes, dont le nom était Vertus d’éveil.

Au sein du processus d’enseignement de l’Ainsi-venant Joie croissante (j. kanki zôyaku nyorai - 歓喜増益如来), le bon Dharma subsista longtemps après l’extinction de cet Eveillé. Ensuite,  « alors qu’il restait quarante ans avant que le bon Dharma ne parvienne à son terme », autrement dit le monde était sur le point d’entrer dans la période de la Semblance ou de la Fin du Dharma. A ce moment, il y avait un moine respectueux des préceptes. Son nom était Vertus d’éveil (j. kakutoku - 覚徳).

A cette époque, il y avait de nombreux moines ayant abjuré les préceptes.

A la même époque, il y avait également des moines qui, eux, avaient abandonné les préceptes. C’étaient des icchantika ayant abjuré les préceptes et offensant le Dharma.

Lorsqu’ils entendirent le prêche (de Vertus d’éveil)

Dans son prêche, Vertus d’éveil réprimandait ces parjures, leur rappelant qu’un moine doit vivre fondé sur l’ascèse et l’enseignement de la voie aux êtres, et non pas compter sur les désirs matériels.

Certains, au sein des congrégations religieuses actuelles, utilisent l’argent issu des offrandes faites par les adeptes à des fins commerciales, par appât du gain. Ce n’est pas une attitude appropriée pour des religieux. Pour cette raison, dans la Nichiren Shôshû, ce genre d’activité n’est absolument pas pratiqué. Il est en effet impossible pour un moine de notre école d’entreprendre des activités à but lucratif, tel que le commerce. Ce point est d’ailleurs établi statutairement au sein des règles de l’école. A l’époque dont il est question dans le sutra, des moines, ayant brisé les interdits, s’adonnaient apparemment à ce genre d’entreprise. Vertus d’éveil les réprimanda.

Ils conçurent alors de la haine. Armés de sabres et de bâtons, ils attaquèrent ce maître du Dharma.

Après avoir écouté le sermon de Vertus d’éveil, les moines irrespectueux des préceptes virent naître en eux le désir malsain de le tuer.

Les hommes en proie aux désirs génèrent une immense colère lorsque la voie menant à l’assouvissement de ces désirs leur est interdite. Ce phénomène est toujours présent en ce monde. Les hommes « faisant de l’argent » de manière malhonnête deviennent fous furieux lorsque leurs pratiques sont sur le point d’être interdites. Ils fomentent alors toutes sortes de sombres conspirations. Ils vont parfois jusqu’au meurtre ou jusqu’à la persécution. Il en fut de même pour les moines non respectueux des préceptes. Ils se mirent à haïr, à détester Vertus d’éveil, au point de vouloir l’assassiner.

Le roi d’alors s’appelait Doté de vertus. Ayant appris ce qui se passait, il se rendit immédiatement là où se trouvait le prêtre, afin de protéger le Dharma. Il se battit de toutes ses forces contre les moines haineux.

Le roi d’alors s’appelait Doté de vertus (j. utoku - 有徳). Ayant eu vent de l’incident, il se précipita à l’endroit où se trouvait le prédicateur. Il évita à ce dernier d’être assassiné par les moines parjures contre qui il se battit bravement.

En cette occasion, le prédicateur fut sauvé du danger.

Ainsi, Vertus d’éveil put échapper au danger d’être assassiné par les mauvais moines.

Le onze novembre de la première année de Bu’nei (1264), Nichiren Daishônin fut attaqué à Komatsubara par Tôjô Saemon accompagné de plusieurs centaines de guerriers. Son disciple bienfaiteur, Messire Kudô Sakon Yoshitaka, se battit courageusement pour le protéger. Il fut cependant tué au cours du combat. Cet homme constitue l’exemple même de la protection du Dharma.

Pendant ce temps, le roi subit des blessures à coups de sabres, de bâtons, de flèches et de lances. Pas un endroit de son corps, aussi petit qu’une graine de moutarde soit-il, ne restait intact.

A l’issue de la bataille, le roi eut le corps couvert de blessures infligées par les armes de ses ennemis et se retrouva à l’article de la mort.

Alors, Vertus d’éveil se rendit auprès du roi et le loua.

Au moment de l’instant suprême du roi, Vertus d’éveil se rendit à son chevet et loua son acte de renoncement à soi.

« C’est bien, c’est bien ! Roi, vous êtes véritablement un protecteur du bon Dharma. Dans la vie prochaine, votre corps deviendra le réceptacle infini du Dharma ».

Autrement dit, grâce aux œuvres et vertus d’avoir protégé le bon Dharma, dans le futur, vous deviendrez Bouddha.

Après avoir entendu cet enseignement, le roi ressentit une grande joie. Sa vie parvenue à son terme, il naquit dans le pays du Bouddha Akşobhya.

Entendant les paroles de Vertus d’éveil, le roi Doté de vertus ressentit une immense joie. Là, sa vie s’acheva. Grâce aux œuvres et vertus accumulées, le roi Doté de vertus naquit au pays du Bouddha Akşobhya (j. ashuku butsu – 阿閦仏). Ce dernier est cité dans le chapitre « Château transitoire » du Sutra du Lotus. Il est le premier des seize princes, disciples du Bouddha Grands pouvoirs vainqueur en sagesse (j. Dai tsûchishô butsu - 大通智勝仏) à avoir obtenu l’éveil.

En tant que principal disciple de cet Eveillé. 

Ce roi se manifesta dans le pays de ce Bouddha dont il devint le principal disciple.

Les généraux de ce roi, son peuple, ses alliés, tous ceux qui s’étaient battus à ses côtés, ressentirent alors de la joie et ne régressèrent jamais dans leur aspiration à l’éveil. Après leur mort, tous vinrent à renaître dans le pays du Bouddha Akşobhya.

De plus, tous les féaux de ce roi qui s’étaient toujours battus à ses côtés, vinrent à renaître dans le pays du Bouddha Akşobhya où ils purent magnifiquement réaliser l’éveil.

Plus tard, le moine Vertus d’éveil mourut à son tour et put renaître dans le pays du Bouddha Akşobhya. En outre, il devint son deuxième disciple parmi les auditeurs.

En outre, le moine Vertus d’éveil, après sa mort, devait renaître lui aussi dans le pays du Bouddha Akşobhya dont il devint le deuxième disciple.

A travers cet exemple du passé, le Vénéré Shakya montre que, lorsque le bon Dharma est sur le point de péricliter, il convient de recevoir, de garder et de protéger le Dharma, même au prix de sa vie.

Nichiren Daishônin propagea de manière appropriée les trois grands Dharma ésotériques, enseignement suprême apte à sauver tous les êtres à travers les trois phases. Il le fit sur la base des cinq sortes de profondes doctrines que sont le Bouddhisme en général, le Mahayana en particulier et, plus précisément, l’enseignement véritable, puis la doctrine originelle et enfin, l’ensemencement. Par conséquent, la protection de ce Dharma fondamental au péril de sa vie, représentait le fondement de son action. On peut effectivement lire ce passage important sur le Kaidan dans le Traité sur les trois grands Dharma ésotériques :

« Lorsque le passé du roi Utoku et du moine Kakutoku sera transposé dans le futur souillé de la Fin du Dharma… ».

Quand il s’agit de l’œuvre importante de construire le Kaidan ultime, l’attitude appropriée est claire à la lumière de la légende du roi Doté de vertu et du moine Vertus d’éveil. Il convient donc de méditer profondément sur l’indication faite ici par Nichiren Daishônin.

Lorsque le bon Dharma est sur le point de péricliter, il convient de le recevoir, de le garder et de le protéger de cette manière. Kāśyapa, le roi de ce temps là, c’était moi.

Ici, le vénéré Shakya dévoile à Kāśyapa que le roi Doté de vertu était en fait lui-même dans une de ses vies précédentes.

Le moine prêchant le Dharma était l’Eveillé Kāśyapa.

Le moine prêchant le Dharma, autrement dit Kakutoku, devint le Bouddha Kāśyapa, un Eveillé apparu avant la naissance de Shakyamuni.

Kāśyapa, ceux qui protègent le bon Dharma reçoivent ainsi d’innombrables rétributions. Grâce à cette causalité, j’ai obtenu aujourd’hui divers aspects dont je peux librement me parer.

En raison des causes et des conditions d’avoir protégé le Dharma au péril de sa vie, il reçut d’incommensurables rétributions, comme obtenir l’aspect d’Eveillé. L’aspect de l’Eveillé est constitué de trente-deux signes d’excellence et quatre-vingt marques distinctives. Tous sont des traits de prééminence. L’expression « glorification du fait de cent mérites » désigne le fait d’obtenir un de ces signes par la pratique d’une infinité de bonnes actions. Mais la causalité de ces dernières doit être fondée sur la protection du Dharma. On dit que le Bouddha obtint ses trente deux signes distinctifs grâce aux mérites accumulés du fait de la protection du bon Dharma fondamental.

Et réaliser ainsi le corps de Dharma indestructible ».

Le « corps de Dharma » signifie avoir pris pour corps physique le monde des Dharma et de s’être uni à la grande vérité du monde des dharma. Possédant des vertus immensément profondes et vastes, il est « indestructible ». Le vénéré Shakya affirme ici avoir réalisé ce vénérable corps.

L’Eveillé s’adressa ainsi au bodhisattva Kāśyapa : « C’est pourquoi, les pratiquants laïcs souhaitant protéger le Dharma, doivent porter des sabres et des bâtons, afin d’en assurer la sécurité.

Après avoir évoqué les œuvres et vertus inhérentes à la protection du Dharma, le Bouddha dit au bodhisattva Kāśyapa que les pratiquants laïcs doivent également porter le sabre et le bâton pour le protéger.

Hommes de bien, après mon extinction, le pays tombera dans la négligence et le désordre d’un monde souillé et perverti. Alors, les hommes se pilleront mutuellement et le peuple sera en proie à la famine. A ce moment, afin d’échapper à la famine, nombre d’entre eux éveilleront leur cœur à l’éveil et quitteront la demeure. On les appellera les “crânes rasés”.

En effet, dans le futur, après l’extinction de l’Eveillé, dans une ère pervertie, le pays sera plongé dans la confusion, les hommes se détrousseront mutuellement et le petit peuple souffrira de la faim. Il n’y aura plus de véritable attirance envers la voie, mais, afin d’échapper à la disette, certains entreront dans les ordres et, tout en recevant les offrandes du peuple, commettront de mauvaises actions. On les appellera « les crânes rasés ».

Les  crânes rasés, voyant des hommes protéger et garder le bon Dharma, les chasseront ou les blesseront, parfois même les tueront.

Les « crânes rasés » sont des hommes extrêmement déréglés ayant quitté la demeure, autrement dit, devenus moines uniquement pour assouvir leurs désirs. Aujourd’hui, ce genre de personnages correspondrait à ces individus égocentriques, utilisant à leur guise la religion. En revanche, les moines cherchant à guider les êtres sur la base d’un véritable esprit de recherche, sont précieux. Or, ceux dont il est question ici, les crânes rasés, au contraire, sont des moines ou des religieux entrés dans la voie uniquement  pour leur profit personnel, désir de pouvoir, désir de domination, désir de monopole, soucieux avant tout de leur prospérité. Ils jouent les guides, anticipant les offrandes de ceux qui sont confiants envers leur aspect de religieux. Agissant uniquement motivés par leurs désirs, ils se mettent naturellement en colère face à des hommes pratiquant le bon Dharma.

A présent, la Soka Gakkai, prise d’une colère malveillante à l’encontre de la Nichiren Shôshû, se livre à de multiples insultes et médisances. Nous, par contre, nous ne sommes pas dans le même état après la Soka Gakkai. Nous sommes simplement remplis de pitié pour ces personnes vouées à la chute en enfer, que nous devons néanmoins sauver. C’est pour cette raison que nous faisons sans cesse shakubuku. Or, leur égoïsme à son paroxysme, les fait entrer dans une colère injuste envers ceux qui sont dans la bonne voie. Ils mentent dès lors effrontément et provoquent des contrariétés à leur encontre, allant jusqu’à les persécuter. La raison de ces malveillances réside uniquement dans leurs désirs malfaisants. Ils sont ainsi identiques aux « crânes rasés » du Sutra. En effet, tout en forgeant de toute pièce une religion falsifiée, ils n’agissent qu’en fonction de leurs désirs opportunistes. Face à une congrégation fondée sur la rectitude, ils s’insurgent. Ainsi, le sutra donne un enseignement précis, détaillant même les offenseurs du Dharma du futur, jusque dans la période de la Fin du Dharma.

Pour cette raison, j’autorise (les moines) observant les préceptes à recourir au soutien des bâtons et sabres (des laïcs), aux vêtements blancs et à accepter leur compagnie.

Afin de protéger les moines préservant le bon Dharma, les laïcs sont autorisés, le cas échéant, à porter le sabre, à porter le bâton, lorsqu’ils accompagnent le prêcheur, dans le but de le défendre.

Même s’ils sont armés de sabres et de bâtons, je dis néanmoins qu’ils respectent les préceptes.

Cette attitude est louée ici par l’Eveillé, considérant qu’elle représente celle d’hommes de bien respectant les préceptes.

Même s’ils sont armés de sabres et de bâtons, ils ne doivent cependant pas ôter la vie ».

Toutefois, il convient de prêter attention aux dernières paroles de l’Eveillé au cours de ce passage, paroles par lesquelles il met en garde sur le fait de porter le sabre et le bâton. En effet, ce n’est pas parce que l’on est armé de sabres ou de bâton que l’on peut ôter une vie à la légère. Autrement dit, dans la période de la Fin du Dharma, dans la perspective de propager l’enseignement, il ne faut pas prendre comme objectif de tuer autrui.

Au sein de la réponse apportée dans le cadre de ce septième échange de questions et de réponse, Nichiren Daishônin donne deux moyens pour interrompre les offenses au Dharma. Le premier est d’arrêter de faire des offrandes aux icchantika. Le second est, à l’instar du roi Ŗşidatta, d’ôter la vie aux offenseurs du Dharma.

Toutefois, finalement, l’interruption des offrandes représente la forme prise par la propagation correcte et rationnelle de l’enseignement, basée sur les quatre dons universels[79]. Elle représente en effet le thème principal du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude dans son ensemble et est préconisée plus particulièrement au sein du huitième échange de questions et de réponses. En fait, « même s’ils sont armés de sabres et de bâtons, ils ne doivent cependant pas ôter la vie » constitue une sorte de préparation concernant les moyens d’interdire l’offense au Dharma précisés dans le huitième dialogue.

Dans le Sutra du Lotus, il est dit : 

Jusqu’à présent, Nichiren Daishônin a cité les passages du Sutra de l’Extinction (Nehangyô) et du Sutra du Roi bienveillant (Nin’nô kyô), réfutant les offenseurs du Dharma, dans la perspective de trouver une solution aux malheurs de la nation. A présent, enfin, il cite le Sutra du Lotus à titre de distinction finale. Le texte est un extrait du chapitre « Parabole ».

« Si des hommes, dénués de foi, médisent de ce sutra, ils coupent alors les graines de boddhéité dans l’ensemble des mondes.

L’éveillé dit : les hommes qui, par manque de foi médisent du Sutra du Lotus, commettent alors le grave crime de détruire la graine de boddhéité de tous les êtres. En fait, seul le Sutra du Lotus contient  la graine fondamentale permettant à tous les hommes de devenir Bouddha. Dès lors, médire de ce sutra revient à détruire la graine du Bouddha, apte à sauver tous les êtres, au vrai sens du terme. Autrement dit, il s’agit du crime de s’opposer aux phénomènes et vérités des mondes de dharma dans leur ensemble.

A la fin de leur vie, ils entreront dans l’enfer Avici ». Fin de citation.

En ce sens, les offenseurs du Sutra du Lotus tombent inéluctablement en enfer. Telles sont les propres paroles de l’Eveillé.

En ce qui concerne « l’enfer Avici », précisons d’abord qu’il existe huit grandes catégories d’enfers. L’enfer Avici est situé au plus profond de ces huit enfers et se révèle le plus atroce. Il est constitué de cinq « non intermittences »[80] que j’omettrai ici, signifiant que la souffrance subie dans cet enfer est sans répit à différents titres. C’est pourquoi, on l’appelle « enfer aux souffrances sans intermittence ». Par conséquent, tous les êtres humains devraient croire et protéger le Sutra du Lotus. Les offenseurs de ce Sutra, quant à eux tombent irrémédiablement en enfer. Telle est la citation choisie par Nichiren Daishônin à titre de conclusion des sutras.

A partir de là, ce sont les propos de l’hôte, autrement dit, Nichiren Daishônin.

Ces passages de sutra sont parfaitement clairs. Que pourrais-je y ajouter ?

Après avoir cité ces passages parfaitement clairs, je n’ai rien à rajouter, car quelles paroles pourraient les compléter ? Les mises en gardes du Sutra du Lotus et du Sutra du Nirvana sont synthétisées ci-après.

Si l’on se réfère au Sutra du Lotus, offenser les sutra du Grand véhicule est plus grave encore que d’avoir commis les cinq rébellions à l’infini.  

Le point principal de la mise en garde du Sutra du Lotus concerne l’offense au sutra du Mahayana et, en particulier, du Sutra du Lotus. Cette faute surpasse les cinq rébellions commises à l’infini. Le chapitre « Parabole » montre effectivement longuement et avec précision que l’offense au Sutra du Lotus est véritablement beaucoup plus grave que les cinq crimes de rébellion[81].

C’est la raison pour laquelle cette faute entraîne la chute dans l’enfer Avici duquel on ne peut s’extraire pendant une éternité.

Par conséquent, le crime d’offense envers le Mahayana, en particulier le Sutra du Lotus, provoque la chute dans l’enfer Avici, duquel nul ne peut sortir pendant une  durée de temps infiniment longue.

Si l’on se réfère au Sutra de l’Extinction, même si l’offrande aux auteurs des cinq rébellions est autorisée, l’offrande aux offenseurs du Dharma est interdite.

Ensuite, le sens principal du Sutra du Nirvana est que si l’offrande aux mauvais hommes ayant perpétré les cinq rébellions est encore tolérée, l’offrande aux offenseurs du bon Dharma, quant à elle, est absolument interdite. Cette interdiction de faire l’offrande aux icchantika correspond à la question posée par Cunda, vue précédemment.

Celui qui tue une fourmi tombe inéluctablement dans les trois mauvaises voies.

A partir de là, Nichiren Daishônin traite de manière comparative la notion d’avoir pour but l’action de « tuer ». Tuer une fourmi : si cet acte est commis sans nécessité, d’un cœur malsain, alors, il y a chute dans les mondes de l’enfer, des esprits affamés ou des animaux.

Celui qui interdit l’offense au Dharma accède au degré de non régression. 

Par contre, celui qui se bat pour dissuader l’offense au Dharma, accède à l’état de vie supérieur des bodhisattva, à un degré d’éveil où l’on ne régresse plus. Ici, Nichiren Daishônin reprend le sens principal du Sutra de l’Extinction.

Ainsi, Vertus d’éveil devint le Bouddha Kāśyapa et Doté de vertus devint Shakyamuni.

L’exemple de ce principe est fourni par Kakutoku (Vertus d’éveil), renaissant sous les traits du Bouddha Kāśyapa et par le roi Utoku (Doté de vertus), devenant Shakyamuni lui-même.

A présent, Nichiren Daishônin va critiquer clairement les offenses au Dharma.

Les enseignements des Sutra du Lotus et du Nirvana représentent l’essence des cinq périodes de prêche de l’Eveillé.

En premier lieu, Nichiren Daishônin rappelle que le Sutra du Lotus et le Sutra de l’Extinction représentent le cœur essentiel de tous les sutra prêchés par le vénéré Shakya au cours de ses cinquante années d’enseignement.

En effet, Shakyamuni exposa ses enseignements à diverses fins : le Sutra de l’Ornementation fleurie (j. Kegon gyô -華厳経), premier enseignement du Bouddha avait ainsi pour objectif la « soudaineté »[82]. L’objectif des sutras suivants, les Agama (j. agon kyô - 阿含経) fut la « séduction »[83]. Les nombreux sutra enseignés ensuite au cours de la période dite des doctrines diverses (j. hôdô bu - 方等部) avaient pour objectif  le « discrédit »[84]. Les Sutra de la sagesse (j. Hannya kyô - 般若経), enseignés subséquemment eurent pour objectif le « filtrage »[85]. Ces enseignements ne représentent toutefois pas le but véritable de la venue en ce monde du Bouddha. Le véritable objectif de l’Eveillé fut manifesté pour la première fois par le Sutra du Lotus. En effet, il révèle le contenu du Dharma permettant à chacun des dix mondes de s’ouvrir à la boddhéité et manifeste ainsi la grande rigueur et compassion par laquelle il guide l’intégralité des êtres.

Le Sutra de l’Extinction (j. nehangyô -涅槃経) fut enseigné en dernier, reprenant la signification du Sutra du Lotus. Prêché à l’attention des êtres n’ayant pu encore obtenir l’éveil par le Sutra du Lotus, il intègre le contenu des moyens de l’Ornementation fleurie, des Agama, des Doctrines diverses et de la Sagesse, enseignés avant le Sutra du Lotus et conclue néanmoins par le sens du Sutra du Lotus. C’est ce que l’on nomme la « transmission de l’héritage après le glanage » (j. kunjû izoku - 捃拾遺嘱). La glanure symbolisant ici les personnes étant « passées à travers » l’éveil au moment de l’enseignement du Sutra du Lotus. Le cœur de l’ensemble des enseignements du vénéré Shakya est le Sutra du Lotus. Dès lors, si l’on compare le Sutra du Lotus et le Sutra du Nirvana, naturellement le Sutra du Lotus est supérieur. Toutefois, si l’on se situe par rapport à la signification des cinquante ans de prêche, alors effectivement, les Sutra du Lotus et du Nirvana constituent les éléments centraux des enseignements de Shakyamuni.

Leurs prescriptions sont très sévères. Qui ne s’y conformerait pas ?

Les Sutra du Lotus et du Nirvana enseignent que le crime d’offense envers de tels sutras véridiques au sein du Grand véhicule est extrêmement grave et, à l’inverse, que les œuvres et vertus de les protéger sont immenses. Ils exhortent tous les êtres à prendre refuge dans ces sutra et à les adorer.

Les offenseurs du Dharma ont toutefois oublié la voie correcte. En outre, l’aveuglement dû à leur stupidité s’est accru en raison de leur attachement à la Sélection de Hônen.

A partir de ce passage, Nichiren Daishônin démontre par des exemples concrets, qu’à cause de cet écrit pernicieux qu’est le Recueil des passages sélectionnés de Hônen et l’oubli de la voie correcte du Sutra du Lotus et du Sutra de l’Extinction, les opinions stupides augmentèrent

Se souvenant de son apparence, certains sculptent ou peignent son image. Ou encore, portant foi à ses thèses fallacieuses, d’autres gravent son verbiage tordu et méchant sur des blocs en bois afin de le propager à l’intérieur du pays et à l’extérieur des villes.

Se remémorant les vertus de Hônen par le souvenir de son apparence, on sculpta des statues en bois à son effigie, ou peignit son portrait que l’on enchâssât. Ou encore, on gravait ses paroles nuisibles comme des plantes vénéneuses sur des plaques en bois afin de les imprimer et les divulguer dans toutes les régions du Japon.

On vénère son école et on fait des offrandes à ses disciples.

Ainsi, de nombreuses personnes avaient foi et vénéraient l’école hérétique de la Terre pure, s’opposant au Sutra du Lotus et au vénéré Shakya. Ces mêmes personnes, par erreur, faisaient des offrandes aux disciples de Hônen, prédicateur de doctrines erronées. Autrement dit, ils commettaient la grave erreur de faire l’offrande aux doctrines erronées du maître erroné prêchant des doctrines erronées.

On en est arrivé au point de voir couper les doigts des mains de Shakyamuni et de les remplacer par les mudra d’Amida.

Lorsqu’on visite les temples de Kyoto ou de Nara, on y voit de nombreuses statues de Bouddha et de boddhisattva. Les mains de ces statues forment des « mudra ». Au cours de la longue histoire du Bouddhisme, des moines et des maîtres sculpteurs de statues de Bouddha ont sculpté des images de formes diverses. Aussi, s’il existe des images de mudra à peu près cohérentes, ce n’est pas toujours le cas. Quoi qu’il en soit, le mudra exprime l’éveil du Bouddha ou ses pratiques. Cette forme d’expression a existé dans les Bouddhismes indien, chinois et japonais.

Pour en revenir à ce texte, traditionnellement le mudra dessiné par les mains des statues du vénéré Shakya, représentent un cercle formé du pouce et du majeur se touchant en leur extrémité. Par contre, dans le mudra dessiné par les mains du Bouddha Amida, ce sont le pouce et l’index qui se touchent. Aussi, suffit-il de corriger la position des doigts, autrement dit de changer le majeur pour l’index touchant le pouce de Shakyamuni pour obtenir une statue d’Amida. Ainsi, Nichiren Daishônin dit ici, qu’à son époque, les gens considéraient Amida comme supérieur à Shakyamuni, au point de mutiler les statues de ce dernier pour en faire des statues d’Amida.

De voir les temples dédiés à l’Ainsi-venant de l’est devenir la demeure du roi des oies, souverain de l’enseignement de la terre de l’ouest.

L’ « Ainsi-Venant de l’est » désigne l’Ainsi-Venant Bhaisajyaguru (Maître des remèdes – j. Yakushi Nyorai – 薬師如来). Le Vénéré Shakya prêcha le Sutra des œuvres et vertus des vœux originels de ce Bouddha. L’Ainsi-Venant Maître des remèdes émit douze grands vœux originels. Il est considéré comme guérissant en particulier les maladies physiques et spirituelles des hommes. Celui-ci est un Bouddha des sutra provisoires et, à ce titre, n’est pas un Bouddha au triple corps permanent. Toutefois, le considérant comme le maître des remèdes partageant l’esprit du bon médecin du chapitre « Durée de la vie », le grand Maître Dengyô enchâssa Bhaisajyaguru dans le sanctuaire fondamental du temple du mont Hiei, sur la base de l’ouverture et de la révélation du Sutra du Lotus. Pour suivre cet exemple, tous les temples de l’école du Tendai enchâssèrent également l’effigie de l’Ainsi-Venant Bhaisajyaguru dans leurs sanctuaires.

Quant au « roi des oies », cette expression se rapporte à l’un des trente-deux signes distinctifs du Bouddha : des palmes entre les doigts des pieds et des mains, comme les oiseaux palmipèdes. Le « roi des oies » est donc le Bouddha. Cette phrase expose l’exemple concret du remplacement de l’Ainsi-venant Maître des remèdes par le Bouddha Amida.

Le Sutra conforme au Dharma, retranscrit plus de quatre cents fois, a été abandonné au profit des trois sutra de la Terre pure.

Il s’agit là de la pratique de la retranscription du Sutra du Lotus. En la 10e année de l’ère Tenchô (833), le grand maître Jikaku[86], troisième Patriarche du temple du mont Hiei, alors âgé de quarante ans, fit une retranscription du Sutra du Lotus, conforme au Dharma (Nyôhô kyô - 如法経). Le sanctuaire dans lequel ce sutra fut conservé s’appelle le Sanctuaire conforme au Dharma (Nyôhô dô - 如法堂).

« Conforme au Dharma » (Nyôhô) fait référence au début du chapitre « Maîtres du Dharma » du Sutra du Lotus, partie dans laquelle sont exposées les pratiques du Sutra du Lotus à l’aide de dix sortes d’offrandes à ce sutra.

« S’il se trouve des gens qui reçoivent, gardent, lisent, récitent, comprennent et prêchent et retranscrivent ne serait-ce qu’une stance de ce Sutra de la fleur du Dharma merveilleux, qui regardent les rouleaux de ce sutra avec le même respect qu’envers l’Eveillé, qui lui font offrande de fleurs, de colliers, d’encens, d’onguents, de fumigation, de dais, de bannières, de vêtements, de musique, ou, simplement, joignent les paumes en signe de vénération… »[87].

Le fait de retranscrire le Sutra du Lotus, après avoir fait parfaitement ces offrandes, représente la véritable retranscription du Sutra du Lotus conformément aux dix offrandes. Ainsi, la retranscription du sutra réalisée conformément au chapitre « Maîtres du Dharma » s’appelle « Sutra conforme au Dharma ». Cette pratique fut effectuée à partir de la 10e année de Tenchô (833), pour le 13e anniversaire de la mort de l’empereur Goshirakawa, jusqu’en la première année de Genku (1204). Pour être précis, cet intervalle représente 371 ans au cours desquels ce rite fut observé.

Or, on interrompit le rite de la retranscription du Sutra du Lotus effectué depuis l’époque du 13e anniversaire de la mort de l’empereur Goshirakawa, pour se livrer à la retranscription des trois sutra de la Terre pure. Nichiren Daishônin évoque ici cette offense au Dharma. « Plus de quatre cents fois » désigne le nombre de fois où le rite du « Sutra conforme au Dharma » fut pratiqué depuis le début.

On a interrompu les cours commémorant le grand maître du Tendai pour ceux dédiés à Shandao.

Comme vous le savez, Zhiyi, le grand maître du Tendai naquit en Chine. Il classa et jugea de manière appropriée l’intégralité des sutras. Il enseigna également dans quel but chaque sutra avait été prêché. Il laissa par conséquent une œuvre immense.

Or, les moines des autres écoles ne le comprennent toujours pas. Ils pensent que le bodhisattva Nāgārjuna, véritable fondateur du Bouddhisme Mahayana, était remarquable, ou croient que Kûkai[88] fait autorité dans le Bouddhisme. Pour ces raisons, ils se trompent, considérant les Sutra de la Sagesse, sutra provisoires, comme centre de l’enseignement du Bouddha. En fait, les Sutra de la Sagesse n’étaient rien d’autre que des moyens destinés à permettre au Bouddha d’enseigner le Sutra du Lotus. Aussi, la vérité principielle, substantifique moelle du Bouddhisme, n’apparaît pas au niveau de la « vacuité » (enseignement central des Sutra de la Sagesse – NdT). Même si ces sutra qualifient la vacuité de vérité primordiale, finalement, elle ne va pas plus loin que la vacuité. C’est pourquoi, le monde bouddhiste actuel ne peut pas emprunter la voie du véritable éveil dès ce corps, fondé sur la véritable identité de la vacuité, de la conditionnalité et de la médianité. Ayez la conviction, Mesdames et Messieurs, qu’étant devenus des croyants de la Nichiren Shôshû, vous étudiez et pratiquez le meilleur enseignement du bouddhisme.

Zhiyi, lui, était vraiment remarquable. Fondé sur son enseignement, Saichô, (le grand maître Dengyô) fonda le temple du mont Hiei au Japon. Or, la cérémonie de gratitude (Okô) envers la bienfaisance de Zhiyi, se déroulant le jour anniversaire de son décès, le 24 novembre de chaque année, fut  supprimée. A sa place, une cérémonie de Okô, dédiée à la reconnaissance envers Shandao, troisième fondateur du Nenbutsu en Chine, fut officiée. Nichiren Daishônin cite ici quelques exemples d’offenses au Dharma, leur nombre étant cependant si important qu’il était difficile de toutes les évoquer.

Il serait difficile d’être exhaustif dans les exemples de ce genre. N’est-ce pas là, la destruction du Bouddha ? N’est-ce pas là, la destruction du Dharma ? N’est-ce pas là, la destruction des moines ?  

A travers ces quatre exemples, Nichiren Daishônin démontre que les actes de destruction des trois trésors : Bouddha, Dharma et Moine se perpétuent de manière constante. En effet, les doigts du mudra de Shakyamuni furent coupés, remplacés par le mudra d’Amida ; les temples dédiés à l’Ainsi-Venant Maître des remèdes, ré attribués au maître des enseignements de la Terre de l’ouest (Amida). Ces deux exemples se rapportent à la destruction du trésor du Bouddha. Ensuite, nous trouvons l’interruption des plus de quatre cents pratiques du sutra conforme au Dharma, autrement dit l’interruption du rite de la retranscription du Sutra du Lotus. Cette offense correspond à la destruction du trésor du Dharma. Enfin, le remplacement du cours dédié à la mémoire du grand maître Dengyô, par un cours dédié à Shandao, correspond à la destruction du trésor du Moine.

Ces hérésies sont uniquement dues à la Sélection.  

La cause de cette situation déplorable réside dans l’écrit nuisible, enseignement erroné, doctrine hérétique de la Sélection de passages choisis de Hônen.

Quelle tristesse de se détourner des propos prescripteurs véridiques et lucides de l’Ainsi-venant.

Il est vraiment triste qu’un tel écrit nuisible soit apparu, se détournant des exhortations lucides du vénéré Shakya. Ces paroles prescriptives sont celles qui ont déjà été citées : « Si des hommes, dénués de foi, médisent de ce sutra, ils coupent alors les graines de boddhéité dans l’ensemble des mondes. A la fin de leur vie, ils entreront dans l’enfer Avici ».

Quelle pitié d’obéir aux paroles vulgaires de moines stupides jetant la perturbation.

Il est pitoyable que de nombreuses personnes suivent les propos vils et imprudents d’un homme aussi stupide qu’ignorant du Bouddhisme tel que l’était Hônen, qui diffusa son écrit nuisible, sans savoir que leur obéissance constitue la cause karmique de leur chute en enfer aux souffrances sans intermittence.

Si vous souhaitez que la tranquillité et le calme s’installent rapidement sur cette terre, il faut alors interdire l’offense au Dharma dans tout le pays.

Telle est la conclusion finale du septième échange de questions et de réponses. Concrètement,  « interdire l’offense au Dharma » signifie interrompre les offrandes, les dons aux offenseurs du Dharma. Cette attitude sera développée davantage dans le huitième dialogue. Elle constitue la signification de la présentation de la bonne doctrine du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Afin que personne ne réalise de dons aux offenses au Dharma, afin que chacun comprenne que l’offrande aux offenseurs du Dharma est une erreur, afin de faire prendre conscience de ce principe au plus grand nombre, ce qu’il convient de faire est « un shakubuku par personne ».

A présent, la Nichiren Shôshû est tournée vers le « 750e anniversaire de la présentation de la bonne doctrine du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude ». Aussi, il est nécessaire de permettre d’interrompre l’offrande à l’offense au Dharma, d’abord à nos proches, et de leur faire savoir que ces religions sont des doctrines erronées. Pratiquer ainsi shakubuku constituera la source du bonheur de chacun et permettra de sauver un grand nombre de personnes.

 

  

 

 

Huitième Dialogue
Controverse sur la peine de mort
 

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La seconde partie du huitième dialogue, jusqu’à la fin, en particulier, correspondant à celle lue dans les temples locaux lors de la cérémonie de Oéshiki, même relativement difficile, elle vous est familière.

Le huitième débat expose la méthode pour interdire les offenses au Dharma. La décapitation y est prohibée. En effet, dans le septième dialogue, Nichiren Daishônin cite les deux méthodes utilisées dans les temps anciens, pour punir les offenseurs du Dharma. Ces deux méthodes sont énoncées dans le Sutra de l’Extinction. La première est la décapitation. Autrement dit, le sutra préconise de tuer les mauvais éléments. Je lis l’étonnement sur vos visages. Pourtant, il s’agit bien des paroles du Sutra de l’Extinction, citées par Nichiren Daishônin dans le septième dialogue du Traité sur la sérénité du pays. Il est certes important de protéger le bon Dharma, même armé de sabres, d’arcs et de flèches, ou de lances. Toutefois, à la fin, il est dit : « Bien que l’utilisation du sabre et du bâton soit autorisée, il ne faut pas ôter la vie ». Nichiren Daishônin précise bien l’importance de ne pas tuer inconsidérément.

L’autre méthode est l’interruption de l’offrande aux offenseurs du Dharma. La non utilisation de ces méthodes est énoncée dans le huitième échange. Pénétrons à présent dans la lecture du texte proprement dit.

Le visiteur dit : Si l’on souhaite interdire les offenseurs du Dharma, si l’on veut éradiquer ceux qui transgressent les interdits de l’Eveillé, faut-il, comme le préconise le Sutra, les mettre à mort ?

En l’occurrence, la question du visiteur est : « Faut-il, comme vous le dite, ôter la vie aux offenseurs du Dharma en les tuant, afin, comme le préconise le sutra, de mettre un terme à leurs crimes et d’éradiquer les enseignements hétérodoxes » ? Ici, « le sutra » désigne le Sutra du Nirvana, duquel a été extraite la citation.  Dans le Sutra du Nirvana, il est en effet indiqué que le roi Ŗşidatta (j. Sen’yo koku ô - 仙予国王) tua les brahmanes médisant des enseignements du Mahayana. Faut-il, conformément à cet exemple, tuer les offenseurs du Dharma ?

S’il en est ainsi, nous serons à notre tour des assassins. Ne devrons-nous pas alors, en subir nous-mêmes les conséquences ?

Puisque depuis le début, l’hôte tente de démontrer que Hônen offensait le Dharma, il faudrait donc tuer ses successeurs. Mais le visiteur retourne la question : cet acte ne serait-il pas, néanmoins, très grave ?

L’hôte répond alors en citant de nouveau le sutra.

En effet, dans le Sutra du Grand rassemblement, il est dit :

Ce passage est extrait du chapitre « Extinction complète du Dharma » du Sutra du Grand rassemblement.

« Si un homme se rase la tête et revêt le surplis, les hommes et les cieux devront lui faire des offrandes, qu’il respecte les préceptes ou même, qu’il les transgresse. En effet,  par cet acte, c’est à moi qu’ils font l’offrande. Car cet homme est mon fils.

L’Eveillé énonce de lui-même qu’un moine, quel qu’il soit, à partir du moment où il s’est rasé la tête et a vêtu le surplis, cet homme est dès lors son fils.

Dans ce passage, « respecter les préceptes » désigne le moine protégeant l’enseignement du Bouddha et agissant correctement. A l’inverse, « transgresser les préceptes » désigne le moine incapable de protéger l’enseignement entrant progressivement dans l’opposition. Ainsi, il existe aussi des moines agissant mal. Cependant, les uns comme les autres sont les enfants du Bouddha, selon les propres paroles de l’Eveillé. Aussi, les hommes et les cieux doivent faire l’offrande aux moines, enfants du Bouddha, qu’ils respectent ou non les préceptes, parce que, justement, ils sont les enfants du Bouddha.

Si, par contre, ils le frappent, ils frappent alors mon fils.

Quelle qu’en  soit  la  raison,  frapper  un  moine,  revient à   frapper le  fils  de  l’Eveillé.

S’ils le tancent et l’humilient, c’est moi qu’ils injurient et humilient ».

Si l’on  insulte  un  moine, si on le rabaisse,  c’est  insulter, rabaisser l’Eveillé.

Sans réfléchir davantage, nous devons savoir, sans discourir sur le fait qu’il soit bon ou mauvais, sans distinguer du bien ou du mal, lorsqu’un homme est devenu  moine, il est apte à recevoir des offrandes.

Par ces extraits, le voyageur veut dire que, sans réfléchir au bien ou au mal, face à un moine, il convient fondamentalement de lui faire l’offrande.

Comment pourrions-nous dès lors le frapper sans blesser son père ?

Selon ces  phrases, on ne saurait faire du mal au fils, sans  affliger  le père. Autrement dit, ce n’est pas  parce qu’il est un offenseur du Dharma qu’il faut  commettre l’irréparable, autrement dit, le tuer.

Ensuite, le visiteur prend l’exemple de la preuve manifeste de la chute en enfer de ceux qui tuèrent un enfant du Bouddha.

Les brahmanes aux bâtons de bambous qui tuèrent le vénérable Maudgalyāyana sombrèrent pendant une éternité au fond de l’enfer aux souffrances sans intermittence.

Les « brahmanes aux bâtons de bambous » étaient un groupe d’adeptes des voies extérieures, vivant à l’époque du vénéré Shakya. Très violents et brutaux, ils portaient toujours des bâtons avec lesquels ils frappaient tous ceux qui leur déplaisaient.

Ces hommes détestaient l’Eveillé et ses disciples. Un jour, deux vénérables disciples du Bouddha, Śāriputra (j. Sharihotsu - 舎利弗) et Maudgalyāyana (j. Mokuren -目連) marchaient en direction de Rājagŗha[89], lorsqu’ils furent interpellés par les brahmanes aux bâtons de bambous. « On dit que votre maître, Gautama, dispense l’enseignement véritable. Alors, nous voulons vous interroger sur cet enseignement ». Ils rajoutèrent : « si votre réponse ne nous convient pas, nous vous battrons à mort ».

Ils s’adressèrent d’abord à Śāriputra : « Dis-nous ce que vous entendez par “la voie” ». Śāriputra, homme d’une très grande sagesse,  répondit par des paroles profondes exposant des principes philosophiques d’une extraordinaire complexité. Les brahmanes ne comprenant strictement rien à ce discours, crurent que Śāriputra faisait leur éloge. Ils dirent alors : « tu peux passer ».

Ils se tournèrent alors vers Maudgalyāyana : « Et toi, qu’en penses-tu » ? Maudgalyāyana répondit : « Grâce à mes pouvoirs divins et transcendantaux, il m’est arrivé dans le passé, d’aller en enfer. J’y ai vu votre maître défunt. En raison de ses crimes de mensonges, sa langue était devenue d’une largeur incommensurable. En outre, des êtres armés de lames et de houes, labouraient sans pitié cette langue en long et en large. Telles étaient les souffrances endurées par votre maître. Cela prouve que votre enseignement est complètement erroné ». Entendant ces paroles, les brahmanes entrèrent en fureur et lynchèrent sauvagement Maudgalyāyana avec leurs cannes de bambou.

De son côté, Śāriputra, ne voyant pas venir Maudgalyāyana, retourna sur ses pas. Il le découvrit à l’article de la mort. Etonné, Śāriputra lui demanda : « Toi réputé pour être le meilleur dans les pouvoirs divins et transcendantaux, pourquoi n’as-tu pas utilisé ces pouvoirs pour te sortir de ce traquenard » ? Maudgalyāyana murmura dans un souffle : « parce que c’est mon karma accumulé depuis le passé ». Ainsi, quelle que soit la somme des bonnes œuvres et vertus accumulées, il y a des cas où l’on ne peut échapper au karma du passé. Enfin, au moment de mourir, Maudgalyāyana dit dans un souffle : « lorsque j’étais frappé par les cannes de bambou, je fus incapable de me rappeler le mot “divin” de mes pouvoirs ». Puis il s’éteignit.

Nichiren Daishônin écrit que, toutefois, en raison de ce crime, les brahmanes aux cannes de bambous tombèrent pour une éternité dans l’enfer aux souffrances sans intermittence.

Devadatta, qui tua la nonne Utpalavarna, fut longtemps prisonnier des flammes de l’enfer Avici.

Devadatta (j. Daibadatta - 提婆達多) était un très mauvais homme qui commit trois des cinq fautes de rébellion : la première fut de faire couler le sang du Bouddha. Un jour, Devadatta poussa un rocher d’une montagne sur le chemin qu’empruntait le vénéré Shakya, dans le dessein de le tuer. Le rocher tomba sur les doigts de pieds du Bouddha, dont il fit couler le sang. Le vénéré Shakya ne fut pas tué, mais son sang s’écoula de son corps. Cet acte fait partie des cinq fautes de rébellion. Il n’existe pas de résolution concernant le fait de tuer un Bouddha. En effet, s’il est possible de tuer son père, de tuer sa mère ou un arhat, il est en revanche impossible de tuer un Bouddha.

Ce fut la même chose pour Nichiren Daishônin, le onze novembre de la première année de l’ère Bun’nei (1264). Alors qu’il se trouvait au lieu-dit Komatsubara, dans le pays d’Awa, il fut encerclé par plusieurs centaines d’hommes armés, commandés par Tôjô Saemon. Bien que leur but était de tuer Nichiren Daishônin, ils n’y parvinrent pas. Par contre, ils lui infligèrent une blessure, laissant une cicatrice de quatre pouces entre ses sourcils. Ils firent couler son sang, un des cinq crimes de rébellion.

Ensuite, Devadatta commit le crime de détruire l’harmonie au sein de la congrégation des moines. L’explication demandant trop de temps, je ne l’aborderai pas aujourd’hui. En fait, Devadatta suborna les disciples du vénéré Shakya, tentant de les faire devenir ses propres disciples.

Enfin, il tua un arhat. C’est le crime dont Nichiren Daishônin cite ici l’exemple : « Devadatta, qui tua la nonne Utpalavarna (j. Renge bikuni -蓮華比丘尼) ».

Utpalavarna était une disciple du vénéré Shakya, dévouée à une profonde ascèse du Bouddhisme. Elle était parvenue à l’éveil des arhats. Jadis, Devadatta avait suborné le prince Ajātaśatru (j. Ajase - 阿闍世), lui disant : « Je vais tuer le vénéré Shakya et deviendrai Bouddha à sa place. Toi, tue ton père, le roi Binbasāra (j. Binbashara - 頻婆舎) et deviens roi à sa place. Toi devenu roi et moi devenu le Bouddha, nous changerons le monde ». Porté par ces paroles, Ajātaśatru emprisonna Binbasāra, son propre père, qu’il finit par assassiner.

En raison de ce mauvais acte (s. Karma), le corps du roi Ajātaśatru se recouvrit de pustules infectieuses, particulièrement douloureuses. A ce moment, Jivaka (j. Giba - 耆婆), son sage médecin, lui conseilla d’aller voir le vénéré Shakya. Alors, Ajātaśatru fit acte de contrition et, grâce aux œuvres et vertus de la rigueur et compassion du vénéré Shakya, ses pustules guérirent. Il prit en même temps conscience de la nature effroyable de Devadatta, à quel point il était un homme mauvais, lui qui l’avait subjugué au point de le pousser à commettre des actes irréparables. Sur ces entrefaites, Devadatta se rendit au château pour recevoir des offrandes comme à l’accoutumée.

Bien entendu, Ajātaśatru lui refusa l’accès. Alors que Devadatta s’indignait de cette attitude, la nonne Utpalavarna sortit du château. Elle admonesta sévèrement Devadatta, lui disant : « Tout en étant disciple de l’Eveillé, tu t’opposes à lui et ne commets que des actes nuisibles. Tu es inhumain » ! Mis hors de lui par les paroles de la nonne, il la frappa à coups de poings et la tua.

Or, un trou s’ouvrit devant la porte du château et Devadatta y tomba, trou qui le fit tomber directement au fond de l’enfer. C’est ce qu’entend le Gosho par : « Devadatta, qui tua la nonne Utpalavarna, fut longtemps prisonnier des flammes de l’enfer Avici ». Dans les Notes de voyages en Asie centrale (c.Xiyuji, j. Saïikiki -西域記), ouvrage dans lequel il relate son  périple de dix-sept années en Inde, le tripitaka Xuanzang (j. Genjô -玄奘) indique qu’à son époque (17e siècle), le trou par lequel Devadatta tomba en enfer existait encore.

Ces preuves des temps anciens sont claires, les descendants doivent les craindre.

Cette phrase marque la conclusion du visiteur. Comme il l’a été dit clairement auparavant, le crime karmique de tuer un moine fait tomber dans l’enfer Avici[90]. Dès lors, on comprend le caractère terrifiant du meurtre d’un moine, même pour ses descendants.

En réprimandant ainsi les offenseurs du Dharma, vous enfreignez l’interdit. Il est difficile de vous croire. Comment vous justifiez-vous ?

Le visiteur rétorque : Ainsi, ne détruisez-vous pas les paroles d’or de l’Eveillé exhortant à avoir de la compassion pour les enfants du Bouddha et leur faire l’offrande ? Même s’ils prônent des enseignements erronés, il est difficile de croire qu’il est juste de les tuer.

L’hôte dit 

Commence alors la réponse de l’hôte au visiteur.

« Il est clair que vous avez lu ces sutras. Pourtant, vous parlez encore de la sorte. Sont-ils hors de portée de votre esprit, ou ne parvenez-vous pas à en comprendre le raisonnement ?

Bien qu’à l’évidence vous connaissiez les sutra que je cite, vos propos prouvent que, finalement, vous n’en avez pas compris le sens. Les principes développés à travers les phrases des sutras vous sont-elles donc incompréhensibles ? Ce passage va par conséquent rectifier les conceptions erronées du visiteur.

Mon intention n’est nullement de blâmer les enfants de l’Eveillé.

Tout ce que j’ai dit jusqu’à présent n’était nullement dans le dessin de blâmer les enfants du Bouddha. Le visiteur, citant des passages du Sutra du Grand rassemblement, a controversé sur le fait que les moines, respectant les préceptes ou même les enfreignant, sont tous les fils du Bouddha. Nichiren Daishônin précise ici qu’il considère lui aussi les moines comme des enfants de l’Eveillé. Son intention n’est donc pas de les interdire.

J’ai uniquement la haine de l’offense au Dharma.

« L’offense au Dharma » se rapporte aux « Icchantika », évoqués au cours du septième dialogue. Les icchantika enfreignent l’esprit fondamental du Dharma. Nichiren Daishônin déteste uniquement l’acte d’offense au Dharma. Admettons que l’on manque au précepte de l’abstinence d’alcool, ou encore, à celui de ne pas mentir. Or, de nos jours, la plupart passent leur temps à mentir quand ça leur convient. En tout état de cause, ces actes constituent une infraction aux préceptes. Pour autant, il n’est absolument pas question de considérer les auteurs de ces infractions comme des offenseurs du Dharma, encore moins de les tuer. Tel est le sens de cette phrase.

Par contre, les moines qui commettent l’offense au Dharma, détruisent l’esprit fondamental du Dharma. C’est eux que le Sutra du Nirvana demande d’interdire, interdit ayant donc pour objet les mauvais moines et nonnes, offenseurs du Dharma, et non pas ceux qui gardent ou non les préceptes.

Dès lors, quel sort convient-il de réserver aux offenseurs du Dharma, tel Hônen qui, par ses mauvaises paroles détruisit le Dharma ? La réponse est donnée dans la partie suivante.

Selon les enseignements bouddhistes antérieurs à Shakyamuni, ce crime était puni de mort.

Dans le Sutra de l’extinction, on trouve des exemples du passé. Présentés comme les actes du vénéré Shakya lui-même, on trouve l’exemple du roi Ŗşidatta, qui tua les brahmanes offensant le Grand véhicule, ou encore celui du roi Doté de vertus, qui se battit armé, pour protéger le moine Vertus d’éveil. En ce sens, ces exemples représentent des «enseignements bouddhistes antérieurs à Shakyamuni » montrant qu’il faut punir de mort le crime d’offense au Dharma. 

Toutefois, les sutras enseignés après l’apparition du bienveillant demandent d’interrompre les dons.

Le « bienveillant » désigne le vénéré Shakya. Au sein des enseignements contenus dans les sutras exposés après l’apparition du vénéré Shakya, le Bouddha, bienveillant, puisque fort de sa rigueur et compassion qui englobe tous les êtres, les guide et demande d’interrompre les dons.

« Interrompre les dons » signifie qu’il ne faut pas tuer les offenseurs du Dharma, proférant des doctrines pernicieuses, telle l’invocation du Bouddha. Toutefois, il ne faut pas leur faire d’offrande. « Interrompre les dons » est en fait un procédé important dans la perspective d’éradiquer l’offense au Dharma.

Ainsi, si l’ensemble des quatre sortes d’êtres des quatre océans et des infinités de pays cessent de faire des dons à ce mal et prennent tous refuge dans le bien,

Si, en ce monde, des pays ou des peuples sont capables de faire la distinction entre le bien et le mal au sein du Bouddhisme et, ainsi, cessent de faire des dons au mal et font uniquement des offrandes au bien, c’est-à-dire au bon Dharma, alors, seules les bonnes doctrines prévaudront dans le futur.

Quels désastres pourraient se produire ? Quelles calamités pourraient se manifester ?

En conséquence, si les doctrines erronées sont ainsi fondamentalement interrompues, quels désastres, quelles calamités pourraient alors s’abattre sur nous ? Il n’y aurait plus jamais de catastrophes de ce genre. L’art secret d’interrompre les calamités, applicable à tous les pays du monde, est dévoilé ici. En effet, seul l’acte de rejeter le mal et de garder le bien, relevant du principe selon lequel le Dharma correct gère la nation alors que les dharma hétérodoxes y jettent la perturbation, peut interrompre les catastrophes

 

 

 

Neuvième dialogue
Fin du doute et naissance de la foi
 

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A partir de là, commence le neuvième dialogue. Parvenu à ce stade de réflexion, le visiteur a compris ce que l’hôte dit depuis le début. La signification principale de ce neuvième dialogue est par conséquent de démontrer que la sérénité du pays se produit par la réfutation des erreurs et la révélation de la rectitude. Là, le visiteur met fin à ses doutes et, en lui, naît alors la foi.

A ce moment, le visiteur recula sur son siège et, ajustant son col

Le visiteur se redresse sur son siège. Il a bien compris les paroles de l’hôte. Il a ressenti qu’il s’agit là d’une personne digne de respect. Aussi, il s’assoit convenablement et arrange sa tenue vestimentaire. Ensuite, il répond à l’hôte.

Les enseignements de l’Eveillé sont variés et leur signification difficile à percer.

Au début, le visiteur avouait ne pas bien comprendre le sens des enseignements du Bouddha. Ces derniers sont « variés » désigne le fait qu’il existe de très nombreux sutra, encore plus de livres sur le Bouddhisme. Il existe également de nombreuses écoles du Petit et du Grand véhicule. Pour ces raisons, la signification des enseignements du Bouddha est « difficile à percer ». Il est difficile de distinguer où il veut en venir.

Certes, le Bouddhisme est complexe. Même en ce qui concerne un enseignement du Hinayana, je pense qu’aujourd’hui, sans doute, personne n’est capable de comprendre un traité sur et enseignement. Le Mahayana, quant à lui, est véritablement vaste et, de plus, profond. Il est encore plus difficile que le Hinayana. Pourtant, lorsqu’on lit ces textes en fonction de la logique correcte enseignant sérieusement les principes bouddhiques, on comprend alors un peu. En les lisant sans précaution, on ne comprend absolument rien.

J’avais de nombreux doutes et ne savais faire la distinction entre le vrai et le faux.

Les principes énoncés dans le Dharma du Bouddha sont profonds et lointains et contiennent beaucoup de points sujets au doute et peu clairs. Le visiteur était incapable de distinguer le vrai principe des faux.

Or, les Passages sélectionnés du sage Hônen existent.

Le visiteur parle à présent de l’existence du livre de Hônen, les Passages sélectionnés. Hônen était très respecté dans le monde, au point où le visiteur l’appelle encore « le sage Hônen » (Hônen Shônin).

Ce livre préconise de jeter, fermer, ignorer et abandonner l’ensemble des Bouddha, des sutra, des bodhisattva et des divinités. Ses phrases sont très claires.

Dans les Passages sélectionnés, Hônen écrit explicitement qu’hormis les trois sutra de la Terre pure, il faut « jeter, fermer, ignorer et abandonner » tous les vénérables Bouddha, y compris celui qui a enseigné les sutra, le vénéré Shakya, tous les bodhisattva, toutes leurs pratiques et leurs œuvres et vertus, et même les divinités protectrice du Dharma.

Mais à cause de lui, les saints ont quitté le pays et les divinités bénéfiques abandonné leur demeure. Alors, la famine règne sous le ciel et les épidémies se répandent dans le monde. Vous avez largement cité les sutras et distingué clairement le vrai du faux.

A cause des Passages sélectionnés, les saints et les divinités ont abandonné le pays. Alors, divers désastres et calamités se sont produits, famines et épidémies ravagent même le pays. L’hôte a largement cité les sutra annonçant ces phénomènes. A partir de là, le visiteur a bien su distinguer le vrai des faux principes.

Aussi, mon attachement aveugle s’est corrigé, mes oreilles et mes yeux ont été éclairés.

Jusqu’à présent, j’avais cru que Hônen était un moine éminent et que l’invocation du Bouddha était un enseignement des plus respectables au sein du Bouddhisme. Or, c’était mon attachement erroné. Maintenant que mes oreilles ont pu entendre le vrai principe, que mes yeux ont pu le voir, tout est à présent très clair.

Après tout, la paix sur la Terre et la quiétude sous le ciel sont ce que l’on aime, du Souverain à la multitude du peuple, ce que l’on désire. Si, au plus vite, on interrompt les dons aux icchantika et fait l’offrande aux moines et aux nonnes,…

Ici, le visiteur, dit que pour réaliser le vœux de tous, du plus haut jusqu’au plus bas, c’est-à-dire la sécurité et la paix en ce monde, il faut arrêter de faire des dons aux icchantika et, pour toujours, pratiquer l’offrande aux bons moines et nonnes. Les icchantika, comme nous l’avons déjà vu, sont des ennemis du Bouddha, offensant le Dharma et détruisant l’esprit du Bouddhisme. Le visiteur a compris qu’il ne fallait pas tuer ces icchantika, mais cesser de leur faire des dons. Ne faire absolument aucun don à des offenseurs du Dharma est un principe très important que les moines de la Nichiren Shôshû ont gravé dans leur cœur.

Si l’on parvient à endiguer les vagues blanches troublant l’océan de l’Eveil

Arrêter le don aux icchantika est un préalable établi depuis les temps anciens, pour rectifier le Dharma du Bouddha

A la fin de la dynastie chinoise des Han postérieurs, il y eut un empereur nommé Ling. A cette époque, survint une insurrection menée par des rebelles habillés de tissu jaune. Leur chef était un taoïste nommé Zhangjiao. Une partie de sa bande s’établit dans la plaine de Baibo (j. Hakuha = vagues blanches) au bord de la rivière Xi. Là, celle-ci se livra à divers actes de piraterie. On finit par appeler ces bandits « les vagues blanches ». Au Japon également, on désigne le vol par l’expression « vague blanche ». La pièce de théâtre nommée « les cinq hommes des vagues blanches » en est un exemple.

« L’océan de l’éveil » désigne le caractère immense de l’enseignement du Bouddha, vaste comme l’océan. Toutefois, le vent peut provoquer des vagues sur cet océan. S’il se déchaîne, alors des vagues blanches se dressent. En d’autres termes, les pirates, ou vagues blanches, au sein du Bouddhisme, sont les Passages sélectionnés de Hônen.

Et couper les verts bosquets recouvrant la montagne du Dharma,…

« Les verts bosquets recouvrant la montagne du Dharma » se rapporte à la mutinerie qui eut lieu à la fin des Han antérieurs, sur le mont Lülin (bosquets verts) dans la province de Jing. Pour cette raison, « Bosquets verts » devint synonyme de banditisme. Là encore, les bandits des bosquets verts de l’immense montagne du Bouddhisme sont les Passages sélectionnés de Hônen.

 

Le monde deviendra le monde de Xinong, le pays deviendra le pays de Tangyu.

Alors, si l’on éradique les enseignements hérétiques et pernicieux, si l’on coupe leur mal à la racine,   « Le monde deviendra le monde de Xinong, le pays deviendra le pays de Tangyu ».

« Xi » (de Xinong) désigne Fuxi (j. Fukugi - 伏羲), l’un des trois augustes mythiques de la Chine antique. Quant à « Nong », il s’agit de l’un des deux autres augustes, Shennong (j. Shinnô - 神農)[91]. « Le pays de Tangyu » se rapporte au pays de Tangyao et de Yushun, respectivement quatrième et cinquième des cinq empereurs de la Chine antique[92]. Tangyao (j. Tôgyô - 唐尭)  était le fils de Diku (j. Teikoku - 帝嚳). Il transmit le trône à Yushun. De nombreuses histoires naissent autour de ces personnages, que je n’évoquerai pas aujourd’hui.

En fait, Nichiren Daishônin indique, à travers les paroles du visiteur qu’il est possible de revenir à la paix dans le monde, comme au temps où Fuxi et Shennong le dirigèrent.

Alors, nous pourrons prendre en considération le superficiel et le profond de l’eau du Dharma et vénérer le faîte et les poutres de la maison du Bouddha.

Ici, le visiteur a pris conscience et a bien compris que l’enseignement outrancier des Passages sélectionnés de Hônen, exhortant à abandonner, fermer, ignorer et jeter tous les Bouddha, tous les sutra, ainsi que les bodhisattva et les dieux, constitue une erreur. C’est pourquoi, une fois interrompu cet enseignement hérétique, il est désormais capable de prendre en considération la superficialité et la profondeur de l’eau du Dharma. Cette dernière symbolise le courant du Dharma, autrement dit, la transmission. Au sein du Bouddhisme, l’eau des œuvres et vertus destinées à guider les êtres peut être profonde ou superficielle. Même si c’est une métaphore, il convient de faire la distinction entre les deux.

A l’époque, six écoles existaient au sud : écoles du Trésor de la scolastique[93], de l’Accomplissement de la vérité[94], des Commandements[95], de l’Ornementation fleurie[96], du Caractère spécifique des Dharma[97] et des Trois traités[98]. Plus tard, dans la période de Heian[99], deux nouvelles écoles firent leur apparition : celle du Tendai[100] et celle des Formules incantatoires[101]. Plus tard encore, au début de la période de Kamakura, ce fut au tour des écoles du Zen et de l’Invocation du Bouddha d’apparaître. Pour être précis, l’école de la Terre pure de Hônen existait déjà à la fin de la période de Heian.

Parmi ces écoles, le visiteur rejette celle de l’Invocation du Bouddha, puisqu’il a compris qu’elle était hérétique. Il dit ensuite qu’il faut définir parmi les autres, celles qui sont bonnes, autrement dit qui représentent « le faîte et les poutres de la maison du Bouddha » et vénérer celle qui est supérieure aux autres. Toutefois, il ne comprend pas encore lequel de ces enseignements constitue ce faîte et ces poutres. Telle est la compréhension du visiteur à ce stade du texte.

Ensuite, nous arrivons enfin à la réponse de l’hôte au neuvième débat.

L’hôte, avec joie, dit : « La colombe se transforme en faucon et le moineau en palourde.

Je pense, Mesdames et Messieurs que vous devez vous demander ce que peut bien signifier que la colombe se soit transformée en faucon. Il s’agit là d’une référence à un vieux livre chinois intitulé Discours concernant un recueil de notes sur les habitudes sociales (c. Liji jishuo, j. Reiki shûsetsu - 礼記集説). Dans cet ouvrage, on peut lire : « A la mi-printemps (février), le faucon se transforme en colombe. A la mi-automne (août) la colombe se transforme en faucon ». Autrement dit, dans la froidure du mois de février, le faucon devient colombe. Un être aussi fort que le faucon se transforme en une faible colombe. Par contre, en août, quand le climat s’est nettement réchauffé, alors, la colombe se transforme en puissant faucon. C’est ici le proverbe du mois d’août que Nichiren Daishônin utilise : « la colombe s’est transformée en faucon ». Dans le même ouvrage, on lit également : « En automne (septembre), le moineau pénètre dans l’océan et devient palourde ». Aux changements de saisons, de tels phénomènes se produisent. En fait, ce proverbe ancien exprime les transformations s’opérant au fil des changements de saisons.

Cette citation désigne le fait que, après avoir écouté le discours correct, ce que le visiteur considérait comme inférieur devient subitement supérieur.

Que cela est réjouissant ! A voisiner l’ami de cette demeure parfumée, votre nature est devenue celle d’un champ de lin.

Ici, Nichiren Daishônin se qualifie lui-même « d’ami de cette demeure parfumée ». Une chambre exhalant le parfum de l’orchidée ; vivre dans un lieu aussi pur, implique que l’habitant est un homme pur, doté d’un esprit juste, purifiant par sa simple présence le lieu où il vit. Il parle ainsi de lui-même et dit au visiteur qu’à force d’écouter ses propos, sa nature s’est transformée, « devenant celle d’un champ de lin ».

Le lin est un végétal connu. Quant au « champ », l’idéogramme chinois utilisé ici (), possède deux significations. La première est une unité de mesure de surfaces, équivalent à cent mètres carrés. La seconde est les sillons que les paysans tracent en soulevant la terre, dans les rizières à l’aide de leur houe. Ici, la signification est donc le champ de lin.

« Votre nature est devenue celle d’un champ de lin » : Si parmi un grand nombre de tiges de lin plantées, il se trouve des tiges d’armoise, plante qui, en général, pousse tordue, au contact du lin, alors ces plantes poussent tout droit comme le lin. Autrement dit, cet exemple symbolise le fait qu’être en relation avec des personnes justes, de pénétrer parmi des hommes à la pensée correcte, même les personnes au caractère tordu deviennent elles aussi correctes.

Autrement dit, vous qui aviez un sentiment perverti au début, à présent, parce que vous avez entendu le discours de l’ami de cette demeure parfumée, c’est-à-dire moi-même, votre sentiment est devenu droit.

Si vous désirez réellement vous préoccuper de ces difficultés et croire entièrement ces paroles, le vent sera doux, les vagues seront calmes et les récoltes abondantes en peu de temps.

Comme je vous le dis depuis le début, les calamités et les catastrophes nationales trouvent leur cause unique dans les Passages sélectionnés de Hônen. Vous avez fini par adhérer à mes paroles. Si, dès lors, vous avez le souhait de rejeter l’hérésie et de prendre refuge dans la rectitude, alors, comme le vent s’adoucira sur les bosquets verdoyants et les vagues blanches déferlant sur l’océan se calmeront, grâce aux mesures prises contre toutes les offenses au Dharma, les années seront sous peu fertiles et paisibles.

Mais le cœur des hommes change avec le temps. La nature des choses s’altère selon leur environnement.

Ce passage met en garde contre la versatilité du cœur humain. Comme le cœur des hommes change sans cesse, bien que vous disiez avoir compris, je ne m’y trompe pas. Vous changerez encore au gré des circonstances.

Un proverbe chinois dit : « L’oranger sauvage du sud du Yangtze, devient mandarinier sauvage lorsqu’on le déplace au nord ». Le mandarinier sauvage est rempli d’épines et est considéré comme un mauvais arbre. Même un arbre, aussi merveilleux et bénéfique que l’oranger sauvage du sud du Yangtze, devient mandarinier sauvage dès lors qu’on le transfère au nord du Yangtze. Autrement dit, la nature des choses varie en fonction des circonstances. Même un homme remarquable, bercé dans un environnement favorable, sera imprégné de la nuisance des mauvais hommes s’il se plonge dans un environnement mauvais. Il deviendra alors aussi mauvais qu’eux.

Comme la lune sur l’eau au gré des vagues s’agite

Encore un exemple de la versatilité de l’esprit humain : la lune se reflétant dans l’eau, montre sa forme telle quelle tant que le vent ne souffle pas. Toutefois, si des vagues se forment en raison du vent, le reflet de la lune sur l’eau sera déformé, sans pouvoir conserver son aspect d’origine. Ainsi, les choses changent en fonction des conditions et finissent par devenir autre chose.

Ou les soldats de l’avant-garde sous le sabre s’inclinent.

Les soldats de la troupe d’avant-garde étaient bardés d’armures et de casques, et étaient armés jusqu’au dents pour affronter l’armée ennemie. Or, celle-ci attaqua en force avec des lances et des sabres acérés, au point où, malgré sa préparation à l’affrontement, l’avant-garde, effrayée de la vigueur de son adversaire, battit en retraite. Cet exemple montre que la volonté des hommes est semblable à celle de ces soldats qui, malgré leur intention première de se battre, la virent décliner face au danger.

 

Bien qu’à présent vous affirmiez croire, il est certain que, par la suite, vous oublierez pour longtemps.

A l’instar de cet exemple, vous semblez à présent posséder la foi, mais, une fois hors de ce lieu, vous oublierez les principes justes appris ici. Dès lors, il faut immédiatement mettre en pratique l’éradication de l’offense au Dharma. C’est ce que montre la phrase suivante.

Si, en premier lieu, vous désirez apporter la sérénité au pays et prier pour le présent et l’avenir, il faut, en toute hâte, examiner la situation et prendre rapidement des mesures.

Si vous souhaitez vivre dans un pays serein, dans un monde paisible, si vous désirez cette paix  véritable pour le présent et l’avenir, il faut que vous tourniez votre esprit vers le chemin correct et, immédiatement, mettiez en pratique les mesures pour éradiquer l’offense au Dharma.

Commencer la pratique et immédiatement faire shakubuku présente certes des aspects déraisonnables. Toutefois, puisque ce Bouddhisme est la religion correcte, il est important de commencer sa pratique avec le sentiment d’établir la claire distinction entre le juste et l’erroné. C’est en ce sens  également que faire shakubuku avec conviction en bénéficiant des œuvres et vertus de la récitation sérieuse du Daimoku est important. Telle est la signification de « prendre rapidement des mesures ». Nichiren Daishônin nous donne cette claire directive, en nous montrant l’importance de passer à la mise en pratique de ce qui est correct, à travers la pratique de shakubuku.

Il indique ensuite les raisons à l’aide de passages de sutra. Dans le deuxième dialogue, il citait des passages du Sutra de la Radiance d’or, du Grand rassemblement et du Roi bienveillant. Il cite ensuite sept passages de ces sutras auxquels il a ajouté le Sutra du Maître des remèdes. Nichiren Daishônin énonce, à l’aide de ces quatre sutras les catastrophes encourues pour s’opposer à l’esprit du Dharma. Il va maintenant indiquer quel est l’état de ces catastrophes à présent.

Pour quelle raison ? Parmi les sept désastres énumérés dans le sutra du Maître des remèdes, cinq d’entre eux se sont déjà produits et deux restent à venir ; ce sont le désastre de l’invasion par un autre pays et le désastre de la révolte au sein de son propre monde.

Les « sept désastres énumérés dans le Sutra du Maître des remèdes » sont, comme je l’ai déjà dit : les épidémies, changements dans la course des constellations, éclipses lunaires et solaires, vents et pluies hors saison et le manque de pluie pendant des périodes anormales. Il y a aussi le désastre de l’invasion par un autre pays et le désastre de la révolte au sein de son propre monde. Parmi ces sept désastres, les cinq premiers énumérés se sont déjà clairement produits. Restent les deux derniers : le désastre de l’invasion par un autre pays et le désastre de la révolte au sein de son propre monde.

Parmi les trois catastrophes du sutra du Grand rassemblement, deux sont rapidement survenues et une n’est pas encore apparue. Il s’agit de la catastrophe due à la guerre.

Nichiren Daishônin cite ensuite les « trois catastrophes du Sutra du Grand rassemblement ». Ces catastrophes sont 1) l’inflation du prix du grain, 2) la guerre et 3) les épidémies. L’inflation du prix du grain se rapporte à l’augmentation du prix de la nourriture, autrement dit à l’inflation tout court. Aujourd’hui aussi, l’économie est perturbée. L’agitation de l’économie se manifeste de diverses manières, en fonction des singularités de l’époque. Aujourd’hui, elle prend la forme de la déflation, situation plongeant beaucoup de personnes dans la difficulté. A l’époque, elle se manifestait plutôt sous la forme de l’inflation. L’insuffisance des denrées provoque l’augmentation progressive de leur prix, phénomène se terminant par l’impossibilité de se procurer quoi que ce soit. Telle est l’inflation du prix du grain. Quant aux épidémies, elles se produisaient sans cesse. Seule, la catastrophe de la guerre ne s’était pas encore produite.

Bien que les désastres et calamités décrits dans le sutra de la Radiance d’or se soient l’un après l’autre produits, point encore ne s’est accomplie la catastrophe de l’invasion du pays par des barbares étrangers, point encore n’est advenu ce désastre.

Le Sutra de la Radiance d’or énumère grand nombre de calamités, dont l’invasion du pays par des barbares étrangers. Seule cette calamité ne s’est pas encore produite.

Parmi les sept désastres cités dans le sutra du Roi bienveillant, six abondent et un ne s’est pas encore produit. Il s’agit de l’invasion du pays par des brigands venus des quatre directions.

Les sept désastres du Sutra du Roi bienveillant sont : la perte de l’éclat du soleil et de la lune, la perte de l’éclat des constellations, le feu, les inondations, les tempêtes de vent, la chaleur excessive et les bandits. Nichiren Daishônin les a déjà cités de manière très exhaustive. Parmi ces désastres, six étaient déjà abondants. Seul le désastre provoqué par des barbares étrangers venant envahir le pays ne s’était pas encore produit.

Non seulement cela, “lorsque le pays se trouble, ce sont d’abord les esprits démoniaques qui montrent des signes de désordre. Or, parce que les esprits démoniaques sont troublés, les hommes le sont aussi”.

« Non seulement cela » souligne le fait que la phrase “lorsque le pays se trouble, ce sont d’abord les esprits démoniaques qui montrent des signes de désordre. Or, parce que les esprits démoniaques sont troublés, les hommes le sont aussi”, faisant suite à l’énumération des sept désastres du Sutra du Roi bienveillant. Autrement dit, la perturbation des esprits maléfiques est le signe avant coureur de la perturbation du lieu. Celle-ci provoque la perturbation des hommes, puis, ensuite, la perturbation de leur territoire.

En examinant la nature des choses à la lumière de ce passage, cent démons ont été très tôt perturbés et de nombreux hommes ont alors péri.

Diverses catastrophes sont prédites dans les sutras. Or, même si seuls le désastre de l’invasion d’une nation étrangère et celui de la guerre civile ne sont pas encore survenus, les autres catastrophes se sont, elles, déjà produites sous diverses formes, exactement comme prédit : « cent démons ont été très tôt perturbés et de nombreux hommes ont alors péri ».

Les désastres passés sont évidents. Comment pourrait-on douter des désastres à venir ?

Puisque ces catastrophes passées se sont effectivement produites, le doute n’est pas permis quant à la manifestation certaines des désastres à venir, prédits par les sutra.

Si les catastrophes restantes se produisent à cause des méfaits de mauvais enseignements, que faudra-t-il faire à ce moment là ?

Si les deux désastres, non encore manifestés, se produisent en raison des erreurs des mauvais enseignements, que pourra-t-on faire à ce moment là ? Etes-vous bien conscient de l’absence de technique pour y remédier ?

Les empereurs et les rois, fondés sur la nation, règnent sous les cieux. Leurs vassaux possèdent les rizières et les jardins et subviennent aux besoins du monde.

Les souverains fondent leur politique sur le bien-être du peuple. Les vassaux possédant des biens terrestres peuvent venir en aide au monde, autorisant ainsi à tous une vie confortable.

Mais, si des brigands venus d’autres horizons envahissent ce pays, si des révoltes intérieures se produisent et que les terres sont pillées, comment ne pas être pris de terreur et d’agitation ?

Toutefois, si une nation étrangère envahit le pays, ou si la guerre civile éclate, fi de la tranquillité du pays et de la vie quotidienne du peuple. Ce dernier clamera dès lors sa douleur et son étonnement. Lorsqu’une nation étrangère attaque et envahit notre pays, ou qu’à l’intérieur de celui-ci, des factions s’opposent mutuellement, alors, des pillages, des confiscations de terres se produisent, plongeant naturellement toutes les classes de la société dans la douleur et l’étonnement.

Si l’on perd son pays et que sa maison est détruite, dans quel monde pourra-t-on s’enfuir ?

Si, en raison de ces événements, notre pays n’existe plus et notre maison est détruite, où pourra-t-on bien prendre refuge ? Il n’y aura nul lieu où se sentir en sécurité.

Si vous pensez à votre propre sécurité, ne devez-vous pas d’abord prier pour la tranquillité et l’ordre dans les quatre directions du pays ?

Si vous aspirez à votre propre sécurité, vous devez alors penser à la sécurité du pays entier en priant pour lui. De plus, parmi les sept calamités et autres désastres prédits dans les sutras Roi bienveillant, Radiance d’or, Maître des remèdes et du Grand rassemblement, ceux qui ne se sont pas encore produits se manifesteront immanquablement. Alors, si vous désirez prier pour la sécurité du pays, vous devez d’abord interdire[102] les doctrines erronées.

Jusque là, Nichiren Daishônin a traité du présent. Autrement dit, les aspects à développer ou à éradiquer pour éviter les catastrophes et devenir heureux au cours de cette vie. A présent, il va aborder l’avenir, c’est-à-dire la vie future de chacun, autrement dit ce qui se passe après la mort.

En fait, le thème du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude ne se rapporte pas uniquement à la vie présente. Du point de vue de la nature fondamentale du bouddhisme, les deux phases : présent et futur[103], ensemble, sont importantes. Il s’agit de « la quiétude dans l’existence présente et de la naissance dans un lieu propice pour la vie suivante[104] ». Il est bien sûr nécessaire de projeter des plans pour obtenir une vie quotidienne sereine et heureuse, débarrassée des peines et des souffrances. Toutefois, il faut également éviter de subir d’autres souffrances en tombant en enfer, dans le monde des esprits affamés ou dans celui des animaux après la mort. Il faut donc se préparer aussi à un futur heureux après la mort. C’est donc en ce sens que, à partir de là, Nichiren Daishônin nous révèle l’importance du « futur ».

Aujourd’hui, de nombreuses personnes pensent qu’après la mort, il n’y a plus rien. Il faut croire que la pensée même de la crainte d’une vie future ne les effleure pas. Cependant, les adeptes de la Nichiren Shôshû doivent avoir foi dans le principe des deux phases : présent et futur, et y réfléchir de manière correcte.

Aujourd’hui, les éducateurs, ou les philosophes, estiment parfaitement comprendre les principes de la vie. Or, ils ne savent même pas que l’intégralité des êtres est dotée en commun des illusions dues aux égarements de la vue et de la pensée. Les égarements de la vue (j. ken’naku -見惑), illusions idéologiques, sont au nombre de cinq. L’une d’elles est « les vues extrêmes » (j. henken -辺見), elle-même constituée de deux égarements : la vue de l’interruption (j. danken -断見) et la vue de la continuité (j. jôken -常見). Ces personnages, forcément, entrent dans l’un ou l’autre de ces deux égarements extrêmes.

En un mot, la vue de l’interruption consiste en l’idée selon laquelle la vie s’achève avec la mort, après laquelle tout s’annihile. A l’opposé, la vue de la continuité envisage que la vie individuelle perdure après la mort en tant qu’âme, sans jamais s’éteindre. Ces deux concepts sont erronés l’un et l’autre.

En effet, la vie existe en tant que « karma ». Notre vie est composée des deux lois de la forme (j. shiki - ) et du cœur (shin - ), où shiki représente « le corps » et shin « l’esprit ». Notre vie existe à travers ces deux éléments. Notre manière d’être, physiquement et spirituellement depuis les vies passées, constitue la cause de ce que nous sommes aujourd’hui. Aussi, même après la mort, notre forme, autrement dit notre corps devient le cœur. Ce dernier, autrement dit l’esprit, se fond à la forme et, en fonction du principe de causes, conditions, effets rétributions, diverses transformations s’opèrent en nous ? Ainsi, s’ouvre la vie suivante.

Dès lors, au sein de l’immensité illimitée du monde des dharma, certaines vies tombent dans l’enfer et d’autres naissent parmi les esprits affamés. D’autres, encore, deviennent celles d’animaux alors que certaines reçoivent la rétribution des hommes et des cieux. C’est pourquoi, l’aspect au moment de la mort est important. La respiration s’est interrompue, mais le corps, lui, est encore là. Certaines personnes, par exemple, montrent un aspect post mortem véritablement resplendissant : leur corps exprime le cœur du Bouddha. La vie suivante se détermine donc à travers le corps et l’esprit.

En particulier, tant qu’ils font partie du monde des hommes, tous craignent la vie future.

Aussi, une personne ayant foi dans le principe de causes, conditions, effets rétributions, vision correcte portée par le bouddhisme sur les trois phases, manifeste un grand intérêt à la causalité la liant à la vie suivante et s’inquiète de tomber dans les trois mauvaises voies.

C’est pourquoi croient-ils en des enseignements hérétiques, ou respectent les offenseurs du Dharma.

S’inquiétant de leur vie suivante, ils croient et respectent sans réfléchir les doctrines hérétiques et enseignements erronés contenus dans le Recueil des passages sélectionnés de Hônen, véritable apostasie et manifestation de l’ingratitude de son auteur.

Je suis désolé qu’ils ne puissent distinguer le bien du mal et, en même temps, je suis triste qu’ils aient pris refuge dans l’enseignement du Bouddha.

Le bien est le correct, le mal est l’erroné. De nombreuses personnes ne savent pas faire la distinction. Elles rejettent le bien et choisissent le mal. C’est là une attitude détestable. Pourtant, que ces personnes aient la volonté de prier pour leur vie future par le Dharma du Bouddha est à la fois pitoyable et louable.

Pourquoi, avec une force de la foi identique, respectent-ils aveuglément des paroles hérétiques ?

Puisque ces personnes ont la foi, ne devraient-elles pas adopter la religion correcte ? Pourquoi s’attachent-elles à des paroles erronées, pourquoi sont-elles captivées par des enseignements fallacieux ?

S’ils ne reviennent pas de leurs attachements et continuent à avoir un esprit pernicieux, ils se retireront rapidement du monde conditionné pour immanquablement tomber dans les geôles sans intermittence.

Ce passage indique clairement les effets nuisibles reçus à cause des dharma hérétiques. Autrement dit, si vous avez des attachements envers les enseignements hérétiques et torves du Nenbutsu, si vous ne parvenez pas à vous débarrasser de votre prédilection pour les doctrines délétères : « abandonner, fermer, oublier et jeter », prônées par les Recueils de passages sélectionnés de Hônen, alors vous quitterez le « monde productif », c’est-à-dire ce monde, et tomberez dans l’enfer aux souffrances sans intermittence.

L’expression « conditionné » (j. ui - 有為) est le pendant de l’expression « inconditionné » (j. mui -無為). Le monde conditionné désigne toutes les vicissitudes de notre vie présente, provoquées par nos actes, eux-mêmes produits en fonctions de causes et de conditions. En fait, notre vie quotidienne s’améliore ou se dégrade, change de multiples manières, en fonction de nombreuses conditions (j. en - ). La vie humaine et son territoire (environnement) sont semblables à des bulles à la surface de l’eau ; ils sont « le monde conditionné ».

Les geôles sans intermittence font allusion à l’enfer aux souffrances sans intervalle. Il s’agit de l’enfer le plus profond, le plus pénible des enfers. Il existe huit grands enfers. Du plus superficiel au plus profond, ce sont : l’enfer aux vies semblables[105], l’enfer des cordes noires[106], l’enfer de la rencontre des êtres[107], l’enfer des cris et des vociférations[108], l’enfer des grands cris et vociférations[109], l’enfer des brûlures et de la chaleur[110], l’enfer des grandes brûlures et chaleurs[111] et, le plus profond, le plus dur, l’enfer sans intervalle[112]. Au sein des mauvais karmas, en fonction de leur lourdeur, il existe ainsi des distinctions parmi les degrés d’enfers. Le crime d’offense au Dharma entraîne la chute dans l’enfer sans intermittence, le plus profond des huit grands enfers.

 Pourquoi cela ? Dans le sutra du Grand rassemblement, il est dit :

Le passage précédent n’est pas une assertion gratuite de Nichiren Daishônin. Il est la démonstration par la preuve littérale, extraite de sutras.

“Si un roi, même ayant pendant d’innombrables mondes pratiqué l’offrande, les préceptes et la sagesse, voit mon Dharma sur le point d’être détruit, l’abandonne et ne fait rien pour le protéger, toutes les innombrables racines de bien qu’il a accumulées seront effacées et perdues.

Ce passage est constitué des paroles du vénéré Shakya donnant un précepte au roi Binbisāra. En un sens, il explique à ce dernier l’attitude spirituelle propre à un souverain. Prenons un monarque. Même si, au cours d’innombrables vies, il a eu foi dans l’enseignement de l’Eveillé. Même s’il a pratiqué le don, gardé les préceptes et s’est exercé à l’ascèse de la sagesse et ainsi accumulé des œuvres et vertus, s’il voit le dharma sur le point de péricliter et n’a pas le souci de le protéger, alors, toutes les racines de bien plantées par le passé disparaîtront immédiatement.

Puis, sans que cela ne tarde, ce roi contractera une grave maladie et, après la fin de sa vie, renaîtra dans le grand enfer.

Ce passage du Sutra du Grand rassemblement a déjà été cité. Dans le sutra, à la place du mot « puis », nous lisons : « ce pays verra se manifester trois mauvais augures : le premier est la famine, le deuxième est la guerre, le troisième est la maladie. (…) Des pirates à l’intérieur et à l’extérieur se rebelleront ». Ce passage concerne les catastrophes se manifestant au cours de la vie présente. Or, Nichiren Daishônin, traitant ici du futur post mortem, l’a volontairement éludé. Après « puis », nous lisons que le souverain, sans tarder, contractera une grave maladie et, après sa mort, renaîtra dans le grand enfer.

Comme pour ce roi, il en sera de même pour son épouse, les princes, les ministres, les préfets, le maître principal, les chefs de villages, les généraux et les magistrats”.

Le roi ne tombera pas seul en enfer. Il sera accompagné de tous ses proches, épouse, enfants, ministres et fonctionnaires militaires et civils. Autrement dit, tous ceux qui vivent dans le même lieu que le roi partagent la même causalité et, par conséquent, tous, tomberont avec lui en enfer. Tel est l’enseignement de l’Eveillé. Les êtres partageant la même causalité territoriale, partagent donc le même sort.

Dans le sutra du Roi bienveillant, il est dit :

C’est à présent une citation du chapitre « passation » du Sutra du Roi bienveillant. Ce passage explique les mauvaises rétributions de l’acte de s’opposer et de détruire l’enseignement du Bouddha.

“Si un homme détruit l’enseignement du Bouddha, il ne rencontrera de piété filiale chez ses enfants, ni d’harmonie parmi ses six collatéraux et les dieux ne le protégeront pas.

En premier lieu, il n’aura plus d’enfants pratiquant la piété filiale. Ensuite, les six collatéraux ne s’entendront plus et lutteront les uns contre les autres. Les « six collatéraux » désignent les proches. Diverses explications existent sur cette expression. Je citerai celle du grand maître Miaole (j. Myôraku - 妙楽) par le biais de ses Plaquettes explicatives du sens obscur de la fleur du Dharma (c. fahua xuanyi siqian, j. hokke gengi shakusen - 法華玄義釈籤) : il s’agit, d’après lui, du père et de la mère, du frère aîné du frère cadet, de la femme et des enfants. Il s’agit donc des personnes avec qui le souverain a le lien de parenté le plus proche. Tous ces gens connaîtront entre eux de mauvaises relations et, du point de vue de la vie quotidienne, les divinités n’accorderont plus leur protection, à un tel homme, destructeur de l’enseignement du Bouddha.

Jour après jour, les maladies et les démons viendront le tourmenter. Les désastres tomberont sur lui et le malheur le poursuivra là où il va.

De plus, diverses maladies se répandront et des esprits maléfiques provoqueront des catastrophes. Pénétrant dans la vie quotidienne et dans la psychologie du peuple, d’étranges catastrophes à répétition se produiront, omniprésentes dans le temps et dans l’espace.

Une fois mort, il entrera en enfer, chez les esprits affamés ou les animaux. S’il en sort et devient un homme, sa rétribution sera alors d’être l’esclave de l’armée.

Enfin, après sa mort, il tombera en enfer, parmi les esprits affamés ou chez les animaux. Et s’il en réchappe et renaît parmi les hommes, il subira la rétribution d’être l’esclave de l’armée. Les « esclaves de l’armée » désignent les êtres qui, par le biais de la haine, détruisent le bon Dharma. Recevant la rétribution appropriée, même s’ils naissent en tant qu’être humain, ils sont exposés aux dangers des armes blanches, ou souffrent par le sabre.

Comme l’écho, comme l’ombre,

Ces deux exemples symbolisent le fait que la rétribution dans les trois mondes, relevant de la causalité bonne ou mauvaise du passé au présent et du présent au futur, ne peut absolument pas s’effacer.

L’écho est celui du son, l’ombre celle du corps. Dès qu’il y a son, il y a forcément écho. S’il y a un corps, il y a inévitablement une ombre. Ces exemples enseignent que, tant qu’il vit, l’être humain s’exprime en tant que son et en tant que corps, devenant alors écho et ombre après sa mort. Le sens de l’ombre est ici celui du karma perdurant après la mort. Dans le contexte du sutra évoqué, la rétribution karmique est celle de la renaissance dans l’enfer, les esprits affamés, les animaux, ou dans l’une ou l’autre des six voies.

Comme l’homme qui écrit la nuit et dont les mots demeurent, même après l’extinction de la lumière.

Encore une autre métaphore : un homme écrit la nuit à la lueur d’une lampe. Une fois son écriture achevée, il éteint la lampe. Les mots écrits sont désormais invisibles. Toutefois, mêmes invisibles, ces mots subsistent. De même, bien qu’invisible, la rétribution existe solennellement. Ainsi, bien que l’ensemble des actes commis par un homme au cours de sa vie semble disparaître à sa mort, sa rétribution se manifeste clairement dans la vie suivante. Le karma ne disparaît pas.

Ainsi est la rétribution des trois mondes”.

Ces « trois mondes » sont le monde des désirs (j. yokkai -欲界), le monde de la forme (j. shikikai -色界) et le monde de l’absence de forme (j. mushikikai -無色界). Il s’agit, autrement dit, des six voies. Le monde de la forme et celui de l’absence de forme se rapportent au monde du ciel. En revanche, le monde des désirs se rapporte à l’enfer, aux esprits affamés, aux animaux, aux asura, aux hommes et aux cieux. Par conséquent, lorsque l’on parle du monde du ciel, il s’agit de trois mondes : le ciel du monde des désirs, le ciel du monde de la forme et le ciel du monde de l’absence de forme. Finalement, cette phrase signifie que la rétribution dans les six voies durera une éternité dans le futur.

Dans le deuxième rouleau du sutra du Lotus, il est dit :

C’est la troisième fois que Nichiren Daishônin cite ce passage du chapitre « Parabole » du Sutra du Lotus dans le Traité sur la Sérénité du pays.

“Si un homme ne croit pas en ce sutra et l’offense, il tombera dans l’enfer Avici après la fin de sa vie”.

Le sutra par lequel le Bouddha, sauveur de tous les êtres, leur indique comment devenir eux-mêmes Bouddha est le Sutra du Lotus. Aussi, l’acte d’offense envers ce sutra détruit la graine de boddhéité de tous les êtres. Pour cette raison, cet acte entraîne la chute irrémédiable dans l’enfer aux souffrances sans intermittences. C’est ce qu’indique la phrase du sutra ci-dessus, conclusion générale expliquant les grandes mauvaises rétributions du futur.

Dans le chapitre Sans mépris qui apparaît dans le septième rouleau du même sutra, il est dit : “Mille éons dans l’enfer Avici, de grandes souffrances il recevra”.

Les êtres ayant offensé le bodhisattva Toujours sans mépris (j. Jô Fugyô – 常不軽, s. sadāparibhūta) se repentirent de leurs actes mais, en raison de leur crime, ils durent souffrir pendant mille éons les affres de l’enfer aux souffrances sans intermittence, rétribution post mortem de leur faute.

Dans le sutra du Nirvana il est dit : “Celui qui s’éloigne des amis de bien, n’écoute pas le Dharma correct et demeure dans l’enseignement erroné,

 Les « amis de bien » (j. zen yû -善友) sont synonymes de « bonnes connaissances » (j. zen chishiki -善知識). Il existe trois catégories de bonnes connaissances : les bonnes connaissances à caractère professoral (j. kyôjû no zen chishiki -教授の善知識), qui nous enseignent correctement diverses choses, les connaissances de bien, compagnons de route (j. dôgyô no zen chishiki -同行の善知識), qui accomplissent de bonnes actions avec nous et enfin les bonnes connaissances protectrices de l’extérieur (j. gego no zen chishiki - 外護の善知識), qui protègent correctement le Dharma de l’extérieur.

Par le biais de ces causes, s’abîmera dans l’enfer Avici et endurera un corps mesurant verticalement et horizontalement quatre vingt quatre mille yojana”. Fin de citation

Si l’on crée différentes mauvaises causes et conditions comme exécrer les amis de bien, se détourner du bon Dharma, recevoir les enseignements des mauvaises personnes et vivre en fonction de ces dharma pernicieux, alors, on tombera et souffrira dans l’enfer Avici où notre corps prendra les proportions considérables de quatre vingt quatre mille yojana de haut et de large.

Le « yojana » est une unité de longueur. Un yojana représente la distance parcourue en une journée par l’empereur. Selon les distances chinoises, un yojana représente trente lieues (c. li - ). Selon les distances japonaises, il mesure à peu près cinq lieues (j. ri -) Un « ri » mesurant quatre kilomètres, un yojana mesure donc environ vingt kilomètres. Quatre vingt quatre mille fois vingt kilomètres donnent un million six cent quatre vingt mille kilomètres. Il s’agit donc d’une taille extraordinaire. De plus, « mesurant verticalement et horizontalement quatre vingt quatre mille yojana », celle-ci est aussi haute que large. Si nous tombons dans l’enfer aux souffrances sans intermittences, notre corps se dilate de la sorte et la souffrance perçue remplie la totalité de ce corps.

Comme la personne qui tombe dans l’enfer aux souffrances sans intermittences n’est pas la seule dans ce cas, on se dit qu’avec une telle taille, en y pénétrant, il n’y a plus de place pour les autres. Toutefois, il n’en est rien. En effet, en fonction du karma, tous ont le corps qui enfle jusqu’à cette dimension de quatre vingt quatre mille yojana et ressentent tous aussi intensément la souffrance.

Lorsqu’on ouvre la grande quantité des sutras, on voit que tous accordent de l’importance à la gravité de l’offense au Dharma.

A partir de là, sont reportées les paroles de l’hôte lui-même. Toutes les précédentes citations des sutras enseignent le caractère effroyable de l’offense au Dharma. S’opposer au bon Dharma prêché par l’Eveillé entraîne un terrible châtiment.

Qu’il est triste que tous franchissent la porte du bon Dharma pour le quitter et pénétrer dans les profondeurs des geôles des dharma hérétiques.

Tout en prêchant son enseignement pendant quatre-vingts ans, le vénéré Shakya établit une claire distinction entre la teneur des expédients salvifiques et le véritable enseignement. Par la suite, Zhiyi, le grand maître du Tendai en Chine et le grand maître Dengyô, fondateur du temple du mont Hiei au Japon, systématisèrent la grande logique du Dharma. De cette logique, il ressort que le Grand véhicule est supérieur au Petit et que, au sein du Mahayana, le Sutra du Lotus, enseignement véritable par rapport aux enseignements provisoires, représente « la porte du bon Dharma », c’est-à-dire l’enseignement suprême du Bouddha. Tous les autres sutras, Hinayana et provisoires, expédients salvifiques, sont sortis de cette porte. Nichiren Daishônin souligne ici que, malgré la clarté de cette logique, « il est triste » de voir certains s’attacher à une parcelle de ces enseignements et pénétrer d’eux-mêmes dans l’enfer résultant des dharma hérétiques.

Qu’il est stupide que les uns et les autres se prennent dans les rets des enseignements délétères et errent éternellement dans les filets des doctrines erronées.

« Qu’il est stupide », également de se prendre dans les rets des enseignements délétères du Recueil des passages sélectionnés de Hônen et, ainsi, errer éternellement dans les filets des doctrines erronées offensant l’enseignement du Sutra du Lotus.

Ils se perdent dans le brouillard des illusions en ce monde et s’abîment dans les profondeurs des flammes intenses après la mort.

Ici le mot « illusion » est écrit à l’aide d’un idéogramme prononcé « mô » (), constitué lui-même de deux idéogrammes : la partie gauche est la lune () et la partie droite est l’ignorance () prononcée également « mô ». Ce caractère évoque une situation obscure, où la clarté de la lune a disparu. Quant au brouillard, il recouvre la clarté du soleil. L’illusion, due aux enseignements hérétiques de Hônen, cache le soleil et la lune de la véritable nature du Bouddha. Les « flammes intenses », elles, sont synonymes de l’enfer aux souffrances sans intermittence. Autrement dit, nul ne réchappe à cet enfer.

Comme cela est lamentable, comme cela est affligeant.

Le terrible spectacle de la chute dans l’insupportable enfer aux souffrances sans intermittences dans la vie suivante n’est-il, dès lors pas, lamentable, affligeant ? Il faut donc avertir et réprimander l’attachement aux offenses au Dharma.

A partir de ce point là, commence la partie essentielle du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Vous l’entendez dans vos temples respectifs lors de la cérémonie de Oéshiki. Sachez que cette partie est la plus importante.

Au plus vite, rectifiez l’attachement en votre petite croyance.

Le mot « croyance » est important. Notre vie quotidienne, elle-même, existe entièrement en fonction de notre type de foi et de vénération. Même ceux qui prétendent ne pas avoir de religion, d’une manière ou d’une autre ont foi en quelque chose. La vie quotidienne a existé dans le passé, existe à présent et existera dans le futur constamment sur la base de la foi et de la vénération.

Chacun possède, dans la vie quotidienne, sa manière de croire. En ce sens, plus largement, la croyance porte tout le monde. Par exemple, ceux qui disent : « pour moi, l’argent est ce qui compte le plus et l’important est de l’économiser », ont foi en la religion de l’argent. Ainsi, est-il important de savoir distinguer la bonne croyance de la mauvaise. En effet, de là dépend notre vision de la vie. Nichiren Daishônin fait ici allusion à la croyance erronée dans le Nenbutsu.

La « petite croyance » est une manière étriquée et tendancieuse d’avoir la foi. C’est ce que Nichiren Daishônin exhorte de rectifier, puis de prendre « immédiatement refuge dans le bien unique du véhicule véridique », vaste religion. Par conséquent, il exhorte à prendre refuge dans la religion correcte.

Et prenez immédiatement refuge dans le bien unique du véhicule véridique.

Le « véhicule véridique » est l’enseignement emmenant les êtres humains vers le bonheur.

A l’opposé du véhicule véridique, sont les expédients salvifiques, enseignements provisoires. Dans le Sutra des Sens infinis, le vénéré Shakya affirma lui-même :

« Je compris que la nature et les désirs des êtres sont dissemblables. Nature et désirs des êtres étant dissemblables, je prêchai le Dharma de diverses manières, par le pouvoir des expédients ».

Ce passage démontre clairement que tous les sutras : Ornementation fleurie, Agama, Doctrines diverses et la Sagesse, enseignés pendant plus de quarante années, étaient tous des moyens, des expédients salvifiques.

Puis, dans le Sutra du Lotus, il déclare :

« Je vais honnêtement rejeter les moyens et prêcher exclusivement la voie sans supérieur ».

Dans la perspective de guider les êtres, l’honnêteté est particulièrement importante. Fort de ce principe, l’Eveillé, rejetant honnêtement les moyens, prêcha la voie sans supérieure. La voie vers le véritable bonheur réside donc dans l’exposition dénuée d’affectation du vrai et, également, dans la foi docile en cette vérité. Telle est la signification du « bien unique », du Sutra du Lotus, « rejetant honnêtement les moyens et ne pêchant que la voie sans supérieur ». Tel est le véhicule véridique.

Poursuivant en ce sens, je dirai que l’enseignement véritable au sein du Sutra du Lotus repose dans la doctrine originelle, englobant l’intégralité de la doctrine éphémère. Plus loin encore, au sein même de l’enseignement de la doctrine originelle, Myôhôrengekyô que le vénéré Shakya transféra au bodhisattva Jôgyô, au titre de la transmission de l’essentiel du chapitre « Pouvoirs divins », représente la substance fondamentale du chapitre « Durée de la vie ».

Nichiren Daishônin apparut et montra clairement la substance fondamentale du Dharma originel du passé infini dans le Traité sur le sens de la substance, ou encore, le Traité sur ce que les Bouddha des trois phases jugent bon d’adopter et de rejeter au sein du canon des enseignements. Cette substance fondamentale est les trois grands Dharma ésotériques. Le Honzon de la doctrine originelle, le Kaidan de la doctrine originelle et le Daimoku de la doctrine originelle, les trois grands Dharma ésotériques sont tels quels inclus dans Nam Myôhôrengekyô, substance du Dharma du passé infini.

« Le profond des phrases est le Dharma merveilleux au degré de dénomination lors de l’éveil véritable dans le passé lointain, sans y mêler d’autres pratiques. C’est Nam Myôhôrengekyô, contemplation correcte instantanée, pratique de la réalité d’Une pensée trois mille ».

A partir de ce célèbre passage du Traité sur la Merveille de la cause originelle, nous pouvons clairement conclure que la substance de Nam Myôhôrengekyô représente, telle quelle les trois grands Dharma de la doctrine originelle. Là réside le « bien unique du véhicule véridique » guidant de manière correcte l’intégralité des êtres de la Fin du Dharma. Il convient de lire ce passage du Traité sur la Sérénité du pays, en sachant à quoi il se rapporte.

Ainsi, les trois mondes se révéleront tous être le monde du Bouddha. Comment le monde du Bouddha pourrait-il péricliter ? Les dix directions se révéleront toutes être la terre précieuse. Comment la terre précieuse pourrait-elle être détruite ?

Cette partie est sans doute quelque peu difficile à saisir. Nous trouvons d’abord « les trois mondes ». Ces derniers désignent les trois mondes évoqués plus haut, à savoir le monde des désirs, le monde de la forme et le monde de l’absence de forme. Il s’agit, en fait, des six voies. Comme l’indique l’expression « transmigration dans les six voies » (j. rokudô rinné -六道輪廻, s. samsāra), il s’agit du monde de l’illusion et de la souffrance. Lorsqu’il prend refuge dans le bien unique du véhicule vrai, ce monde devient tel quel, et instantanément, le monde du Bouddha.

Ce principe est sans doute difficilement compréhensible sur la base de la logique ordinaire. Toutefois, il convient d’avoir foi dans les immenses œuvres et vertus du Sutra du Lotus, substance et aspect inconcevables du monde des dharma. Dans ce passage, Nichiren Daishônin indique que, dans son enseignement, les œuvres et vertus illimitées, comme la voie, sont nécessaires pour obtenir l’état de vie du Bouddha. C’est garder le bon Dharma et la bonne doctrine. Il affirme, en même temps que, de là, apparaîtra clairement le chemin vers la vaste propagation.

Dès lors, comme l’indique la phrase du Traité sur le Sens de la substance :

« (Celui qui) honnêtement rejette les moyens et, uniquement dans le Sutra de la fleur du Dharma a foi… »

Tout autre enseignement que le Sutra du Lotus n’est qu’un expédient. Le Bouddha lui-même nous exhorte à rejeter complètement ce dernier.

A présent, la Soka Gakkai, tentant de s’insinuer dans les bonnes grâces des religions, a abandonné la veine principale de l’enseignement de Nichiren Daishônin et raconte toutes sortes d’invraisemblances, afin de duper le monde. Rien, dans ces propos, n’appartient à l’enseignement véritable de Nichiren Daishônin. Jamais basées sur l’enseignement véritable de Nichiren Daishônin, toutes ces allégations ne sont que des contrefaçons, inférieures mêmes aux expédients salvifiques. Nichiren Daishônin nous exhorte à rejeter ces visions erronées.

Dans le Traité sur le Sens de la substance, il poursuit :

(…) et récite Nam Myôhôrengekyô, voit les trois voies des mauvaises passions, du karma et de la souffrance se transformer en trois vertus de corps de dharma, sagesse et libération. Les trois visions et les trois vérités apparaissent en son cœur. Le lieu où demeure cet homme est la terre de la lumière toujours sereine. Le Bouddha de la fleur du lotus substantifique de la durée de la vie de la doctrine originelle, au triple corps sans artifice, à la fois habitant et habité, corps et territoire, matière et esprit, doté à la fois de la substance et de l’application, se trouve parmi les disciples et bienfaiteurs de Nichiren ».

Nous lisons « habitant et habité, corps et territoire, matière et esprit ». Cette phrase révèle que la vie de celui qui récite le Daimoku, réalise les œuvres et vertus du point de vue du triple corps : corps de Dharma, corps de rétribution et corps de communication, identiques à l’éveil du Bouddha originel de l’ensemencement. Aussi, grâce à la réalisation de ces œuvres et vertus, le lieu où vit cet homme devient immédiatement la terre du Bouddha.

Le corps de celui qui récite Nam Myôhôrengekyô exprime tel quel l’aspect du Dharma. C’est le sens de la phrase : « le corps et le territoire sont Une pensée trois mille ». Ici, le « corps » et le « territoire », en fait l’homme et son environnement, dans une relation de fusion merveilleuse, réalisent les œuvres et vertus des quatre vertus de la permanence (j. jô - ), de la félicité (j. raku - ), du soi (j. ga - ) et de la pureté (jô - ). Il existe également les expressions « rétribution du support » (j. ehô -依報) et « rétribution du principal » (j. shôhô -正報). Le principal, c’est nous, les êtres. Le support, c’est notre environnement. Sans environnement, ni notre vie quotidienne, ni nous-mêmes, physiquement, n’existeraient. Pour cette raison, le corps et le territoire coexistent en une importante corrélation.

Lorsque l’on récite Nam Myôhôrengekyô, la triple vision de la triple vérité apparaissent telles quelles en notre cœur. Simultanément, ce phénomène rejaillit à la fois sur « l’habitant et l’habité ». Il s’agit là du corps des êtres humains et du lieu où vit ce corps. Dans ce cas, la forme, revêtue par la réalisation des œuvres et vertus par le corps, est la réalisation du corps de communication sans artifice. Ensuite, « corps et territoire », c’est-à-dire le corps, habitant, doté des quatre vertus présentes à l’origine[113] et des quatre vertus acquises par l’ascèse[114] et le territoire, support de ce corps, manifestant la substance du Dharma de la fusion merveilleuse, représentent le corps de Dharma sans artifice. Enfin, « matière et esprit » ; notre esprit, existant en dépendance de notre corps (la matière), fait naître le profond éveil. « Matière et esprit » se rapporte donc au corps de rétribution sans artifice. Les œuvres et vertus de ce corps de rétribution sans artifice éclairent l’intégralité des dix mondes de dharma. En somme, cette phrase signifie que l’aspect de notre foi, fusionnant avec le Gohonzon, est la manifestation du triple corps sans artifice du Bouddha.

Ce passage du Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude participe du même sens. Si l’on a une foi forte, le territoire du Bouddha ne peut péricliter et les dix directions deviennent toutes des terres remplies de joyaux. Ces dernières, également, ne peuvent être détruites. Je pense que ce passage comprend également la signification des terres précieuses issues des transformations de la « triple transformation des terres et des champs[115] » du Sutra du Lotus.

Si le pays ne décline pas et que le territoire ne subit pas de ruine, votre corps sera en sécurité et votre esprit serein.

Si nous-mêmes et notre environnement ne subissons pas de transformations ni de catastrophes, alors, nous devenons physiquement et spirituellement serein et établissons un état de vie heureux.

Vous devez croire, vous devez respecter ces mots, ces paroles».

Mais pour cela, il est important de réfuter les erreurs et d’établir la rectitude. C’est ce que rappelle l’expression « ces mots ». Par cette démarche, la terre du Bouddha se réalisera immanquablement. C’est ce que souligne l’expression « ces paroles ». Autrement dit, il est évident, à travers cette phrase, que la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude consiste à rectifier rapidement l’attachement exclusif en votre petite croyance et à prendre immédiatement refuge dans le bien unique du véhicule véridique.

Voici, enfin, l’agrément final du visiteur.

Le visiteur dit : S’agissant de cette vie et de la vie suivante, qui ne serait prudent ? Qui ne serait effrayé ?

Ici, le visiteur, grâce aux enseignements affables, dispensés par l’hôte depuis le début de leur entretien, a compris l’importance de se séparer de ses attachements et de craindre et réprimander les offenses au Dharma pour les deux phases du présent et du futur. Cet homme comprend qu’il doit se conformer à la signification de la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude, développée par l’hôte.

Ayant ouvert ces phrases des sutras et reçu consciencieusement la parole du Bouddha, je réalise combien lourde est l’erreur d’offense, combien profond est le crime de destruction du Dharma.

Assimilant vos propos, j’ai compris combien lourde est l’erreur d’offenser le bon Dharma, combien profond est le crime de le souiller.

J’ai cru en un Bouddha unique en rejetant tous les autres Bouddha ; j’ai vénéré les trois sutra en excluant tous les autres. Cette attitude n’était pas due à la corruption de ma pensée ; j’ai suivi les paroles des éminents maîtres précédents.

J’ai pratiqué l’enseignement exhortant à abandonner, fermer, oublier et jeter, prôné par Hônen et eu foi dans le Bouddha Amida, rejetant tous les autres. J’ai vénéré uniquement les trois sutras de la terre pure, n’essayant même pas de saisir de mes mains les autres sutras. Je n’ai toutefois pas agi de la sorte en raison de desseins fourbes. J’ai obéi aux paroles de Hônen et des siens, préconisant le Nenbutsu comme l’enseignement correct.

Il en est de même des hommes dans les dix directions.

Je ne suis pas le seul. Beaucoup d’autres ont commis la même erreur.

Ceci représente de vains efforts dans cette vie et la chute dans l’enfer Avici dans la vie future. Les phrases sont claires et le principe formel ; ils ne laissent aucune place au doute.

 Ces erreurs ne perturbent pas seulement l’esprit en superficie, elles apportent également le trouble jusqu’à notre nature profonde. On fait alors naître beaucoup de détresse. De plus, il apparaît clair, à la lumière des sutras, qu’elles provoqueront la chute dans l’enfer Avici dans la vie suivante. Cette logique est précise, elle ne laisse aucune place au doute. Ainsi, le visiteur expose sa nouvelle conviction.

Ensuite, vient la promesse du visiteur.

Il est temps de respecter vos bienveillantes instructions et d’ouvrir ma sottise de visiteur désemparé. Nous devons sans tarder faire prendre effet à l’antidote et établir la paix. Apaisons d’abord notre vie présente et, en outre, assurons la vie après notre trépas

Il s’agit là de la dernière phrase importante de ce texte. Elle dit, en substance : vénérant enfin votre admonestation rigoureuse et compatissante, j’ouvre mon cœur erroné, mon cœur ignorant et vais rapidement prendre des mesures contre cette offenses au Dharma, source des catastrophes. Je vais rapidement faire des efforts pour pacifier ce monde Je vais également prier pour ma sérénité physique et spirituelle, ainsi que pour la sérénité de la nation dans cette vie et pour être heureux dans la vie suivante. Telle est la dernière promesse du visiteur.

Je ne croirai pas seulement moi-même, mais je corrigerai les erreurs d’autrui.

Enfin, cette ultime phrase est, elle aussi, extrêmement importante. Je ne me contenterai pas de croire seul, je corrigerai également les erreurs des autres.

Nichiren Daishônin évoque ici Nam Myôhôrengekyô en tant que pratique personnelle et enseignement à autrui : pratiquer soi-même le bon Dharma et le préconiser aux autres. Il est important, dans cette démarche de préconisation aux autres, de dénoncer et de réprimer les visions erronées de ceux-ci sur la vie, sur le monde et sur la religion. La pratique de shakubuku favorise l’ouverture des yeux sur le bon Dharma et de réaliser ainsi la voie de l’enseignement à autrui. Ainsi, « je corrigerai les erreurs d’autrui », désigne shakubuku sur la base de la pratique personnelle. Tel est l’objet même du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Il est donc important de pratiquer nous-mêmes shakubuku là où nous avons un lien.

A la réflexion, si, au sein des nombreuses offenses au Dharma de son époque, Nichiren Daishônin montra plus particulièrement du doigt les enseignements erronés du Recueil des passages sélectionnés de Hônen. Cette action se révélait en effet indispensable, en regard des prédispositions des êtres et de la preuve manifeste de la punition collective d’alors. Toutefois, aujourd’hui, à divers titres, l’aspect de l’offense au Dharma s’est amplifié et modifié.

A la fin du quatrième dialogue, l’hôte prononçait la célèbre formule : « Plutôt que l’offrande de dix mille prières, il serait préférable d’interdire ce seul mal ». A l’époque de Nichiren Daishônin, le critère du « seul mal » était l’offense au Dharma commise par Hônen dans son Recueil de passages sélectionnés, forme de mal contre lequel il fallait prendre des mesures. A cette époque, à cause des enseignements du Nenbutsu, de nombreuses personnes montraient le mauvais aspect de la chute dans l’enfer au moment de l’instant suprême. Ce fait est clairement énoncé par les livres de l’époque

Aujourd’hui, les gens semblent pratiquer une multitude de religions. Or, aucune d’entre elles n’étant des enseignements aptes à faire devenir Bouddha dans le véritable sens du terme, il faut donc leur faire shakubuku. Toutefois, il faut savoir que, aujourd’hui, le « seul mal », c’est-à-dire la Soka Gakkai, montre l’aspect le plus négativement erroné. Ce mouvement est sorti de l’enceinte du bon Dharma pour s’enfoncer dans les geôles des enseignements hérétiques. Ses membres agissent comme s’ils avaient reçu telle quelle la constitution physique de son meneur, Daisaku Ikeda. Ceux-ci répandent sur le monde offense au Dharma et pensées hérétiques avec étroitesse d’esprit et avidité égoïste. Tel est l’aspect actuel de la Soka Gakkai.

Ils évoquent et se réfèrent aux enseignements de Nichiren Daishônin. Toutefois, leurs allégations n’ont rien à voir avec le Dharma de Nichiren Daishônin. Comme je l’ai déjà dit précédemment, Nichiren Daishônin pratiquait et agissait sans cesse par Nam Myôhôrengekyô, véritable substance du Dharma. Aussi, penser que, dans l’objectif de propager le Dharma merveilleux, il soit possible d’utiliser l’offense au Dharma et les doctrines erronées ne relève nullement de l’enseignement de Nichiren Daishônin. Pour la Soka Gakkai, Nichiren, ou Daishônin, ne sont que des mots dont, tout en les prononçant, elle se détourne fondamentalement. Force est de dire qu’une manière de voir les choses aussi contradictoire est une grave erreur.

Nichiren Daishônin déclarait :

« Même si vous utilisez Nichiren, si vous le vénérez de manière pernicieuse, le pays sera détruit ».

Autrement dit, la chute en enfer est inéluctable pour les membres de la Soka Gakkai et, en particulier, les grands dirigeants autour de Daisaku Ikeda, s’opposant à Nichiren Daishônin ou à Nikkô Shônin. Ils jettent la perturbation au sein du bouddhisme. Je tiens à le préciser clairement ici, sur la base de l’enseignement du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude.

Aussi, afin d’interdire ce seul mal et, également, dans le sens de sauver les membres de cette organisation, il est important de pratiquer shakubuku avec rigueur et compassion envers ses membres et envers les autres personnes afin de les orienter vers le bon Dharma de la Nichiren Shôshû. Actuellement, de nombreux livres paraissent, dénonçant les erreurs de la Soka Gakkai. Je pense que leur lecture vous apportera de nombreux points de références.

A présent, la Nichiren Shôshû progresse, tournée vers le sept cent cinquantième anniversaire de la présentation de la bonne doctrine du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Je vous encourage, Mesdames et Messieurs, à progresser en gravant dans votre cœur cette dernière phrase du traité : « Je ne croirai pas seulement moi-même, mais je corrigerai les erreurs d’autrui », et avec le désir de dévoiler l’illusion et l’aveuglement du plus grand nombre de personnes avec qui vous avez un lien et de les guider sur la voie de la foi correcte.

Ayez la conviction que, même si votre démarche se porte seulement sur une personne, le monde deviendra d’autant plus clair. Mettez en application shakubuku dans toutes ses acceptions. En effet, cette attitude correspond à la présentation de la bonne doctrine du Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude.

Ainsi s’achève mon cours sur le Traité sur la Sérénité du pays par l’établissement de la rectitude. Je prie du fond du cœur pour votre dévotion courageuse

(Trois récitations du Daimoku).

 


 

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[1] Ere Bun’ei : 1264-1271 ; le premier Gohonzon inscrit par Nichiren Daishônin date du 9 octobre de la 8e année de Bun’ei (1271), soit onze ans après l’écriture du Risshô ankoku ron. 

[2] Ere Kenji : 1275-1277.

[3] Ere Kôan : 1278-1288. 

[4] L’idéogramme “shô” (rectitude) « » s’écrit à l’aide de cinq traits. Le premier est « » qui signifie  un. On dessine alors les quatre autres « » qui signifient  s’arrêter. On peut ainsi dire que  la rectitude s’arrête (se limite) à un.

[5] Trois véhicules (sanjô) : les auditeurs, les Bouddha pour soi et les bodhisattva.

[6] Cinq véhicules (gojô – 五乗) : les hommes, les cieux, les auditeurs, les Bouddha pour soi et les bodhisattva.

[7] Sept expédients (shichi hôben – 七方便) : les hommes, les cieux, les auditeurs, les Bouddha pour soi, les bodhisattva des enseignements des corbeilles, les bodhisattva des enseignements particuliers et les bodhisattva des enseignements particuliers.

[8] Neuf mondes de dharma (kû hokkai – 九法界) : les mondes des enfers, des esprits affamés, des animaux, des asura, des hommes, des cieux, des auditeurs, des Bouddha pour soi et des bodhisattva.

[9] L’heure du chien : de 21 à 23 heures 

[10] Rappelons que le Traité sur la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude, comme certains autres textes importants de Nichiren Daishônin, sont écrits en japonais classique, c’est-à-dire en Chinois classique, comme c’était la coutume à l’époque.

[11] Sutra de la Sagesse du roi bienveillant (j. ninnô hannya kyô) : il existe en fait deux versions chinoises de ce sutra. La première, en deux fascicules, s'intitule : Sutra du Prêche de l'Eveillé sur la paramita de la sagesse du roi bienveillant (j. bussetsu ninnô hannya haramitsu kyô), traduite par Kumarajiva. La seconde, Sutra de la paramita de la sagesse du Roi bienveillant qui protège le pays, en deux fascicules, fut traduite par Amoghavajra. Ce sutra fut prêché par l'Eveillé aux rois des seize pays. Il expose que les calamités s'abattant sur le pays seront évitées si ce sutra est lu et exposé. Ce sutra fait partie des  “trois sutra protecteurs de la nation”, les deux autres étant le Sutra du Lotus et le Sutra de la Radiance d'or.

[12] Trente-trois dieux : divinités vivant au sommet du mont Sumeru avec, en leur centre, Sakra devanam Indra (j. Taishaku).

[13] Empereur Saimei : trente-septième empereur du Japon, il régna de 594 à 661.

[14] Vajra (j. kongô sho) : à l'origine, c'était une sorte d'arme utilisée dans l'Inde ancienne. Le mot diamant fait référence à sa dureté, capable de briser n'importe quel objet. Dans le bouddhisme ésotérique, il symbolise l'esprit de la boddhéité, capable de briser toutes les illusions. Le Vajra est fait principalement de fer et de cuivre. Il en existe de trois sortes : s'il n'est pas doté d'une pointe, le Vajra est alors appelé "pilon simple" (j. dokko). Il représente alors l'ainsité. S'il est doté de trois dents, il est appelé "sanko" et représente les trois (pratiques) mystiques : pratique mystique physique, par laquelle on forme les signes manuels représentant une divinité, la pratique mystique verbale, par laquelle on récite les formules magiques propres à cette divinité et la pratique mystique mentale qui consiste à méditer sur la divinité. Si le Vajra possède cinq dents, il est dès lors appelé "goko" et représente les Bouddha des cinq formes de sagesse : Mahavairocana (j. Dainichi) : sagesse de la substance du monde des dharma ; Ashuku (j. Aksobhya) : sagesse grande et parfaite comme un miroir ; Hôshô (Ratnasambhava) : sagesse de la similitude des natures ; Muryôju (Amitabha) : sagesse de la contemplation sublime et Fukû jôju (Amoghasiddhi) : sagesse d'accomplir ce qui doit être accompli.

[15] Ecole Rinzai (j. rinzai shû) : une des cinq écoles du Zen (chan) en Chine ; fondée par Linji Yixuan (j. Rinzai gigen), cette école fut très florissante en Chine. Eisai la transmit en 1191 au Japon où elle prospéra, en particulier dans la classe des samouraïs.  Il existe à présent quatorze courants et plus de six mille temples de l'école Rinzai au Japon.

[16] Ecole Sôtô (j. sôtô shû) : on dit que le nom de cette école (dont la prononciation chinoise est Caodong) est dérivé de deux lieux : Caoxi (j. Sôkei), où vécut Huinen (j. Enô), sixième patrirche de la lignée du Zen et Dongshan, où vécut Liangjia (j. Ryôkai), fondateur de l'école. L'école Sôtô fut introduite au Japon par Dôgen en 1227.

[17] Ecole Ôbaku (j. ôbaku shû) : l'une des trois écoles du Zen au Japon ; fondée par Ingen Zenji (c. Yinyuan), un moine chinois. Son temple principal est situé à Uji, près de Kyôtô. Cette école est issue de l'école Rinzai. En 1654, Yinyuan, supérieur du temple Wanfusi (j. manfukuji) du mont Huangbo (j. ôbaku) se rendit au Japon où il fonda un temple qu'il nomma Ôbakuzan Manfukuji. Jusqu'au quatorzième supérieur, Ryûtô, tous les supérieurs du temple furent chinois.

[18] Amoghavajra (c. bukong, j. fukû) (705 - 774) : sixième Patriarche de l'école Shingon, il naquit en Inde du nord et se rendit en Chine en 720 avec son maître Vajrabodhi (c. Jin gang zhi, j. Kongôchi), qu'il assista dans la traduction de sutra. Après le décès de son maître, il retourna en Inde à la recherche de manuscrits originaux en sanskrit, des sutra et des traités. Il retourna en Chine en 746. Il fut non seulement le traducteur de cent dix ouvrages, mais propagea également les enseignements ésotériques.

[19] Abandon des impôts et taxes, etc…

[20] Hachiman : Les légendes disent qu'Hachiman était auparavant un mortel dont les actes lui valurent d'être transformé en divinité. A l'origine, il était le fils de l'Impératrice Jingo (170 - 269). Lorsque celle-ci fut enceinte de lui, elle menait alors une campagne militaire en Corée. Elle avala une pierre afin de retarder l'accouchement jusqu'à la victoire et on dit que c'est pour cela que son enfant fut très jeune un homme au caractère solide et un grand guerrier. Il est traditionnellement considéré comme le dieu de la guerre et le patron des samouraïs. Ses chamans suivent strictement les préceptes de la voie des samouraïs, ne refusent jamais le combat et contrôlent tous leurs actes. Ils sont aussi versés dans les jeux de stratégie et la tactique militaire.

[21] Quatre rois célestes (j. shiten'nô) : ils gardent les quatre directions : Jikokuten (s. dhrtarastra) à l'est, Zôchôten (s. virudhaka) au sud, Kômokuten à l'ouest (s. virupaksa) et Tamonten (s. vaisravana) au nord. Ils sont les rois des quatre royaumes célestes entourant le mont Sumeru. Tout en servant la divinité Indra (j. taishaku), ils protègent le bouddhisme et ses croyants. Ils sont inscrits aux quatre angles du Mandala Gohonzon de Nichiren Daishônin : Jikokuten en haut à droite, Zôchôten en bas à gauche, Kômokuten en bas à droite et Tamonten sous sa translittération phonétique Bishamonten en haut à gauche.

[22] Yaksa (j. yasha) 1) Populairement, ogres à l'apparence effroyable, mendiant et, parfois, dévorant les êtres humains. 2) Sorte de demi-dieux faisant partie des huit catégories d'être surnaturels protégeant le bouddhisme, ils sont aux ordres du roi Bishamon et protègent la partie nord du monde.

[23]  Nikken Shônin fait ici allusion à la découverte faite au mois de mai 2003 par des chercheurs de l’université de Tokyo et de l’observatoire astronomique national du Japon qui ont découvert 18 supernovas éloignées, en utilisant l’appareil photo principal du foyer du télescope Subaru, Suprime-Came. Une simple exposition a montré 12 nouvelles supernovas. C’est la première fois que tant de supernovas ont été découvertes en même temps. Les supernovas sont les extrémités explosives des étoiles, plus de 8 fois plus lourdes que notre soleil. Elles représentent des événements rares se produisant seulement une fois en cent ans, même dans une galaxie composées de centaines de milliards d’étoiles. Ces explosions sont également l’un des événements les plus énergiques au sein de l’univers et peuvent être aperçues depuis de grandes distances. Les supernovas nouvellement découvertes sont situées de 4 à 7 milliards d’années lumières, et leur lueur a été émise quand l’univers était seulement moitié de sa taille actuelle. La découverte permettra des observations ultérieures desquelles une réponse claire pourra peut-être être donnée à la question : est-ce que l’univers se dilate à un taux constant et si oui, de combien ?

[24]  Les quatre castes de l’Inde : Dans l’hindouisme il existe quatre castes envisagées en hiérarchie. Quiconque n’appartient pas à une de ces castes est un banni. Le mot religieux pour caste est “Varna”’. Chaque Varna possède certains droits et fonctions. Les membres de chaque Varna doivent travailler dans certains métiers uniquement accessibles aux membres de ce Varna. Chaque Varna a un certain type de régime. Le plus haut Varna est celui des brahmans. Les membres de cette classe sont des prêtres et les personnes instruites de la société. Le Varna suivant dans la hiérarchie est celui des Kshatrya. Les membres de cette classe sont les gouverneurs et les aristocrates. Après eux, on trouve les Vaisia, c’est-à-dire les propriétaires et les hommes d’affaires. Après eux dans la hiérarchie sont les  Sudra. Les membres de cette classe sont les paysans et la classe ouvrière, travaillant dans les tâches  non polluantes. La hiérarchie de caste finit ici. Au-dessous de ces castes sont les bannis, intouchables par les quatre castes. Ces intouchables sont employés dans les travaux dégradants comme le nettoyage, les eaux d’égout etc.

[25]  Kosala : royaume indien antique, correspondant approximativement à un secteur de la région d’Oudh. Sa capitale était Ayodhya. C’était un Etat puissant au 6e siècle avant J.C. mais, affaibli par une série de guerres avec le royaume voisin de Magadha, il fut finalement absorbé par ce dernier au 4e siècle avant J.C. Kosala fut le berceau de beaucoup de littérature épique en Sanskrit, dont le Ramayana. Le vénéré Shakya et Mahavira, fondateur du Jainisme, enseignèrent dans le royaume de Kosala.

 

[26]  Sravasti : Située à 134 Kms de Lucknow et 29 Kms de Balrampur, capitale du royaume antique de Kosala, Sravasti  eut l’honneur d’abriter le vénéré Shakya pendant 24 saisons des pluies dans les jardins de Jetvana. La ville, censée avoir été fondée par le Roi mythique Sravast, possède des stupas historiques, des monastères majestueux et plusieurs temples. On dit que le Bouddha y réalisa quelques miracles. Cet endroit saint abrite également l’arbre célèbre d’Ananda Bodhi, une progéniture de celui qui est dit avoir été planté par Ananda, disciple et cousin de l’Eveillé.

 

[27]  Magadha : royaume indien antique, situé dans le secteur des Etats modernes de Bihar et de Jharkhand. Sa capitale était Pataliputra (maintenant Patna). La prééminence de ce royaume se développa vers le milieu du 7e siècle avant J.C. période au cours de laquelle il  prolongea rapidement ses frontières, en particulier sous le règne du roi Bimbisara (540 - 490). Magadha tomba sous la coupe (325) de l’empereur Chandragupta, qui fit du royaume le noyau de l’empire des Maurya. Après une période d’obscurité, Magadha recouvrit son importance au 4e siècle de notre ère, en tant que base de la puissance de la dynastie des Gupta. Le bouddhisme et le Jainisme se sont développés en premier dans le pays de Magadha, dont le Bouddha utilisa le dialecte Sanskrit, le Magadhi.

[28]  Varanasi : anciennement Bénarès, Varanasi est l’une des sept villes saintes de l’hindouisme. Se baigner dans le Gange à Varanasi est censé purifier de tous les péchés et se faire incinérer sur les ghats permet de se libérer du cycle des réincarnations.

Son nom actuel vient de deux rivières, la Varuna et l’Assi. Par le passé la ville s’est appelée Kashi et Bénarès. Son nom est mentionné dans des textes sacrés hindous et bouddhistes. Elle se trouvait sur le trajet des voyageurs venus d’Asie Centrale et de Chine. Elle serait l’une des plus vieilles villes du monde. Elle dégage une atmosphère tout à fait particulière tellement la vie et la mort se côtoient à chaque coin de rues.

Aujourd’hui la ville est aussi connue pour sa soie et ses saris.

[29]  Kapilavastu : située à 110 kms de Gorakhpur dans Uttar Pradesh, Kapilavastu (Piprahwa) fut la capitale du clan de Shakya, et une des premières républiques. C’est dans les environs opulents de Kapilavastu, que le prince Siddhartha passa son enfance. C’est là qu’il vit les souffrances de la naissance, de la vieillesse, de la maladie et de la mort. Puis, finalement voyant un bienheureux moine ayant rompu le lien avec ces quatre souffrances, il décida de renoncer à toutes les richesses et aux plaisirs mondains et de chercher la vérité en empruntant le chemin du salut.

[30]  Kusinagara : lieu de l’extinction et de la crémation du vénéré Shakya.

[31]  Dynastie des Zhou (1027-221 av. JC) : Originaire de la vallée de la Wei, elle étend son emprise sur la moitié nord de la Chine, vallée du Changjiang comprise. La capitale est établie à Luoyang.  Au cours de cette période, le pays entre dans l’âge de fer (charrue à soc de fer). Notons encore l’apparition d’une philosophie qui a modelé la civilisation chinoise, fondée par Kongfuzi ou Confucius. Mais à la fin du 5e siècle av. JC, l’autorité politique des Zhou diminue et une période de guerres incessantes avec les états voisins, connue sous le nom de la période des Royaumes Combattants (403-221 av. JC) sonne le glas de cette dynastie. 

[32]  Grand précepteur (c. taishi, j. taishi) : chargé de l’éducation de l’empereur.

[33]  Inari : dieu de la nourriture et déesse du riz dans la mythologie japonaise, Inari est l’une des divinités les plus mystérieuses du Japon. Tous les ans, il (elle) descend d’une montagne vers les rizières. Les renards sont ses messagers. Il est souvent imaginé sous les traits d’un vieil homme portant deux sacs de riz ou assis dessus et flanqué de chaque côté par des renards, souvent confondus avec le dieu lui-même, dans l’imagerie populaire. On dit d’ailleurs, qu’il peut prendre l’aspect de ces animaux. Il peut aussi se montrer sous la forme d’une araignée, pour donner des leçons aux hommes faibles. Un temple dédié à Inari existe dans beaucoup de villes japonaises, mais également dans beaucoup de foyers, car il (elle) est vénéré(e) comme le symbole de la prospérité et de l’amitié.

[34] Kâsyapamâtanga : (j. Kashô Matô) : moine de l’Inde centrale qui introduit le bouddhisme en Chine, en compagnie de Zhu Falan.

[35] Zhu Falan : (j. Jiku Hôran) : moine de l’Inde centrale qui introduit le bouddhisme en Chine, en compagnie de Kâsyapamâtanga.

[36] Les yeux divins (j. tengen tsû) : capacité de voir toute chose à toutes distances.

[37] Les oreilles divines (j. tennitsû) : capacité d’entendre tous les sons quelle que soit la distance.

[38] La vision des vies antérieures (j.shukumyô tsû) : capacité de connaître ses propres vies passées et celles des autres.

[39] Les pieds divins (j. jinsoku tsû) : capacité de se déplacer partout et de se transformer à volonté.

[40] La perception des pensées (j. tasin tsû) : capacité de connaître les pensées des autres.

[41] Le pouvoir d’annihiler les écoulements (j. rojin tsû) : capacité d’anéantir les mauvaises passions.

[42] Premier fruit : le fruit d’entrer dans le courant (s. srota apatti phala, j. yoruka ou shudaon ka) : premier degré d’éveil atteint par les pratiquants du Petit véhicule. Il s’agit d’entrer dans le courant de l’émancipation en allant à l’inverse du courant des vies et des morts. Ce fruit peut être obtenu lorsqu’on s’est départi des illusions des vues erronées.

[43] Deuxième fruit : le fruit de retourner encore une fois (s. sakrd agamin phala, j. ichiraika  ou shidagon ka) : deuxième degré d’éveil atteint par les pratiquants du Petit véhicule. La destruction de six des neuf illusions du monde des désirs permet de ne renaître qu’une fois dans le monde des hommes et des cieux avant d’obtenir l’émancipation totale.

[44] Troisième fruit : le fruit de non retour (s. anagamin phala - j. fugenka ou anagon ka) : troisième degré d’éveil atteint par les pratiquants du Petit véhicule. Ce niveau peut être atteint en se soustrayant des souillures du monde des désirs, y compris les vues et les pratiques erronées. A ce degré, on renaît dans le monde matériel ou dans le monde spirituel, mais il y a “non-retour” dans le monde des désirs.

[45] Quatrième fruit : le fruit des arhats (s. arhat phala, j. arakan ka) : quatrième et dernier degré d’éveil atteint par les pratiquants du Petit véhicule. Un tel saint s’est débarrassé de toute renaissance, de tous les désirs.et de toutes les illusions. Il a obtenu la parfaite connaissance, a tout appris, de sorte qu’il n’a plus rien à étudier. Il est digne de respect et de recevoir des offrandes.

[46] Livre de la piété filiale (c. xiajing, j. kôkyô) : ce très court "Classique de la piété filiale" décrit une leçon de Confucius à son disciple Zeng Shen sur les attitudes à adopter envers un aîné, que celui-ci soit son propre père, un frère aîné, ou le souverain. Le texte, écrit sous la forme d’un dialogue, a certainement été compilé par les propres disciples de Zeng. En dépit de sa brièveté, ce texte représente le cœur de la pensée sociale confucéenne, attribuant à chaque personne une position définie dans le contexte social, assurant ainsi la stabilité au sein de la famille, de la société et de la nation. Le désordre social entraîne en effet le chaos et la guerre.

[47] Jia Xiang (j. Kajô - 嘉祥) : nom populaire de Jizang (j. Kichizô - 吉臓)

·       Né en 549 près de l’actuelle Nanjing

·       Mort en 623

Ecrits majeurs

Jizang composa des commentaires sur les sutra et traités clés, trop nombreux pour être tous énumérés. Néanmoins, ses œuvres les plus influentes sont :

·       Zhongguanlun Shu (Commentaire sur le Traité de la voie du milieu)

·       Erdi Zhang (Essai sur les deux niveaux de discours)

·       Bailun Shu (Commentaire sur les Cent traités)

·       Shi Er Men Lun Shu (Commentaire sur le Traité des Douze portes)

·       Sanlun Xuanyi (Sens mystérieux des Trois traités)

·       Erdi Yi (Sens des deux niveaux de Discours)

·       Dasheng Xuanlun (Traité sur le Mystère du Mahayana)

Idées majeures :

·       L’attachement ou l’engagement excessif envers tout point(s) de vue est la cause principale de la souffrance de la vie.

·       Réfuter ce qui est trompeur, est révéler ce qui est juste, car cette attitude contribue à surmonter les attachements aux points de vue.

·       Cette réfutation peut être schématisée parmi d’autres voies, en termes des quatre niveaux de deux sortes de discours,

Arrière-plan :

Selon les Biographies complémentaires des moines bouddhiques éminents, le moine bouddhiste et érudit chinois Jizang fut spirituellement précoce, ayant atteint un certain degré de réalisation à l’âge de sept ans, à travers une compréhension immédiate lors d’une conférence sur le bouddhisme. Comme l’indique cette légende, il était déjà moine à cette époque et démontrait un talent de  compréhension de l’essence de tous les problèmes particuliers. Sa production littéraire fut prodigieuse, indiquant une affinité, voire une sympathie pour la pensée bouddhiste chinoise dans son ensemble. Jizang est le plus souvent identifié à l’école chinoise du courant Madhyamika (voie du milieu), appelée d'ordinaire "Ecole des trois traités" (Sanlun Zong).

Le bouddhisme Madhyamika, dans la tradition indienne, est étroitement identifié à l’érudit et moine Nagarjuna qui, vraisemblablement, vécut au cours du deuxième siècle de notre ère. Son ouvrage le plus célèbre et le plus important est probablement le Mulamadhyamikakarikas, ou Versets sur les fondements de la voie du milieu. S’il existe une prémisse fondamentale derrière le travail et la tradition qu’il représente, c’est que tous les points de vue ou engagements obsessionnels de tous ordres, vis-à-vis d’objets, pensées, actions, et autres, sont des dysfonctions et, au moins en partie, cause des souffrances fondamentales nécessairement associées à la condition humaine. Cette tradition tente de démontrer que toutes les revendications et propositions, sont non seulement logiquement absurdes mais aussi, contribuent au duhkha, ou chagrin.

L’étude du Madhyamika en Chine débuta en fait avec les travaux de Kumarajiva (344-413), l’un des plus remarquables traducteurs et propagateurs de la pensée bouddhique en Chine. Ses traductions des textes bouddhiques, dont ceux sur le Madhyamika, ont été considérées comme faisant autorité par de nombreux érudits, même jusqu’à présent. Ses disciples, puis leurs propres disciples, devinrent des figures principales au cours de la brève quoique influente évolution du courant chinois du Madhyamika. Nous devons simplement nous souvenir que le nom de la tradition Madhyamika en Chine, l’école Sanlun, signifie “Trois Traités”. Ce nom fait référence aux traductions de Kumarajiva des trois textes considérés comme venus du courant indien du Madhyamika. Ces trois traités sont : le Zhonglun, ou Traité du milieu, traduction du Mulamadhyamikakarikas de Nagarjuna ; le Shi Er Men Lun ou le Traité des douze portes, considéré pour être également un ouvrage de Nagarjuna ; et Bai Lun ou Cent traités d’Aryadeva.

Jizang

Jizang vécut environ cent soixante ans après Kumarajiva, au 6e siècle. Plus connu pour ses formulations innovantes, la majeure partie de sa volumineuse littérature fut des commentaires sur les autres textes, y compris les trois traités de Nagarjuna et d’Aryadeva, desquels la tradition Sanlun tire son nom, ainsi que de sutra et d’autres ouvrages. Il critiquait et analysait également souvent les autres courants bouddhistes. Que la majeure partie du travail de Jizang ait été des commentaires d’autres textes ou courants, étant donné la prétendue, bien que fondamentale répugnance de la part du Madhyamika traditionnel à formuler des propositions doctrinales, est révélateur. On peut cependant se demander comment un écrivain dans la tradition Madhyamika chinoise, tel que Jizang, a considéré son propre rôle.

[48] Pratyutpanna (j. hanjû) : pratiquée de sept à quatre-vingt dix jours, cette méditation est supposée faire apparaître le Bouddha devant ses yeux.

[49] Amida :  nom japonais du Bouddha Amitâbha "Lumière infinie", maître de la Terre Pure de l'Ouest (Saihô Jôdô), un des Bouddha les plus populaires du Mahâyâna. Lorsqu'il était le bodhisattva Hôzô, le futur Amida prononça quarante-huit voeux solennels, s'engageant à secourir tous les êtres souffrants. En Chine, puis au Japon à partir du VIII siècle, Amida devint le plus vénéré des personnages du panthéon mahâyâniste. A l'époque de Heian (794-1185), on le représenta souvent venant quérir le mourant pour le transporter au paradis de l'Ouest. A l'époque de Kamakura (1185-1333), les écoles de la Terre Pure exaltèrent son rôle de sauveur

[50] Avalokitésvara (j. Kannon) : "celui qui entend les supplications du monde", principal bodhisattva du Grand Véhicule. Incarnant la compassion suprême, il est vénéré en Chine sous le nom de Guanyin, au Japon sous celui de Kannon et au Tibet sous celui de Chenrezi.

[51] Mahasthamaprapta (j. dai seishi) : bodhisattva décrit dans le Sutra de la Contemplation des vies infinies, accompagnant le Bouddha Amitabha en compagnie de Avalokitésvara. Mahasthamaprapta signifie "qui a obtenu la grande force," se référant à la puissance de sa sagesse et de ses mérites accumulés. Quelques disciples identifient Mahasthamaprapta à la figure première et la plus féroce du bodhisattva Vajrapani.

[52] Sutra Amida (j. amida kyô) : sutra en 1 fascicule traduit en chinois par Kumarajiva. Le titre sanskrit de ce sutra est Sukhavattvyuka ou “parure glorieuse de Sukhavatt” (le pays du bonheur). Il décrit brièvement les aspects agréables du pays d’Amida et précise que d’innombrables Bouddha dans les six directions louent ses vertus et attestent de la vérité de ce sutra. Il explique ensuite que celui qui garde son nom, renaîtra dans ce pays.

[53] Sutra des vies infinies (j. muryô jû kyô) : 2 fascicules dont la traduction chinoise est attribuée à Samghavarman. Il est le canon fondamental du bouddhisme de la terre pure, expliquant comment Amida devint Bouddha et comment il sauve les êtres sensitifs. Le sutra donne également des descriptions détaillées de ses attributs physiques et son pays.

[54] Sutra de la contemplation des vies infinies (j. kan muryô jû kyô) : 1 fascicule traduit en chinois par Kalayasas. Ce sutra présente seize contemplations centrées sur Amida et sa terre.

[55] Vaidehi (j. idaike) : épouse du roi Bimbasara du pays de Magada. Elle fut emprisonnée avec le roi, son mari, par leur fils Ajatasatru (j. ajase), emprisonnement auquel Bimbasara ne survécut pas. Ce drame au sein de la famille royale est conté dans le Sutra de la contemplation des vies infinies, où il est dit que Vaidehi prit refuge dans le Bouddha Amida.

[56] Akasagarbha (c. Xu Kong Zang, - 虚空蔵 - t. Namkhai Nyingpo, j. Kokûzô) : bodhisattva considéré être l’essence de l’éther. Son nom signifie le trésor de l’espace illimité et symbolise le bonheur infini généré par l’aide à d’innombrables êtres sensitifs.

[57] Ksitigarbha (c. Di Zang, - 地蔵 -t.  Sai Nyingpo, j. Jizô) le nom de ce bodhisattva signifie littéralement "essence de la terre". Il fit le vœu  d’entrer dans  le Nirvana seulement lorsque l’enfer sera vidé des esprits des criminels. Jusqu’à ce moment, il travaille à aider les êtres à obtenir l’éveil. Il apparaît sous différentes formes (divinité, prêtre, laïque, dragon et autres) en fonction des êtres aidés.  Il est souvent dépeint sous les traits d’un moine tenant un bâton dans sa main droite et une perle dans sa main gauche.  Parmi ses assistants, il y a les dix rois de l’enfer. Ces derniers jugent et condamnent les défunts.  En fonction de leurs fautes ou de leurs actes méritoires, ils sont dirigés vers la voie des cieux ou de l’enfer, etc…

[58] Traité de la contemplation du milieu (sk. Mādhyamika-śāstra– j Chûkan ron -中観論) de Nāgārjuna : composé de vingt-sept brefs chapitres (400 stances), l’objectif principal de cet ouvrage est de réfuter les enseignements du Hinayana et, également, d’analyser les enseignements des voies extérieures.

[59] Traité des douze portes (sk. Dvādaśmukha- śāstra, j. Jûni mon ron - 十二門論) de Nāgārjuna : l’objectif de cet ouvrage est de réfuter les enseignements du Hinayana et des autres enseignements des voies extérieures.

[60] Traité en cent versets (sk. Śata-śāstra, j. Hyaku ron -百論) d’Aryadeva (170-270) : ce traité a pour objectif principal de réfuter les diverses théories philosophiques opposées au bouddhisme et de montrer le sens véritable du Mahayana.

[61] Ecole des Trois traités (c. Sanlun, j. sanron -三論) : l’école des Trois traités représente la forme chinoise de l’école indienne du Mādhyamika (école du milieu) Les trois traités font référence aux trois ouvrages sur lesquels l’école se fonde : le Traité de la contemplation du milieu, le Traité des douze portes et le Traité en cent versets.

Ces trois textes furent traduits en chinois par Kumarajiva (344-413) au 5e siècle. Kumārajīva les transmit à ses disciples chinois, parmi lesquels les plus éminents furent Daosheng, Sengjao, Daozong, et Senglang. Ces moines contribuèrent largement à l’établissement des fondations de l’école des Trois traités.

Au 6e siècle, les personnages les plus représentatifs de l’école furent Falang (507-581) et son disciple Jizang (ou Jiaxan, 549-623). Ils correspondent à l’époque de l’apogée de l’école des Trois traités. Au 7e siècle, l’école fut introduite au Japon par Ekwan, disciple coréen de Jizang. Après l’émergence de l’école de la Nature des dharma, l’école des Trois traités décrut en importance.

Le credo de l’école des Trois traités est l’absence d’essence des choses, celles-ci étant seulement relatives, existant uniquement en vertu de leurs opposés. Elles sont donc vides. En d’autres termes, l’existence de l’un présuppose l’existence de l’autre. Les opposés sont mutuellement dépendants. Dès lors, une entité ne peut pas exister réellement. Cette théorie est fondée sur le discours des faits expérimentés du Sutra de la Sagesse. Selon l’explication de Nāgārjuna, la vacuité implique l’absence d’essence des choses, mais pas leur non existence en tant que phénomène. Le monde phénoménal est caractérisé par la discrimination, base de toutes les représentations mentales. Elle est l’élément créateur des apparences du monde extérieur.

L’approche méthodologique du rejet des opposés est le fondement de la voie du milieu selon l’école des trois traités. La position médiane est clairement exprimée à travers les huit négations du Traité du milieu :

Ni naissance, ni extinction

Ni interruption, ni permanence

Ni uniformité, ni diversité

Ni venue, ni départ

De cette analyse, l’école des Trois traités conclut à la production conditionnée (sk. pratītya-samutpāda, j. engi – 縁起) en tant que nature fondamentale du monde. Celle-ci est irréelle et vide, dans la mesure où aucun des huit phénomènes niés ci-dessus n’est valable.

[62] Traité de la grande vertu de sagesse (sk. Mahāprajñāparamitapadeśa, j. Daichi dô ron -大智度論) : commentaire en cent volumes du Sutra de la Grande vertu de sagesse (sk. Mahāprajñāparamitā-Sutra, j. Daibon hannya kyô -大品般若経), attribué à Nāgārjuna et traduit en chinois par Kumārajīva. Les trente-quatre premiers volumes fournissent des commentaires sur le chapitre introducteur du sutra. Le Traité de la grande vertu de sagesse est lui-même fondé sur le Traité du milieu et souligne la doctrine de la vacuité. Il représente un travail encyclopédique, riche en informations sur les divers courants philosophiques majeurs de l’Inde.

[63] Aryadeva (j. Daiba提婆) : quatorzième successeur de la lignée de Shakyamuni, il est aussi appelé Kānadeva, ce qui signifie « Deva le borgne », parce qu’il avait perdu un œil. Il vivait dans le sud de l’Inde au troisième siècle. Son nom de famille était Vaiśramaņa. Il devint disciple de Nāgārjuna à Kośala et maîtrisa la doctrine de la vacuité. En Inde, il fut considéré comme le fondateur de l’Ecole Mādhyamika (Ecole de la vision du milieu). Il convertit un grand nombre d’hérétiques à Pataliputra, mais fut cependant tué par l’un d’eux.

[64] Réfutation des idées des voies extérieures : dans le Traité du milieu, Nāgārjuna réfute les notions de naissances des choses en fonction d’un Dieu créateur, en fonction d’une union harmonieuse, en fonction du temps, en fonction d’une entité, en fonction de modifications, en fonction du hasard et en fonction du rassemblement ou de la dispersion d’atomes.

[65] Le principe est profond et sa compréhension infinitésimale (j. rijin gemi -理深解微) : phrase extraite du Recueil de passages sur la sérénité et la félicité (anraku shû – 安楽集) de Daochuo.

[66] Pas un sur mille (senchû muichi -千中無一) : dans son Hymne à la renaissance sur la Terre pure, Shandao écrit que pas une personne sur mille ne peut renaître sur la Terre pure à moins d’effectuer uniquement les cinq pratiques de l’invocation du Bouddha.

[67] Concentration sur le bien (j. jôzen -定善) : pratique du bien effectuée lorsque l’esprit est libéré des pensées diverses et illusoires et concentré en un lieu.

[68] Dispersion sur le bien (j. sanzen -散善) : pratique du bien effectuée lorsque l’esprit est dispersé.

[69] Grand enfer des hurlements incessants (j. abi kyôjan jigoku - 阿鼻叫喚地獄) : l’enfer des hurlements fait partie des huit grands enfers. Les criminels y sont bouillis dans de grands chaudrons ou jetés dans une pièce en fer où un grand incendie fait rage. On comprend qu’ils hurlent de douleur.

[70] Kongzi ou Kongfuzi (j. Kôshi - 孔子) : Confucius (551-479 av. JC). « Ne vous affligez pas de ce que les hommes ne vous connaissent pas ; affligez-vous de ne pas connaître les hommes ».

[71] Mengzi (j. môshi -孟子) Mencius (v. 372 ?-  v. 289 av. JC).  « Ceux qui s'avancent trop précipitamment reculeront encore plus vite ».

[72] Zaimu (財務) : littéralement « affaires financières ». Dans la Soka Gakkai, il s’agit de collectes d’argent pour l’organisation. L'unité du zaimu de la Soka Gakkai est de 100 dollars minimum, sans limite supérieure. Lors des dernières élections sénatoriales, le Komeito bénéficia d’environ 6.040.000 voix. 80% de ces voix, soit environ 5 millions, sont estimées provenir des membres de la Soka Gakkai. Le zaimu de l'année dernière dura trois mois et demi, du 13 Septembre au 31 Décembre. La somme collectée par Gakkai en une année se situe donc entre 2 et 3 milliards de dollars. On parle même de 3.900.000.000 dollars.

Le zaimu fut originellement introduit dans Gakkai entre 1945 et 1955. A cette époque, seuls les foyers aisés étaient membres du système zaimu, chacun donnant 4.000 yens par an. (Au taux d'échange d'après-guerre de 360 yens pour un dollar US, cela ne ferait que 11 dollars).

Cependant, le système se généralisa progressivement, de sorte que l'argent fut collecté auprès des foyers de tous les membres. Au début des années 70, il s'étendit au delà de l'objectif de Kosen-rufu. Gakkai introduisit ce que ses dirigeants appelèrent « zaimu spécial », sous le prétexte de construire des édifices nommés Centres Culturels Soka et d’offrir des temples à la Nichiren Shôshû. Puis, à partir de 1977, le système prit la forme du zaimu actuel, ou une fois par an, Gakkai collecte au moins 100 dollars par personne. Elle appelle ceux qui récoltent zaimu, les membres de la Division Zaimu. De telles personnes sont appelées maintenant les membres de la Division Kofu (Kosen-rufu).

Lorsque le Président Honoraire Ikeda fut nommé Sôkôtô (Responsable Général du Hokkekô) en 1982, Gakkai augmenta ses activités de collecte d'argent, les appelant "un grand bon en avant". A présent, de l'argent est même donné sous le nom d'enfants. Il n'est pas du tout inhabituel pour des familles nullement aisées de donner 10.000 ou 20.000 dollars. Les membres de Gakkai qui donnent plus de 100.000 dollars sont appelés « Membres de Diamant ». Des ordres ont été transmis des Quartiers Généraux vers les responsables de chapitres afin qu'ils puissent estimer combien de « Membres de Diamant » peuvent être rassemblés. Il y a même des cas ou Gakkai ayant appris le décès d'un père, manœuvre afin de récolter l'argent qu'il avait fait vœu de laisser à sa famille.

[73] Terre (j. chi - ) : le mot « terre » est utilisé pour qualifier certains états de vie de bodhisattva parce qu’on peut y produire la sagesse de l’Eveillé et faire qu’elle y demeure immuable, comme la terre.

[74] Ceux qui sont entrés dans le courant (s. srotāpana, j. yoru -預流 ou shudaon-須陀亘) : premier degré d’éveil atteint par les pratiquants du Petit véhicule. Il s’agit d’entrer dans le courant de l’émancipation en allant à l’inverse du courant des vies et des morts. Ce fruit peut être obtenu lorsqu’on s’est départi des illusions des vues erronées.

[75] Ceux qui reviennent encore une fois (s. sakŗdāgāmin, j. ichirai 一来ou shidagon - 斯陀含) : deuxième degré d’éveil atteint par les pratiquants du Petit véhicule. La destruction de six des neuf illusions du monde des désirs leur permet de ne renaître qu’une fois dans le monde des hommes et des cieux avant d’obtenir l’émancipation totale.

[76] Ceux qui ne reviennent pas (s. anāgāmin, j. fugen - 不還ou anagon -阿那含) : troisième degré d’éveil atteint pas les pratiquants du Petit véhicule. Ce niveau peut être atteint en se soustrayant des souillures du monde des désirs, y compris les vues et les pratiques erronées. A ce degré, on renaît dans le monde de la forme ou dans le monde de la non forme, mais il y a « non-retour » dans le monde des désirs.

[77] Arhats (s. arhat ou arhahat, j. setsuzoku - 殺賊, fushô - 不生, ôgu - 応供 ou arakan - 阿羅漢) : quatrième et dernier degré d’éveil atteint par les pratiquants du Petit véhicule. Un tel saint s’est débarrassé de toute renaissance, de tous les désirs et de toutes les illusions. Il a obtenu la parfaite connaissance, a tout appris, de sorte qu’il n’a plus rien à étudier. Il est digne de respect et d’offrande. Il n’existe pas de traduction à proprement dite du mot arhat en japonais. On l’a traduit par « celui qui a tué les bandits » (setsuzoku), « celui qui ne renaît pas » (fushô) et « digne d’offrande » (ôgu).

[78] Prasenajit (j. Hashinoku -波斯匿) : Roi de Śrāvasti dans le pays de Kośala. Il avait le même âge que le Bouddha et accéda au trône l’année où celui-ci obtint l’éveil. Il régna sur Kośala et Kāśi. Il fut un dévot disciple du Bouddha tout au long de sa vie avec son épouse et son fils. A l’âge de quatre-vingts ans, il fut détrôné par son fils, Virūdhaka. On dit qu’il mourut de faim.

[79] Les quatre dons universels : Les sermons du Bouddha sont répartis en quatre “Shitsudan”. Shitsudan est la translittération phonétique du mot sanscrit Siddhanta qui, d’après les anciens maîtres, signifie accomplissement. On appelle Siddhanta les quatre moyens utilisés par l’Eveillé pour guider les êtres vers l’accomplissement de la Voie.

Selon le grand maître Nanyue (南岳), lui-même maître de Zhiyi, Shitsu signifie universel, et Dan signifie offrande. Le Bouddha fait l’offrande du Dharma universellement à tous les êtres, à l’aide de ces quatre moyens. Ces quatre offrandes sont :

1. Sekai Shitsudan (世界悉檀 - L’offrande de ce monde) : le Bouddha enseigne d’abord le Dharma de ce monde en utilisant les mots provisoires d’homme, de soi,  etc, en rapport avec le caractère ordinaire des êtres, sur ce qui les rend heureux, afin de leur faire ressentir la joie.

2. Kaku Kaku  Ijin Shitsudan (各各為人悉檀 - L’offrande à chaque homme) : le Bouddha enseigne le Dharma du Bouddha en tenant compte des prédispositions, petites ou grandes, de la profondeur ou de la superficialité des graines accumulées par les êtres par le passé, dans le but de leur faire ouvrir l’esprit à la véritable croyance, de leur permettre d’accroître les bonnes racines.

3. Taiji Shitsudan (對治悉檀 - L’offrande de l’apaisement par opposition) : A ceux dont la convoitise est grande, le Bouddha enseigne la rigueur et compassion (Jihi). A ceux dont la stupidité est grande, il enseigne la vision de la causalité. Ainsi, à l’aide de moyens appropriés, il guérit les maux des êtres.

4. Dai Ichigi Shitsudan (第一義悉檀 - L’offrande de l’enseignement du principe premier): Lorsqu’il a vu la maturité des prédispositions des êtres, l’Eveillé enseigne l’aspect véritable des dharma (Shohô Jissô).

[80] Cinq non intermittences (j. go muken -五無間) : cinq éléments à caractère immédiat en terme de temps et d’espace, au sein de l’enfer Avici : 1) Non intermittence de l’effet (shuka muken 趣果無間) : ceux qui ont commis suffisamment de crimes pour tomber dans l’enfer Avici y renaissent immédiatement après leur mort, 2) Non intermittence se la souffrance subie (j. Juku muken - 受苦無間) : la souffrance subie dans cet enfer est permanente, sans relâche, 3) Non intermittence du temps (j. ji muken - 時無間) : cet enfer existe en permanence, 4) Non intermittence de la vie (j. myô muken 命無間) : les êtres y vivent en permanence  et 5) Non intermittence de la forme (gyô - 形無間) : bien que cet enfer soit immense, leur corps est aussi vaste, de sorte qu’ils n’ont aucun espace de liberté, et sont sans cesse tourmentés.

[81] Cinq crimes de rébellion (j. go gyaku zai -五逆罪) : tuer son père, tuer sa mère, tuer un saint du bouddhisme (arhat), faire couler le sang du corps du Bouddha et briser l’union harmonieuse de la congrégation.

[82] Soudaineté (j. gigi - 擬宜) signifie “sonder la prédisposition”. C’est octroyer le Sutra de l’ornementation fleurie aux êtres pour sonder leur prédisposition. Après avoir accédé à l’éveil, le vénéré Shakya réfléchit au moyen de guider les êtres. Il exposa ainsi le Sutra de l’ornementation fleurie, issu de sa réflexion, contenant les significations élevées du Grand véhicule, de manière à sonder les capacités des êtres au regard de la voie du Bouddha (d’après le cours de Nikken Shônin sur Nam Myôhôrengekyô).

[83] Séduction” (j. yûin - 誘引) signifie “attirer”, “initier”. Il s’agissait d’octroyer les Sutra Agama à une partie des êtres. En effet, si Shakyamuni avait enseigné de but en blanc les profondes doctrines Mahayana aux deux véhicules (les auditeurs et les Bouddha pour soi), êtres de moindre prédisposition, ils n’auraient pas pu les comprendre. Aussi, pour les “attirer” progressivement vers les enseignements élevés, il leur enseigna d’abord des enseignements mineurs à titre de base (idem supra).

[84] Discrédit” (j. danka - 弾呵) signifie “exclure”, “réprimander vertement”. Il s’agissait de contester et de détruire l’attachement des êtres pour les enseignements mineurs du Petit véhicule, afin d’éveiller en eux un cœur affectionnant le Grand véhicule, en leur montrant la noble vérité du Mahayana (idem supra).

[85] Filtrage” (j. tôda - 淘汰) : l’idéogramme “tô”  () signifie “laver le riz”; c’est “laver”, “plonger dans l’eau”. L’autre idéogramme, “da” (), signifie également “plonger dans l’eau”, “nettoyer”.

Entre les personnes dotées d’un esprit étriqué et celles d’un esprit large, il existe une grande dissimilitude. C’est ce que de nos jours, on appelle “la différence”. En bouddhisme, on enseigne “la différence” et “l’égalité”.

La “différence” désigne les dissemblances entre les visages ou la constitution physique, la différence de sexe, les disparités entre les capacités individuelles, différences dues à la conditionnalité. Autrement dit, en ce monde, tout est l’aspect de la différence, ce qui représente une des facettes du principe véritable.

Le “filtrage” consiste à rassembler ce qui présente des différences, sélectionner et uniformiser. C’est pourquoi, il s’agit de nettoyer les différences visibles. Dès lors, même pour les gens du Petit véhicule, à partir du moment où est ouvert en eux l’éveil de la sagesse (j. hannya) du Grand véhicule, les enseignements du Petit véhicule, en eux-mêmes, possèdent alors les significations du Grand véhicule, et ces significations et valeurs se manifestent. C’est ce qu’on nomme “le filtrage”, octroyé aux prédispositions des êtres par les Sutra de la sagesse (idem supra).

[86] Jikaku Daishi (慈覚大師) : Nom posthume de Ennin (794 - 866) : moine japonais de l’école du Tendai. Troisième successeur de Saicho (Dengyô, 767 - 822), dont il fut le disciple dès l’âge de 15 ans, au monastère Enryakuji du mont Hiei. En 838 il se rendit en Chine où un long périple lui permit d'étudier différents aspects du Bouddhisme. De retour au Japon en 847, il fut nommé Supérieur du temple Enryakuji. Malheureusement, il mêla des enseignements des Paroles incantatoires (Shingon) aux doctrines du Tendai.

[87] La suite est : « Sache-le, Roi des remèdes, ces gens auront déjà fait offrande à des centaines de milliers de myriades d’Eveillés, auront accompli leur grand vœu auprès des Eveillés et c’est par compassion pour les êtres qu’ils seront nés sous forme humaine ».

[88] Kûkai (空海) (774-835) : religieux japonais fondateur de l’école du Shingon (Formules incantatoires) au Japon, également connu sous le titre honorifique de grand maître Kôbô. Issu de la noblesse du Shikoku (île au sud du Japon), le jeune Kûkai est envoyé par ses parents à Nara, chez un oncle, érudit renommé et connaisseur de la culture chinoise classique, pour parfaire son éducation. Mais Kûkai est davantage attiré par le bouddhisme que par le confucianisme. Il s’intéresse tout particulièrement au courant ésotérique et tantrique. Mais à cette époque, les doctrines et les rites de l’école des Mystères sont mal connus au Japon. En 804 il peut se joindre à une ambassade japonaise qui entreprend la périlleuse traversée de la mer de Chine. Saichô fait également partie de la mission. Cependant, les deux religieux ne voyagent pas ensemble. Kûkai étudie le sanscrit à Chang’an puis l’ésotérisme auprès du maître Huiguo qui l’initie aux arcanes de l’école  des Formules incantatoires (j. Shingon shû, c. Zhenyan zhong). Il demeure plus d’un an en Chine puis revient au Japon avec une ample cargaison de textes chinois. En 809, il devient l’un des religieux les plus en vue auprès de la cour impériale. Ses origines aristocratiques et ses grandes capacités littéraires et calligraphiques y concourent. Il est autorisé à bâtir un monastère au mont Koya qui devient ainsi le centre japonais de l’école du Shingon. Sa renommée ne cesse de s’accroître et il est nommé précepteur de deux princes héritiers.

[89] Rājagŗha (j. Oshajô -王舎城) : ville de l’Inde centrale, capitale du pays de Magadha.

[90]Enfer Avici (j. Abi jigoku - 阿鼻地獄) : synonyme de l’enfer aux souffrances sans intermittence.

[91] Voir BEF n° 25 (Cours de Nikken Shônin sur le Traité qui ouvre les yeux et n° 87 (Glossaire chronologique des références historiques dans le Bouddhisme de Nichiren Daishônin).

[92] Idem supra

[93] Ecole du Trésor de la scolastique (j. kusha - 倶舎) : cette Ecole est fondée sur le Discours sur le trésor de la scolastique (s. abhidarma kosa bhasya, j. abidatsuma kusha ron) de Vasubandhu. Cette Ecole enseigne la vacuité du soi mais admet l’existence des dharma. Elle admet également l’existence des trois phases (passé, présent et futur). Bien qu’au Japon elle ne fut jamais reconnue comme une Ecole indépendante, ses doctrines furent toujours étudiées.

[94] Ecole de l’Accomplissement de la vérité (j. jôjitsu - 成実) : cette Ecole, qui fit partie des treize Ecoles chinoises et des six Ecoles japonaises est fondée sur le Discours de l’accomplissement de la vérité (s. satyasiddhi sastra, j. jôjitsu ron) écrit par Harivarman (250-350) et traduit par Kumarajiva, qui expose la non substantialité (vacuité) à la fois des personnes et des choses. Cette théorie est plus avancée que celle des autres Ecoles du Petit véhicule. C’est pourquoi, lors de sa fondation, elle fut considérée comme faisant partie du Mahayana. Ses doctrines furent étudiées en association avec celles de l’Ecole des trois traités, mais ne fut jamais reconnue véritablement comme une Ecole religieuse indépendante.

[95] Ecole des Commandements (j. ritsu - ): cette Ecole fut fondée en Chine autour des commandements en quatre divisions, établis par l’Ecole de la corbeille des dharma (s. dharma gupta, j. hôzô).

[96] École de l’ Ornementation fleurie (j. Kegon華厳) : fondée en Chine par Dushun (j. Tojun - 557 - 640), elle ne fut véritablement installée en tant qu’école que par Fazang (j. Hôzô - 643 - 712) son troisième Patriarche. Elle fut transmise au Japon par Daoxuan (j. Dôsen) en 736.

[97] Ecole du Caractère spécifique des dharma (j. Hossô - 法相) : fondée en Chine par Xuanzang (j. Genjô), cette école est également appelée “école du Rien que conscience”. Elle fut importée au Japon par Dôshô qui étudia auprès de Xuanzang.

[98] Ecole des Trois traités (c. Sanlun, j. Sanron - 三論) : nom donné en Chine à l’école Madyamika (voie du milieu) qui voit en Nagarjuna son fondateur. Elle fut introduite en Chine par Kumarajiva qui avait traduit les trois traités de référence de cette école : le Madyamika sastra (traité du milieu, j. Chûron – 中論) et le Dvadasa mukha sastra (traité des douze portes, j. Jûnimon ron – 十二門論) de Nagarjuna et le Sataka sastra (cent discours, j. Hyaku ron – 百論) de Aryadeva, disciple de Nagarjuna. La doctrine de cette école fut transmise au Japon par Ekan en 625.

[99] Période Heian ou l'ère Heian (平安時代) est l'une des 14 subdivisions traditionnelles de l'histoire du Japon. Cette période commence en 794 et s'achève en 1185.

[100] Ecole du Tendai (天台) : Ecole du Mahayana fondée en Chine par Zhiyi (j. Chigi - 智顗) (538 – 597), sur le Sutra du Lotus et les vues philosophiques de Nāgārjuna. Zhiyi classa les enseignements du Bouddha en cinq périodes et établit la doctrine de Une pensée trois mille (j. ichinen sanzen), à partir des dix ainsi exposés dans le chapitre des « Moyens » du Sutra du Lotus. L’école fut transmise en Chine par Jianzhen (j. Ganjin –鑑真) au milieu du huitième siècle, mais ce fut Saichô (最澄) (Dengyô - 敎傳), qui lui donna véritablement son essor en 805, en revenant de Chine avec les traditions de l’école.

[101] Ecole des Formules incantatoires (j. Shingon – 真言) : Fondée au Japon au début du 9e siècle par Kûkai (空海) (Kôbô – 弘法), sur les enseignements qu’il rapporta de Chine.

[102] N’oublions pas qu’à travers le visiteur, Nichiren Daishônin s’adresse à Hôjô Tokiyori, le plus haut personnage de l’Etat (NdlR).

[103] L’expression : « Pour les deux phases : présent et futur » (j. gentô nise no tame - 現当二世の為) est inscrite en haut à droite des Gohonzon de la Nichiren Shôshû, retranscription du Dai Gohonzon du Kaidan de la doctrine originelle.

[104] La quiétude dans l’existence présente et de la naissance dans un lieu propice pour la vie suivante (j. gense an’non, goshô zensho - 現世安穏・後生善処) : expression extraite du 5e chapitre du Sutra du Lotus « Parabole des plantes médicinales » : « Lorsque ces êtres entendront le Dharma, ils obtiendront la quiétude dans l’existence présente et, dans l’existence suivante, naîtront dans un lieu propice ». Ce passage exprime le bonheur ressenti par ceux qui ont foi et reçoivent le Dharma merveilleux. Ils obtiennent un état de vie serein dans cette existence et, dans l’existence suivante, ils renaissent dans un endroit propice, où ils sont de nouveau en mesure de recevoir et de croire dans le Dharma merveilleux. Dans le 7e fascicule des Mots et phrases du Lotus, Zhiyi, le grand maître du Tendai dit : « La quiétude dans l’existence présente et de la naissance dans un lieu propice pour la vie suivante, signifie ressentir l’effet de la rétribution (hôka – 報果) dans la cause de rétribution (hô-in – 報因) ».

[105] L’enfer aux vies semblables (s. samjīva niraya, j. tôkatsu jigoku - 等活地獄) : Les êtres vivant dans cet enfer se nuisent mutuellement. Ils portent des ongles d’acier et s’entredéchirent dès qu’ils se rencontrent, jusqu’à ce qu’il ne reste plus d'eux que les os. Parfois, les gardien de l’enfer, munis de barres de fer, les frappent de la tête aux pieds, jusqu’à les réduire en poussière. Alors, ils renaissent dans le même enfer (jusqu’à ce que leurs fautes soient expiées) avec une condition de vie semblable à la précédente, d’où le nom “vies semblables”. Tombent dans cet enfer, ceux qui ont commis la faute d’ôter la vie (ne serait-ce qu’à un moustique ou à un cafard, précise Nichiren Daishônin),

[106] L’enfer des cordes noires (j. kokujô jigoku – (黒蠅地獄) : situé sous le précédent, cet enfer est destiné à ceux qui ont commis les fautes d’ôter la vie et de voler le bien d’autrui. Les gardiens de l’enfer mesurent le corps des damnés en les entourant à l’aide de cordes trempées dans de l’encre. Ensuite, ils coupent et déchirent les victimes suivant les marques laissées par les cordes

[107] L’enfer de la rencontre des êtres (s. samghātā niraya, j. shugô jigoku - 衆合地獄) : les gardiens de l’enfer rassemblent les damnés entre deux montagnes de fer ; ils poussent les montagnes et écrasent les êtres placés au milieu. Tombent dans cet enfer ceux qui ont commis le meurtre, le vol et la luxure,

[108] L’enfer des cris et des vociférations (s. raurava niraya, j. kyôkan jigoku - 叫喚地獄) : ne pouvant plus supporter les souffrances endurées, les damnés crient et hurlent de douleur et de désespoir. Les gardiens de l’enfer les transpercent à l’aide de flèches, frappent leur tête avec des barres de fer, les font courir sur un sol de fer chauffé au rouge, les font griller à la broche et leur font ingurgiter de l’huile bouillante pour brûler leurs viscères. Tombent dans cet enfer ceux qui ont commis le meurtre, le vol, la luxure et l’abus de boissons alcoolisées

[109] L’enfer des grands cris et vociférations (s. maha raurava niraya, j. dai kyôkan jigoku - 大叫喚地獄) : les damnés, tombés dans cet enfer parce qu’ils ont commis le meurtre, le vol, la luxure, l’abus de boisson et le mensonge, crient, vocifèrent et se lamentent. En effet, les gardiens de l’enfer leur transpercent la bouche et la langue avec des aiguilles d’acier rougies, leur coupent la langue, leur arrachent les yeux et les découpent finement au sabre

[110] L’enfer des brûlures et de la chaleur (j. shônetsu jigoku - 焦熱地獄) : les damnés sont entourés de flammes. Les gardiens de l’enfer les font se coucher sur le sol brûlant et les frappent de la tête aux pieds à l’aide de bâtons de fer rougis. Ils les embrochent, et les grillent des deux côtés. Tombent dans cet enfer ceux qui ont commis le meurtre, le vol, la luxure, l’abus de boissons alcoolisées, le mensonge et ont eu des vues erronées

[111] L’enfer des grandes brûlures et chaleurs (j. dai shônetsu jigoku - 大焦熱地獄) : les flammes de cet enfer brûlent jusqu’aux cieux. Les damnés, tombés en cet enfer ont commis le meurtre, le vol, la luxure, l’abus de boissons alcoolisées, ont eu des vues erronées et violé une nonne respectant le précepte de pureté. Ils brûlent pendant de longs éons

[112] L’enfer sans intervalle (s. avīci niraya, j. muken jigoku - 無間地獄) : alors que les souffrances endurées dans chaque enfer sont dix fois supérieures aux souffrances de l’enfer précédent, les souffrances de l’enfer sans intervalle sont, elles, mille fois supérieures. Dans la Réponse à Kônichi Shônin, Nichiren Daishônin écrit : « “Avici Naraya” est un terme sanskrit. En Chine et au Japon, on l’écrit “Muken”. Muken signifie “sans intervalle”. Parmi les cent trente-six enfers, cent trente-cinq font preuve d’un répit (entre les souffrances). L’enfer sans intervalle, lui, ne connaît pas un instant, pas un moment qui ne soit une grande souffrance au cours des douze heures » (À l’époque, la journée était divisée en douze heures, NdT). Nichiren Daishônin écrit encore, dans Apparition des offenses au Dharma : “Si le Bouddha avait expliqué en détail les souffrances inhérentes à cet enfer, les hommes, en entendant, auraient vomi du sang et seraient morts. C’est pourquoi, le Bouddha n’en parla pas avec précision”. Tombent dans cet enfer ceux qui ont commis les cinq crimes de rébellion (parricide, matricide, meurtre d’un saint, action de faire couler le sang du corps du Bouddha, destruction de l’harmonie de la congrégation). Y tombent également, ceux qui ont commis l’offense au Dharma.

[113] Quatre vertus présentes à l’origine (j. honnu no shitoku – 本有の四徳) : vertus latentes dans la vie des êtres possédant naturellement la nature du Bouddha. Principe enseigné dans le Sutra de l’Extinction.

[114] Quatre vertus acquises par l’ascèse (j. shutoku no shitoku –修得の四徳) : terme de l’école du Tendai désignant les quatre vertus obtenues à travers la pratique, par opposition aux quatre vertus inhérentes.

[115] Triple transformation des terres et des champs (j. sanpen doden -三変土田) : dans le chapitre onzième du Sutra du lotus, “Vision du stupa précieux”, Shakyamuni change par trois fois les terres, pour en faire une terre unique du Bouddha. On dit également “triple purification des terres (j. sanpen jôdo - 三変浄土). Afin d’ouvrir le stupa précieux du Bouddha Tahô, Shakyamuni voulut faire venir tous les Bouddha constituant le corps fractionné dans les dix directions. Pour cela, il commença à purifier le monde de saha (monde de l’endurance). Ensuite, les deuxième et troisième fois, il purifia deux millions de milliards de nayuta de pays dans les huit directions. Toutes ces terres devinrent alors la terre unique du Bouddha. Dans le septième volume du Sens obscur du lotus, Zhiyi écrit : “La triple transformation des terres et des champs signifie que (le Bouddha) transforma la terre souillée de la cohabitation (des éveillés et des êtres ordinaires), la désignant clairement comme la terre pure de la cohabitation. Certains la virent comme étant la pureté de la terre des moyens avec reste (la terre provisoire établie pour ceux qui ont détruit la majeure partie des mauvaises passions et proches d’atteindre l’émancipation de la transmigration dans les trois mondes, mais encore en proie à des illusions mineures), … d’autres la voient comme la pureté de la terre de la rétribution correcte (terre des bodhisattva de haut degré), … d’autres la voient comme la pureté de la terre de la lumière sereine. C’est seulement le pouvoir de la samadhi du lotus qui fait la différence de vision”. Autrement dit, le Bouddha transforma le monde souillé de saha où cohabitent les éveillés et les hommes ordinaires en terre pure. Selon leur état de vie, les êtres virent cette terre unique comme la terre des moyens où vivent les deux véhicules, ou la terre de rétribution où vivent les bodhisattva, ou encore, la terre de la lumière toujours sereine où vit le Bouddha.

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